EN COULISSES : ENQUETE DE CE VENDREDI

PRISON DU CAP MANUEL : Méthode musclée du nouveau régisseur
La prison du Cap Manuel à Dakar a un nouveau régisseur en la personne du lieutenant Aly Conté Bâ qui a remplacé le lieutenant Mame Saliou Fall. Ce mouvement concerne beaucoup de maisons d’arrêt et ne fait pas toujours le bonheur des pensionnaires, généralement des condamnés à de lourdes peines ou des Vip en maille à partir avec la justice. Elle est considérée comme l’un des centres de détention les plus accueillants du pays, si cela a un sens car la prison reste la prison : un lieu de privation de beaucoup de libertés. Le régisseur partant, Mame Saliou Fall, avait fini par se tailler une bonne réputation, surtout venant de certains détenus condamnés à de lourdes peines. Récemment, l’ancien président tchadien Hissein Habré lui avait publiquement tressé des lauriers à l’occasion d’une inspection des lieux conduite par le directeur de l’administration pénitentiaire, Cheikh Tidiane Diallo. Au contraire de la Mac de Rebeuss (construite en 1929), qui ne répond plus aux normes à cause de sa surpopulation, celle du Cap Manuel était réputée moins draconienne. Par exemple, en attente de son jugement par la Cour des chambres africaines extraordinaires, l’ancien maître de N’Djaména y bénéficie d’un statut à part : Outre sa chambre spacieuse équipée d’un grand lit, d’un climatiseur, d’un téléviseur avec un abonnement Canal Horizons et d’une table de travail, la résidence est dotée d’autres chambres, d’un salon, d’un compartiment pour les Eléments pénitentiaires d’intervention et d’une cour gazonnée où il effectue ses promenades journalières. Jusqu’à ce que le nouveau régisseur Aly Conté Bâ commence à imprimer son style de “management”.
Pour tout dire, il a serré les vis et imposé des mesures strictes. “Il est inutilement sévère”, a confié avant-hier un détenu à un proche venu lui rendre visite. Il fallait toutefois s’attendre à ces mesures car ces deux dernières années ont été riches en faits divers avec le suicide d’un détenu, l’arrestation de trois autres pour trafic de chanvre indien. Selon nos sources, le lieutenant Bâ a très vite fait comprendre à son monde qu’il ne tolérerait pas de compromissions ou faveurs indues à certains détenus : respect des heures de promenade, discipline, extinction des feux, application stricte des dispositions légales. De sorte que certains détenus ont commencé à informer leurs proches de cette nouvelle situation. En tout cas, le Cap Manuel est devenu une prison pour Vip. Si Habré en est le pensionnaire le plus célèbre, la traque des biens mal acquis a gonflé le nombre de nouveaux arrivants : Me El Hadj Amadou Sall (avocat de Karim Wade) ; Toussaint Manga (jeunesses libérales du Pds) ; Abdoul Aziz Diop et Amadou Ndiaye (affaire Aïda Ndiongue et plan Jaxaay) ; le guide religieux Cheikh Al Hassane Sène ; Mamadou Pouye (affaire Karim Wade) ; Alioune Badara (propriétaire de l’entreprise Namora) y attendent leur procès.
ME EL HADJ DIOUF
Apparemment Me El Hadj Diouf digère mal la suspension de trois mois, prise contre lui, la semaine dernière, par le conseil de discipline de l’ordre des avocats. La preuve, lors de sa plaidoirie dans l’affaire Pape Alboury Ndao, le tonitruant avocat a traité de tous les noms d’oiseaux ses confrères membres du conseil de l’ordre. Profitant de sa plaidoirie, l’avocat a déversé toute sa bile sur les femmes du Parti démocratique sénégalais (Pds) en leur demandant d’aller s’occuper de leurs époux. Il s’est aussi attaqué à Karim Wade qu’il a jusque-là épargné en le qualifiant de “grand voleur”. Me Diouf n’a pas aussi épargné ses confrères de la partie civile en les accusant d’être des politiques, des manipulateurs. Jugeant les propos discourtois à l’endroit de ses confrères, Me Hilal Sherazad a préféré quitter la salle en grognant : “Je ne reste pas car il insulte des confrères”, a lancé l’avocate très en colère. Ainsi, en tant que membre du conseil de l’Ordre, Me Bidjély Fall a tenté de le raisonner en lui chuchotant à l’oreille de modérer son langage. Comme s’il n’attendait que cela, Me Diouf s’est mis à injurier de plus belles ses confrères “juges”. “Je n’ai rien à cirer de ses remarques. Mon confrère oublie qu’avec ma robe, j’ai ’humilité de plaidoirie. Qu’ils aillent au diable ! Ils ne peuvent rien contre moi car c’est moi qui les ai élus”, a martelé un Me El Hadj Diouf incontrôlable. Et si l’on en croit certaines indiscrétions, les choses ne vont pas en rester là. Car, ses confrères, furieux, promettent de lui apporter la réplique.
ARAME BANDIT
Me Mbaye Jacques Ndiaye n’a pas réussi à faire rouvrir les débats dans l’affaire Arame Sow dite Arame Bandit, du nom de la jeune fille qui a fait tomber Cheikh Sidaty Mané et Cheikh Diop, les meurtriers du policier Fodé Ndiaye. L’avocat de Cheikh Sidaty Mané, un des meurtriers, avait écrit au juge pour un rabat du délibéré. Non seulement le juge ne l’a pas suivi, mais il a relaxé la jeune fille qui était poursuivie pour tentative d’escroquerie. Principal témoin dans l’affaire Fodé Ndiaye, Arame Bandit avait été accusée de tentative d’escroquerie au préjudice d’un boutiquier. Lors de son procès, elle avait déclaré que l’un des avocats des deux meurtriers était derrière son arrestation. C’est pourquoi Me Mbaye Jacques Ndiaye qui l’avait démasquée – puisque Arame s’était présentée sous le nom de Ndèye Sokhna Diouf- voulait un rabat du délibéré.
