VOYAGE À TRAVERS L’HISTOIRE DU FORT DE BAKEL
Ses murs ont été témoins des combats héroïques de Mamadou Lamine Dramé et de la transformation du pays. Ce monument, désormais siège de la préfecture et site UNESCO, reste un symbole vivant de la mémoire collective
Perché sur une colline stratégique, le fort de Bakel domine fièrement le fleuve Sénégal et la Mauritanie voisine. Construit entre 1818 et 1853, ce fort n’est pas simplement une fortification : il incarne l’histoire et les luttes de cette région, un témoignage de l’époque coloniale et des résistances locales. Depuis 1960, il abrite également la préfecture de Bakel, un rôle administratif qui renforce son importance et son ancrage dans la vie contemporaine.
En 1854, Federbe, gouverneur du Sénégal et militaire, prend les rênes de la région. Bien qu’il n’ait pas été directement sur place, il joue un rôle décisif dans la transformation du fort. De Saint-Louis, il supervise les travaux de modernisation, renforçant les fortifications et transformant le fort de Bakel en un lieu stratégique. Des canons sont installés, orientés vers la Mauritanie, prêts à défendre cette position clé.
Les murs épais du fort, munis de meurtrières, permettent aux soldats de surveiller les alentours tout en restant protégés. À travers ses nombreuses tours, comme la tour du pigeon au nord et la tour du Mont au Singe au sud, le fort pouvait signaler les mouvements ennemis. À l’ouest, la tour Jaurice, surnommée le « tout télégraphique », était un centre vital pour les communications.
Non loin du fort se trouve le pavillon René Caillet, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO. Ce pavillon, qui porte le nom de l’explorateur français, est un témoignage de l’époque coloniale. René Caillet, en traversant Bakel sur son chemin vers Tombouctou, y laissa une trace indélébile. Le pavillon reste un point de mémoire et un symbole de l’histoire de l’exploration.
Mais Bakel n’a pas été seulement un lieu de colonisation. C’est également un lieu de résistance. En 1886, Mamadou Lamine Dramé, un homme de Boundiourou (Mali), se dresse contre l’oppression coloniale. Après avoir accompli son pèlerinage à La Mecque, il revient dans son village natal, où il forme une armée pour lutter contre les forces coloniales. Le 12 avril 1886, il mène ses hommes dans une bataille contre les Français, mais malgré leur courage, les bombardements français les dispersent. Cet acte de résistance fait partie des nombreux récits de la lutte pour l’indépendance.
La construction du fort de Bakel, réalisée avec des pierres locales, est un exemple frappant de durabilité. Perché sur une colline, il a été conçu pour résister aux intempéries, et malgré les années, il reste en bon état. Son emplacement élevé lui a permis de résister aux inondations, un défi que d’autres fortifications n’ont pas toujours su surmonter. Ce fort, fait de pierre et de mémoire, se dresse toujours malgré les affres du temps.
Aujourd’hui, l’histoire du fort de Bakel continue d’être racontée par des passionnés comme Idrissa Diarra, un enfant du pays. Enseignant et directeur d’école pendant 40 ans, Idrissa a choisi, après sa retraite en 2012, de devenir guide touristique. Il permet ainsi aux visiteurs de découvrir l’histoire fascinante du fort et de la région. Grâce à des hommes comme lui, l’héritage de Bakel, riche de combats et de conquêtes, demeure vivant et accessible.
Depuis 1960, le fort de Bakel n’est plus seulement un site historique, mais aussi le siège de la préfecture. Il incarne ainsi l’évolution de la ville, passant d’un symbole militaire à un centre administratif vital. Le fort, avec ses pierres et ses tours, continue de raconter l’histoire de la région, une histoire d’indépendance, de résistance et de transformations. Aujourd’hui inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, il est un lieu de mémoire et un trésor à préserver pour les générations futures.