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2 décembre 2024
Développement
A DUBAÏ, LE PARADIS FISCAL DES BIENS MAL ACQUIS AFRICAINS
Une fuite de données révèle l'ampleur du patrimoine immobilier détenu par les proches de nombreux chefs d'État africains dans cette oasis du Golfe. Des villas de luxe, des gratte-ciel huppés, des biens dont la valeur atteint des dizaines de millions
(SenePlus) - L'enquête "Dubai Unlocked" menée par Le Monde a révélé une fuite de données confidentielle exposant le patrimoine immobilier substantiel détenu par les proches de nombreux chefs d'État africains dans l'émirat de Dubaï. Ces acquisitions de biens de luxe, souvent en décalage avec leurs fonctions officielles, soulèvent des interrogations sur l'origine douteuse des fonds utilisés.
Au Gabon, l'influente Marie-Madeleine Mborantsuo, ex-présidente de la Cour constitutionnelle, fait l'objet d'une enquête française pour "blanchiment de détournement de fonds publics". Selon Le Monde, "3M" et ses enfants auraient dépensé près de 6 millions d'euros en 2013 pour acquérir plusieurs propriétés à Dubaï.
En Guinée équatoriale, les fils du président Teodoro Obiang, Pastor et Teodorin, ainsi que le beau-frère Candido Nsue Okomo, disposent d'un riche patrimoine immobilier à Dubaï, évalué à plus de 14 millions d'euros pour ce dernier. Une enquête espagnole soupçonne M. Nsue Okomo de blanchiment dans une affaire de corruption.
Au Congo-Brazzaville, la belle-fille de Denis Sassou-Nguesso, Nathalie Boumba-Pembe, a acheté une villa de 3,5 millions d'euros en 2018. Son mari, le puissant ministre Denis Christel Sassou-Nguesso, surnommé "Kiki le pétrolier", est soupçonné de détournements liés à la société pétrolière nationale. Le ministre de l'Intérieur Raymond Zéphirin Mboulou a également investi plus de 5 millions d'euros dans l'immobilier dubaïote.
Au Tchad, l'ex-beau-frère du président Idriss Déby, Mahamat Hissein Bourma, a acquis des biens d'une valeur de 14 millions d'euros à Dubaï, coïncidant avec des acquisitions suspectes au Canada. Incarcéré, il dénonce d'autres hauts responsables propriétaires à Dubaï.
L'angolaise Isabel Dos Santos, fille de l'ancien président et première milliardaire africaine, confirme avoir acheté un appartement à Dubaï il y a plus de 10 ans. Accusée de corruption, elle vit désormais dans l'émirat sous le coup d'un mandat d'arrêt international.
Pour les ONG, Dubaï sert de "base arrière" pour ces personnalités cherchant à contourner les réglementations européennes sur les biens mal acquis, grâce à un cadre juridique plus laxiste. La lutte contre ces pratiques reste un défi majeur malgré les progrès réalisés.
par Francis Laloupo
PURE HAINE
Comment expliquer l’interminable maintien en détention du président Mohamed Bazoumr enversé par le coup d’Etat du 26 juillet 2023 ? Ne pas le laisser sombrer dans l’oubli. Il faut réclamer sa libération. Maintenant
Le 10 mai dernier, la Cour d’Etat du Niger a rendu une décision, concernant la levée de l’immunité du président Mohamed Bazoum, en détention depuis le putsch de juillet 2023 dirigé par le commandant de la garde présidentielle, Abdourahamane Tiani. A la demande de ses avocats, l’audience a été renvoyée au 7 juin prochain, afin que «le droit à la défense puisse être pleinement assuré», selon Kadri Oumarou Sanda, le bâtonnier de l’Ordre des avocats du Niger.Mohamed Bazoum, dirigeant nigérien élu en 2021, qui n’a toujours pas formulé sa démission, est invariablement accusé par la junte au pouvoir, le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), de haute trahison, complot contre la sécurité de l’Etat et soutien au terrorisme (sic). Des accusations jugées fantaisistes par nombre d’observateurs et destinées à justifier un coup d’Etat dépourvu de tout motif concevable. Rappelons que le putsch est intervenu en réaction à un éventuel limogeage du commandant de la garde présidentielle, dans un climat de querelle de palais, sur fond de conflit autour de la gestion de la manne pétrolière. Parmi les acteurs de cette guéguerre, l’ex-président Mahamadou Issoufou qui, malgré son départ de la présidence en 2021, n’a cessé de multiplier des manœuvres d’immixtion inappropriée dans les décisions de son successeur…
Une prise d’otage. Comment qualifier autrement le traitement auquel est soumis Mohamed Bazoum? L’homme et sa famille sont séquestrés, à l'intérieur d'une dépendance de la résidence présidentielle, sous haute surveillance, dans des conditions inquiétantes. Après la libération de son fils en janvier dernier, Mohamed Bazoum a été maintenu en détention avec son épouse Hadiza. Coupé de tout contact, à l’exception de son médecin, il connaît, au fil des mois, une détérioration continue de son quotidien. En décembre 2023, la Cour de justice de la Cédéao (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest) a, en pure perte, ordonné sa libération. Ses avocats, qui ne peuvent avoir accès à leur client, redoutent un possible désintérêt de la communauté internationale à l’égard cette situation. Un sentiment confirmé par l'un d'entre eux, Reed Brody, qui constate que « Mohamed Bazoum pourrait être imperceptiblement oublié dans les évolutions géopolitiques de la région ». Pour conjurer le risque de l’oubli, le New York Times, dans son édition du 4 mai 2024, décrit, sous la plume d’Elian Peltier, la situation actuelle du désormais ancien président du Niger : « Pendant ses premiers mois de captivité, M. Bazoum a été détenu avec sa femme, leur fils de 22 ans, Salem, et deux travailleurs domestiques, dans la résidence présidentielle. Ils n’avaient pas d’électricité mais pouvaient se promener à l’extérieur de la maison pendant que des gardes et d’autres personnes juchées sur des camionnettes armées les entouraient. D’après un proche de Mohamed Bazoum, la pièce est rapidement devenue un four gigantesque. Les températures qui ont dépassé les 40 degrés à l’extérieur, ont fait peler la peau des captifs. Mme Bazoum a également souffert d’un grave épisode de paludisme. (…) Désormais, les soldats sont postés à l’intérieur de la maison et ont retiré les clés des portes, afin que M. Bazoum ne puisse pas les verrouiller et garantir son intimité. Selon les personnes interrogées dans son entourage, il y a de l’électricité, mais les soldats ont confisqué tous les téléphones… »
Une entreprise de persécution
La séquestration de Bazoum s’est avérée, au fil des mois, une entreprise de persécution. Aux lendemains du coup d’Etat, l’équipe de putschistes a orchestré une campagne de diabolisation du président renversé, l’affublant des pires accusations au point de le présenter, aux yeux d’une opinion intérieure, comme l’auteur de tous les périls nationaux. Dans ce contexte critique, ceux qui, dans le pays n’ont jamais accepté l’élection de Mohamed Bazoum, ont trouvé l’occasion d’assouvir de ténébreuses revanches… Le discours officiel des nouveaux maîtres de Niamey s’est transformé en une chronique de la haine extraordinaire. Une logique de la haine, instaurée après le coup d’Etat, avec la volonté affichée de détruire un homme, et d’effacer le souvenir d’un dirigeant qui avait à peine accompli la moitié de son mandat jugé prometteur sur la scène internationale. A cet égard, rappelons quelques faits marquants de sa présidence, cités par le New York Times : « M. Bazoum a rapidement fait du pays l’un des bénéficiaires les plus privilégiés de l’aide étrangère en Afrique de l’Ouest. Il s’est attaqué à la corruption et a promis d’envoyer plus de filles à l’école, en partie pour limiter les grossesses précoces dans un pays où le taux de natalité est le plus élevé au monde. Il a travaillé en étroite collaboration avec la Chine pour construire un oléoduc qui est le plus long d’Afrique, que la junte a inauguré cette année… » On pourrait ajouter d’autres mérites, tels que la mise en œuvre de mécanismes innovants de lutte contre l’insécurité et l’extrémisme violent, ainsi que de pertinentes projections socio-économiques. Pour ceux qui, depuis longtemps, ont connu Mohamed Bazoum, l’ont vu agir et militer dans l’espace politique nigérien, difficile de comprendre et d’admettre le sort qui lui est fait actuellement.
