SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
5 avril 2025
Société
LE MALAISE CHEIKH DIBA
Son silence prolongé sur l'audit des finances publiques, alors même qu'il en a été l'interlocuteur principal auprès de la Cour des comptes, soulève des interrogations. Le ministère des Finances voit son pouvoir décisionnel se réduire
Le ministre des finances et du Budget a été le principal interlocuteur de l’équipe de la mission d’audit de la Cour des comptes sur les finances publiques sur la gestion 2019-2024. Malgré les révélations du Premier ministre, Cheikh Diba s’est jusque-là gardé de commenter en tout cas publiquement la gestion du régime précédent avec qui il a collaboré.
Silence radio! Jamais un ministre des Finances au Sénégal n’a été en retrait sur un dossier qui concerne les finances publiques. Malgré cette polémique qui tient le Sénégal en haleine depuis le 26 septembre 2024 avec l’annonce du Premier ministre qui, lors d’une conférence du Gouvernement, avait révélé des « maquillages de chiffres » par le pouvoir sortant, Cheikh Diba a brillé par son silence. Il s’est jusque-là gardé d’évoquer le sujet. En tout cas, pas en public. Pourtant le Sénégal l’attendait sur l’état des lieux des finances publiques commandité par le régime en place qui venait juste d’égrener 5 mois au pouvoir. Car, il a eu à occuper sous le régime de Macky Sall, l’influente direction de la Programmation budgétaire au ministère des Finances. Mais, en lieu et place de l’argentier de l’Etat, c’est le chef du gouvernement qui s’y est collé. Cheikh Diba n’était même pas à la table du gouvernement qui se livrait, selon les termes du Premier ministre, à un exercice de vérité. Ousmane Sonko était accompagné de « l’alter égo » du ministre des Finances et du Budget en l’occurrence le ministre de l’Economie, du Plan et de la Coopération, Abdourahmane Sarr.
Ousmane Sonko était aussi entouré des ministres de la Justice et de l’Enseignement supérieur. Cette absence qui ne cesse de soulever de questions traduit-elle un malaise ? La prééminence du ministère des Finances au sein du gouvernement semble se rétrécir de plus en plus. En effet, le Premier ministre l’a dépouillé d’une de ses missions. Ousmane Sonko a décidé de centraliser toutes les dépenses d’investissements. Désormais, toutes les dépenses de l’Etat doivent être validées par le locataire du petit Palais.
Vers un isolement progressif de Cheikh Diba
Toujours est qu’il a été le principal interlocuteur de la Cour des comptes pour l’élaboration de l’audit. D’ailleurs, c’est Cheikh Diba, par ses services, qui a préparé le rapport qui a été envoyé, le 18 septembre 2024, à la Cour pour certification. C’est pourquoi, après la publication du rapport d’audit, le ministre des Finances et du Budget sera encore attendu. Va-t-il briser le silence aujourd’hui lors de la conférence de presse annoncée par le gouvernement ?
En tout cas, cité par le chroniqueur de Walfadjri, Pape Sané dans un scandale portant sur 8 milliards de Fcfa, il a, devant l’Assemblée nationale, tenue une sortie qui s’apparente à des adieux. En tout cas, en attendant qu’il soit blanchi par la Justice, les révélations portées contre lui jurent d'avec les principes sur lesquels le régime en place s’est engagé. D’ailleurs, lors d’une sortie, quelques jours après son installation, le chef de l’Etat avait appelé les membres du Gouvernement à « être irréprochables ».
« Si l’un d’entre nous, en toute responsabilité et en toute connaissance de cause, décide, dans l’intimité de son bureau, de transgresser, il ne peut entraîner personne dans une solidarité gouvernementale. Ce n’est pas notre rôle et nous devons tous le comprendre. Ce sont des choix et ils doivent être assumés par leurs auteurs», avait fait valoir le Président Bassirou Diomaye Faye. En tout état de cause, le ministre des Finance semble être à l'étroit dans ce gouvernement où il est plus perçu comme un résidus de l'ancien régime.
LE TROUPEAU TRAHI DE L'INTERIEUR
Le vol de bétail, véritable fléau pour le secteur de l’élevage au Sénégal, est parfois pratiqué par des éleveurs eux-mêmes, selon plusieurs témoignages recueillis auprès des acteurs de la filière.
Le vol de bétail, véritable fléau pour le secteur de l’élevage au Sénégal, est parfois pratiqué par des éleveurs eux-mêmes, selon plusieurs témoignages recueillis auprès des acteurs de la filière. Cette pratique, aux conséquences souvent dramatiques, freine le développement du secteur et plonge de nombreuses personnes dans la précarité.
