A QUAND LA RECONNAISSANCE ‘’INSTITUTIONNELLE’’ DE MAMADOU DIA ?
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Le président de la République a fini de baptiser le Centre International de Diamniadio en l’honneur du Président Abdou Diouf. Et il vient d’annoncer que l’université de Diamniadio portera le nom de Amadou Moctar Mbow.
On applaudit des deux mains pour ces deux personnalités sénégalaises, de rayonnement mondial et de renom international, qui ont été choisies pour ces deux institutions.
-Abdou Diouf, qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, il ne passe jamais inaperçu (non pas seulement à cause de sa taille) mais par ses brillants parcours administratif et politique. En effet, il a été gouverneur à 25 ans, Premier ministre et président de la République avec le fameux article 35. Il a dirigé le pays durant 20 ans avec un bilan mitigé : positif et négatif.
Les aspects positifs de son magistère sont : consolidation de l’Etat, renforcement de la démocratie, modernisation de l’Administration, ouverture au multipartisme, résolution pacifique de la crise contre la Mauritanie en 1989, reconnaissance de sa défaite en 2000 permettant la première alternance démocratique, évitant du coup une instabilité politique au pays...
Cette défaite a été bénéfique pour lui, car il a été après élu secrétaire général de la Francophonie avec trois mandats successifs.
Mais il a failli sur le plan économique, au niveau des infrastructures, a appliqué les Pas, n’a pas empêché la dévaluation du franc Cfa dans son propre pays, (alors qu’il y était farouchement opposé). Last but not least, il n’a pas résolu la crise casamançaise.
Cela n’enlève en rien de sa stature d’Homme d’Etat et il mérite toute la reconnaissance de la Nation.
On peut en dire autant pour Amadou Moctar Mbow qui a été directeur général de l’Unesco, a présidé avec brio les Assises nationales et a coordonné avec rigueur et compétence, la Commission nationale de réformes des institutions (Cnri). L’université de Diamniadio doit être fière de porter le nom de cet illustre compatriote.
D’autres hautes personnalités sénégalaises ont leur nom apposé au fronton de diverses institutions du pays : Léopold Sédar Senghor (aéroport, stade, lycée), Lamine Guèye (lycée), Blaise Diagne (aéroport, lycée). La seule entorse significative qui fait exception à ce beau tableau est, malheureusement, l’Université Gaston Berger (Ugb). J’aurais aimé que l’université qui m’a formé portât le nom d’un illustre sénégalais.
Je n’ai rien contre Gaston Berger (qui est du reste né à Saint-Louis) mais ce qu’on retient de lui, c’est d’avoir été l’inventeur de la prospective, qui est définie comme une étude sur les futurs possibles, spécialiste de Husserl et des travaux sur la caractériologie, et père de Maurice Béjart.
Qu’en est-il de Mamadou Dia ?
Mamadou Dia est né le 18 Juillet 1910 Khombole d’un père toucouleur et d’une mère sérère. Il est mort le 25 Janvier 2009.
A mon humble connaissance, aucune institution importante du pays ne porte le nom du premier Président du Conseil du Sénégal. C’est un oubli historique voire une injustice qu’il faudrait corriger pour donner à Mamadou ce qui appartient à Mamadou.
Il a été accusé à tort ou à raison d’avoir fomenté un coup d’Etat, ce qui lui a valu son arrestation et son emprisonnement durant douze longues années (1962-1974 à Kédougou). Il a été tour à tour gracié et libéré. En 1976, il a été amnistié avant d’être réhabilité par le Président Abdoulaye Wade.
Cette réhabilitation doit être accompagnée d’un symbolisme fort en baptisant en son nom, l’Université du Sine Saloum. C’est une université à vocation principalement agricole, ce qui épouse parfaitement la vision économique du grand Maodo.
Sa brouille avec le Président Senghor, au-delà de leur forte personnalité opposée, était surtout d’ordre idéologique par rapport au contenu qu’il fallait donner à la notion de développement. En effet, Senghor penchait plus pour la culture alors que Mamadou Dia misait beaucoup sur l’agriculture et les organisations paysannes pour amorcer le développement du pays. Peut-être que le terme tant galvaudé et ressassé d’ «émergent» serait déjà une réalité si on avait appliqué sa théorie et sa vision économiques.
Quoi qu’il en soit, il n’est jamais trop tard pour bien faire. Dans cette optique, j’invite solennellement mais modestement, le président de la République à réparer cette injustice ou cet oubli, afin que le grand Maodo ait la place qui sied dans cette Nation qu’il a tant servie avec fidélité, dignité et humilité.
Dans ce même ordre d’idées, il serait intéressant de penser à Mbaye Gana Kébé, Ibrahima Sarr (ex-cheminot) ou... Abdoulaye Wade pour l’université de Thiès.
Ceci n’est que la contribution d’un modeste citoyen sénégalais soucieux du développement de son pays sur tous les plans (économique, social, politique, ...symbolique).