Quelques mots suffisent pour qualifier cet ancien professeur de philosophie : Fidélité, droiture, loyauté, humilité, sens de l’engagement, haute idée de la chose politique et du service de l’Etat. Militant attaché à ses convictions, aimant les partager, avec un réel souci de la tolérance et de l’écoute de l’autre. Cet homme a toujours manifesté son amour des siens et ses contemporains. C’est donc ce serviteur de l’Etatque des putschistes projettent de supprimer, avec un rare acharnement. Mohamed Bazoum refuse de démissionner. Non pas du fait d’un attrait immodéré pour le pouvoir, mais en raison de l’idée qu’il se fait de l’Etat, de la raisond’Etat, et, partant, de la fonction qu’il a incarnée. En se gardant de démissionner, il continue de représenter la sauvegarde des intérêts collectifs d’un pays où une majorité devenue silencieuse de la population lui a confié les clés de la gestion du pouvoir. Comment alors admettre qu’un petit groupe d’officiers, mus par des motifs inavouables, et agissant au nom de honteuses conspirations, puissent se prévaloir exclusivement du droit de confisquer le patrimoine commun de l’Etat nigérien ?
Alors que l’intention du CNSP de s’installer durablement au sommet de l’Etat ne fait plus de doute, la procédure judiciaire engagée à l’encontre de Mohamed Bazoum a pour seul but de le soustraire durablement de l’espace public. Au regard des accusations alléguées, l’ancien président encourt la peine perpétuelle. La hantise de ses preneurs d’otages : que Bazoum retrouve sa liberté de parole, et livre sa vérité sur les véritables ressorts du coup d’Etat. Quels sont donc ces secrets si bien gardés qui ont amené ses geôliers à ordonnancer cette forme de violence à son encontre ? A en croire Amadou Ange Chekaraou Barou, l’un de ses proches conseillers, « le pouvoir de Tiani repose, en partie, sur lance de la libération immédiate de Mohamed Bazoum, auquel aucun crime ne peut être imputé. Il ne s’agit plus simplement de libérer un homme, mais de le sauver. Par-delà l’indignation que suscite cette affaire, il faut continuer de dire simplement, en tous lieux : libérez Mohamed Bazoum. Maintenant.
Francis Laloupo est journaliste, enseignant en Géopolitique.
L'OMBRE DES ÉTATS-UNIS D'AFRIQUE PLANE SUR LA CRISE BÉNINOISE-NIGERIÉNNE
Jean-Baptiste Placca rappelle l'immense gâchis de l'unité africaine perdue en 1963. Plutôt que de s'unir, les dirigeants choisissent trop souvent "d'écraser leur peuple à huis clos" par cynisme ou cupidité
(SenePlus) - La récente crise diplomatique et économique entre le Bénin et le Niger est un sombre rappel du rendez-vous manqué de mai 1963, lorsque les dirigeants africains auraient dû s'engager sur la voie des "États-Unis d'Afrique". Comme le souligne Jean-Baptiste Placca de RFI, "Voilà pourquoi certains dirigeants, au gré de leurs humeurs, écrasent leur peuple à huis clos et se jouent de la Constitution."
Les deux voisins ont frôlé une guerre économique paralysante pour les exportations pétrolières du Niger, qui transitent par le territoire béninois. Seule l'intervention de la Chine en tant que médiateur a permis de désamorcer un conflit aux répercussions potentiellement continentales. "N'est-ce pas à toute l'Afrique de remercier la Chine?", s'interroge Placca, tout en précisant que Pékin défendait surtout ses propres intérêts financiers colossaux dans les infrastructures pétrolières nigériennes.
Au cœur de cette crise se trouve un schisme ancien et profond entre les deux pays. Comme le décrit Placca, "Comme toujours, sur ce continent, chaque partie s'entête à imputer à l'autre les causes de ses malheurs." Le Bénin accuse la junte militaire au Niger de faire fi de sa souveraineté, tandis que les putschistes nigériens campent sur leur conception de "l'honneur" national.
Cette situation désespérante rappelle la fragmentation post-coloniale de l'Afrique. "Le véritable drame de ce continent est que les États-Unis d'Afrique n'existent même plus en projet", déplore l'éditorialiste. À l'inverse des 50 États sans frontières des États-Unis d'Amérique, l'Afrique reste morcelée en 54 "susceptibilités" nationales prêtes à s'embraser au nom de "la fierté nationale".
Dans une métaphore saisissante, Placca compare les relations entre États africains à celles entre voisins de village, obligés de traverser les cours d'autrui: "La bienséance impose de saluer ceux dont, par nécessité, l'on viole ainsi l'intimité." Cette "bienséance de l'interdépendance" fait cruellement défaut actuellement.
Pourtant, le Bénin a de légitimes griefs face au "mépris" nigérien envers le passage du pipeline pétrolier vital sur son sol. Et inversement, le Niger peut invoquer la sécurité nationale pour restreindre les mouvements à ses frontières. Dans ce climat de "suspicion" mutuelle, l'avenir s'annonce orageux.
