CHRISTIAN VALANTIN
PORTRAIT SENEPLUS – Ancien responsable du Parti socialiste, chef puis directeur de cabinet de Senghor, député pendant 32 ans… Et il parle de Macky
Christian Valantin avait disparu de la scène publique sénégalaise en 2001, un an après l’Alternance. Et au bout de 32 ans à l’Assemblée nationale. SenePlus l’a retrouvé en pleine promotion de son livre Trente ans de vie politique avec Léopold Sédar Senghor. La verve intacte.
Retrouvailles
L'histoire commence par une erreur d'aiguillage. Une matinée ensoleillée, mais frisquette. Au cœur de rues animées, mais muettes. L'homme voûté que l'on aperçoit au loin en train de scruter la vitrine d'une boutique d'œuvres d'art, a l'air d'un senior qui ploie sous l'âge. Mais observé de plus près, il semble trop jeune pour être celui avec qui nous avons rendez-vous ce jour du mois de février dernier, sur l'Île de Saint-Louis. Il fait à peine 60 ans. Christian Valantin, lui, en a 87.
Malgré tout, le doute subsiste. L'on s'avance vers l'inconnu. Le dévisage secrètement et, afin d'être définitivement fixé, compose le numéro de notre hôte. Une voix raillée répond, demande notre position et indique la sienne. Au même moment, l'inconnu discute à l'intérieur du magasin. On rebrousse chemin. Slalome entre deux-trois rues et tombe sur la silhouette familière d'un monsieur longeant le trottoir d'un pas lent. Échine droite, visage paré de lunettes à montures fines, sourcils fournis, Christian Valantin se dresse devant nous. Élégant sous son costume marron foncé, ses mocassins assortis, et sa chemise ciel à "col Mao".
Il avait disparu de la scène publique sénégalaise en 2001. À la suite des législatives qui parachevèrent l'Alternance survenue un an plus tôt, point final de 40 ans de règne PS. On le retrouve en pleine promotion de son livre Trente ans de vie politique avec Léopold Sédar Senghor. "Un texte unique sur Senghor, l'homme politique", avertit sa maison d'édition, Belin. En dehors des mèches blanches qui recouvrent complètement sa tête, sa démarche hésitante et son visage couturé de rides, il n'a pas vraiment changé.
Avec agilité, il s'installe à l'avant de la voiture. Et, après les salutations, indique au collègue au volant la destination : hôtel "Résidence". "Je voulais vous recevoir chez moi, mais il y a des travaux, se désole-t-il. On sera plus tranquilles là où on va." Lorsque l'on emprunte un sens interdit, il s'empresse de relever la contravention. Mais au lieu de pester contre le conducteur indélicat, il lui accorde des circonstances atténuantes en s'en prenant aux autorités municipales locales : "Il n'y a aucun panneau de signalisation. Je ne sais pas ce que font les maires ici."
De Barthélémy à Christian
Ce genre de coup de gueule est souvent le propre des "anciens combattants" pour qui tout était mieux avant. Mais chez Valantin il traduit un attachement viscéral à l'ordre et à la discipline. Le professeur Abdoulaye Élimane Kane, ancien ministre et membre du bureau politique du PS, témoigne : "Christian avait une bonne connaissance des textes du parti et bien que très conciliant sur beaucoup de questions il ne manquait jamais, de rappeler l'orthodoxie et les dispositions pertinentes lorsque, cela s'imposait." Dans son livre sur Senghor, le concerné rappelle que ses "arrière-grands-parents et grands-parents faisaient partie de cette société politique qui exposait ses idées avec clarté, franchise et courtoisie. Parvenus à de hautes fonctions politiques, ils n'hésitaient pas à dénoncer les injustices du système colonial". Une affaire de famille, donc.
