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23 avril 2025
Diaspora
par Ibrahima Thioye
ENVIE ET JALOUSIE
Ces émotions, aussi honteuses soient-elles, sont le terreau fertile de grandes réalisations comme des pires bassesses. Voyage au cœur de ces sentiments complexes qui font de nous des êtres profondément humains
1. L’envie et la jalousie sont des émotions sociales complexes.
2. L’envie est une haine mêlée de souffrance qui pousse l’individu à se réjouir du mal d’autrui et à se contrister de son bien, car tout ce qu’il aspire à être, mais n’est pas, se trouve chez l’autre ; elle suppose une constante comparaison entre sa propre situation et celle des autres, qui l’amène à constater son infériorité. Il existe plusieurs types d’envie : l’envie admirative ou émulative, l’envie hostile, l’envie dépressive (1).
3. La jalousie est une haine envers l’être ou la chose aimés (fluctuation entre amour et haine), jointe à l’envie envers l’autre. Elle s’extériorise au début par la peur de perdre cet être, cette chose ou cet avantage que l’on a et qu’on considère comme précieux. Lorsque cette perte devient réelle, d’autres émotions, découlant de cette jalousie, s’emparent de la personne.
Exemple : dans ma contrée, j’avais le plus beau cheval, mais récemment, mon voisin s’est offert un pur-sang d’une beauté sublime. J’éprouve un sentiment mêlé d’amour et de haine ou d’indifférence envers mon cheval, qui ne me procure plus cette fierté qu’il me donnait, et en même temps j’envie le voisin pour sa belle acquisition.
4. On envie souvent le bonheur et les biens d’un autre ; on est jaloux des biens, êtres ou avantages que l’on souhaite conserver. Ces deux émotions sociales, étroitement liées, entraînent dans leur sillage d’autres émotions simples : tristesse, colère, peur et honte.
Exemple : Mamadou est envieux des cadeaux reçus par sa petite sœur et est jaloux de la part d’attention parentale qu’il est en train de perdre. De même, dans l’exemple précédent, j’envie mon voisin pour sa belle acquisition et je suis jaloux de l’admiration que suscitait mon cheval, qui s’est déplacée ou que je dois partager avec mon voisin.
5. On parle de la morsure de l’envie et du flash de la jalousie.
6. La mauvaise nouvelle est que nous avons tous éprouvé ces deux émotions d’une manière ou d’une autre (par la morsure de l’envie ou le flash de la jalousie), mais selon des modalités différentes : pour certains, la promotion fulgurante du voisin de bureau a provoqué une déprime de cinq minutes ; pour d’autres, cela a engendré plusieurs nuits d’insomnie. Nous trouvons ces émotions tellement honteuses que rares sont ceux qui font l’aveu de les avoir ressenties ; certains ont l’envie comme passion dominante (ce sont des personnes sensibles, capables de ressentir une gamme assez large d’émotions sans les réprimer ou les refouler).
7. La bonne nouvelle est que par l’éducation ou grâce à un travail intérieur, ceux qui ont l’envie comme passion dominante peuvent acquérir une maîtrise telle que celle-ci s’exprime avec moins d’intensité, tant sur le plan du ressenti que sur celui du comportement et/ou de la réflexion.
8. C’est surtout dans le milieu de l’art que l’on rencontre des personnes animées par ces passions, car l’artiste ressent généralement (et sans répression) toute la palette des émotions ; l’envie et la jalousie constituent des moteurs puissants pour ces expériences émotionnelles, qui sont souvent le prélude à la créativité artistique. Les œuvres d’art sont fréquemment le résultat de la sublimation de ces émotions réprouvées. C’est comme si la production de lumière (œuvre d’art) était précédée d’un plongeon dans l’obscurité (les émotions difficiles).
9. Une caractéristique de l’individu envieux : il s’intéresse aux tares/défauts ou avantages/atouts des autres ; il divulgue en permanence les faiblesses d’autrui. Parfois, par stratégie, il peut aussi faire l’inverse : parler des réussites des autres pour dissimuler son comportement honteux.
Une caractéristique de l’individu peu envieux : il est indifférent et peu intéressé aux tares/défauts ou avantages/atouts des autres ; mais cela peut cacher un narcissisme très développé ou une grande maturité psychologique.