En somme, cet éditorial percutant rappelle l'immense gâchis de l'unité africaine perdue en 1963. Plutôt que de s'unir, les dirigeants choisissent trop souvent "d'écraser leur peuple à huis clos" par cynisme ou cupidité. La Chine a pu temporairement éteindre ce feu de brousse béninois-nigérien. Mais jusqu'à quand ?
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LES FINANCES PUBLIQUES EN PÉRIL
Abdou Karim Sock dénonce les déficits abyssaux, une dette exponentielle et des infrastructures inadaptées sous Macky Sall. Selon lui, les caisses de l'Etat sont vidées par une politique d'endettement massif au profit de projets pharaoniques sans viabilité
Dans un réquisitoire sans concession, l'expert en gestion des finances publiques Abdou Karim Sock a dressé un état des lieux alarmant de la situation économique et budgétaire héritée du régime de Macky Sall, lors de son passage dans l'émission "Objection" de Sud FM ce dimanche.
S'exprimant dans le cadre d'un débat sur le nouveau "Projet Souverain" porté par le président Bassirou Diallo, M. Sow a fustigé la gouvernance financière de l'ancien régime, n'épargnant aucun détail chiffré pour étayer son constat accablant.
"Les finances publiques sont très mal en point", à tonné d'emblée l'ancien cadre du ministère des Finances, citant des déficits budgétaires et commerciaux abyssaux, une dette publique à 73% du PIB dépassant largement les normes communautaires, et des tensions de trésorerie équivalente à un besoin de financement quotidien de 5 milliards F CFA.
Selon lui, cette situation découle directement des "options politiques" prises par l'ex-président Sall, à savoir le financement de tous les azimuts d'infrastructures pharaoniques par l'endettement massif, au détriment du secteur privé national relégué au deuxième plan.
"Le PSE a privilégié des projets clés-en-main réalisés par des entreprises étrangères, excluant complètement le privé sénégalais", a déploré M. Sock, donnant l'exemple du BRT à 300 milliards ou des stades de Diamniadio adjugés à des turcs.
Pis, ces réalisations n'auraient selon lui aucune viabilité économique compte tenu de l'absence d'études de faisabilité et de planification préalable dignes de ce nom. L'expert n'a pas plus manqué d'épingler le défaut de sincérité budgétaire, avec un budget 2024 entaché d'irrégularités remettant en cause sa constitutionnalité selon lui.
Face à ce sombre constat, Abdou Karim Sock a plaidé pour des réformes d'envergure portées par le nouveau "Projet Souverain" : rationalisation rigoureuse des dépenses publiques, recouvrement effectif des impôts dus, remise à plat des subventions et renégociations de contrats publics et d 'emprunts.
Mais désavouant toute attente de changement à court terme, il a appelé les Sénégalais à la patience, jugeant qu'il faudra "2 à 3 ans" au moins pour commencer à ressentir les effets concrets de cette nouvelle politique économique.
"Le projet c'est un mandat de 5 ans, il faut du temps pour corriger les déséquilibres hérités avant de voir les fruits semés", a prévenu M. Sock, tout en exhortant les autorités à travailler dans la transparence et le respect des normes de bonne gouvernance.
LE MIRAGE DES PARCHEMINS
Si les diplômes envahissent de plus en plus les CV des politiques et hauts fonctionnaires sénégalais, leur valeur réelle est loin d'être assurée. Car derrière les belles signatures, les compétences concrètes et l'expertise de terrain sont parfois absentes
Le culte des diplômes semble devenir l'élément central pour nos autorités, dans la nomination aux postes de ministres et de directions des entreprises publiques. Les titulaires de ces diplômes sont souvent perçus comme les mieux préparés aux postes de responsabilités et à affronter les défis complexes de la gouvernance moderne. ‘’EnQuête’’ jette un regard critique sur ce phénomène.
Doctorats, PHD, MBA, DESS, Master II… La possession de ces différents sésames semble être une condition sine qua non pour être nommé dans ce nouveau gouvernement. Le diplôme n’est plus une présomption de connaissance, mais une finalité en soi dans un pays où le statut social et la légitimité se mesurent à l'aune d’un curriculum vitae bien rempli. Les partisans de l’ancien président Abdoulaye Wade aimaient le présenter comme le chef d’État le plus diplômé du Caire au Cap.
En effet, de nos jours, le Sénégal traverse une période où les titres académiques sont devenus des symboles de réussite sociale et de compétence professionnelle. Le nouveau gouvernement illustre cette tendance, en promouvant des qualifications académiques élevées pour toute nomination à des postes clés. Les titulaires de ces diplômes sont souvent perçus comme les mieux préparés pour affronter les défis complexes de la gouvernance moderne.
Cependant, cette course aux diplômes soulève des questions sur la véritable nature de la compétence et de l'efficacité dans la gestion des affaires publiques. Pour le journaliste, Moustapha Mbaye, ‘’le pouvoir discrétionnaire du président de la République est souvent téléguidé par d'autres considérations socioculturelles. Le diplôme ne suffit pas, il n'est qu'un justificatif au plan hiérarchique. De ce fait, la confiance, la proximité avec le chef et l'apport politique comptent beaucoup. À cet effet, le mérite inclut des paramètres qui exposent le choix final à des critiques’’, a-t-il déclaré.
Pour beaucoup de citoyens, d'un côté, cette exigence de qualifications élevées pourrait conduire à une Administration publique plus compétente et mieux formée. Les titulaires de diplômes avancés apportent souvent une expertise spécialisée et une capacité analytique précieuse, pense Fatou M. Guèye, assistante de direction.
Cependant, cette approche présente également des limites. La surévaluation des diplômes peut éclipser des compétences tout aussi importantes, comme le leadership, l'innovation et l'expérience pratique. Elle peut également engendrer une élite technocratique déconnectée des réalités et des besoins de la population, analyse un assistant de ressources humaines dans un cabinet situé sur la VDN, B. Fall.
Pour un gouvernement réellement efficace, il est important de trouver un équilibre entre les qualifications académiques et les compétences pratiques. La reconnaissance des expériences de terrain, des capacités de gestion et des compétences interpersonnelles est essentielle pour compléter la formation académique des responsables publics, conseille-t-il.
Oumou Niang : ‘’Le recrutement dans l’Administration est trop politisé.’’
Contrairement au secteur public, le secteur privé sénégalais se distingue par des procédures de recrutement beaucoup plus rigoureuses et basées sur le mérite. Les entreprises privées suivent généralement des processus de sélection stricts, comprenant des évaluations techniques, des entretiens approfondis et des vérifications de références.
