SYSTÈMES ET POPULISMES !
Ce qu’on appelle aujourd’hui laborieusement le « système », sans jamais le définir, est souvent un fourre-tout politique, théorique, idéologique et social. D’où la nécessité de clarifier certains aspects théoriques et historiques de ce concept.
Ce qu’on appelle aujourd’hui laborieusement le « système », sans jamais véritablement le définir, est souvent un fourre-tout politique, théorique, idéologique et social. D’où la nécessité de clarifier certains aspects théoriques et historiques de ce concept, d’identifier les mouvements politiques et sociaux communément appelés mouvements « anti- systèmes » ou « populistes »; ce qu’ils sont réellement au-delà des proclamations et pétitions de principes, d’essayer de comprendre leurs projets et de faire des projections sur leurs avenirs .
De l’évolution historique des systèmes
Le système, pour parler de lui, n’est pas tombé du ciel ; c’est un fait social et historique, une création des hommes, animée et dirigée par eux. Aucun système n’est mauvais en soi et dans l’absolu ; tout système social correspond à une forme nécessaire et rationnelle d’organisation et de fonctionnement des sociétés humaines à un moment historique déterminé. C’est l’usage que font les hommes du système qui le pervertit ou le bonifie ! L’Afrique du Sud après Mandela, avec l’ANC, mouvement d’obédience communiste-socialiste et dirigée par les présidents noirs qui lui ont succédé, est de l’avis quasi unanime, plus corrompue et plus inégalitaire aujourd’hui que sous le système de l’Apartheid !
Toutes les formes d’organisation humaine, après les communautés primitives, sont des systèmes parce qu’elles obéissent à des règles et des mécanismes de fonctionnement et de reproduction basés sur l’inégalité, la hiérarchie et l’ordre.
Au début étaient les sociétés barbares reposant sur la loi du plus fort, la force, la violence et la domination ; ensuite, de manière plus civilisée et subtile, les sociétés féodales avec leurs ordres et privilèges ; puis le capitalisme, qui consacre juridiquement la liberté et l’égalité et privilégie le travail et le mérite individuels comme seuls critères d’accomplissement social. Ces systèmes que je viens d’évoquer sont socialement typés avec des classes et couches dominantes qui règnent sur la grande masse. Ces systèmes sont consacrés, garantis et défendus par l’État grâce à sa force armée et sa justice, en tant qu’institution dominante dotée d’un pouvoir de contrainte, voire de répression. L’État impose par la loi et la violence légale( forces de l’ordre ), l’ordre établi par les classes dominantes du système socio-politique. Cependant, les systèmes ne se réduisent pas uniquement à l’État et à ses institutions ; ils se retrouvent dans des sous-systèmes que sont toutes les formes d’organisations sociales et religieuses dans lesquelles des pouvoirs, des intérêts et des privilèges sont en jeu.
Avec l’évolution du système capitaliste, qui domine le monde depuis le XVIIIe siècle et qui est devenu capitalisme-impérialisme au début du XXe siècle, malgré les poussées fulgurantes du communisme-socialisme au début du XXe siècle (avec la Révolution russe d’octobre 1917, la Révolution chinoise en 1949, la naissance du Bloc de l’Est après la Seconde Guerre mondiale, les révolutions dans le Tiers Monde avec l’Inde, l’Iran, l’Indochine, Cuba, etc.), le système capitaliste est pour l’essentiel restauré au plan économique, tout au moins dans les pays anciennement socialistes et communistes (économie de marché dominante, appropriation privée des moyens de production combinée à un capitalisme d’État, forte insertion dans le marché capitaliste mondial des biens, services et capitaux). Le système capitaliste mondial, devenu unipolaire autour des États-Unis après la chute du Bloc de l’Est au début des années 1990, est rigoureusement contesté par la Chine, la Russie, l’Inde et certains pays émergents regroupés sous le vocable de BRICS.
Le système capitaliste dominant dans lequel nous vivons toujours au début du XXIe siècle s’est adapté par des formes diverses, allant des démocraties occidentales de type libéral (Europe occidentale, Amérique du Nord, etc.) aux démocraties du Tiers Monde avec des variantes autoritaires pour beaucoup, totalitaires pour certains et des transitions démocratiques pour le plus grand nombre. Ces formes modernes du capitalisme, qu’elles soient démocratiques, libérales ou autoritaires, se caractérisent par l’existence de fortes inégalités sociales, le chômage, la pauvreté, l’économie de marché, un mode d’appropriation privée des moyens de production et, de façon manifeste ou diffuse, par la domination du système par des oligarques (castes et minorités, groupes de pression et lobbies) ou des ploutocrates (personnes riches), ou les deux à la fois. Les systèmes sont généralement sociologiquement relativement fermés ; ils ont vocation à se perpétuer et à se reproduire pour la conservation des privilèges des classes et couches dominantes. « Tous les systèmes sont mauvais », nous disait Jean-Jacques Rousseau ! La démocratie, toujours selon lui, « est le système le moins mauvais » !