10. Utilité de ces deux émotions : au niveau individuel, ces émotions poussent à l’action, à la créativité et même à l’excellence (l’envie émulative/admirative est plus ou moins promue dans la société ceddo qui encourage l’idée de ne pas être en reste ou de faire moins que son nawle, ou pair). Au niveau social, un groupe intégrant davantage d’envieux et de jaloux est souvent plus propice à la créativité et à la survie, à condition que ses membres soient canalisés pour éviter l’implosion.
11. Nocivité de ces deux émotions : l’envieux souffre énormément, surtout lorsqu’il s’agit de l’envie hostile ou de l’envie dépressive ; le jaloux, lorsque sa jalousie devient maladive et étouffante, a tendance à chosifier son conjoint ou sa conjointe, rendant ainsi la relation très difficile.
12. Gestion de ces émotions : a/ Reconnaitre ces émotions ; b/ les exprimer ou les tenir secrètes (selon le contexte) ; c/ réfléchir sur les sentiments d’infériorité sous-jacents (il y a un travail sur l’estime de soi qui doit accompagner ce processus) ; d/ arrêter les comparaisons, valoriser ce qu’on a, faire preuve de gratitude, s’accepter comme on est, etc.
Pour des définitions précises, voir le livre de François Lelord et Christophe André : La force des émotions.
Les Wolofs disent ñee : envier avec certainement moins de haine (envie émulative)
Ils disent aussi aññane : envier avec certainement plus de haine (envie hostile)
Ibrahima Thioye est Consultant en développement personnel.
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TIKTOK ET LE MIRAGE DE LA MIGRATION
Chaque jour, des dizaines de jeunes sénégalais quittent tout, hypnotisés par les sirènes numériques d'une meilleure vie en Europe. Mais derrière les filtres et la musique entraînante se cache une traversée mortelle
Les réseaux sociaux ont changé la façon dont les gens migrent. Au Sénégal, de nombreux jeunes utilisent TikTok pour entrer en contact avec ceux qui sont arrivés avec succès en Espagne. Mais la route à travers l'Atlantique est souvent beaucoup plus difficile que ce qui est présenté en ligne.
Ce film suit deux amis essayant de réaliser leur rêve européen.
OFFENSIVE CONTRE LES PASSEURS
"C'est à cause de gens comme vous que les drames de l'immigration se succèdent. Vous tuez nos fils". À Mbour, une récente audience a révélé les destins brisés des migrants et la détermination des autorités à endiguer le phénomène
(SenePlus) - Le tribunal de grande instance de Mbour, à 70 km au sud-est de Dakar, est devenu le théâtre d'une lutte acharnée contre le trafic de migrants. Dans un contexte marqué par des tragédies successives en mer, la justice sénégalaise serre la vis face aux réseaux de passeurs, comme le rapporte Le Monde dans un récent article.
Le 24 septembre, un public particulièrement tendu à mis en lumière l'ampleur du phénomène. Des personnes ont défilé à la barre pour diverses accusations liées au trafic de migrants. Le procureur, visiblement ému par les récents drames, n'a pas mâché ses mots : "C'est à cause de gens comme vous que les drames de l'immigration se succèdent. Vous tuez nos fils et vous voulez continuer votre vie comme si de rien n'était."
Cette audience intervient dans un contexte dramatique. Deux jours plus tôt, 38 corps sans vie étaient découverts à bord d'une pirogue à la dérive au large de Dakar. Face à ces tragédies répétées, le président Bassirou Diomaye Faye a annoncé une "traque sans répit" des passeurs et la mise en place d'un numéro vert pour les dénoncer, souligne le journal français.
Les chiffres témoignent de l’intensification de la lutte contre ce fléau. Selon la Division nationale de lutte contre le trafic des migrants (DNLT), citée par Le Monde, le nombre d'interceptions de pirogues a plus que doublé en un an, passant de 25 en 2023 à 61 au premier semestre 2024. Les passeurs ont également connu une hausse significative, de 127 à 210 sur la même période.
Le commissaire Omar Boun Khatab Guèye, à la tête de la DNLT, explique au Monde la complexité des réseaux : "Dans une filière, il existe au moins quatre types de profil : des recruteurs, des hébergeurs, l'organisateur et les capitaines." Cette structure élaborée rend la tâche des autorités particulièrement ardue.
Malgré l'existence d'une loi prévoyant des peines allant de cinq à dix ans d'emprisonnement, certains observateurs, comme l'avocat Oumar Sène interrogé par Le Monde, estiment que les sanctions actuelles ne sont pas assez dissuasives. Il plaide pour une criminalisation du trafic de migrants avec une période de sûreté de dix ans.
