POURQUOI IL FAUT TENIR L'ELECTION PRESIDENTIELLE AVANT LE 2 AVRIL PROCHAIN...
Ne pas tenir ce scrutin jusqu’au 2 avril prochain pourrait nous mener directement vers un vide institutionnel.. Il aurait fallu que le chef de l’État ne prît pas la parole pour annoncer le report de l’élection afin de nous épargner cette situation
Si, pour certains, la décision du Conseil constitutionnel est perçue comme un appel pour la tenue de l’élection présidentielle avant l’expiration du mandat de l’actuel président de la République, pour d’autres, elle ne fait que rendre plus compliquée la situation. Toutefois, ne pas tenir ce scrutin jusqu’au 2 avril prochain pourrait nous mener directement vers un vide institutionnel.
Il aurait fallu que le chef de l’État ne prît pas la parole pour annoncer le report de l’élection présidentielle afin de nous épargner cette situation inédite et très compliquée dans laquelle nous vivons depuis le 3 février dernier.
En effet, après la publication officielle de la liste des candidats par le Conseil constitutionnel, tous les vingt candidats retenus étaient prêts pour aller en campagne et proposer aux populations leurs programmes. Hélas, tout a été chamboulé c’est à dix heures du démarrage de cette campagne avec le discours dans lequel le président Macky Sall annonçait sa décision d’abroger le décret convoquant le corps électoral pour l’élection présidentielle. Le scrutin, qui devait se tenir le 25 de ce mois de février, est finalement reporté.
Cette décision du chef de l’État, malgré les motifs invoqués par Macky Sall dans son adresse à la nation, n’a fait que plonger le pays dans une incertitude totale avec son lot de conséquences très lourdes. Depuis lors, personne ne sait quand est-ce que les Sénégalais iront aux urnes. Ce sans compter l’incertitude qui plane sur les modalités de l’organisation du scrutin. Une chose est sûre : seul le chef de l’État détient les clés pour nous sortir de cette impasse unique dans l’histoire politique de notre nation. Son mandat devant expirer le 2 avril prochain, il a le devoir et l’obligation de se rattraper en fixant au plus vite une date pour libérer son peuple. Autrement, nous risquons d’aller vers des jours très sombres.
Concertations mais pas avec n’importe qui...
Dans un communiqué publié le 16 février 2024 par son service de communication, le président de République a fait part de sa volonté de se soumettre à la décision du Conseil constitutionnel l’appelant à organiser “dans les meilleurs délais” le scrutin présidentiel tout en rappelant que son mandat prend fin le 2 avril prochain. Si on se limite à ces deux points, l’organisation de l’élection présidentielle avant cette date devient une obligation. Mais depuis jeudi dernier, date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, on assiste à un débat qui n’a pas sa raison d’être entre, d’une part, les partisans de la fixation d’une date avant le 2 avril et, d’autre part, ceux qui sont favorables au report de la présidentielle le temps de reprendre tout le processus électoral et de corriger les nombreux dysfonctionnements notés. Ce même si, d’après les « sept sages », seuls les candidats qu’ils ont officiellement retenus sont appelés à concourir à cette élection présidentielle. Des candidats parmi lesquels une a jeté l’éponge hier…
Par conséquent, seuls les 19 candidats restants en lice sont habilités à se prononcer sur cette question de la date du scrutin. Toute autre voix en dehors de ce cercle des admis à concourir ne doit bénéficier de la moindre attention. Qu’elle émane de candidats spoliés ou recalés, peu importe. C’est pourquoi les concertations devant être menées pour arrêter une date afin que le scrutin soit tenu “dans les meilleurs délais” ne devront en aucun cas concerner ceux qui ne sont pas admis à concourir. Dès lors, l’idée de la tenue d’un dialogue entretenue par les candidats éliminés de la course ne procède que d’une volonté de faire du dilatoire pour remettre en cause la tenue du scrutin d’ici le 2 avril prochain. Ces candidats « spoliés » ont compris qu’au-delà de cette date, c’est tout le compteur du processus électoral qui sera à zéro d’où la possibilité pour eux de se remettre dans la course. Le danger, si toutefois leurs manœuvres prospèrent, ce serait d’engager tout le pays dans un blocage institutionnel sans précédent. Ce parce que non seulement le chef de l’État sortant ne pourra — et ne devra — plus exercer sa fonction, mais surtout, personne d’autre, y compris le président de l’Assemblée nationale ne pourra se substituer à lui, si on tient compte des cas où ce scénario s’impose (démission, décès, indisponibilité).