La démocratie, qui est le système actuel de gouvernement dominant dans le système capitaliste, est relativement plus ouverte que les autres systèmes, plus dynamique, parce que elle cherche en permanence à s’adapter, à se réformer et à se renouveler .
Des populismes aujourd’hui
Depuis la chute et la dislocation du Bloc de l’Est et les réformes libérales en Chine, on a de moins en moins tendance à qualifier les systèmes par leurs caractéristiques sociales, idéologiques ou socioéconomiques. Les systèmes sont devenus relativement « neutres » et quasiment « uniformes » socialement. Ils n’ont plus d’épithètes idéologiques ; ils sont devenus le Système avec un grand « S » des États-Unis à l’Europe, de l’Asie à l’Amérique latine, du Brésil à l’Afrique. Maintenant le Système signifie le pouvoir en place tout court et quel qu’il soit, celui des élites sur le peuple. Le système s’exerce aux plans économique et financier à travers les oligarques, les lobbies, la politico-bureaucratie, les affairistes etc. La révolution sociale cède la place à la lutte anti-système dirigée par des mouvements et partis populistes.
Le populisme ne s’inscrit pas dans une perspective de renversement et de bouleversement de l’ordre sociale mais dans une perspective de remplacement des élites par d’autres. Bien que proclamant partout , à cor et à cris, vouloir restaurer la souveraineté du peuple , transformer la société par le bas, dans leur démarche concrète, les populistes de tous les pays font le contraire de ce qu’ils disent une fois arrivés au pouvoir. D’ailleurs, le glissement sémantique, la substitution subtile du concept « anti système » par celui de « transformation systémique » traduit ce glissement. L’anti- système logiquement détruit le système tandis que le transformateur systémique cherche a le modifier, à l’adapter à lui. On est ainsi en face d’un flou artistique socialement et idéologiquement parlant.
La plateforme d’offre politique des populistes prévoit en général l’instauration d’une gouvernance et d’un contrôle directs par le peuple des affaires publiques( la souveraineté populaire) , la souveraineté nationale, la souveraineté économique, le remplacement des anciens dirigeants et des élites du système, une réallocation des ressources en faveur du peuple et des démunis, des lendemains radieux pour le peuple, les jeunes et les laissés pour compte en particulier.
Le combat populiste est inspiré et dirigé, dans les pays développés, par des élites bourgeoises dites de droite ou d’extrême droite, voire fascistes, donc appartenant aux classes dominantes tandis que dans les pays du Tiers Monde et pauvres comme les nôtres, il est porté par les couches moyennes ( petits bourgeois) produits du système. Au Sénégal deux courants idéologique, en plus des nationalistes et des révoltés de tous ordres, dirigent et animent les mouvements d’obédiences populistes : les intellectuels anciennement de gauche, adeptes de la « Révolution » et du « Grand Soir » relativement minoritaires dans cette mouvance et un courant d’intellectuels formés à l’école occidentale et en même temps militants de courants religieux islamistes bien structurés, apparus au Sénégal au milieu des années 1980. Ces courants islamistes sont fortement inspirés par les obédiences « Frères musulmans » et « Salafistes ».
Ces intellectuels islamistes malgré les ajustements et alliances tactiques opérés avec les intellectuels occidentalisés, sont stratégiquement opposés aux Confréries musulmanes installés au Sénégal depuis fort longtemps et les considèrent comme des hérésies dans l’Islam. Le DMG de la Présidence de la République, Cheikh Oumar Diagne, n’est pas un épiphénomène, c’est le représentant assumé sans fards ni hypocrisie de ce courant. Les références idéologiques et sociales sont généralement éludées ou volontairement rendues floues. Ils présentent juste à l’opinion un concentré de revendications nationalistes, de promesses de rupture aux plans politique économique, éthique, morale et de lutte contre corruption et ce qu’ils appellent la mal gouvernance . Leurs revendications correspondent souvent à des exigences populaires légitimes susceptibles d’indigner et de mobiliser les populations, les jeunes et les laissés pour compte principalement.