Le soleil de janvier darde ses rayons sur le marché hebdomadaire de Dinguiraye. En cette matinée du samedi 25 janvier 2025, ce « louma » du département de Nioro du Rip, dans la région de Kaolack (Centre), vibre déjà au rythme des transactions.
Dans cet espace poussiéreux cerné de murs ocres, plusieurs centaines de bovins à la robe claire se côtoient sous un ciel d’azur. Le vent sec de l’harmattan, chargé de particules, balaie le marché. Les éleveurs, reconnaissables à leurs amples boubous et leurs turbans soigneusement noués ne laissant apparaître que leurs yeux, négocient avec de potentiels clients.
Sous un majestueux arbre offrant une ombre généreuse contre la chaleur, des groupes d’hommes discutent prix et qualités des bêtes. Des bergers, bâtons à la main, tentent de maintenir l’ordre dans leurs troupeaux, tandis que les beuglements des vaches se mêlent aux conversations animées.
Cependant, il suffit d’une simple allusion au phénomène du vol de bétail pour que les langues se délient. Les voix s’élèvent, se chevauchent, chacun voulant partager son témoignage. Sa colère. Ce fléau, loin d’être exclusivement le fait d’individus extérieurs au milieu de l’élevage, révèle une réalité inquiétante : il est souvent orchestré par des acteurs internes au secteur, fragilisant de manière insidieuse l’ensemble de la filière.
A Dinguiraye, l’histoire d’Aliou Ba est sur toutes les lèvres. « Le 2 janvier dernier, un individu de mon village, accompagné de deux complices, est venu aux alentours de 22 heures voler mes trente bœufs, certains avec leurs veaux, d’une valeur estimée à plus de 20 millions de FCFA. Il m’a complètement ruiné », lâche-t-il d’une voix où perce une rage contenue.
La pilule est d’autant plus amère à avaler que malgré toutes les preuves dont il dispose, le présumé voleur, « détenteur de plus de 50 vaches », est toujours libre.
De passage au marché hebdomadaire, Aliou Diallo, venu de la localité voisine de Ndoffane, livre un témoignage des plus invraisemblables. « C’est mon propre oncle qui, en mai 2023, a volé mes deux vaches et leurs veaux », affirme-t-il, avant d’ajouter qu’il a fini par les retrouver en suivant les traces de leurs sabots jusqu’à leur lieu de détention.
À plusieurs kilomètres de Dinguiraye, le soleil est déjà haut à Ndramé Escale, bourgade frontalière nichée à quelques encablures de la Gambie. Dans son marché hebdomadaire, beuglements et hennissements se mêlent dans une symphonie familière.
Dans ce vaste espace où la terre rouge contraste avec le bleu intense du ciel, une foule bigarrée s’active déjà. Les bovins, fidèles au rendez-vous, occupent la partie extrême du marché, mais les équidés font la singularité de ce louma frontalier. Les propriétaires de chevaux et d’ânes n’hésitent pas d’apostropher les visiteurs en vantant les qualités de leurs montures.
Alors que le soleil poursuit sa course dans le ciel sénégalais, l’atmosphère, jusqu’alors animée par les négociations et les retrouvailles hebdomadaires, change imperceptiblement. Les visages se ferment, les regards se font plus graves suite à l’évocation de la problématique du vol de bétail.
El Hadj Mamadou Sow, président de l’association des éleveurs de Ndramé Escale, pointe du doigt une méthode aussi vicieuse que destructrice, orchestrée, selon lui, par des bergers itinérants. « Il arrive que nous laissions nos animaux paître dans la brousse. Mais lorsque des éleveurs nomades traversent la zone, certains n’hésitent pas à s’approprier une partie de notre troupeau et partir avec. Dans ce cas, il devient très difficile d’engager la moindre recherche », se désole-t-il, l’air impuissant.
A Missirah Wadène, commune située dans le département de Kounghel (Centre), où sévit également le mal, Aly Dicko, s’exprimant au nom de la communauté d’éleveurs mauritaniens qui s’y est établie, ne mâche pas ses mots quand il s’agit de désigner les malfrats. « Le vol de bétail est un problème interne à la communauté. Les voleurs sont souvent des voisins, et la population, complice, ne les dénonce pas. Combien de voleurs y a-t-il à Missirah ? Ils sont connus de tous, mais personne ne les dénonce », fustige-t-il.
