L’ULTIME COMBAT POUR DESIGNER LE GRAND SERIGNE POLITIQUE DE DAKAR...
Le Premier ministre Ousmane Sonko et l'ancien maire Khalifa Sall, tous deux victimes des manœuvres de Macky Sall mais avec des destins différents, s 'affrontent pour la suprématie dans la capitale
Les élections législatives du 17 novembre prochain constituent un rendez-vous à plusieurs enjeux. Parmi ceux-ci, la bataille de Dakar qui s'annonce sanglante entre Pastef dirigée par le Premier ministre Ousmane Sonko et Taxawu Sénégal de l'ancien maire Khalifa Sall. Lequel des deux sera désigné « Grand Serigne Politique » de Dakar par la collectivité locale dakaroise ?
C'est en 2009, sous le régime de Me Abdoulaye Wade, que la mairie de Dakar a échappé à un parti au pouvoir. Khalifa Sall, alors membre du PS, venait d'imposer sa force sous la bannière de la grande coalition de l'opposition Benno Sigil Sénégal (Bss). Cinq ans après, c'est à dire au terme de son premier mandat en 2014, c'est au tour de Macky Sall de subir le même revers que son précédent. Khalifa Sall se fait réélire face au candidat d'alors de l'Avr confirmant ainsi son leadership incontesté dans la capitale où il contrôle 17 sur les 19 communes. Le président Macky Sall, sentant son pouvoir menacé par la montée en puissance du «khalif de Dakar», utilise le très fallacieux prétexte de la caisse d'avance pour le mettre hors d'état de bénéficier. Mais de la manœuvre politico-judiciaire : s'offrir facilement un second mandat présidentiel faute de concurrent sérieux.
Finalement, le leader de Taxawu Sénégal n'a pu participer à l'élection présidentielle de 2019. Tout de même, ce examen a révélé la naissance d'un nouveau phénomène politique en la personne de Ousmane Sonko, sorti troisième derrière Idrissa Seck, avec un score de 15%. Ce qui constitue un grand lien en avant comparé à ses résultats du plus fort reste acquis lors des législatives de 2017 et lui octroyant un seul siège à l'Assemblée nationale. Conscient que le chef de file du Pastef est désormais une réalité politique, Macky Sall, dont l'image renvoie à celle du varan de la légende intransigeante à toute personne qui s'approcherait de lui, tente le même coup d'État infligé à Khalifa Sall. Mais c'était sans compter la détermination de la « bête » Sonko qui lui opposa une farouche résistance. Avec comme renfort, une bonne partie du peuple et particulièrement la jeunesse pour le sauvetage de la «guillotine».
Sonko très résilient ne sera certes pas candidat mais parviendra tout de même à barrer la route à Macky Sall dans sa quête d'une troisième candidature. Mieux, il lui impose son propre pion qui finit par se faire élire : Bassirou Diomaye Faye. Ainsi donc, Khalifa Sall et Ousmane Sonko subiront le même sort sous Macky Sall. Tous deux emprisonnés et éliminés à une élection présidentielle. A la différence que là où l'ancien maire de Dakar n'a pu lui tenir tête, Sonko, en revanche, est parvenu à mettre fin à son régime par le biais de son candidat qui a fait capituler son pouvoir. Yewwi et le clash...Réélu en 2019 au terme d'un examen très sélectif face à quatre candidats seulement avec 58%, Macky Sall prend conscience de son lien en arrière.
L'opposition, sentant la toute puissance du régime s'effriter, est dans l'obligation de s'organiser en perspective des locales et des législatives de 2022. Ce, pour affaiblir le pouvoir afin de faciliter sa chute à la présidentielle de 2024. Khalifa Sall, une des figures de proue de la scène politique, entreprend dès 2020 des démarches auprès des membres de l'opposition radicale pour donner naissance à une grande coalition dénommée Yewi Askan Wi (Yaw) composée d'une dizaine de partis et de mouvements dont le Pastef de Ousmane Sonko. Lancé le 2 septembre 2021, il a envisagé dans sa charte de conduite de faire une liste unique aux locales et législatives pour pouvoir accorder à chaque membre qui le souhaiterait de se présenter à la présidentielle de 2024.
Cette nouvelle entité porte très vite ses fruits. En plus de faire feu de tout bois sur la gouvernance cynique de Macky Sall, elle draine des fautes et résiste à toutes les tentatives du pouvoir de freiner sa dynamique. Barthélémy Dias, deuxième homme fort de Taxawu Sénégal connu pour son courage, son engagement, sa témérité et sa fougue, forme avec Sonko, qui incarne les mêmes qualités, un duo redoutable et intenable.