Christian Valantin est né le 13 avril 1929 à Saint-Louis. Deux siècles auparavant, son arrière-grand-père, Barthélémy Valantin, ouvrait la voie à la fratrie en arrivant le premier dans l'ancienne capitale de l'ex-AOF. Son grand-père, Barthélémy-Durand était député du Sénégal en 1948 et en même temps "faisait office, à l'époque, de maire de Saint-Louis", sa ville natale. Celui qui se définit comme un "métis culturel", "sénégalais en même temps que français", a longtemps essayé de retracer ses origines du côté de son père, Marc-Édouard, également né à Saint-Louis, en remontant le chemin de son bisaïeul. Mais ses recherches dans le Sud-Ouest de la France n'ont rien donné. Ni à La Rochelle, où "des contacts" l'avaient orienté, ni à Rochefort où il a certes retrouvé un Valentin, "mais avec un 'e'". "Je n'en sais pas plus, abdique-t-il. Par contre, j'en sais davantage du côté de ma mère."
Et pour cause. Suite au décès en 1940 de leur maman, Madeleine Valantin née Guillabert (à Saint-Louis également), quatre ans après celui de leur père, lui (11 ans) et son frère cadet, Henri-Louis (8 ans), seront élevés par leur grand-mère maternelle, Suzanne Guillabert. Un nom très réputé à Saint-Louis. Qu'il n'est plus besoin de présenter. Les frères Valantin ont donc passé leur enfance au 10 de la rue Blanchot. Là où, bien plus tard, l'ainé fera une rencontre décisive, qui allait bouleverser sa vie.
Déjeuner décisif
1955. Ministre du gouvernement français, Senghor déjeune chez les Guillabert. À l'étudiant en droit qui rêve de devenir avocat (il le deviendra plus tard), il propose de faire "Colo". Plus qu'un conseil, c'était une prescription. Senghor : "Nous aurons besoin des cadres qui sont actuellement en fin d'études ; deviens administrateur et dans dix ans tu seras gouverneur du Sénégal." Objection de Valantin : "Avant dix ans, le Sénégal sera indépendant." Réplique du poète-président : "Avant d'être indépendant, il nous faudra quelques années d'apprentissage par l'autonomie interne."
La prédiction du jeune homme de 26 ans se réalise, le Sénégal devient indépendant en 1960. Mais en fin de compte, les craintes de l'ancien ministre français s'avéreront fondées. Christian Valantin l'admet en arborant un sourire malicieux : "L'histoire lui a donné raison. La situation actuelle des pays africains montre que nous n'étions pas prêts pour l'indépendance." Il suivit quand même la direction indiquée par le premier Président du Sénégal. Reçu au concours d'entrée à l'ENFOM (École nationale de la France d'outre-Mer), ses camarades de promo avaient pour noms Babacar Bâ, Cheikh Hamidou Kane, Amady Aly Dieng, Kane Diallo Modibo, Henri Senghor… et des ressortissants d'autres colonies, bref ces cadres dont parlait Senghor. Lesquels devaient permettre aux jeunes États africains d'assumer pleinement leur accession à la souveraineté internationale.
Comme pour le récompenser de l'avoir écouté, Senghor fit de lui son chef de cabinet après son élection à la présidence de la Fédération du Mali, le 4 avril 1959. Le nouveau breveté de l'ENFOM avait juste 30 ans. C'était son premier poste administratif. Le point de départ d'une riche carrière au cœur de l'État : il devient, à l'éclatement du Mali, directeur de cabinet du ministre du Plan et du Développement, Karim Gaye (septembre 1960), puis gouverneur de la région de Thiès (1961), directeur général de l'OCA (Office de commercialisation agricole, 1963) et directeur de cabinet de Senghor (1965), en remplacement d'Abdou Diouf, qui cumulait cette fonction avec celle de secrétaire général de la présidence.
Virage politique
Avril 1967. Senghor, qui le jugeait "particulièrement préparé à faire de la politique", lui propose d'être candidat aux législatives du 25 février 1968. Il accepte le challenge en se présentant à Thiénaba, dans le département de Thiès. Un choix loin d'être fortuit. Il confesse : "Mes fonctions de gouverneur (de Thiès) m'avaient permis de nouer des relations d'amitié avec nombre de personnes qui pouvaient m'aider à m'implanter politiquement, notamment Serigne Ibrahima Seck dit Serigne Thiénaba, qui m'apporta un soutien indéfectible. Il en fut de même avec Serigne Cheikh Tidiane Sy, aujourd'hui khalife général des Tidianes, qui ne manquait jamais de parler à des auditoires importants du cousin que j'étais pour lui." Il sera élu en 1968 et régulièrement réélu jusqu'en 2000. Trente-deux ans à l'Assemblée nationale où il a régulièrement siégé aux commissions des Finances et des Lois.