Cheikhna Ba, coordonnateur du comité communal de lutte contre le vol de bétail à Ngainthe Pathé, dans le département de Koungheul, abonde dans le même sens et affirme : « Les voleurs, nous les connaissons tous. Ils sont parmi nous. »
Ces différents témoignages sont confirmés par Dr Ibrahima Thiam, spécialiste en production animale au Bureau régional de la FAO, basé à Dakar. « Il est important de souligner que le problème du vol de bétail est avant tout un problème local. Les voleurs sont issus des communautés elles-mêmes », tranche-t-il.
Une complicité tacite qui entrave les efforts de lutte
Des témoins, des traces, des récits concordants, il n’en manque guère. Mais dans ce monde rural où les liens familiaux sont sacrés, porter plainte contre un proche relève très souvent de l’impensable.
« L’absence de la culture de la dénonciation au sein des populations constitue le principal frein aux efforts déployés. La plupart des gens savent qui sont les responsables, mais choisissent de se taire. Cette omerta complique considérablement cette lutte, malgré toutes les dispositions prises par l’État pour y remédier », regrette Abdoulaye Diop, le sous-préfet de Ndiédieng, dans le département de Kaolack.
« Nos plaintes n’aboutissent jamais. Un voleur appréhendé ne passe que quelques jours en prison. A quoi bon dans ce cas de porter l’affaire en justice ? », rétorquent en chœur certains éleveurs qui demandent la criminalisation effective de ce délit et le durcissement des peines d’emprisonnement.
Le 22 mai 2017, l’État du Sénégal avait pourtant fait voter une loi criminalisant le vol de bétail avec pour objectif de réduire, voire éradiquer ce fléau. Mais, les résultats escomptés se font encore désirer.
« Le constat que nous avons fait, comme tout le monde d’ailleurs, est que l’application de cette loi pose problème. Ceci est peut-être dû à plusieurs facteurs. D’abord, il y a l’insuffisance des ressources judiciaires et sécuritaires pour enquêter sur le vol de bétail. Ensuite, il y a la méfiance envers le système judiciaire. Enfin, les coûts élevés des démarches administratives et des procédures judiciaires qui peuvent être excessivement chers », explique Dr Astou Fall, Coordonnatrice de la Cellule de Prévention et de Lutte contre le vol de bétail (CLCVB), au ministère de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de l’Élevage.
Quoi qu’il en soit, estime Dr Ibrahima Thiam, « il est essentiel de plaider pour une évaluation des aspects législatifs et réglementaires relatifs à la criminalisation du vol de bétail. Quelles mesures ont été prises jusqu’à présent et quelles sont les contraintes rencontrées dans l’application de la législation ? Ce premier pas est crucial car le vol de bétail est un problème transversal. »
Le maire de Ndiédieng, Abdoul Aziz Mbodj, partage cet avis. « L’objectif principal d’une loi pénale est la persuasion. Si les résultats ne suivent pas, la première proposition est de s’arrêter et d’évaluer ladite loi », plaide-t-il.
Une criminalité aux lourdes conséquences socio-économiques
Les implications économiques de cette forme de criminalité sont énormes. Le vol de bétail entraîne des pertes financières considérables pour les éleveurs, affecte la stabilité économique des communautés rurales, et compromet les moyens de subsistance de nombreuses familles.
La pratique, très répandue au centre du pays, est loin d’être un phénomène circonscrit dans cette zone. À Vélingara, commune située dans le sud-est, des malfrats ont emporté en une seule nuit 24 vaches, plongeant une veuve et sa famille dans la précarité, relate Dr Thiam.
Selon les données de la FAO, au Sénégal, les éleveurs perdent annuellement 3,2 millions de dollars américains, soit deux milliards de FCFA à cause de cette pratique. En moyenne, cela représente 22 000 à 30 000 têtes de bétail (bovins, ovins, caprins et équidés) par an.
« L’élevage se meurt au Sénégal à cause du vol de bétail et ça risque d’être catastrophique pour l’économie du pays », alerte Abdoulaye Ba, secrétaire général du marché au bétail de Dinguiraye.
A Ndiédieng, de nombreux jeunes ont déserté le secteur pour devenir marchands ambulants dans la capitale, à Dakar, regrette l’édile de la commune, Abdoul Aziz Mbodji. Ce dernier fait par ailleurs savoir que beaucoup de personnes hésitent désormais à investir dans l’élevage par crainte de voir leur cheptel disparaitre du jour au lendemain.
