«LA SUBVENTION DE L’ETAT N’ENGENDRE AUCUNE AMELIORATION DE LA PRODUCTIVITE»
ETUDE DE LA DPEE SUR L’AGRICULTURE AU SENEGAL

La subvention de l’Etat, allouée annuellement aux agriculteurs, n’améliore pas leur productivité. Cette révélation a été faite par la Direction de la prévision et des études économiques (Dpee), en marge d’une étude réalisée sur le thème : «productivité agricole, productivité et croissance à long terme au Sénégal : une analyse en équilibre général calculable dynamique». Selon la Dpee, une nouvelle politique agricole de l’Etat pourrait susciter un accroissement annuel moyen de 10,7% de l’activité agricole sur la période 2014-2023.
Dans son étude sur l’agriculture, la Dpee a confirmé les nombreuses difficultés qui plombent le secteur agricole depuis plusieurs décennies. Ces difficultés ont pour nom : faible productivité des facteurs, production très fluctuante, vétusté des équipements agricoles, dégradation des infrastructures, mauvaise qualité des semences, manque d’unités de stockage et insuffisance du crédit agricole.
En conséquence, l’agriculture a participé de moins en moins à la création de richesses nationales, entraînant du coup une migration massive des populations rurales vers les milieux urbains. Cette baisse de la productivité a entraîné une baisse sensible de la contribution de l’agriculture à la formation du PIB. Pour soutenir les paysans dans l’augmentation de la production agricole, l’Etat leur octroie une subvention annuelle qui avoisine les 30 milliards de Fcfa. Cependant, cette subvention n’engendre pas toujours les résultats escomptés.
A en croire le professeur Abdoulaye Seck, qui a réalisé l’étude sur la subvention publique et la productivité agricole au Sénégal, ces subventions, aussi importantes qu’elles ont pu être, n’ont pas contribué à améliorer de façon significative la productivité de nos agriculteurs, particulièrement dans la vallée du fleuve Sénégal où l’étude a été réalisée.
D’après lui, il faut interroger la logique comportementale de ces agriculteurs pour pouvoir comprendre cela. «Un agriculteur qui fait face à des contraintes financières relativement importantes, quand vous lui permettez de faire des économies en terme de dépenses par rapport aux intrants qu’il met dans le processus de production, l’idéal aurait été qu’il puisse utiliser ces intrants et profiter de la subvention pour pouvoir acheter de nouvelles machines, engager des ouvriers agricoles. Et ce n’est pas ce qu’on a constaté dans la zone nord. La plupart de ces agriculteurs, confrontés à des difficultés financières, utilisent toute économie qu’on leur donne à des fins de consommation, au lieu de l’investir dans l’activité productive. C’est ce que l’on appelle le détournement du produit de la subvention, ce qui empêche l’augmentation de la productivité», déplore-t-il.
Selon lui, si l’Etat veut vraiment aider les agriculteurs à augmenter leur productivité, il doit mettre l’accent sur deux dimensions importantes. «L’Etat doit d’abord renforcer les organisations paysannes en terme technique et financier, car notre étude nous a permis de constater que les agriculteurs qui sont affiliés à ces organisations tendent à être beaucoup plus productifs que les autres.
La réponse pourrait se trouver au niveau de tout un ensemble de services que ces organisations offrent aux agriculteurs en termes d’assurance, de services d’achat, de vente et d’aides multiformes. Ensuite, l’Etat doit renforcer les infrastructures dans la chaîne agricole qui doit aller «de la fourche à la fourchette», c’est-à-dire les aider dans le stockage et la transformation de leurs produits», a-t-il préconisé.