LE POUVOIR FAIT BLOC AUTOUR DE CHEIKH OUMAR DIAGNE
L'intellectuel musulman, aux positions jugées provocatrices, bénéficie du soutien tacite du pouvoir malgré les critiques. Pour l'entourage de Diomaye Faye, il est victime de manœuvres visant à déstabiliser le président
(SenePlus) - Au cœur du palais présidentiel, un homme cristallise les tensions et les débats : Cheikh Oumar Diagne. Directeur des moyens de la présidence, cet intellectuel musulman se retrouve sous le feu des critiques de l'opposition et des grandes confréries soufies du pays. Dans un entretien accordé au Monde, il défend ses positions et sa vision d'un Islam ouvert au débat.
Surnommé "maître" par ses collègues en référence à son érudition religieuse, Diagne ne cache pas ses convictions. "Je suis soufi", affirme-t-il, tout en revendiquant le droit de débattre avec les marabouts et de discuter "de l'œuvre terrestre et humaine des figures des confréries". Cette posture, rare au Sénégal, lui vaut l'hostilité des communautés mouride et tidjane, qui l'accusent de propos irrespectueux envers leurs grandes figures.
Son parcours atypique, de l'opposition au cœur du pouvoir, intrigue. Ancien détenu politique sous le régime de Macky Sall, il a côtoyé l'actuel président Bassirou Diomaye Faye en prison. "Il m'a fait forte impression. Je me suis décidé à soutenir sa campagne dès que nous serons libérés", confie-t-il.
Malgré les controverses, Diagne assume ses positions. "Je n'ai rien contre le qualificatif d'islamiste", déclare-t-il, proposant même la création de "tribunaux religieux à côté des tribunaux laïcs". Ces déclarations alimentent les critiques de l'opposition, qui voit en lui une menace pour la laïcité de l'État.
Face aux accusations, l'entourage présidentiel temporise. "L'opposition cherche à nuire au président et cherche des angles d'attaque. Il en est devenu un", murmure-t-on au sein du parti présidentiel Pastef.
QUAND ALPHA OUMAR KONARÉ RETRAÇAIT L'ODYSSÉE CENTENAIRE DE MAKHTAR MBOW
Dans un discours empreint d'émotion et de respect, l'ancien président du Mali a retracé le parcours exceptionnel de l'ex-patron de l'Unesco, évoquant ses racines familiales, ses amitiés, et son impact sur la scène internationale
L'ancien président malien Alpha Oumar Konaré a rendu un hommage poignant et personnel à Amadou Makhtar Mbow, figure emblématique de l'UNESCO, intellectuel et Sénégalais de renom, à l'occasion de son 100e anniversaire en mars 2021.
Dans un discours empreint d'émotion et de respect, Konaré a retracé le parcours exceptionnel de Mbow, évoquant ses racines familiales, ses amitiés, et son impact sur la scène internationale. Cet hommage, prononcé quelques années avant le décès de Mbow ce mardi 24 septembre 2024, offre un aperçu touchant de la vie d'un homme qui a marqué l'histoire de l'Afrique et du monde.
AMADOU TIDIANE WONE NOMMÉ MINISTRE-CONSEILLER À LA PRÉSIDENCE
L'écrivain, essayiste et ancien ministre de la Culture est connu pour son engagement culturel et sa réflexion sur l'identité sénégalaise. Cette nomination s'inscrit dans une restructuration plus large de l'équipe présidentielle,
(SenePlus) - Le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye continue le renforcement de son équipe. Il a ainsi nommé, par décret n°2024-2083 signé le 20 septembre 2024, Amadou Tidiane Wone, Ministre-Conseiller à la présidence de la République.
Amadou Tidiane Wone, figure intellectuelle respectée au Sénégal, apporte une expérience riche et variée à ce poste. Écrivain, essayiste et ancien ministre de la Culture, il est connu pour son engagement dans le domaine culturel et sa réflexion sur l'identité sénégalaise. Son parcours inclut également des responsabilités au sein de l'UNESCO, où il a œuvré pour la promotion du patrimoine culturel africain.
Cette nomination pourrait signaler une volonté du président Faye de placer la culture et l'identité nationale au cœur de sa politique. L'arrivée de Wone à la Présidence apporte une dimension intellectuelle et culturelle à l'équipe présidentielle, probablement en vue d'influencer la vision et la stratégie du gouvernement dans ces domaines.