Pour Demba Ba, président de l’Association des éleveurs de Mbirkilane, dans la région mitoyenne de Kaffrine (Centre), « si le Sénégal importe des vaches et moutons à l’occasion des grands événements religieux, c’est à cause du vol de bétail », affirme-t-il, assurant que « si nous arrivons à y mettre un terme, d’ici 3 ou 5 ans, nous n’allons plus importer. »
Si le phénomène reste préoccupant au Sénégal, il l’est davantage dans les autres pays de la sous-région. Au Mali, par exemple, entre 2019 et 2022, le nombre d’animaux volés a atteint le chiffre record de 887 250 têtes de bovins et 446 000 petits ruminants, soit 6,4 millions USD ou 3,84 milliards de FCFA/an.
La situation est encore plus critique au Burkina Faso avec 8 millions de têtes volées entre 2017 et 2021, et plus encore au Nigéria avec le chiffre astronomique de 432 millions USD, selon les estimations faites par l’Association des éleveurs de bétail Miyetti Allah du Nigéria (MACBAN, sigle anglais) en 5 ans.
En termes d’économie illicite, le vol de bétail (22 %) constitue ainsi, en Afrique de l’Ouest, le troisième fléau après le trafic d’armes (56 %) et l’enlèvement contre rançon (39 %), devançant le commerce illicite (20 %) et le commerce illicite de pétrole (20 %).
Des pistes de solutions en gestation
Pour faire face à cette endémie, la FAO s’engage à soutenir l’État du Sénégal en mettant en œuvre sept recommandations majeures. Celles-ci comprennent entre autres la création d’une coalition sous-régionale pour lutter contre le vol de bétail en Afrique de l’Ouest, ainsi que l’implication des communautés locales et l’utilisation d’innovations technologiques adaptées.
S’y ajoutent l’harmonisation des systèmes nationaux d’identification et de traçabilité du bétail, l’élaboration d’un programme régional sur l’identification et la traçabilité, le renforcement des cadres juridiques et le plaidoyer pour des financements dédiés à cette problématique.
El Hadj Aboubacar Bitèye, président de l’Association nationale de lutte contre le vol de bétail (ANLCVB)/@APA
En attendant la concrétisation de ces différentes solutions, El Hadj Aboubacar Bitèye, tente d’agir à travers l’Association nationale de lutte contre le vol de bétail (ANLCVB), qu’il a créée en 2010. Grâce à ses efforts, quelque 11 803 têtes volées ont été retrouvées, soit 55 % des 21 430 recensées par l’association.
Établie dans une cinquantaine de localités par le biais de comités de vigilance, l’ANLCVB fonctionne grâce à ses propres ressources et parvient, tant bien que mal, à apporter sa contribution. Cependant, elle doit encore se doter des moyens nécessaires pour atteindre ses ambitions.
« Les comités de surveillance sont à bout. Nous avons besoin d’être reconnus par l’État et d’avoir plus de moyens de déplacement pour mener à bien notre mission », lance Babou Sow, président du Comité de vigilance à Missirah Wadène, dénonçant au passage la « non-implication » des chefs de village dans ce combat.
Même si leur apport dans cette lutte n’est plus à démontrer, les membres de l’ANLCVB doivent être davantage encadrés pour parer à tout abus. « Nous ne devons pas permettre à ces comités de s’arroger des prérogatives qui ne sont pas les leurs et qui relèvent des forces de défense et de sécurité. Pour cela, il faut qu’ils soient formés afin qu’ils ne se livrent pas à des actes qui seraient de nature à atteindre à la dignité des suspects », conseille le maire de Ndiédieng, Abdoul Aziz Mbodj.
Les autorités administratives ont, quant à elles, assuré de leur entière disponibilité pour participer « à cette œuvre d’utilité publique. » En Conseil des ministres du 12 février 2025, le président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye a ainsi souligné « l’impératif » de mettre en œuvre les « dispositifs » de prévention et de coercition « de lutte contre le vol de bétail ». De quoi faire meugler d’espoir les bovins.
LES STARTUPS AGRITECH À L'HONNEUR DU AYUTE AFRICA CHALLENGE SENEGAL
Heifer International a lancé la 4e édition du concours annuel AYuTe Africa Challenge au Sénégal, un événement clé visant à récompenser les startups agritech innovantes, avec à la clé un grand prix de 25 000 dollars pour les projets qui participent...