Leurs stratégies et méthodes en matière de communication sont la victimisation à outrance, la dénonciation et la déconstruction systématiques, la stigmatisation, le harcèlement médiatique et les agressions verbales, le matraquage de l’opinion et du peuple, le tout articulé autour d’un discours simple, simpliste et réducteur, à des fins de propagande et manipulation des masses . Leurs stratégies de communication se sont révélées efficaces et mobilisatrices avec l’apport des réseaux sociaux et des médias.
Leurs modes d’action sont à la limite de la légalité républicaine., il accepte la légalité tant qu’elle les arrange, quand elle leur est favorable et la conteste immédiatement par des voies souvent de non droit, par l’épreuve de force, par des manifestations de rue pouvant aller jusqu’aux émeutes et autres actes de vandalisme.
Souvenons-nous de l’occupation de la Chambre des Représentants et du Sénat américain par les hordes pro-Trump, les émeutes et les occupations de la rue et des principales Institutions du Brésil par les Bolsonaristes après leur dernière défaite électorale. Souvenons-nous aussi, au Sénégal, des émeutes de début mars 2021 et de juin 2023 à l’appel de Ousmane Sonko leader de Pastef qui ont fini par décider le Gouvernement à dissoudre ce parti .
Les populistes, c’est les virages a 180 degrés du discours et au respect des engagements, tantôt anarchistes et émeutiers accomplis dans l’opposition, aussi, dictateurs et négateurs des droits et libertés individuelles et collectives, une fois arrivés au pouvoir. Depuis qu’ils sont au pouvoir au Sénégal , ils n’ont quasiment autorisé aucune manifestation légale de l’opposition et mettent à tour de bras, de simples citoyens en prison pour des délits « d’opinion »!) .
Les marqueurs forts de la ligne d’actions des populistes sont l’occupation du terrain politique par les réseaux sociaux, les médias et les appels incessants à des mobilisations afin de maintenir une tension politique et sociale permanente. Les jeunes mécontents et le lumpen prolétariat des grands centres urbains sont les fers de lance de leurs actions de rue et de casse.
Le combat des mouvances populistes a toujours besoin d’être incarné et dirigé par un leader charismatique, un tribun iconoclaste, parfois fantasque voir messianique, quasiment vénéré et souvent considéré comme « inspiré » et « infaillible » ! Les militants et adeptes des mouvements populistes donnent plus l’impression dans leurs attitudes vis à vis de leur leader, de « talibés » fanatiques et d’illuminés que de personnes ayant adhéré librement et consciemment à une cause ( mêmes chez certains intellectuels !). Leur leader, quoi qu’il dise, quoi qu’il fasse, a toujours raison et il faut le défendre, se sacrifier pour lui, parce qu’il incarne la cause, le « Projet » qui est « sacré ». Les conditions objectives de l’éclosion et de développement fulgurant des mouvements populistes dans nos pays sont le bas niveau de conscience politique des populations , de culture intellectuelle chez notre jeunesse et même d’une bonne partie de nos élites. Cette situation est accélérée par la tyrannie des réseaux sociaux et des médias de l’instantané, du sensationnel et du buzz.
Ensuite, les conditions de pauvreté de masse, les inégalités découlant des limites des politiques et solutions proposées par les élites dirigeantes, l’insuffisance d’équité et de justice sociales, la corruption et l’enrichissement illicite. Ces limites incluent l’insuffisance d’emplois décents et d’activités pour les jeunes en particulier, le creusement des inégalités sociales et l’exclusion de pans de plus en plus significatifs de la population des retombées du développement. Enfin, la mondialisation forcenée des économies qui laisse peu de marges de manœuvre à nos pays, la stagnation et la régression de nos économies agricoles combinées à une démographie galopante et un exode rural massif ainsi que l’absence d’alternatives socioéconomiques crédibles et d’espoir en un avenir meilleur.
Les mouvements anti-système ont généralement cette magie de concentrer toutes les contestations et tous les mécontentements populaires du moment, en réunissant dans une même dynamique les exclus du développement et tous ceux qui aspirent à un changement, quel qu’en soit le prix et quelles qu’en soient les perspectives. Malheureusement, les espoirs que ces personnes fondent sur les promesses de leurs dirigeants populistes sont vite déçues, une fois le pouvoir conquis. D’abord, les nouvelles élites populistes s’emparent rapidement des principaux leviers de l’appareil de répression du « système » et les utilisent vigoureusement et sans états d’âme contre tous ceux qui daignent les contester, y compris le peuple. Ensuite, les promesses à caractères sociale et économique comme l’emploi, l’amélioration du pouvoir d’achat, la souveraineté monétaire, la souveraineté alimentaire et économique, l’industrialisation révèlent la difficulté de leur faisabilité à l’épreuve de la réalité.