LE CUDIS SALUE LA CRÉATION D'UNE DIRECTION DES AFFAIRES RELIGIEUSES
L'organisation s'est engagée à accompagner pleinement le Dr Dramé dans ses missions, qui incluent l'écoute des autorités religieuses et l'amélioration des relations entre l'État et les différentes communautés religieuses
(SenePlus) - Le Cadre Unitaire de l'Islam au Sénégal (CUDIS) vient d'exprimer son enthousiasme face à une décision majeure du président Bassirou Diomaye Faye. Dans un communiqué rendu public, l'organisation félicite chaleureusement le chef de l'État pour la création d'une "Direction des affaires religieuses et de l'insertion des diplômés en langue arabe".
Cette nouvelle instance sera dirigée par le Dr Djim Ousmane Dramé, un membre éminent du CUDIS. L'organisation s'est engagée à accompagner pleinement le Dr Dramé dans ses missions, qui incluent l'écoute des autorités religieuses et l'amélioration des relations entre l'État et les différentes communautés religieuses du Sénégal.
Le CUDIS, qui regroupe une diversité impressionnante d'acteurs religieux allant des confréries soufies aux associations islamiques, en passant par la communauté chiite, voit dans cette nomination une opportunité de renforcer le modèle sénégalais de tolérance et de vivre-ensemble.
"Le modèle de tolérance et de vivre ensemble sénégalais, magnifié à travers le monde, a plus que jamais besoin d'être perpétué mais surtout préservé et consolidé face aux différentes menaces, internes et externes", souligne le communiqué. L'organisation rappelle le rôle historique des acteurs religieux comme "piliers et ciment" de la stabilité et de l'harmonie nationale.
Cette initiative s'inscrit dans la lignée des orientations exprimées par le président Faye lors du récent Gamou de Ndiassane, où il a réaffirmé son ambition de faire du religieux un levier d'épanouissement pour la nation sénégalaise.
Le CUDIS, présidé par Abdoul Aziz Mbacké Majalis, se positionne comme un acteur clé dans la promotion de la paix et la lutte contre l'extrémisme religieux au Sénégal.
par Jean Pierre Corréa
POURQUOI LE RIZ EST-IL L’ÉPICENTRE DES SCANDALES AU SÉNÉGAL ?
EXCLUSIF SENEPLUS - Les plaintes des Sénégalais concernant la cherté du riz résonnent de plus en plus fort, alors qu’un nouveau scandale vient assombrir le tableau : un détournement présumé de plus de 15 milliards FCFA
Les plaintes des Sénégalais concernant la cherté du riz résonnent de plus en plus fort, alors qu’un nouveau scandale vient assombrir le tableau : un détournement présumé de plus de 15 milliards FCFA, orchestré par un dénommé Ali Zaidan, en complicité avec des agents de banque. Ce fait divers s'ajoute à une liste déjà longue d'affaires qui ont nourri les fantasmes, notamment l’affaire Bocar Samba-Dieye-CBAO, la dissolution de la Société de promotion et de commercialisation du riz au Sénégal (SPCRS SA), les déboires de TDS, le conflit entre Moustapha Tall et ses frères portant sur cinq milliards, pour ne citer que ces faits troublants. Sans oublier le scandale des fonds Covid impliquant la société AVANTI, qu’on accuse d’avoir bénéficié des faveurs de Mansour Faye.
Panorama d’un secteur en pleine tourmente, au cœur de l’économie sénégalaise
Le riz est un marché juteux qui attise des convoitises multiples. Avec une consommation annuelle de 1,5 million de tonnes, le Sénégal demeure un des pays africains où l’on consomme le plus de riz par habitant. Néanmoins, le Sénégal demeure fortement dépendant des importations. En 2022, les importations ont atteint près de 347 milliards FCFA selon l’Agence Nationale de la Statistique et des Données (ANSD), creusant ainsi un trou dans nos réserves de change et enrichissant la chaîne de valeur au détriment du consommateur. Bien que des efforts aient été entrepris pour développer la production locale, l’Agence Ecofin souligne que le pays peine encore à satisfaire la moitié de ses besoins par sa propre filière.
Les importations de riz sont régulées par des DIPA, Déclaration préalable d'Importation de Produits alimentaires, rendant l’accès à un marché libre complexe. Si cette réglementation avait en théorie pour but de mieux contrôler le marché et de favoriser la production locale, elle s’avère dans la pratique contre-productive, en engendrant des délais bureaucratiques et en favorisant ceux qui entretiennent des relations privilégiées avec l’administration. Ailleurs, ce système est peu répandu, l’on privilégie souvent une approche plus ouverte.