Heifer International a lancé la 4e édition du concours annuel AYuTe Africa Challenge au Sénégal, un événement clé visant à récompenser les startups agritech innovantes, avec à la clé un grand prix de 25 000 dollars pour les projets qui participent à la modernisation du secteur agricole.
Cette annonce a été faite lors de la Conférence panafricaine 2025 de l’ANDE à Dakar, un rassemblement majeur d’organisations engagées dans l’autonomisation des jeunes par l’innovation numérique et la création d’entreprises durables.
Créé en 2021 dans le cadre de l’initiative AYuTe Africa NextGen, le concours AYuTe (Agriculture, Jeunesse et Technologie) met en avant les talents de la jeunesse africaine et les technologies émergentes pour aider les petits exploitants agricoles à accroître leur productivité et leurs revenus. Ce concours se déroule dans 8 pays africains, dont le Sénégal, et propose aux jeunes innovateurs des financements sous forme de dons en espèces, ainsi que des opportunités d’accès à des programmes de mentorat et de formation.
« L’agriculture représente un secteur clé pour le développement économique du Sénégal, employant 60 % de notre main-d’œuvre et contribuant largement à l’approvisionnement alimentaire du pays », a déclaré Daouda Ndao, directeur national de Heifer International Sénégal. « Grâce à la technologie, nous pouvons transformer ce secteur et soutenir les entrepreneurs qui créent des solutions pour améliorer la vie de nos agriculteurs. »
Mabouba Diagne, ministre sénégalais de l’Agriculture, de la Souveraineté Alimentaire et de l’Élevage, également ambassadeur de l’AyuTe Challenge – Sénégal, a souligné l’importance de cette initiative : « Cette compétition inscrit les jeunes comme acteurs essentiels dans la vision d’un Sénégal souverain et prospère. Leur engagement dans la souveraineté alimentaire positionnera le pays parmi les leaders d’une agriculture moderne et résiliente. »
En 2024, la startup Aar Mbay Mi, lauréate du concours AYuTe Africa Challenge Sénégal, a conçu un dispositif innovant pour protéger les cultures contre les oiseaux granivores. Marie Touré, membre de l’équipe gagnante, a commenté : « Gagner ce concours ne nous a pas seulement apporté un financement substantiel ; cela a ouvert de nouvelles opportunités, permettant à plus de 20 000 petits exploitants agricoles de bénéficier de notre solution qui réduit considérablement les dégâts causés par les oiseaux dans les champs de céréales. »
Le 4e concours AYuTe Africa Challenge Sénégal invite les candidatures de mars à avril 2025. Les startups éligibles doivent répondre aux critères suivants :
•Être dirigées par des citoyens sénégalais âgés de 18 à 35 ans.
•Proposer des solutions technologiques innovantes pour résoudre les défis rencontrés par les petits exploitants agricoles.
À propos de Heifer International
Depuis 1944, Heifer International œuvre pour éradiquer la faim et la pauvreté de manière durable. L’organisation travaille actuellement dans 19 pays, notamment en Afrique, en Asie et dans les Amériques, et soutient les petits producteurs pour renforcer les systèmes de marché locaux et promouvoir des moyens de subsistance durables. Heifer a déjà accompagné plus de 52 millions de personnes dans le monde.
UN NOUVEL OUTIL STRATÉGIQUE POUR LE DÉVELOPPEMENT
Lors du Conseil des ministres, le gouvernement a examiné et adopté le projet de décret portant création et fixant les règles d’organisation et de fonctionnement du Bureau d’Intelligence et de Prospective Économique (BIPE).
Lors du Conseil des ministres, le gouvernement a examiné et adopté le projet de décret portant création et fixant les règles d’organisation et de fonctionnement du Bureau d’Intelligence et de Prospective Économique (BIPE).
Ce nouvel organe est conçu pour renforcer l’anticipation et la planification stratégique des politiques économiques du Sénégal. Le BIPE aura pour mission principale d’analyser les tendances économiques nationales et internationales, d’évaluer les performances des secteurs clés et d’orienter les prises de décision du gouvernement sur la base de données fiables et de projections précises.
Dans un contexte de mutations économiques rapides, le BIPE jouera un rôle crucial dans : La collecte et l’analyse de données économiques et financières pour éclairer les décisions politiques et stratégiques ; l’élaboration de scénarios prospectifs permettant d’anticiper les évolutions des marchés et des secteurs stratégiques ; l’appui aux réformes économiques en proposant des recommandations fondées sur des études approfondies ; le suivi et l’évaluation des politiques publiques, en s’assurant de leur efficacité et de leur impact sur le développement du pays.