Directrice des ressources humaines dans une société de la place, Oumou Niang considère que le recrutement dans l’Administration est trop politisé. ‘’Le secteur privé est plus rigoureux que la Fonction publique où les recrutements se font sur la base du clientélisme politique, du lobbying ou de la familiarité… Les compétences ne sont pas les seuls critères. Alors que dans les structures privées, le mode de recrutement obéit à une procédure de sélection, de test écrit et d’entretien’’, soutient-elle.
Elle poursuit qu’il faut aussi une période d’essai de deux à trois mois pour un contrat.
Une thèse que confirme Doudou Diamé qui a postulé à plusieurs reprises dans une multinationale anglophone spécialisée dans la sécurité. ''J'ai été éliminé trois fois après avoir réussi les tests préliminaires et des cas pratiques... Ce n’est pas facile d'entrer dans ces boîtes ; elles sont exigeantes’’, nous confie-t-il.
En effet, les entreprises privées mettent l'accent sur les compétences techniques et les expériences professionnelles pertinentes. Les candidats doivent souvent passer par plusieurs étapes de sélection, y compris des tests de compétences, des entretiens comportementaux et des évaluations de performance. Ce processus rigoureux assure que les employés recrutés sont bien qualifiés pour les postes proposés, favorisant ainsi la productivité et la compétitivité des entreprises.
Un canevas très rare dans l’Administration. Pour expliquer cette dichotomie, le journaliste Moustapha Mbaye relève la différence qui existe entre ces deux mondes. ‘’L’Administration a une démarche différente de celle du privé qui n'est pas pris au piège par la politique, même si d'autres considérations sociologiques sont prises en compte. Le diplôme est la porte d'entrée, mais la compétence et le résultat demeurent les racines qui vous permettent de mieux vous implanter dans l'entreprise’’.
L'ENA et les corps militaires et paramilitaires…
Le plus grave dans cette pratique se trouve dans la Fonction publique locale (municipalité et mairie de ville, conseil régional ou départemental) où ‘’le clientélisme politique excessif a étouffé dans l’œuf toute compétence’’, nous confie un secrétaire municipal dans l’anonymat.
Malgré ce contexte de clientélisme, certaines institutions sénégalaises continuent de promouvoir des concours basés sur le mérite, garantissant ainsi une certaine transparence et équité dans le recrutement. L'École nationale d’Administration du Sénégal (ENA) est un exemple phare de cette méritocratie. Les concours d'entrée dans cette école administrative sont rigoureux et sélectifs, attirant les meilleurs talents du pays. Ces concours garantissent que seuls les candidats les plus qualifiés, ayant démontré leurs compétences académiques et professionnelles, accèdent à des postes dans la haute Administration publique.
Les recrutements dans les corps militaires et paramilitaires sont également basés sur des concours stricts et des critères de sélection rigoureux. Ces processus de recrutement sont conçus pour identifier les candidats les plus aptes physiquement et intellectuellement, assurant ainsi un haut niveau de professionnalisme et d'efficacité au sein des forces de défense et de sécurité.
Toutefois, la promotion à certains grades supérieurs entraine des guéguerres et des frustrations dans l’élite martiale.
Avec la promesse des appels à candidatures qui n’est pas encore tenue, le mode de recrutement dans la Fonction publique sénégalaise est toujours décrié par certains citoyens pour ses pratiques clientélistes. Pour eux, cette forme de favoritisme où les emplois publics sont distribués en fonction des affiliations politiques plutôt que des compétences et du mérite est une réalité persistante qui compromet l'efficacité et l'intégrité des institutions publiques. C’est pourquoi d’aucuns pensent que ces pratiques peuvent saper la méritocratie et alimenter un sentiment d'injustice parmi les citoyens.
Elles peuvent également engendrer une inefficacité bureaucratique, car les compétences professionnelles sont souvent négligées au profit de la loyauté politique. Le recrutement dans la Fonction publique sénégalaise est marqué par un dualisme frappant. D'une part, le clientélisme politique continue de prévaloir, entravant le développement d'une administration publique efficace et compétente. D'autre part, des concours méritocratiques comme ceux de l'ENA et des corps militaires et paramilitaires offrent des lueurs d'espoir pour un système de recrutement plus équitable.
En parallèle, une partie du secteur privé, avec ses procédures de sélection strictes et basées sur le mérite, pourrait servir de modèle pour réformer les pratiques de recrutement dans la Fonction publique. Une telle réforme serait essentielle pour renforcer l'efficacité des institutions publiques et restaurer la confiance des citoyens dans l'Administration. Singapour est un exemple patent.
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SONKO ANNONCE UN CHANGEMENT DE PARADIGME ÉDUCATIF
Langues locales dès la maternelle, plus de souplesse dans les filières, renforcement de l'anglais, réformes des programmes scolaires trop éloignés des besoins réels... Le Premier ministre dévoile ses ambitions de transformation de l'école au Sénégal
Le Premier ministre Ousmane Sonko a clairement affiché samedi ses ambitions pour refonder en profondeur le système éducatif sénégalais. Lors du Conseil interministériel consacré à cette question cruciale, il a martelé que "les Sénégalais doivent surtout s'éduquer, c'est essentiel pour le capital humain".
Dans un discours volontariste, Sonko a dressé un constat sans concession : "Nous connaissons les défis, ils sont colossaux que ce soit pour les infrastructures, les ressources humaines ou l'accompagnement social. Nous ne pouvons réaliser nos objectifs de développement sans résorber ces manques ".
La réforme phare annoncée est l'introduction généralisée des langues nationales dès la petite enfance avant d'apprendre le français et l'anglais. "Une partie de notre retard s'explique par le fait que nous voulons à bas âge imposer à nos enfants de s'alphabétiser dans des langues qu'ils ne peuvent pas", a martelé le Premier ministre, citant son "mentor" le président Macky Sall pour qui c'est "une souffrance très chère".
"Il ya que l'Afrique qui emprunte des langues étrangères pour essayer de les imposer. On perd entre 8 et 13 ans pour que l'enfant essaie de posséder cette autre langue, alors qu'au moment où il va à la maternelle il parlait déjà sa langue maternelle", a-t-il insisté.
L'apprentissage de l'anglais, "langue de communication internationale", sera également renforcé selon Sonko, mais sans faire fi des langues locales qui sont "une richesse et non un appauvrissement".
Autre chantier d'envergure, une révision en profondeur des programmes scolaires jugés trop chargés et éloignés du pragmatisme. "On met tout et rien finalement. Je me demande parfois à quoi a servi tout ce que j'ai appris du primaire à l'université", a lâché le chef du gouvernement.