Cette longévité, Christian Valantin la doit certes à ses qualités intellectuelles, mais aussi à ses qualités humaines, son attachement à sa base politique. Un jour, raconte un ancien responsable socialiste, pour faire revenir à de meilleurs sentiments un vieux militant socialiste de Ngoundiane (un village de la région de Thiès) fâché contre lui, Valantin n'hésita pas à bouder pendant plusieurs heures une plénière à l'Assemblée nationale. C'était en 1997. Le téléphone du député socialiste sonne, on lui apprend qu'un de ses électeurs lui a tourné le dos. Il quitte ses collègues illico pour aller éteindre l'incendie. Arrivé à Ngoundiane vers midi, il pique directement aux champs où le militant en colère vaquait à ses occupations. Il passe la journée avec lui, le raccompagne à la fin de la journée installé avec lui sur sa charrette tirée par un âne, déjeune avec lui dans sa concession autour d'un bol de lakh avant de prendre congé peu après 18 heures, certain que le rabibochage est réussi. Rentré à Dakar dans la soirée, il retrouve ses collègues à l'Assemblée nationale et la plénière qui tirait en longueur.
"Désenghorisation" ?
Malgré ce riche pedigree l'ancien directeur de cabinet de Senghor n'a jamais occupé de fonction ministérielle sous Abdou Diouf. Dommage collatéral de la "désenghorisation" dont on accusait, à tort ou à raison, l'ancien chef de l'État de se livrer après son accession au pouvoir en 1981 ? L'air fort irrité par cette question, Valantin proteste. "Ce n'est pas cela. J'ai toujours préféré être parlementaire. Abdou Diouf, on entretient les meilleurs rapports." Il est l'auteur de nombre de ses discours. L'avait alerté, en 1999, sur une possible défaite à la présidentielle de 2000. L'avait applaudi lorsqu'il coupait l'herbe sous les pieds à ses proches qui, sentant souffler le vent de l'Alternance, envisageaient de "voler la victoire d'Abdoulaye Wade". Et, à son élection à la tête de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), en 2003, il travaillera à ses côtés jusqu'à sa retraite en 2008.
Depuis, Christian Valantin partage sa vie entre la France et le Sénégal. Passant quatre mois ici et huit mois là. L'hôtel "Résidence" est pour lui un passage obligé lorsqu'il séjourne à Saint-Louis. L'endroit est posé à l'angle de la rue Blaise Diagne au quartier Nord. Il est propre, sobrement décoré avec goût et généreusement offert à la lumière du jour. Le calme qui y règne n'est troublé que par des notes de musique en sourdine venant du bar et par un monsieur posté au premier étage du bâtiment qui, à deux reprises, fait des grands signes d'impatience à notre interlocuteur. Nous discutons depuis plus d'une heure. Finalement, Christian Valantin s'excuse : "Pourrait-on se revoir à Dakar ? J'y serai à partir de lundi. Je devais rencontrer ce monsieur depuis 11 heures et là, il fait presque midi."
Rendez-vous est alors pris le vendredi suivant à l'hôtel Farid de la rue Vincens. On le redécouvre plus détendu. Normal, pourrait-on dire. Son "livre se comporte très bien en librairie". "Nous avons écoulé plus de 200 exemplaires en quelques jours", jubile-t-il en commandant à boire et en me proposant "quelque chose". Un café pour moi et un jus d'orange pour lui. "J'ai soif", se plaint-il en s'emparant de son verre qu'il vide au tiers d'une traite avant de replonger dans les souvenirs compilés dans son livre : comment et pourquoi Senghor est entré en politique. L'impact de sa pensée philosophique sur sa pratique politique. Comment, malgré l'humiliation ayant précipité sa démission de la SFIO, il a réussi à manœuvrer pour remporter les législatives de 1951, sous la bannière de son propre parti, le BDS, et au nez et à la barbe de Lamine Guèye. La marche vers l'indépendance. L'éclatement de la Fédération du Mali. Les prémices de la crise de 1962. Sa gestion et son dénouement. L'ascension d'Abdou Diouf. Le départ de Senghor du pouvoir…
"Qui suis-je pour oser ?"