Le décret adopté fixe les règles d’organisation et de fonctionnement du BIPE, en définissant ses missions, sa gouvernance et ses moyens d’action. Placé sous la tutelle de la Primature, il collaborera étroitement avec les ministères sectoriels, les institutions de recherche, les partenaires au développement et le secteur privé pour assurer une veille économique efficace et proposer des stratégies adaptées aux réalités nationales et internationales.
Avec la création du Bureau d’Intelligence et de Prospective Économique, le gouvernement marque une nouvelle étape dans la modernisation de la gestion économique du pays. En dotant le Sénégal d’un outil d’analyse avancé et de veille stratégique, les autorités entendent renforcer la compétitivité du pays, anticiper les défis économiques et maximiser les opportunités de croissance.
MULTIPLE PHOTOS
A SALGUIR, L'ASSECHEMENT DES MARIGOTS PLOMBE LES ACTIVITES ECONOMIQUES
Le village de Salguir, situé au nord-est de la commune de Gandon, dans la région de Saint-Louis, est confronté à l’asséchement progressif de ses trois marigots plombant les activités économiques comme l’agriculture et la pêche.
Le village de Salguir, situé au nord-est de la commune de Gandon, dans la région de Saint-Louis, est confronté à l’asséchement progressif de ses trois marigots plombant les activités économiques comme l’agriculture et la pêche.
Autrefois appelé Salguir Diagne, cette localité comprend principalement un écosystème de trois marigots, »Khant », »Ndjim » et »Ndiasséou », qui jouait un rôle vital pour l’équilibre écologique et économique local. Une fonction perdue au fil des années à cause de l’asséchement progressif des marigots accentué par le déficit pluviométrique lié au changement climatique.
Situé à une vingtaine de kilomètres de la ville de Saint-Louis, Salguir subi les conséquences du changement climatique, qui ont entrainé, en plus du tarissement des marigots, une disparition de certaines espèces de la faune et de la flore de la zone.
Une visite de terrain organisée par l’African journalists forum, une association regroupant des journalistes et chercheurs africains, a permis de constater de visu ces impacts.
»Le problème qu’on est en train de vivre ici, il faut le replacer dans le cadre du changement climatique global’’, a expliqué Boubou Aldiouma Sy, professeur de géographie, géomorphologie au laboratoire ‘’Leïdi’’, dynamique des territoires et développement, du département de géographie de l’université Gaston Berger (UGB) de Saint-Louis.
»Le changement climatique global constaté à Salguir, n’est pas lié en réalité à la présence humaine mais à des saisons astronomiques naturelles, dont la saison sèche climatique que nous sommes en train de vivre actuellement », a-t-il précisé.
Il a indiqué que cette saison sèche remonte à 7 mille ans. »Et, c’est cette saison d’ailleurs qui est à l’origine de l’asséchement des cours d’eau du Sahara, qui était verdoyant au néolithique’’, a-t-il relevé.
Le géographe a expliqué que le changement climatique global a pour effet de modifier les paramètres climatiques comme la température, l’ensoleillement, le vent, et la destruction des végétaux.
»Cette modification des paramètres climatiques renforce l’énergie éolienne et l’énergie hydrique et affecte aussi sensiblement les activités productives primaires de nos sociétés fondamentalement agraires », a dit le professeur.
»Elle perturbe également le tréfonds socio-culturel, les activités économiques, et favorise les phénomènes migratoires », a-t-il encore relevé, indiquant qu’une localité comme Salguir, est confrontée aux effets de ce changement climatique global qui oblige les populations locales à développer des aptitudes locales pour survivre.
»Ici dans le cas du Sénégal, du Mali, de la Mauritanie et de la Guinée, la réaction d’adaptation des communautés face au déficit pluviométrique, a été la mise en place de l’Organisation pour la mise en valeur du Fleuve Sénégal (OMVS) pour développer la culture irriguée », a-t-il cité en exemple.
Selon lui, la mise en place de cette organisation est une réponse au déficit pluviométrique qui s’est installé depuis les années 70. »La réponse des communautés face ce phénomène naturel, était donc, la construction des barrages à Manantali au Mali et à Diama, près de Saint-Louis ».
Il a expliqué qu’entre ces deux barrages, il y a un ensemble d’endiguement pour maîtriser l’écoulement du Fleuve Sénégal et mieux utiliser l’eau à des fins d’irrigation des périmètres agricoles villageois.