Il a également plaidé pour plus de souplesse dans les filières, prenant l'exemple d'"élèves sortis avec un bac littéraire mais qui se sont retrouvés à faire des études de comptabilité ou d'économie appliquée".
Au passage, Sonko a lancé une pique aux "traditions héritées", se disant prête à s'inspirer de "modèles inspirants" à l'étranger comme au Japon ou au Rwanda. "Il faut sortir de notre zone de confort", at-il exhorté.
Dernier dossier brûlant, la nécessité de lutter contre "les négligences, voire les fraudes" dans la délivrance d'état civil, un "phénomène" auquel il veut "mettre fin définitivement avec fermeté".
par Moussa Sylla
POURQUOI DEVONS-NOUS LIRE ?
Je lance un plaidoyer fort en faveur des livres, car je sais qu’ils nous permettront de changer notre vie. Faisons le choix de lire, tout lire, même les livres qualifiés d’hérétiques. C’est ainsi que nous développerons la faculté de concentration
Les mémoires d’Abdoulaye Bathily, Passion de liberté, sont un pur délice de sagesse, d’érudition, d’élégance littéraire. J’ai pris plaisir à lire ce livre d’un trait, et très souvent, à le reparcourir à mes heures perdues, tant il contient des passages édifiants et inspirants.
Une histoire m’a particulièrement marqué, dans ces mémoires. Sa réussite au baccalauréat, dans des conditions qui montrent l’importance de la résilience.
Abdoulaye Bathily a été exclu de l’école pour mouvement séditieux (grève, insubordination). Aucune école ne voulut ensuite l’accepter, parce que des instructions avaient été données dans ce sens par le gouvernement. N’étant pas né dans une famille aisée, il n’avait pas les moyens de s’inscrire dans une école privée. Aussi décida-t-il de tenter sa chance au baccalauréat en tant que candidat libre.
Il travailla avec acharnement pour obtenir son baccalauréat, parallèlement à son emploi à l’Institut fondamental d’Afrique noire (IFAN). Le décès de son papa, quelques jours avant l’examen, ne le détourna pas de ses objectifs, car pour lui, lui rendre hommage revenait à réussir au baccalauréat, tant son père avait insisté pour qu’il étudiât. Il atteignit son objectif en obtenant le diplôme avec la mention Bien.
À la lecture de ce passage, je m’arrêtai pour me poser des questions : comment certaines personnes, devant certaines situations, se métamorphosent-elles pour développer leur potentiel ? Elles ne se plaignent pas, elles n’attribuent pas leurs difficultés du moment à d’autres et prennent la responsabilité de leur destin. D’autres, cependant, se plaignent, accusent le monde entier, ne se demandent pas : « Comment puis-je améliorer ma situation, que dois-je faire dans ce sens ? »
Telle est la magie des livres ; ils sont un moyen de s’élever, ils représentent la voie par excellence pour retrouver espoir et apprendre des devanciers. La lecture de biographies et de mémoires me conforte toujours sur ce point de vue. Tandis que la plupart des gens pensent que la trajectoire des personnes célèbres est linéaire, une lecture attentive de leurs mémoires ou biographies révèle que tel n’est pas le cas.
Très souvent, elles ont connu ces doutes et découragements qui sont des choses normales dans toute existence humaine. Cependant, la différence entre les personnes qui atteignent leurs objectifs et s’élèvent au sommet et celles qui connaissent un destin moyen est souvent la persistance ou le renoncementface aux difficultés.
Quand je discute avec des personnes plus jeunes que moi, je mets toujours l’accent sur l’importance de la lecture. Je leur conseille, si elles veulent changer positivement leur vie, de lire, beaucoup, et tout lire.
Avec l’avènement puis la prépondérance des réseaux sociaux, nos cerveaux sont en train d’être remodelés. Ils sont en proie à une attention et à une concentration faibles, à l’ennui persistant. Or, la pensée en profondeur facilite grandement la réussite, comme le défend Nicolas Carr dans son livre TheShallows, ou encore Cal Newport dans son livre Deep Work, sous-titré, Retrouver la concentration dans un monde de distractions.
Dans son livre précité, Cal Newport écrit : « Il est important de mettre l’accent sur l’omniprésence en profondeur chez les personnes influentes, car cela contraste violemment avec le comportement de la plupart des travailleurs du savoir — un groupe d’individus qui est en train d’oublier ce que peut apporter le fait d’approfondir les choses. »
Cette pensée de Cal Newport montre ce qu’il faut faire pour progresser dans sa carrière. C’est adopter délibérément la pensée profonde, la réflexion, refuser la superficialité. L’acquisition de ces qualités est facilitée par les livres. Dans ce sens, ils permettent d’accélérer sa carrière et d’atteindre plus facilement ses objectifs.
Les périodes les plus fécondes de ma vie ont été celles où j’ai adopté délibérément la réflexion profonde. Pendant des années, j’étais absent de tous les réseaux sociaux. Ce furent des années très productives, pendant lesquelles j’ai beaucoup publié et acquis les bases me facilitant l’écriture. Je suis revenu aux réseaux sociaux, mais m’évertue à ne pas me laisser dominer par eux. La lecture est l’une des armes favorites pour y parvenir.
Aujourd’hui, je déplore que le Sénégal ne dispose toujours pas d’une bibliothèque nationale. Dans un pays d’écrivains talentueux, cela est un scandale. Je n’ai rien contre le sport, que j’adore, mais qu’il y ait autant de stades et une arène nationale pour la lutte mais qu’il n’y ait toujours pas de bibliothèque nationale montre que notre pays ne se donne pas les chances de se développer. Se doter d’une bibliothèque nationale serait un énorme symbole, montrant que le Sénégal a compris que dans le monde d’aujourd’hui, le savoir prime, et un pays qui y investit avance(ra) plus rapidement.
Le Sénégal devrait également faciliter l’accès aux livres en construisant, comme je l’ai écrit plus haut, une bibliothèque nationale et en dotant ses terroirs de bibliothèques. Cela démocratisera le livre et contribuera à améliorer l’égalité des chances dans notre pays. Parfois, si les jeunes ne lisent pas, c’est parce qu’ils n’ont pas les moyens d’acheter des livres. Ces derniers coûtent cher et ne sont pas à la portée de tout le monde. Je me rappelle qu’il y a quelques années, je cherchais les livres qui me plaisaient sur des sites internet douteux, car je n’avais pas toujours les moyens de les acheter.
Si l’accès aux livres n’est pas facilité au Sénégal, l’inégalité des chances y persistera, avec ceux et celles qui ont les moyens de s’en procurer et ceux et celles qui ne les ont pas. Le devoir de l’État est d’y remédier, afin que chaque personne qui veuille lire puisse le faire.
