POUR 2015, FAIRE COMME AVEC EBOLA
En cette période de vœux de fin d’année, alors que le Président de la République va exprimer les siennes ce soir, Le Quotidien souhaite que se multiplie, dans tous les corps de la société, le type d’engagement qui a permis de vaincre la maladie
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Elle répand la terreur, elle ne laisse personne indifférent, car elle modifie les rapports sociaux. Face à sa progression, toutes les machines de guerre moderne sont déployées, les coalitions les plus hétéroclites formées pour venir à bout d’elle, les alliances les plus improbables sont devenues possibles.
La fièvre Ebola n’inquiète pas que les pays qui en sont affectés. Du Sénégal aux Etats-Unis d’Amérique, de l’Europe en Amérique latine, on scrute les voisins, surtout les arrivants, avec méfiance et anxiété, en se demandant si ce n’est pas par eux que le mal va se faire un chemin jusqu’à nous ou nos proches.
Et au Sénégal, dès que la maladie s’est manifestée chez nos voisins du Sud, la peur a failli tourner à la psychose. En un moment, les reflexes des Sénégalais ont rappelé les résolutions qui ont suivi le naufrage du bateau Le Joola.
Pourtant, même si pour beaucoup de pays et leurs dirigeants, Ebola ressemble fort au Mal absolu par sa fulgurance et par sa manière de refaçonner les rapports humains, il n’a pas fait oublier d’autres préoccupations. Et au Sénégal, comme ailleurs dans le monde, 2014 n’a pas été une annus horribilis totale.
Il suffirait de demander à nos amis Burkinabè s’ils sont mécontents d’eux cette année. Et les Gambiens hier, ont failli apprendre qu’ils ont été délivrés d’un autre mal beaucoup plus prévalent, dont ils se demandent s’ils en seront Jammeh débarrassés.
Et pour les dirigeants sénégalais, tout fiers de leur succès lors du Groupe consultatif de Paris en février, 2014 se déclinera en milliards pour le Pse.
Bien sûr, Ebola est quelque peu venu gâcher la fête, surtout en accentuant la brouille avec le très susceptible Alpha Condé de Conakry. Bien sûr, Bassirou Faye ne sera sorti de l’Université que pour le cimetière, et Wade aura lancé une campagne de feu, à coups de dénigrements et de «révélations» destinés à déstabiliser le pouvoir de son successeur, mais ce dernier aspect, c’est juste de la basse politique locale.
Nous ne visons pas ici à faire le bilan ou le décompte de la santé politique du pays. Néanmoins, Le Quotidien ne peut s’empêcher de rendre hommage aux équipes de personnes qui chacune à son niveau, ont permis au Sénégal de se distinguer dans le bon sens dans le marasme régional, et aux Sénégalais de garder le sourire et leur sens de l’humour, même quand ils sont convaincus que «deuk bi dafa macky».
C’est cet optimisme que nous souhaitons voir renforcé, parce que mieux à même de nous conduire au dépassement. Les médecins qui, par leur travail, ont pu éviter d’ajouter ce pays sur la liste des pays affectés par Ebola ont accompli un travail remarquable.
Sans doute que le commun des Sénégalais s’en rendra compte difficilement, mais à partir du moment où un cas s’était manifesté dans le pays, importé ou pas, tout devenait possible.
Une mauvaise riposte, et les choses pouvaient déborder. Malgré les nombreuses lacunes de nos structures médicales, que l’on ne se gêne jamais de relever, le corps médical sénégalais a fait montre de maîtrise et d’expertise pour nous aider à contenir Ebola. Et la volonté politique qui l’a accompagné, doit être saluée.
En cette période de vœux de fin d’année, alors que le Président de la République va exprimer les siennes ce soir, Le Quotidien souhaite que se multiplie, dans tous les corps de la société, le type de volonté et d’engagement qui a permis de vaincre Ebola au Sénégal.
Les dirigeants politiques actuels, à la suite des différents régimes qui les ont précédés, aiment à nous vanter leurs réalisations dans le domaine des infrastructures, ou nous faire rêver avec des promesses de croissance économique à deux chiffres dans un horizon très proche.
Oubliant que le débat est ailleurs dans ce pays. A quoi servirait-il de promettre des taux de croissance à deux chiffres, de faire rêver des kilomètres de bitume ou de faire miroiter le mirage d’un chemin de fer plus rutilant que celui que Lat Dior n’a pu arrêter, si les comportements et les mentalités poussent au laxisme, à la triche et au favoritisme ?
Le président de la République va prononcer ce soir devant la Nation ses vœux de fin d’année. Souhaitons qu’il puisse y inclure pour 2015, la fin de l’insipide et peu honorable feuilleton qui se joue au Palais de justice de Dakar, ainsi qu’une année académique sans aucune perturbation ni surtout, aucun mort ou blessé, et enfin, une véritable sortie de crise dans la Casamance. S’il réussit cela, s’il réitère les mêmes efforts que contre Ebola, nous pourrons alors, pour 2016, rêver de la lune.