UNE PRÉSIDENTIELLE AUX ENJEUX MULTIPLES
COTE D’IVOIRE

Ouestafnews - Le Conseil constitutionnel de Côte d’Ivoire a finalement retenu dix candidatures pour la présidentielle d’octobre 2015, une élection avec plusieurs enjeux, dont celui de faire oublier les deux très chaotiques précédents scrutins.
Sur les 33 candidatures déposées, le Conseil constitutionnel en a validé 10, dont celle du président sortant Alassane Ouattara, en quête d’une réélection après son accession mouvementée au pouvoir en 2011, les résultats sortis des urnes ayant dus être imposés par la force, à la suite de plusieurs mois d'une guerre qui a fait plus de 3000 morts.
M. Ouattara avait ainsi succédé à Laurent Gbagbo, arrivé au pouvoir en 2000 à la suite d’une élection que M. Gbagbo lui-même avait qualifié de « calamiteuse ».
Pour se faire élire dans une « démocratie apaisée » qu’il appelle de ses vœux et dont rêve nombre d’Ivoiriens, M. Outattara devra non seulement battre ses adversaires à la régulière, mais aussi envisager de quitter le pouvoir en cas de défaite pour éviter au pays en reconstruction de retomber dans le chaos.
Parmi ses adversaires les plus en vue, on retrouve de vieux routiers de la politique ivoirienne comme Mamadou Koulibaly, Pascal Affi N’Guessan, deux anciens du Front populaire Ivoirien (FPI, de l’ex-président Gbagbo). Le premier est entré en dissidence, le second contrôle légalement le FPI, mais sans le soutien de l'aile dure des partisans de Gbagbo.
On y retrouve aussi des technocrates ayant occupé d’importantes fonctions à l’international comme l’ancien ministre et diplomate Amara Essy, ancien secrétaire général de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA, ancêtre de l’actuelle Union africaine), ou encore Charles Konan Bany, l’ex-patron de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest.
Scrutin réparateur ou résurgence des vœux démons ?
Prévu en octobre 2015, le scrutin comporte un enjeu certain pour ce qui est de la pacification en cours du pays après des années extrêmement difficiles qui ont mis à terre ce pays que l’on qualifiait jadis de « miracle africain ».
A peine la liste des candidats annoncée que, sur le terrain, ressurgissaient les vieux démons de la violence. La journée du 10 septembre 2015 a ainsi été marquée par une série de manifestations contre la candidature du président sortant dans la capitale économique, Abidjan mais aussi à l’intérieur du pays, qui ont fait un mort et des blessés.
Ces manifestations sont conduites selon la presse par des « Pro-Gbagbo radicaux », qui réclament l’application de l’article 35, une disposition de la loi fondamentale ivoirienne sur la nationalité qui a longtemps maintenu Alassane Ouattara hors des scrutins précédents.
Les opposants n’ont pas tardé à remettre sur la table, les dispositions de l’article 35 pour s’insurger contre la candidature de M. Ouattara dont la participation à la présidentielle de 2010 n’avait été admise qu’a titre exceptionnel suite à des négociations politiques supervisées par la communauté internationale.
Paradoxalement, M. Ouattara qui vient de boucler son premier mandat n’a ni abrogé ni modifié cet article de la discorde et pilier de l’idéologie de « l’Ivoirité », jugée raciste et faite à dessein contre un homme.
Encore et toujours des controverses…
A quelques semaines du scrutin dont la campagne s’ouvre le 09 octobre 2015, certains adversaires de l’actuel régime émettent des doutes sur la transparence du scrutin à venir. Le FPI notamment reproche au pouvoir en place d’avoir verrouillé le processus électoral avec un contrôle total de la Commission électorale indépendante (CEI).
Ces quelques signes de fébrilité font peser un doute sur le scrutin d’octobre 2015, qui pour le pouvoir en place devrait aider à solder le compte d’une décennie de crise, mais surtout offrir à M. Ouattara une légitimité populaire plus crédible, après sa victoire au forceps lors du scrutin de 2010.
Mais ses adversaires sont nombreux à estimer que toutes les garanties et la sérénité requises en de telles circonstances ne sont pas encore réunies. Si son bilan économique est satisfaisant, M. Ouattara reste fortement attendu sur le terrain de la réconciliation et de la justice.
Alors que la Cour pénale internationale vient encore refuser une énième demande de liberté provisoire à l’ex-président Laurent Gbagbo, il est fortement reproché au régime en place de pratiquer une justice des vainqueurs et surtout d’avoir fermé prématurément le dossier judiciaire de la violente crise post-électorale de 2010.