À un niveau individuel, nous devons comprendre les bénéfices que nous apportera la lecture. Elle nous permettra d’avancer plus rapidement dans notre carrière ou dans notre projet d’entrepreneuriat, de devenir de meilleures personnes, tolérantes et ouvertes d’esprit. Je soupçonne que les lecteurs sont en moyenne plus tolérants que les non-lecteurs.
La sirène des réseaux sociaux est tentante. Ils donnent accès aux gratifications instantanées, au neuf. Mais de là vient leur danger. Ils nuisent à ces qualités primordiales à la réussite que sont la pensée profonde, la réflexion délibérée, la capacité de s’ennuyer. Leurs fondateurs, connaissant leurs risques, refusent leurs conséquences négatives pour eux et leurs enfants en se déconnectant. Que font-ils à la place ? Ils lisent.
Suivons leur exemple et lisons. Les civilisations prospères sont des civilisations de savoir, de connaissance. Les personnes les mieux rémunérées aujourd’hui sont celles qui maîtrisent le mieux leur domaine. Cela a un coût, comme la gratification différée. Dans le cas du livre, ses effets positifs ne se remarqueront pas d’emblée. Ils prendront du temps, mais quand ils commenceront à se manifester, nous penserons que nous aurions dû lire davantage.
Si tout le monde passe son temps libre à surfer sur les réseaux ou à regarder la télévision, il n’y a aucun avantage comparatif si nous aussi le faisons. Cependant, si nous choisissons la concentration et refusons la distraction que facilite le fait de surfer sur internet, nous nous donnons des avantages qui seront décisifs, nous distingueront et faciliteront l’atteinte de nos objectifs.
Je lance un plaidoyer fort en faveur des livres, car je sais qu’ils nous permettront de changer notre vie. Faisons le choix de lire, tout lire, même les livres qualifiés d’hérétiques. C’est ainsi que nous développerons la faculté de concentration et acquerrons la capacité de tolérance. Cela vaut un essai, dès maintenant.
À nos livres !
Moussa Sylla est auteur du livreLa conformité bancaire au Sénégal et dans la zone UMOA.
LA HAVANE RÉCLAME À WASHINGTON SON RETRAIT DE LA LISTE DES COMMANDITAIRES DU TERRORISME
Le ministère cubain des Relations extérieures indique que Cuba, non seulement ne commandite pas le terrorisme international, mais qu’elle en est victime, y compris du terrorisme d’État, comme le sait pertinemment l’administration américaine - DÉCLARATION
Alors qu'il n'a pas été inclus dans le dernier rapport américain, Cuba reste classé comme Etat "commanditaire du terrorisme" par les Etats-Unis. Dans sa déclaration, le ministère cubain souligne le caractère arbitraire et infondé de cette désignation.
"Déclaration du ministère cubain des Relations extérieures
D’après des informations officielles en provenance des Etats-Unis, le secrétaire d’État a, le 15 mai 2024, remis au Congrès une nouvelle mouture d’un des rapports ciblant normalement des pays, d’une manière arbitraire, sans le moindre mandat ni la moindre reconnaissance de la communauté internationale. En l’occurrence, ce rapport liste quatre pays qui, censément, « ne coopèrent pas à fond avec les efforts antiterroristes des Etats-Unis durant l’année civile 2013 ». À la différence des années précédentes, Cuba ne fait pas partie de cette liste calomnieuse.
N’empêche que le département d’État continue de la maintenir, comme État censément « commanditaire » du terrorisme international, sur cette liste absolument unilatérale, dénuée de tout fondement, qui ne vise qu’à calomnier et qui sert de prétexte à l’administration étasunienne pour adopter des mesures économiques coercitives contre des États souverains, comme celles qu’elle applique impitoyablement à notre pays.
Or, non seulement le peuple cubain et de nombreux gouvernements latino-américains et caribéens, mais des organisations politiques, sociales et religieuses et différents hommes politiques des Etats-Unis ne cessent de réclamer haut et fort, de manière réitérée, que l’administration étasunienne rectifie cette injustice.
En effet, il est absolument clair et évident que Cuba, non seulement ne commandite pas le terrorisme international, mais qu’elle en est victime elle-même, y compris du terrorisme d’État, comme quiconque s’intéresse à la question peut le constater, et comme le savent pertinemment l’administration étasunienne, son département d’État, sa police et ses agences de renseignements, qui savent tout autant – puisque c’est la raison d’être de cette liste – les extraordinaires préjudices que causent à l’économie cubaine les mesures, les actions et les rétorsions qui se déclenchent automatiquement contre tout État inscrit sur cette liste, que ce soit vrai ou faux.
Cuba – et ce n’est pas tout de le reconnaître – coopère à fond non seulement avec les Etats-Unis, mais avec l’ensemble de la communauté internationale. C’est là une vérité bien connue, même si l’on tente de confondre l’opinion publique. Le président des Etats-Unis dispose de toutes les prérogatives requises pour agir honnêtement et faire ce qui est correct."
Par Abdoul Aziz TALL
L’ADMINISTRATION PUBLIQUE, FONDEMENT DE L’ÉTAT
A tous ceux qui s’impatientent, en exigeant des résultats dans l’immédiat, il y a plus ou moins lieu d’expliquer que la nomination d’un gouvernement n’est que le début d’un long processus qui comporte plusieurs étapes à franchir
L ’Etat désigne l'ensemble des institutions et des services qui permettent de gouverner et d'administrer un pays : les Assemblées, Ministères, Directions, Délégations, Administrations déconcentrées ou décentralisées sont les principales composantes de l’Etat. L’Etat est le fondement de la Nation, laquelle se définit par une communauté humaine ayant conscience d'être unie par une identité historique, culturelle, linguistique ou religieuse. En tant qu'entité politique, la Nation, qui est un concept né de la construction des grands Etats européens, est une communauté caractérisée par un territoire propre. Elle est la personne juridique constituée d’individus régis par une même constitution.
Le fondement et la pérennité d’un Etat résident dans la qualité de son Administration, tant il est vrai que la manière dont fonctionne une Administration constitue un puissant indicateur du niveau d’organisation et de développement d’un pays. A titre illustratif, aux États-Unis d’Amérique, le terme «Administration américaine », renvoie à cette organisation imposante et bien articulée, en quête permanente d’efficacité et d’efficience. Elle est l’expression de la garantie du droit des citoyens et du respect des fondements de la Démocratie. Partant de ces considérations, un régime qui vient à peine de s’installer, doit prendre ses marques et fixer ses repères. Sans compter bien d’autres préalables nécessaires à l’entame effective de l’œuvre colossale en vue.