Des importateurs influents
Bien que certains acteurs historiques comme TDS aient perdu de leur influence, le secteur des importations de riz demeure sous le contrôle de figures emblématiques, connues de tous. Moustapha Tall, le plus médiatisé, reste un acteur incontournable avec une forte influence. Parallèlement, Moustapha Ndiaye, à la tête du Comptoir commercial Mandiaye Ndiaye, s'est imposé comme l'importateur le plus significatif du secteur. Son succès lui a permis de diversifier son empire, allant jusqu'à investir dans la production énergétique avec la centrale électrique WAE.
Ils font désormais face à de nouveaux entrants, en pleine croissance, qui ont rapidement conquis une part significative du marché.
La société AVANTI, qui était encore méconnue il y a quelques années, est le plus marquant de ces acteurs. Son gérant Rayan Hachem, qui avait pris la parole dans les médias, ainsi que son propriétaire, l’indiscret homme d’affaires Ramez Samir Bourgi, protégé de l’ancien régime et qui ne cachait pas ses relations privilégiées avec le Palais, sont devenus des figures connues du secteur. Propulsée dans l’industrie du riz grâce à l’achat de riz par l’Etat avec les fameux fonds Covid de Mansour Faye, scandale pour lequel la Cour des Comptes avait demandé des poursuites notamment pour faux et surfacturation, il n’est pas certain que la société AVANTI arrive à survivre à la reddition de comptes promise aux Sénégalais par le pouvoir actuel.
Parallèlement, un autre géant international, la Louis Dreyfus Company, a également su s'imposer sur le marché. Dirigée au Sénégal par Eric Bourgi, dont tout éventuel lien de parenté concret avec Ramez Samir Bourgi reste inconnu, cette société réalise plus de 100 000 tonnes d'importation par an, consolidant ainsi sa position dominante.
Face à ces mastodontes, des acteurs plus petits, comme Ali Zaidan, à la tête de Sénégalaise Trading Compagnie (STC), essaient de se frayer un chemin. Cet acteur, jusqu'alors peu connu, se retrouve désormais au cœur d’un scandale de détournement de 15 milliards FCFA, illustrant ainsi les dérives de certains acteurs d’un secteur où chaque opération se compte en milliards.
En 2017, le journal le 360 annonçait déjà la « fin de règne des importateurs de riz au pays du thiébou djeun ». Force est de constater que cette fin n'est pas pour demain.
Pourtant une réelle autosuffisance est possible
Il est illusoire de croire que nous pourrons rapidement sortir de notre dépendance aux importations de riz. Les importateurs, pour ceux qui ne sont pas impliqués dans des scandales publics, jouent un rôle crucial en garantissant l’approvisionnement lorsque la production locale est insuffisante. Cependant, l’État se doit de mettre pour objectif d’atteindre l’autosuffisance, en soutenant les mesures proposées par les experts :
1. Amélioration des infrastructures d’irrigation : La FAO recommande d'investir dans des systèmes modernes pour garantir une production stable, notamment dans les zones rizicoles comme la vallée du fleuve Sénégal.
2. Accès aux semences et technologies : L'ISRA soutient l'utilisation de semences résistantes et l’adoption de technologies agricoles modernes pour accroître la productivité.
3. Soutien financier : Il est impératif de faciliter l’accès aux financements pour les riziculteurs locaux, à travers des crédits agricoles et des subventions pour les intrants.
4. Renforcement des infrastructures post-récolte : l’USAID pointe du doigt la nécessité d’investir dans le stockage et la transformation pour réduire les pertes et améliorer la qualité du riz local.
5. Régulation des importations : Le CNCR conseille d'imposer des droits de douane et de limiter les importations pendant les récoltes locales pour protéger les producteurs sénégalais.
6. Formation des agriculteurs : Il est essentiel que l’Etat accompagne la formation des riziculteurs aux meilleures pratiques agricoles et à l’utilisation de nouvelles technologies.
7. Promotion de la consommation locale : Encourager les Sénégalais à privilégier les produits locaux afin d'augmenter la demande en riz local et soutenir les producteurs.