Et enfin, la gouvernance vertueuse, transparente et économe passent aussi à la trappe des promesses non tenues( suppression des fonds politiques, réductions du train de vie de l’Etat, reddition des comptes par tous , la patrie avant le parti etc.). Enfin de compte, dans la plupart des cas, il est constaté que le « système » est toujours là , il n’est pas détruit et il est reproduit en pire avec les nouveaux dirigeants « anti systèmes ». Cette situation creuse chaque jour davantage un fossé plus large et plus profond entre les dirigeants populistes et le peuple.
Les courants et mouvements anti-systèmes d’obédience populiste et souverainiste dans les grands pays capitalistes sont nés pour combattre ce système qui échappe à ses « actionnaire » et au peuple. Ces courants et mouvements dans les pays occidentaux ont profité du caractère de plus en plus monopolistique du capitalisme qui se concentre entre très peu de mains et du déclin des mouvements révolutionnaires, populaires et syndicaux « devenus des appendices du système » pour émerger et se développer. Ces courants ont pour base sociale les couches et classes populaires ( ouvriers, paysans, les déclassés des couches moyennes ), les personnes âgées, les xénophobes et les racistes. Ils ont produit les Le Pen, Mattéo Salvini, Trump, Bolsonaro, etc.
Leurs dirigeants sont des produits du système capitaliste qu’ils cherchent non pas à renverser, mais à réformer en promettant de le « rendre plus populaire » par moins d’impôts à l’intérieur du pays, plus de droits de douane contre les pays concurrents, démantèlement des bureaucraties, dans les organisations d’intégration et d’union comme l’Union Européenne , limitation et éradication de l’immigration etc. Par contre dans nos pays, ce nationalisme appelé par les dirigeants populistes « patriotisme »ou « souverainisme » est souvent un mélange confus de prétentions diplomatique, politique et socioéconomique le tout sur fond de démagogie et de promesses irréalistes, d’exhortation de l’ego et des « instincts » primaires du peuple. Le seul parti populiste en Afrique arrivé au pouvoir par la voie démocratique ( élections libres et démocratiques ), c’est Pastef. Dans les autres pays africains, ils sont identifiés à des putschistes qui tentent de se recycler, après leurs forfaits institutionnels, pour récupérer les masses, les jeunes des grands centres urbains en particulier, à travers un discours aux relents populistes et souverainistes . C’est le cas notamment des pays de l’Alliance du Sahel ( AES), Niger, Burkina et Mali.
Le caractère messianique du discours est commun à tous les populistes du monde. Ils font beaucoup recours aux valeurs, à l’éthique, à la morale en s’adossant fortement à des courants religieux, les Évangélistes chez Trump et d’autres courants de l’Eglise chez d’autres en Europe et en Amérique, les courants Frères musulmans, Salafistes etc. chez nous . En revanche, dans nos pays, les mouvements anti-systèmes sont des mouvements socio-politiques composites, essentiellement dominés par la petite bourgeoisie administrative et certaines élites intellectuelles qui se sont constituées dans le « système ». Dans leurs stratégies les espaces de libertés offerts par la Démocratie sont exploités à fond pour imposer un changement de régime. D’abord, par les voies et moyens classiques, pacifiques offerts par l’État de droit et la Démocratie , ensuite avec l’évolution du rapport de forces en leur faveur, par des actions de mobilisation et des manifestations de plus en plus séditieuses tendant à affaiblir, bloquer et renverser le système par la rue ou les élections, ou les deux à la fois !
De l’État et du système
L’État et le Système sont deux réalités contradictoires, dialectiquement liées. L’un ne peut pas exister sans l’autre. Karl Marx nous apprend que le système, qui repose sur les inégalités et l’exploitation de l’homme par l’homme, ne disparaîtra qu’à l’extinction de l’État avec l’avènement du communisme supérieur (« à chacun selon ses capacités et à chacun selon ses désirs ! »). Ainsi donc, vouloir être anti-système dans une société où il existe l’État est un non-sens ! Pour la simple raison que ceux qui s’en réclament, à l’épreuve du pouvoir, cherchent plus à l’utiliser à leur profit contre les déchus et leurs adversaires supposés ou réels. L’État est le premier système politique organisé.