En dépit de cette réalité structurelle, certains de nos compatriotes anticipent plus ou moins sur la critique, alors que le nouveau dispositif de l’Administration n’a même pas encore fini de se déployer. Or, quelle que soit la légitimité du désir de rupture, celle-ci ne peut s’opérer qu’à des conditions suivant des étapes à franchir nécessairement.
A tous ceux qui s’impatientent, en exigeant des résultats dans l’immédiat, soit par ignorance ou simplement par l’expression prématurée d’une adversité politique, il y a plus ou moins lieu d’expliquer que la nomination d’un gouvernement n’est que le début d’un long processus qui comporte plusieurs étapes à franchir. Etapes dont la délicatesse est plus qu’avérée.
En premier lieu, il y a l’élaboration du décret portant répartition des services de l’Etat et du contrôle des établissements publics, des sociétés nationales et des sociétés à participation publique entre la Présidence de la République, la Primature et les ministères . Cette étape cruciale relève d’une tâche extrêmement ardue , dans la mesure où la préoccupation du décideur est d’éviter d’emblée toute omission de structure. Mais également tout chevauchement d’attributions de nature à créer des conflits de compétences entre les différents départements ministériels. A titre de rappel historique, des corrections ou réajustements ont été déjà apportés après la parution d’un décret et à l’épreuve de la réalité du fonctionnement des ministères.
A ce propos, le BOM, sur invite du Président de la République a eu à fournir par le passé des éléments de prise de décision en vue d’arbitrer des conflits de compétences entre départements ministériels.
Ce travail de répartition des services de l’Etat représente ainsi une tâche bien délicate. Tâche qui ne saurait souffrir de la moindre précipitation ou tâtonnement de la part de l’autorité. Un tel exercice atteint sa plénitude dans la formation d’un nouveau gouvernement où plusieurs ministères ont été regroupés pour former un seul département.
Dans une seconde étape, le choix des compétences appelées à assumer des responsabilités et missions étatiques, exige autant d’attention, de prudence et de sérénité. Une autre tâche à la fois délicate et ardue, notamment pour une nouvelle administration qui se déploie, avec pas moins de deux cents postes stratégiques à pourvoir. Le choix des responsables devant obéir à des critères de compétences certes, mais aussi de bonne moralité. Ce qui implique nécessairement des enquêtes préalables aux nominations des personnes pressenties.
En troisième lieu, les passations de service qui concernent tous les ministères et pratiquement toutes les directions nationales et les Agences, doivent s’effectuer obligatoirement et pour l’essentiel, sous la supervision de l’Inspection Générale d’Etat. Pour chaque structure, un procès-verbal est dressé et soumis aux autorités concernées.
Au risque de provoquer des tares congénitales avec un impact négatif sur l’efficacité et l’efficience attendues du nouveau régime, aucune étape de ce processus ne saurait souffrir d’une quelconque précipitation.
Au regard de tout ce qui précède, vouloir exiger des résultats ici et maintenant, relève d’un empressement qui dénote d’une certaine méconnaissance du fonctionnement d’une administration publique.
Dans certaines grandes démocraties comme c’est le cas aux Etats-Unis d’Amérique, la mise en place d’une administration peut prendre plusieurs mois après l’installation d’un nouveau Président. Cela, en raison de toutes les précautions d’usage prises avant la nomination de ceux que l’ont appelle les « Hommes du Président ».
Voilà les raisons majeures qui expliquent la notion de « délai de grâce » des cent (100) jours, afin de permettre à toute nouvelle administration de prendre ses marques et de mieux apprécier « la température institutionnelle ».
Ce « délai de grâce » résulte d’un « gentleman agreement » entre le pouvoir et l’opposition qui, si farouche soit elle, s’abstient durant cette période, d’exiger des nouvelles autorités des réalisations immédiates, sachant qu’une telle démarche à ce stade relèverait plutôt de l’utopie. Aucune pression, de quelle que nature que ce soit , ne devrait entraîner les nouvelles autorités dans la précipitation, l’improvisation ou le tâtonnement.
Cette étape décisive exige de leur part calme et sérénité. Les citoyens qui les ont élues doivent aussi s’armer de patience et faire preuve d’un esprit positif tout en gardant à l’esprit cette maxime de feu El Haadj Abdoul Aziz Sy Dabbaakh (RTA) , nous invitant de toujours prier afin qu’aucun malheur ne vienne frapper le bateau dans lequel nous sommes tous embarqués.
*Début d’une série d’entretiens et de contribution, cette tribune est signée Abdoul Aziz TALL, conseiller en management public et ancien ministre de la République. Il livre sa part d’expérience des processus décisionnels et des leviers de transformation sociale et politique
Par Fadel DIA
PAS EN MON NOM
Nous ne pouvons pas brandir la Téranga d’une main et de l’autre pointer un doigt accusateur contre les étrangers vivant chez nous. Sauf à offrir en victimes expiatoire nos compatriotes devenus boucs émissaires pour Le Pen et Zemmour
Au plus fort des fanfaronnades et des élucubrations de Donald Trump, quand le président américain insultait et menaçait les élites et les minorités de son pays, les Etats pauvres d’Afrique et même ses alliés européens, une partie de l’opinion américaine, intellectuels, artistes, hommes et femmes politiques, défenseurs des droits de l’Homme, avaient répondu à ses dérives verbales par ce slogan devenu vite populaire : «Pas en mon nom !»
C’était une façon de se désolidariser de Trump, de dire qu’il ne parlait qu’en son seul nom et que ses prises de position n’engageaient pas l’ensemble du peuple américain.
C’est une habitude que nous devrions prendre chaque fois qu’un de nos concitoyens s’érige en imprécateur et prétend s’exprimer au nom du « peuple ». L’énergumène qui profère des insanités sur une composante ethnique bien ciblée et à travers des réseaux sociaux complaisants qu’il a transformés en Radio des mille Collines, n’est heureusement pas président de la République et n’a même aucune légitimité à s’exprimer au nom des Sénégalais. Il n’en reste pas moins que ses propos sont dangereux pour de multiples raisons et que quand on ouvre la boite de Pandore on ouvre la porte à tous les démons. Ce sont des propos dangereux parce qu’il donne à croire qu’ils participent à notre nécessaire reconquête nationale et qu’ils s’inscrivent dans les changements promis par les nouveaux dirigeants du pays. Parce qu’il remet en cause ce que Senghor avait appelé « notre commun vouloir de vie commune » et qu’il sape les fondamentaux de notre héritage historique. Parce que ce sont les propos d’un ignorant et que l’ignorance, qui est le pire défaut des hommes, est toujours source de violence et de désordre.
