AU SAHEL, LE DISCRÉDIT DES DÉMOCRATIES
Le coup d’Etat au Burkina Faso montre une nouvelle fois, après le Mali et la Guinée, l’échec d’un gouvernement élu démocratiquement face aux jihadistes et au désarroi des populations
L’Afrique de l’Ouest serait-elle en train d’inventer un nouveau concept ? Celui du «coup d’Etat militaire populaire», qui peut certes paraître dérangeant. Mais après la prise du pouvoir par les militaires au Mali depuis 2020 puis en Guinée en septembre 2021, le coup d’état au Burkina Faso confirme que l’intrusion des hommes en treillis dans la vie politique civile bénéficie désormais, dans cette région tourmentée du continent, d’un indéniable soutien populaire.
Qu’on ne s’y trompe pas : ce n’est plus la peur qui empêcherait les citoyens de descendre dans la rue pour s’opposer à ces changements de pouvoir, comme ce fut souvent le cas lors des 70 coups d’état qui ont interrompu des processus démocratiques en Afrique, entre 1958 et 2018. En 2015, les Burkinabè avaient d’ailleurs massivement envahi la capitale Ouagadougou pour mettre un terme à une tentative de coup d’état militaire, jugée cette fois-là illégitime.
Cinq ans et demi plus tard, lorsque des mutineries enflamment dimanche plusieurs casernes du pays, et que le président élu perd la main dès le lendemain, les seules manifestations spontanées visent à soutenir le renversement en cours. Pour le reste, la vie dans la capitale ne semblait pas, lundi, particulièrement affectée par le putsch visant à balayer le régime de Roch Marc Christian Kaboré, élu en 2015 et réélu en 2020.
Scandales de corruption et progression des jihadistes
Ancien homme du sérail, qui a accompli une grande partie de sa carrière politique sous le règne du président Blaise Compaoré, «Roch», comme l’appellent familièrement les Burkinabè, avait rompu avec son ancien mentor en janvier 2014 pour créer son propre parti. Quelques mois plus tard, en octobre, une révolution populaire chassait l’inamovible homme fort du pays, au pouvoir depuis 1987.