C’est pourquoi, à notre avis, les seuls interlocuteurs légitimes du chef de l’État pour évoquer ce report ce sont les différents candidats officiellement retenus avec qui il doit discuter pour arrêter la meilleure date et échanger sur les modalités de l’organisation du scrutin à savoir la durée de la campagne, le maintien des bulletins déjà imprimés ou la confection de nouveaux, la mise à disposition du fichier électoral à temps entre autres. Sur ce plan, des discussions sincères qui mettent en avant la sauvegarde de la stabilité institutionnelle, politique, économique et sociale de notre pays doivent primer. Déjà, des propositions très intéressantes venant de spécialistes du droit ou des questions électorales pour la date du dimanche 3 mars ou celle du 10 mars ont été émises et pourraient être la meilleure solution afin de tourner définitivement cette page assez critique de notre histoire.
Volonté d’apaisement salutaire..
Dans sa volonté de décrispation de l’espace politique et social, le chef de l’État a posé un acte salutaire matérialisé par la libération de centaines de prévenus. Ceci a beaucoup contribué à baisser la tension et à donner des garanties pour appliquer les décisions du Conseil constitutionnel. Il lui appartient maintenant de poursuivre dans cette dynamique d’apaisement pour faire revenir la sérénité et l’espoir perdus pour le retour à la paix. Ce pour respecter sa parole de ne pas faire moins que ses prédécesseurs et de nous laisser un pays avec des institutions solides. Le président Macky Sall, qui semble avoir fait une lecture profonde de la situation de l’heure marquée par la détermination du peuple debout et prêt à défendre ses intérêts, n’a d’autre alternative que de changer de posture.
En effet, après les trois personnes tuées au cours des dernières manifestations contre le report de la présidentielle, l’implication de tous les segments de la société dans la lutte pour la défense de la démocratie ainsi que les pressions de la communauté internationale pour l’organisation du scrutin, l’heure a sonné pour lui de sauver ce qui peut encore l’être. Macky Sall a senti la nécessité de s’ouvrir aux acteurs politiques et à la société civile pour des concertations afin de prendre les meilleures décisions. C’est dans ce cadre qu’il faut espérer la libération prochaine de Ousmane Sonko, principal chef de l’opposition, et de Bassirou Diomaye Faye candidat à l’élection présidentielle. Ces deux personnalités de la scène politique, dont les incarcérations sont perçues comme une volonté de les écarter de la compétition électorale, ne doivent plus continuer à séjourner en prison vu la nouvelle tournure des choses. Une tournure à laquelle le président Macky Sall ne s’attendait pas du tout. Toutefois, la polémique sur les médiations menées pour la libération de ces deux leaders de Pastef ne doit pas prendre le dessus sur cette bonne volonté du chef de l’État dès l’instant que l’objectif recherché reste le même : le retour à la paix et l’organisation d’une élection présidentielle transparente. Après le rejet de son décret portant abrogation de celui convoquant le corps électoral ainsi que de la loi votée par l’Assemblée nationale pour le report du scrutin et vu le contexte actuel marqué par la détermination de tout un peuple qui réclame la tenue du scrutin présidentiel avant le 2 avril prochain, la balle est maintenant dans le camp du chef de l’État. Il a en face de lui une belle occasion pour sortir par la grande porte et sauver le pays des forces organisées qui, selon lui, pourraient profiter d’un chaos pour jouer les troisièmes larrons…