LES MÉMOIRES CORRECTIVES DE PAPE SAMBA KANE : LA POÉTIQUE DE LA POLITIQUE
Les personnages qui peuplent et animent aujourd'hui notre monde politique, culturel, religieux, sportif ou autres, pourraient-ils faire l'objet d'un travail similaire à celui réalisé dans le livre "Mémoire Corrective" de Pape Samba Kane ?
Amis de la poésie et de la politique, c'est un pur bonheur de vous livrer un témoignage sous forme de note de lecture des deux tomes concentrés d'agilité spirituelle, que PSK a intitulés "Mémoires Corresctives".
Ces "Mémoires" sont pour moi, véritablement correctives, voire une merveilleuse découverte, du fait que de 1987 à 1996, je demeurais à l'étranger, vivant à Paris depuis 1977, d'où il m'arrivait de m'échapper pour rentrer au Sénégal, pour côtoyer un grand frère pour lequel je nourrissais une admiration qui confinait à la fascination, je veux parler de l'immense Mame Less Dia. Je ne découvrais qu'accidentellement, au détour de visites à certains amis, quelques exemplaires du réputé turbulent "Cafard Libéré". Tout ça pour vous dire que traverser ces quelques 200 portraits, m'a permis de connaître à travers la plume alerte de Pape Samba Kane, des hommes et des femmes, qui, croqués à la musique de son talent, de son humour, de son regard décalé, se révélaient tous, chargés avant tout d'humanité, de chair et de convictions, et qui chacun à sa manière, m'a fait comprendre que le Sénégal n'était pas né, loin de là, en 2000.
Nombre d'entre eux ont disparu, en laissant des traces dans notre Histoire et des souvenirs dans nos esprits, aujourd'hui empreints d'une certaine nostalgie, cette douce nostalgie qui fait dire à Emile Cioran que "si la nostalgie n'existait pas les rossignols rôteraient".
Certains de ses personnages sont là, présents encore, vivants c'est sûr, ils sont souvent de chers amis, et en en connaissant certains de façon très intime, la plume de Pape Samba Kane a déclenché chez moi un sourire, parfois un rire, relatif à un trait que je n'avais pas vu ni décelé, et qui d'un coup rendait évident, ce qui faisait la singularité ou la particularité de ces êtres.
Dresser le portrait d'une femme ou d'un homme publique est un art qui demande, exige plutôt, de ne jamais avoir le mot qui tache...et, sacrilège, entache... Peu de personnes qui ont connu l'honneur, c'en fut un, d'être scrutés par le regard d'un tel homme, entre le "teggi ndawal" et le garçon taquin, sont je l'imagine, venus rouspéter et lui dire leurs courroux. Les autres ont du sourire et penser que la Liberté avait décidément le goût de l'encre dans laquelle ce chenapan trempait sa plume.
Ces deux livres témoignent de la vitalité, de l'humanité, du courage des hommes et des femmes qui ont fait l'histoire de ce pays. C'est une belle somme. La question que nous devons poser à ce maître de la satire, consiste à lui demander si les personnages qui peuplent et animent aujourd'hui notre monde politique, culturel, religieux, sportif ou autres, complètement buzzifiés et twitterisés pourraient faire l'objet et surtout être les sujets d'un tel travail. Ont-ils assez de chair, d'humanité, d'urbanités et d'aspérités auxquels accrocher nos joyeuses satires?
Pape Samba Kane a tout mon respect et je lui dois cet hommage. Je l'ai connu lorsque Youssou Ndour m'a convaincu de rentrer de Paris où je sévissais à Radio France, pour monter ici, la 7FM, avec l'emblématique et précurseur Groupe COM 7, où il dirigea le quotidien "L'INFO 7". Plus tard il fut celui, devenu alors Dirpub du quotidien TAXi, entreprit de me persuader que je n'étais pas qu'une voix, et que je devais me lancer dans l'écriture. Il me confia le billet qui m'allait si bien, que je signais "Siruman", puis j'eus à m'enhardir et à taquiner l'édito, l'analyse et la chronique, et avec l'aide d'Ibrahima Wane, à apprendre d'où on part et où l'on va quand on a quelque chose à dire.
Je pense être devenu grâce à PSK ce modeste chroniqueur à qui il a appris à regarder ailleurs quand on nous montre l'évidence et à toujours respecter l'intelligence des personnes qui nous font l'honneur de nous lire, et sans jamais oublier que dans le mot "impertinence", il y avait si justement celui de "pertinence".
Je remercie PSK de m'avoir appris que " la pensée était le seul mode de transports qui n'était pas en commun".
Merci pour ces 23 années de compagnonnage et puissent les réjouissants projets qui bouillonnent en lui continuer à nous faire cheminer ensemble, et à garder nos esprits libres et alertes.