D’ailleurs les révolutions communistes du début du 20 eme siècle et de l’après seconde guerre mondiale avec l’émergence du Bloc de l’Est ont vu apparaître des Etats dits « de dictature du prolétariat »ou « de dictature démocratique et populaire » pour, disaient les communistes et socialistes d’alors, « détruire l’Etat bourgeois et capitaliste et instaurer un Etat des ouvriers, un Etat du peuple ».Ce fut partout des échecs qui ont débouché sur l’instauration d’un capitalisme d’État , de régimes bureaucratiques, inégalitaires, corrompues et inefficaces dans la gestion économique et sociale. Ce qui conduisit au début des années 1990 à la Pérestroïka et l’effondrement du Bloc de l’Est. La Chine communiste a pu éviter sa Pérestroïka et malgré le printemps de Pékin avec la révolte des étudiants écrasée dans le sang, grâce au génie et au pragmatisme du Premier Ministre Deng Tsiao Ping. Les réformes de Deng ont établi la dualité économique « un pays deux systèmes »et instaurer l’ « économie social de marché ».
Des oligarques issus généralement des cadres et dirigeants des partis communistes en Chine, en Russie et dans les pays dits communistes et socialistes ont été « fabriqués » pour contourner le mode d’appropriation privée des grands moyens de production et pour porter les grandes entreprises à vocations nationale et internationale. Finalement une adaptation plus réaliste des pays « socialistes » et « communistes » pour tirer un meilleur avantage du « système » capitaliste et du marché mondial capitaliste. D’ailleurs cette défaite du camp socialiste et ses tentatives laborieuses de s’adapter au capitalisme et à la mondialisation capitaliste ont amené le politologue et économiste américain, Francis Fukuyama, à conclure dans son best-seller « La Fin de l’Histoire et le dernier Homme » publié en 1992, que avec la chute du Bloc de l’Est et l’ avènement d’un système capitaliste unipolaire mondialisé et dominant, que le système capitaliste libéral « était l’ultime système de gouvernement de l’humanité » ! D’où la fin de l’Histoire ! Sur un autre plan, par le développement prodigieux de la technostructure et de la mondialisation, les États, les administrations et les entreprises sont devenus des structures de plus en plus complexes et difficiles à gérer.
On voit ainsi apparaître des pouvoirs de décision de plus en plus éloignés des fonctions de gestion, de coordination, d’exécution et de contrôle. Ces fonctions apparaissent tous les jours plus complexes, plus pointues et plus spécialisées. Ces fonctions techniques d’assistance et de subordination ont pris une importance croissante et décisive dans toutes les sociétés contemporaines. Ces fonctions complexes et mondialisées nécessitant une expertise avérée pour certaines ont fini par presque donner le contrôle, et parfois même la domination de pans décisifs des systèmes à la technostructure. Cette technostructure, aussi appelée la bureaucratie, a créé un système dans le système (des sous-systèmes) à travers des constitutions, des lois, des règlements, des procédures et des techniques d’organisation, de gestion, de contrôle et de suivi, de telle sorte que le système échappe non seulement au peuple mais même en partie aux dirigeants et aux actionnaires en faveur de certains cols blancs et bleus.
Ce magma charrie « délits d’initiés », « conflits d’intérêts », « collusions », « corruption » ( l’histoire des sub-primes avec Modoff qui avait provoquée la grande crise financière de 2008) etc. La société semble tenue à la gorge par ces « initiés » qui profitent indûment des richesses de l’État, des actionnaires, des investisseurs, des producteurs, des travailleurs et du peuple en général. Les courants et mouvements anti-systèmes d’obédience populiste et souverainiste dans les grands pays capitalistes proclament que leur objectif est de combattre ce système qui échappe à ses propriétaires et au peuple.
Pour finir, à l’entame de cette contribution nous rappelions qu’aucun système n’est mauvais en soi et dans l’absolu, tout système correspond à une forme de rationalité et de nécessité de l’organisation politique, sociale, économique, militaire et même géostratégique d’un peuple à un moment historique déterminé pour lever les contraintes diverses liées à son développement à sa sécurité et sa survie. Cependant, notre avis est que, quel que soit le système en question dans nos sociétés actuelles, il y a des invariants fondamentaux qui doivent être scrupuleusement établis et consolidés si tant est qu’on aspire à servir au mieux les citoyens et le peuple. Ces invariants ou valeurs sont la liberté, l’égalité, la justice, le mystique du travail, la consécration du mérite, la promotion des valeurs de respect, d’obéissance, d’ordre, de tolérance et de paix, le culte du savoir, de la connaissance, de la science, de la technologie et de l’innovation, le respect des règles d’efficience économique, la culture de la solidarité et de la fraternité entre les hommes et entre les peuples du monde.