Aux locales comme aux législatives, les résultats obtenus par Yewi permettent de contrôler plusieurs mairies des grandes villes et de mettre en vote la coalition présidentielle sur le partage dessièges à l'Assemblée nationale malgré l'élimination très contestée de sa liste de titulaires au profit des suppléants. Faisant preuve d'altruisme politique, Sonko jette son évolution sur Barthélémy Dias deuxième homme de Taxawu Sénégal comme candidat à la mairie de Dakar et lui manifeste son soutien indéfectible. La victoire de Dia voix pour succéder à son mentor Khalifa Sall devenu inéligible est sans bavure avec un score fleuve de presque plus de 100 mille sur son principal concurrent de la mouvance présidentielle. Coup de théâtre ! Car à la suite d'un appel à un dialogue national initié par le Président Macky Sall pour dire-il, apaiser la tension politique, Khalifa Sall décide d'y prendre part.
La coalition Yewi, considérant cette invitation comme une manœuvre pour la diviser, perçoit la démarche de Taxawu Sénégal comme une trahison. Ce qui en avait tout l'air puisque c'est à la suite de ce conclave que Khalifa Sall a été réhabilité dans ses droits civiques par l'Assemblée nationale. La tension devient alors plus vive entre la coalition Yewi Askan Wi et son membre fondateur qui finit par claquer la porte et se démarquer du groupe parlementaire de l'opposition. Dans le même temps, le coordinateur de Pastef à Dakar et premier adjoint au maire de Dakar perd son poste. Ainsi donc, le Pastef et Taxawu très liés au départ deviennent des ennemis jurés et font face à une bataille politique à distance loin de connaitre son épilogue.L'ultime bataille de Dakar...
Si pour bon nombre d'observateurs Ousmane Sonko a été l'un des grands artisans de la brillante victoire de Barthélémy Dias à la mairie de Dakar pour d'autres, notamment le camp de Taxawu Sénégal, tel n'est pas le cas. Pour eux, cela reflète la toute-puissance de leur leader Khalifa Sall dans la capitale qu'il contrôle depuis 2009. En tout état de cause, personne ne peut denier à l'ex-maire de Ziguinchor son apport personnel dans la campagne aux dernières locales qui a permis le contrôle de plusieurs localités du pays. Alors qu'on pensait que la dernière présidentielle où Taxawu et Pastef étaient tous sur la ligne de départ allait quitter les deux camps à Dakar, le suspense ne fait que persister.
Ce, malgré que le Pastef y soit largement sorti victorieux avec un score sans appel. Interrogé sur ce fait les militants de Taxawu Sénégal ont soutenu que ce score ne reflétait pas la réalité sur le terrain. Pour eux, beaucoup d'électeurs y comprennent les leurs, ont préféré faire un vote utile à la faveur du candidat de Pastef qui, à leurs yeux, était mieux placé pour féliciter le candidat du pouvoir qu'ils ont combattu. Face à cette situation, il était difficile de jauger le poids électoral de chaque entité. D'où le caractère décisif que constitue les législatives du 17 novembre prochain pour les départager. Dans cette confrontation, il faut noter que même si Taxawu et Pastef étaient dans l'affiche de la dernière présidentielle, leurs acteurs pour le prochain examen ont connu un petit changement.
En effet, Khalifa Sall alors candidat, s'est retiré pour mettre en selle Barthélémy Dias alors que Sonko inéligible qui avait porté son choix sur Diomaye Faye va conduire sa liste. Ce sont donc les ex-amis qui vont s'affronter sur le terrain pour la première fois. Deux figures emblématiques de la scène politique, de même génération, qui se connaissent très bien. Et qui vont en découdre pour arracher les sept sièges de députés délégués à la capitale dakaroise. Amis d'hier devenus de vrais adversaires politiques, ces deux hommes ont un contentieux à vider sur fond de comptes à régler. Aussi bien sur le plan national que…
Les Dakarois dont le verdict sera connu au soir du 17 novembre prochain. Des renforts tous azimuts… Ousmane Sonko, devenu Premier ministre, a opté d'aller aux élections sans coalition autrement dit en ne s'appuyant que sur son parti Pastef dont il est tête de liste. En plus de son coefficient personnel, il va devoir compter sur le soutien de ses responsables politiques dans la capitale parmi lesquels des maires, ministres, directeurs généraux etc. Ainsi que ses nombreux militants et sympathisants. Quant à Barthélémy Dias, chef de file de la coalition Samm Sa Kaddu, en fonction de Premier magistrat de la ville est l'un de ses premiers atouts. Mais son expérience politique ainsi que son bilan à mi-mandat à la mairie,l'implication de Khalifa Sall qui maîtrise bien les rouages de la capitale et l'apport de ses alliés peuvent peser sur la balance.
En définitif chacun des deux dirigeants détient des avantages à faire valoir pour sortir victorieux dans la capitale. Mais comme le dernier mot revient aux populations dakaroises, seules habilitées à trancher, entre Khalifa Sall et Ousmane Sonko