Ces pans importants de l'histoire du Sénégal sont étalés sur près de 200 pages pour rafraîchir les mémoires de ceux qui auraient "tendance ces temps-ci à oublier un peu Senghor". "Il était nécessaire de le rappeler à l'attention de ses concitoyens et du monde entier", insiste l'auteur. Mais Trente ans de vie politique avec Léopold Sédar Senghor a failli ne jamais voir jour. Valantin a beaucoup hésité avant de décider de le mettre au monde. "Qui suis-je pour oser ?" s'est-il longtemps interrogé avant de se lancer.
Auteur de la préface du livre, le philosophe Souleymane Bachir Diagne réussit à chasser ses doutes. Avec un argument-massue : "Ceux qui, comme moi, ont le bonheur d'avoir souvent entendu Christian Valantin parler de celui qui fut son mentor pendant des décennies, lui répondront simplement que la sienne, parmi toutes ces voix de biographes, est celle de quelqu'un qui fut de l'équipe Senghor, qui le connut au point où, ainsi qu'il le rapporte, il pouvait 'lire sa pensée' dans les situations qu'ils vivaient ensemble, déchiffrer sur le visage de son 'patron' quels sentiments l'habitaient. Je fais partie des amis de Christian Valantin qui ont souvent fait valoir devant son hésitation qu'il avait, en vérité, le devoir d'ajouter à ce qui s'est écrit sur Senghor, ce qu'il pouvait en dire depuis sa position unique de témoin privilégié." Imparable !
D'autant que l'ouvrage se veut un viatique pour la jeunesse : "J'ai écrit ce livre pour les jeunes. Parce que j'ai constaté, je constate- et je ne suis pas le seul d'ailleurs- que les jeunes Sénégalais ne connaissent pas leur histoire."
"Belle plume"
Le livre sur Senghor est un document d'histoire et en même temps un récit autobiographique. L'auteur "témoigne non seulement des événements qui ont secoué la jeune République mais aussi, et peut-être surtout, du poids des engagements philosophiques de Senghor dans sa pratique politique". Et par intermittence, sans jamais s'écarter de son sujet principal, Senghor, il dévoile des séquences entières de sa propre vie et de son parcours de haut fonctionnaire de l'administration sénégalaise. Au plan de la forme, il allie rigueur factuelle, profondeur d'analyse et style dépouillé, preuve qu'il n'a pas contribué pour rien à l'élaboration de certains discours de l'un des théoriciens de la Négritude et été par hasard l'un des "nègres" du Président Abdou Diouf.
En effet, Christian Valantin est un esthète de la langue. Ndioro Ndiaye, ancienne ministre socialiste, rapporte que le discours d'Abdou Diouf lors de la venue du pape Jean-Paul 2 à Dakar, en 1992, une visite qui avait suscité beaucoup de réticences de la part de certains chefs religieux musulmans, fait partie de ses chefs d'œuvres. Abdoulaye Élimane Kane ajoute : "Belle plume et maitrise parfaite du Français, il est souvent volontaire pour présenter un texte, ou bien lorsqu'on le sollicite, s'en acquitte à la satisfaction générale. Très sollicité, il arrive souvent à nos rencontres hebdomadaires épuisé mais souriant. Je l'ai vu, à plusieurs reprises, vaincu par la fatigue, tomber dans les bras de Morphée, en réunion de Bureau politique. Mais personne ne lui en tient rigueur, personne ne lui dit rien : ça dure quelques minutes et il se réveille tout seul. Et parfois il recommence. Mais une fois remis d'aplomb il nous gratifie souvent de l'une de ses belles interventions toujours respectueuses des bonnes liaisons entre la consonne terminale d'un mot et la voyelle initiale du mot suivant. Un régal !"