»De telles mesures, ont tendance à modifier sensiblement la circulation naturelle de l’eau dans le lit mineur et dans la vallée du fleuve », a-t-il souligné, ajoutant que cet endiguement à partir du barrage de Diama, permet également, d’empêcher la remontée de la salinité vers l’est.
Boubou Aldiouma Sy a expliqué par ailleurs que la fréquence du déficit pluviométrique, de l’ensoleillement et du vent traduit une sécheresse prononcée, une dégradation très prononcée des végétaux et des phénomènes d’aspiration. »On parle, dans pareille situation de thermo capillarité », a-t-il déclaré.
Les activités productives primaires menacées
Concernant la terre, un support des activités productives primaires, il a indiqué qu’il est en passe de se dégrader à Salguir du fait de la modification des paramètres climatiques.
‘’Le support (terre) des activités productives primaires (agriculture, élevage, pêche, commerce) est en train de se dégrader de façon sensible dans la zone de Salguir », a-t-il réitéré, appelant à mieux comprendre ces phénomènes à l’origine de la thermo capillarité et du changement climatique global.
»Il faut comprendre la façon dont le changement climatique se manifeste sur les végétaux, sur l’eau, sur l’agriculture, sur l’élevage, sur les hommes et surtout sur les sols pour atténuer les impacts », a-t-il recommandé.
Cependant, a-t-il ajouté, une fois que tout cela est compris, il faudra mettre en place des dispositifs pour minimiser ou bien freiner ces phénomènes naturels dans le but d’arriver à des exploitations plus durables.
Le journaliste René Massiga Diouf, président de l’association African journalists forum, a expliqué que cette visite de terrain vise à sensibiliser les journalistes, alerter l’opinion et les autorités sur les effets du changement climatique à Salguir.
Il a précisé que cette visite des membres de l’association African journalists forum s’inscrit dans la continuité des activités entamées depuis quelques mois dans plusieurs localités pour sensibiliser les autorités sur les effets des changements climatiques.
»Dans le cadre de ces activités, on était dernièrement, à Pilote Bar, Tassinère et Doun Baba Dièye et Keur Bernard, des localités situées dans la zone côtière de Saint-Louis », a-t-il rappelé.
»Aujourd’hui, encore on essaie de montrer une autre facette des manifestations du changement climatique à Salguir’’, a-t-il ajouté, soulignant que ce village stratégique jouait par le passé un rôle important, dans la production de produits agricoles et le débarquement de ressources halieutiques.
»C’est une zone qui approvisionnait pratiquement toutes les villes environnantes en produits agricoles, en poissons et dérivés », a-t-il relevé, expliquant que cette visite de terrain vise à montrer »la place et l’importance de Salguir » dans les activités productrices mais aussi à documenter les effets locaux du changement climatique.
»C’est pour cela, pour être au complet, dans le cadre du travail que nous faisons depuis quelques années, il était de notre devoir de venir ici pour montrer aussi, les effets du changement climatique, une réalité qui doit être prise en compte par les autorités », a souligné M. Diouf, par ailleurs journaliste à la RTS, la télévision publique.
L’asséchement des trois marigots plombe les activités économiques
Il a relevé qu’aujourd’hui à Salguir, plusieurs activités économiques comme la pêche et l’agriculture sont au ralenti à cause de l’asséchement des trois marigots de la zone. »Ces points d’eau, a-t-il rappelé, permettaient aux populations de pratiquer la pêche, en plus de pratiquer le maraîchage dans les zones environnantes ».
»Aujourd’hui, le changement climatique a un impact considérable sur pratiquement tous ces écosystèmes. Donc, si on n’alerte pas, si on ne met pas l’accent là où il se doit, peut-être que d’ici quelques années, on va assister à des conséquences néfastes dans cette zone mais aussi pour le Sénégal de manière générale, a-t-il prévenu.
Le typha, l’autre difficulté à Salguir
Outre la dégradation des terres agricoles, l’asséchement des trois marigots, les écosystèmes humides de Salguir sont confrontés à la prolifération du typha, une plante aquatique envahissante.
Dame Diagne, membre actif de l’association inter villageoise (AIV), n’y va pas par quatre chemins pour exprimer son désespoir.
‘’Nous rencontrons beaucoup de difficultés avec la prolifération du typha. Cette plante envahissante cause des difficultés au développement des activités productrices des populations villageoises », a-t-il déploré.
»A l’époque, la pêche, le maraîchage étaient rentables dans le village. Mais aujourd’hui, presque tous les jeunes ont migré vers la ville de Saint-Louis faute d’activités génératrices de revenus. Ce phénomène d’exode rural est dû aux effets désastreux du changement climatique sur les activités productrices’’, a-t-il expliqué.