Plaidoyer pour la réappropriation des habitudes alimentaires
Revenir aux habitudes alimentaires ancestrales en Afrique de l'Ouest francophone est non seulement nécessaire, mais urgent ! Nos ancêtres savaient cultiver le mil, le fonio et le sorgho, des trésors nutritifs qui ont nourri des générations. Aujourd'hui, cependant, nous avons hérité d'une culture alimentaire imposée par les colons, qui ont cherché à écouler leur brisure de riz d'Indochine, un produit que personne ne consommait alors – et ont demandé aux pays colonisés d’abandonner leurs cultures traditionnelles pour se focaliser sur ce qui pouvait être exporté, comme au Sénégal avec l’Arachide. Ce passage à la monoculture, a affaibli nos systèmes agricoles locaux et rendu nos populations vulnérables.
Revaloriser le mil et le fonio, entre autres, c’est retrouver notre identité, redonner du sens à nos assiettes et renforcer notre résilience face aux crises économiques et climatiques. En célébrant nos traditions alimentaires, nous construisons un avenir où la biodiversité prospère et où les communautés s’épanouissent. C'est un acte de révolte contre l'héritage colonial et une promesse d'un avenir sain et durable pour les générations à venir. Un acte de révolte qui pourrait aussi matérialiser le Jub Jubal Jubanti. D’autant qu’il est connu que « plus y a de fous…plus on riz » !
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AU SÉNÉGAL, LA BAGUETTE S'AFRICANISE
Exit le blé importé, place aux céréales locales : mil, fonio et maïs s'invitent désormais dans la recette. Cette métamorphose culinaire incarne une volonté d’indépendance économique et alimentaire
Au cœur de Dakar, une transformation silencieuse s'ouvre. La baguette, héritage colonial français, se réinvente sous les mains expertes des boulangers sénégalais. Exit le blé importé, place aux céréales locales : mil, fonio et maïs s'invitent désormais dans la recette.
Cette métamorphose culinaire va au-delà du simple changement de goût. Elle incarne une volonté d’indépendance économique et alimentaire. Les écoles de boulangerie du pays initient déjà la nouvelle génération à ces techniques innovantes, attirant même des apprentis de toute l'Afrique de l'Ouest.
L'objectif est ambitieux : réduire de moitié les importations de blé et créer une véritable "baguette sénégalaise".
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AMADOU MAKHTAR M'BOW, UN SIÈCLE D'ENGAGEMENT POUR L'AFRIQUE ET LE MONDE
Son décès à 103 ans marque la fin d'une époque, mais son héritage continue d'inspirer les générations futures. Plongée dans la vie d'un homme qui a su allier sagesse africaine et vision universelle
Le 20 mars 2021, à l'occasion du centième anniversaire d'Amadou Makhtar M'Bow, un documentaire retraçant la vie et l'œuvre de cet illustre personnage a été réalisé. Ce film, riche en témoignages et en archives, nous plonge dans le parcours exceptionnel de celui qui fut Directeur général de l'UNESCO pendant 13 ans.
Né en 1921 à Dakar, M'Bow a traversé le siècle en témoin et acteur des grands bouleversements de son époque. De son enfance à Louga aux bancs de la Sorbonne, en passant par son engagement dans l'armée française pendant la Seconde Guerre mondiale, le documentaire retrace les premières années formatrices de cet homme d'exception.
Le film met en lumière le rôle crucial de M'Bow dans la lutte pour l'indépendance africaine. Son implication politique au Sénégal et son combat pour l'unité africaine sont autant de jalons qui ont marqué sa carrière. Le documentaire nous fait revivre les moments clés de cette période tumultueuse, où M'Bow a côtoyé les grandes figures de la décolonisation.
L'apogée de sa carrière internationale est sans conteste son mandat à la tête de l'UNESCO. Le film nous plonge dans les coulisses de cette organisation, révélant les défis auxquels M'Bow a dû faire face et les initiatives qu'il a lancées pour promouvoir l'éducation, la science et la culture à l'échelle mondiale.
Au-delà du récit biographique, ce documentaire est un plaidoyer pour l'unité africaine véritable et le développement du continent. À travers les mots de M'Bow, c'est toute une vision de l'Afrique et de sa place dans le monde qui se dessine.
Le film se clôt sur un message poignant formulé à la jeunesse africaine, l'exhortant à ne pas désespérer et à œuvrer pour le progrès de l'Afrique et du monde.
Amadou Makhtar M'Bow s'est éteint le 24 septembre 2024, à l'âge de 103 ans, laissant derrière lui un héritage inestimable pour les générations futures. Ce documentaire reste un témoignage précieux de sa vie et de ses combats.