AFFAIRE TOUSSAINT MANGA
Le doyen des juges d’instruction a poursuivi hier l’audition des inculpés dans l’affaire Toussaint Manga. Les nommés Cheikh Sène, Cheikh Ibra Biaye et Ousseynou Ngom ont été entendus au fond. Eux également ont clamé leur innocence. Mardi dernier, c’était au tour du secrétaire général de l’Union des jeunesses travaillistes (UJTL) d’être auditionné ainsi que trois de ses coïnculpés. L’audition au fond étant bouclée, les avocats des inculpés n’excluent pas de déposer une demande de liberté provisoire. Toussaint Manga et ses coprévenus ont été arrêtés à la suite de manifestations organisées par le Parti démocratique sénégalais (Pds) pour protester contre la condamnation de Karim Wade, à six ans d’emprisonnement ferme pour enrichissement illicite. Ils sont accusés entre autres de trouble à l’ordre public, destruction de biens appartenant à autrui et à l’Etat…
HENRY GRÉGOIRE DIOP
Ayant “déserté” le Palais de Justice Lat Dior depuis le prononcé du verdict dans l’affaire Karim Wade, le président de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI) Henri Grégoire Diop a fait sa réapparition hier, à la salle 4 du tribunal de Dakar, où s’est tenu le procès de Karim Wade. Le magistrat assistait à la cérémonie d’installation des juges de la Chambre d’assises des Chambres africaines extraordinaires (CAE). Alors que récemment la presse a fait état d’un état de santé “chancelant” le concernant, c’est un Henry Grégoire transpirant la forme qui a assisté à la cérémonie. En attendant la reprise du procès de Tahibou Ndiaye prévu lundi prochain mais finalement renvoyé au 18 mai, le président de la CREI retourne à la Cour d’appel de Kaolack dont il est le Premier président.
TURQUIE
Le Porte-parole du Parti socialiste (Ps) par ailleurs maire de Kaffrine, Abdoulaye Wilane, le fils du khalife général des Layènes, Issa Thiaw Laye, l’ancien directeur général de la Senelec, Seydina Kane ainsi que le Professeur Iba Der Thiam font partie de la délégation officielle qui s’est rendue avec le Président Sall en Turquie, pour les besoins d’une visite officielle entamée hier. Tout ce beau monde n’a sans doute pas été embarqué pour…une promenade de santé. Invité par le Président turc Erdogan, Macky Sall participera, à côté d’autres Chefs d'Etat et de Gouvernement, à la cérémonie-anniversaire de la bataille de Dardanelles à Canakalle. Mais avant cela, il a présidé hier un Forum économique en présence de plus de 150 hommes et femmes d'Affaires turcs intéressés par les opportunités d'affaires et d'investissements au Sénégal, avant d'être invité à un dîner officiel par le Président turc. Dans la délégation présidentielle, on note aussi la présence du ministre des Affaires
étrangères arrivé de la Pologne, le ministre conseiller diplomatique Oumar Ba.
MACKY, DEMBA BA ET MOUSSA SOW
Le président de la République du Sénégal va rentrer de Turquie avec des présents très particuliers. D’après une information transmise à EnQuête, Demba Ba et Moussa Sow, très heureux de leur rencontre avec le chef de l’Etat, ont offert leur maillot à Macky Sall. Le geste a été accompli au cours d’une audience que le successeur de Me Abdoulaye Wade au Palais a accordée à ces deux attaquants des Lions du football. Selon toujours le courrier, le chef de l’Etat a particulièrement été marqué par l’aura et la notoriété “de nos deux compatriotes chez les Turcs, y compris dans le milieu des hommes d’affaires et investisseurs”. Demba Ba est arrivé l’été dernier dans le club du Besiktas Istanbul alors que Moussa Sow évolue chez son rival de Fenerbahçe depuis janvier 2012. Le président de la République les a félicités pour leurs performances sportives et les a incités à la persévérance afin que leurs performances puissent un jour nous valoir aussi un succès dans les compétitions nationales.
TRANSHUMANCE
Le Parti socialiste ne cautionne pas la transhumance. C’est la position réaffirmée par le Bureau politique du Parti. Après une première sortie le week-end dernier pour “regretter” la sortie du président de la République Macky Sall sur la question, le Ps a été attaqué par des alliés du Président Sall notamment la coalition Macky 2012. Mais pour le Ps, “la transhumance est inacceptable, inexcusable et indéfendable”. Toutefois, Me Moussa Bocar Thiam, le porte-parole adjoint, rappelle : “L’interlocuteur du Ps, ce n’est pas la coalition Macky 2012”, mais plutôt “le président de la République avec lequel nous travaillons et nos ministres qui sont dans le gouvernement sont en train de faire un travail remarquable”. Pour les camarades d’Ousmane Tanor Dieng, l’urgence, ce n’est pas le débat sur la transhumance mais “les problèmes de société et les problèmes d’emploi”. “Notre vision, ce n’est pas de polémiquer davantage. Les organismes périphériques peuvent toujours s’agiter mais le Ps a dégagé une position claire et ce débat est clos pour nous”, conclut-il.