S’il avait fait l’effort de consulter nos archives, et c’est sans doute trop lui demander, fait l’analyse de ce que les Congolais appellent « bisso na bisso », le « nous en nous-mêmes »,il aurait appris que ce qui a fait la différence entre notre pays et plusieurs autres pays africains quand les Européens nous ont imposé des frontières artificielles, c’est que depuis près de trois siécles, des hommes et des femmes issus du patchwork culturel et ethnique de ce qui deviendra le Sénégal ont appris non seulement à vivre ensemble, mais aussi se sont alliés pour combattre les mêmes périls, sans qu’aucun d’entre eux n’ait été sommé de renier ses origines. Cela avait commencé à Saint-Louis et l’un des premiers recensements de la population de la vieille cité, sans doute l’un des premiers recensements nominatifs réalisé au sud du Sahara, y révèle l’existence, au milieu du XVIIIe siècle, d’un incroyable melting pot où se côtoient des gens issus de toutes les ethnies, des Fall, des Diaw, mais aussi des Gomis et des Sène venus du sud, des Anne et des Kane venus de l’est, et même des Sidibé venus de plus loin encore. Plus tard, vers la fin du XIXe siècle et au début du XXe, quand Saint-Louis était au faîte de sa gloire, capitale de l’AOF ou principale métropole du Sénégal, elle a compté un maire puis président du Conseil Colonial né Diarra, un cadi Anne et au sein de sa jeunesse dorée, celle qui se battait pour l’émergence d’un « Jeune Sénégal », certains des premiers rôles étaient tenus par des hommes qui avaient pour patronymes Diouf (Ngalandou) ou Traoré (Thiécouta). Saint-Louis fut la première cité sénégalaise à abriter, à quelques centaines de mètres l’une de l’autre, une église et une mosquée, toutes en dur, toujours debout, la première aura bientôt deux siècles et la seconde a près de cent soixante-dix ans.
C’est toute cette histoire qui explique que, dans les années précédant notre indépendance, les Sénégalais aient préféré donner la majorité de leurs voix à Senghor, sérère et chrétien, plutôt qu’à Lamine Guèye, wolof et musulman.
L’énergumène qui déverse ses injures contre ceux qu’il appelle « Peuls Fouta », appellation absurde car il n’y a pas qu’un Fouta, ignore aussi, et c’est impardonnable parce qu’il s’agit cette fois d’actualité, que les Sénégalais ont des semelles de vent, qu’ils ont toujours été de grands voyageurs devant l’Eternel et que, pour ne nous en tenir qu’au continent africain il n’y a pas, de Johannesburg à Casablanca,, une seule grande métropole qui n’ait pas sa colonie sénégalaise. Depuis des siècles des gens partis des territoires qui composent le Sénégal d’aujourd’hui sillonnent le monde, à la recherche de la gloire de la richesse ou du mieux-être. Certains d’entre eux avaient réussi à créer des royaumes et des empires à des milliers de kilomètres de leur lieu de naissance, d’autres plus modestes, ont enseigné la bijouterie en filigrane aux Djiboutiens, fait gouter au monde le ceebu jenn quand il n’était pas encore inscrit au patrimoine de l’Unesco, servi de courtiers à Bangkok, participé à l’exploitation de mines d’or ou de pierres précieuses au Congo, à Madagascar ou au Mozambique. Des Sénégalais sont présents dans les souks d’Istanbul, sur les chantiers de Tokyo, ils exercent des métiers à risques sur les plages d’Italie et sur les places de Montmartre, ou se livrent à des activités moins avouables à Manhattan. Avant de découvrir la route du Nicaragua, ils étaient présents en Argentine et au Brésil et comme on ne prête qu’aux riches, un quartier de Harlem porte le nom de Little Sénégal. Il n’est pas exclu qu’il y ait un jour en Chine un « ToubaGuangzhou », si ce n’est déjà fait !
Rappelons enfin que des hommes et femmes, issus de pères sénégalais et musulmans, ont exercé ou exercent d’éminentes responsabilités dans leurs pays d’adoption : vice-président de la République Démocratique du Congo, membre du staff des campagnes électorales de Barak Obama, chef du plus vieux parti politique de Cote d’Ivoire et, à trois reprises au cours des vingt dernières années, ministres de la République française! C’est l’honneur du Sénégal que son premier président ne se soit jamais adressé à la Nation, dans les grandes occasions, sans saluer « les hôtes étrangers qui vivent parmi nous ». La question que nous devrions nous poser ce n’est donc pas de savoir s’il faut expulser ces hôtes, dont certains sont devenus des citoyens à part entière, mais de nous demander à quoi nous devons ce privilège que jamais des Sénégalais n’ont été victimes d’expulsions massives et ciblées dans les pays qui les avaient accueillis et où ils ont fait leurs trous. Nous ne pouvons pas brandir la Téranga d’une main et de l’autre pointer un doigt accusateur contre les étrangers qui vivent chez nous, sauf si on veut offrir en victimes expiatoire nos compatriotes devenus les boucs émissaires sur lesquels Marion Le Pen et Éric Zemmour font reposer tous les malheurs de la France! C’est tout à l’honneur de notre pays que d’avoir toujours su accueillir avec bienveillance des hommes et des femmes fuyant l’injustice, la misère ou la guerre, et même d’avoir offert l’asile à d’autres, moins humbles, aux motifs plus contestables, parmi lesquels deux ont trouvé la paix dans ses cimetières…
Ceux qui distillent la haine et propagent des mensonges et des affabulations doivent d’abord être traduits devant la justice et, pour le moins, bannis des médias. Mais cela ne doit pas empêcher les Sénégalais, citoyens ordinaires ou hommes et femmes qui ont une parcelle de pouvoir, religieux, politique, coutumier, de clamer haut et fort qu’ils ne parlent pas en leur nom. Enfin, il est important que les nouvelles autorités qui nous gouvernent ne commettent pas l’erreur commise par leur prédécesseur qui avait manqué à ses responsabilités de « Gardien de la Constitution » en ne démettant pas de ses fonctions ministérielles un maire qui avait tenté de mettre à mal la cohésion nationale. Il est nécessaire et urgent qu’elles rappellent à tous ceux qui comme l’énergumène dont il est question ici se font une interprétation personnelle des « changements systémiques » qu’elles ont promis, que ceux-ci ne consistent pas seulement à nous défaire de nos mauvaises habitudes mais qu’elles visent aussi à préserver nos vraies valeurs. Parmi celles-ci il y a ce que nous appelons couramment « Téranga », pas celle qui n’est que paroles doucereuses et falbalas, mais celle qui est expression de générosité, de tolérance et de respect de l’autre et qui est une richesse plus précieuse et plus durable que l’or de Kédougou ou le pétrole de Sangomar qui font saliver tant de Sénégalais !