"Une seule fois", concède le professeur Kane, sa plume a été publiquement contestée : "Chargés tous les deux de faire un projet de communiqué lors de la campagne présidentielle de 2000, nous y avons travaillé ensemble avec conscience et dévouement. À notre grande surprise dès la fin de la lecture du texte quelqu'un s'est écrié : 'ça manque de souffle'. Bien que peu convaincu de la pertinence de cette remarque j'ai aussitôt rétorqué : 'Dans ce cas ça ne peut être imputé qu'à moi car étant sujet à des crises d'asthme, j'ai le souffle court'. Les protestations de mon camarade d'infortune bien que très audibles furent noyées dans un gigantesque éclat de rire auquel il prit une part conséquente."
Cette aisance avec la langue, il le doit à sa grand-mère maternelle, Suzanne Guillabert. "Elle nous disait : 'Lorsque vous parlez le Français, parlez-le bien ; lorsque vous parlez le Wolof, parlez-le bien'", rapporte Christian Valantin qui, s'extasie un de ses parents saint-louisiens, "s'exprime parfaitement aussi dans la langue dite de Kocc Barma". "Il parle le Wolof mieux que la plupart des Sénégalais que je connais, renchérit un de ses anciens collègues à l'Assemblée nationale. Ce qui était un atout pour le responsable politique en zone rurale qu'il était."
"Discret", "secret"
Mais si ses qualités intellectuelles, sa loyauté envers ses supérieurs hiérarchiques, son engagement politique, son attachement à Saint-Louis et son humanisme sont connus, loués, Christian Valantin reste un personnage énigmatique. "Discret" pour les uns ; "secret" pour les autres. "Cette figure quasi historique du régime socialiste m'a toujours semblé fuyante, évanescente mais toujours là, confie un ancien directeur général du journal Le Soleil. Sans doute, sa trajectoire dans l'appareil d'État s'explique, au moins en partie, par le paradoxe d'une telle permanence politique."
Divorcé de la mère de son unique enfant, Marc-Antoine, un médecin, il ne s'est pas remarié. Il n'a pas souhaité s'épancher sur le sujet. Sur beaucoup d'autres questions ayant rythmé la marche du Sénégal, non plus. "Je ne souhaite pas réveiller de vieux démons", botte-t-il en touche à propos, notamment, de l'identité des responsables socialistes qui tentaient de "voler la victoire d'Abdoulaye Wade" en 2000, des commanditaires de l'assassinat de Me Babacar Sèye ("je ne sais pas grand-chose de cette affaire"), des chefs religieux qui étaient opposés à la venue du pape Jean-Paul 2 en 1992…
"Macky doit faire attention"
La rencontre avec Christian Valantin s'est déroulée moins de deux semaines après l'annonce par Macky Sall de sa décision de renoncer à réduire son mandat de 7 ans à 5 ans et de la tenue du référendum le 20 mars. Lorsque nous l'interpellons sur le rétropédalage du chef de l'État, il marque une pause. Nous fixe du regard et, comme pour éviter les oreilles indiscrètes, murmure qu'"il (Macky) n'était pas tenu de suivre l'avis du Conseil constitutionnel". Va-t-il pour autant, à l'instar de beaucoup de Sénégalais déçus de ce dénouement, rejeter le projet de réformes de la Constitution qui incluait la réduction du mandat présidentiel, sans effet rétroactif ? "Je vais voter, c'est sûr. Mais je suis pour le moment indécis", lance-t-il.
Toutefois il salue les initiatives du président de la République en matière de lutte contre la corruption. Il dit : "Il doit poursuivre dans ce registre et faire beaucoup attention à son entourage." Invité à être plus précis, il esquive avec un rire amusé et en croisant les jambes et les bras dans un mouvement coordonné de repli. Et pour annihiler toute velléité de relance, il change de sujet. Nous questionne sur SenePlus et nous souhaite "bon courage" en espérant nous revoir "bientôt, dans huit mois". Un laps de temps si court qu'on ne devrait pas le confondre à ce moment-là. Même de très loin.