M. Diagne plaide en outre pour l’accès du village à l’électricité. »C’est un village traditionnel fondé depuis 1932 par nos grands-pères », a-t-il renseigné, appelant également à désenclaver leur localité à travers la construction d’une route.
Créée en 2012, African journalists forum se veut une plateforme d’échanges et d’actions au service des médias et des populations africaines.
Cette association ambitionne de faire connaître les problèmes de développement auxquels le continent se trouve confronté en mettant à la disposition des populations, les outils nécessaires à leur résolution.
OUVERTURE A DAKAR DU DEUXIEME SOMMET SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES
Le deuxième sommet sur les changements climatiques et la réduction des risques de catastrophes s’est ouvert jeudi à Dakar avec la participation de plusieurs délégations originaires de huit pays et des organisations médias
Le deuxième sommet sur les changements climatiques et la réduction des risques de catastrophes s’est ouvert jeudi à Dakar avec la participation de plusieurs délégations originaires de huit pays et des organisations médias, a constaté l’APS.
La cérémonie officielle d’ouverture s’est déroulée sous la présidence des ministres sénégalais de l’Environnement et Transition écologique, Daouda Ngom, de la Communication, des Télécommunications et du Numérique, Alioune Sall et leur homologue gambien de l’Information et des médias, Ismaila Cissey.
Le directeur général de l’UAR, Grégoire Ndjaka, ainsi que plusieurs officiels d’organisations et structures partenaires étaient également présents.
Le thème de cette édition est : ‘’La radio au cœur des communautés : ensemble face au défi climatique’’.
Organisé sur deux jours par l’Union africaine de radiodiffusion (UAR) en partenariat avec le Bureau des Nations unies pour la réduction des risques de catastrophe, ce sommet explore la synergie entre la radio et la communication sur le changement climatique en soulignant le rôle de la radio comme un puissant outil de plaidoyer et de mobilisation.
Initié dans le sillage de la Journée mondiale de la radio, le sommet de Dakar vise à consolider à définir de nouvelles stratégies pour faire de la radio un acteur clé de la résilience climatique en Afrique.
Il permet également de favoriser les échanges et renforcer la collaboration entre différents acteurs de contribuer à un avenir plus durable. La radio s’impose donc comme un outil indispensable pour sensibiliser, informer et mobiliser les populations dans la lutte contre les changements climatiques et ses conséquences.
L’UAR est la plus grande organisation professionnelle de radio et télévision en Afrique. Elle regroupe plus de 80 organisations audiovisuelles publiques et privées.
par l'éditorialiste de seneplus, Amadou Elimane Kane
CHEIKH ANTA DIOP, UN BATISSEUR
EXCLUSIF SENEPLUS - La constitution d’un État africain continental permettra de mettre à terre la mascarade des indépendances. C’est une proposition concrète pour faire de l’Afrique le continent majeur du 21ème siècle
Amadou Elimane Kane de SenePlus |
Publication 13/02/2025
Un État fédéral, un des leviers de la renaissance africaine
Les travaux de recherche de Cheikh Anta Diop présentent toujours une réflexion d’une étonnante actualité pour notre monde contemporain. L’unité africaine reste au cœur de nos interrogations pour bâtir l’épanouissement de notre continent.
Dès 1952, Cheikh Anta Diop posait la question de la création d’un État fédéral d’Afrique noire qu’il associait étroitement au panafricanisme dans une démarche scientifique, politique, historique et culturelle.
Compte tenu des enjeux planétaires et en nous appuyant sur les écrits et la pensée de Cheikh Anta Diop, nous exposerons les raisons de bâtir un État fédéral d’Afrique noire constituant ainsi un des axes de la renaissance africaine.
Pour cela, il est important dans un premier temps de dresser un schéma historique de la formation du monde noir pour ensuite décliner les ressources stratégiques et politiques du continent africain.
Origine et histoire du monde noir
L’expérience scientifique a démontré que l’Afrique est le berceau de l’humanité et que les peuples africains, partis de la région des grands lacs, se sont glissés dans le bassin du Nil. « Aux temps proto-historiques, ils créèrent la civilisation soudanaise nilotique et la civilisation égyptienne. »
Ainsi, les peuples africains ne sont pas issus d’autres peuples mais représentent bien la première civilisation du monde. La puissance des empires d’Afrique est à cette époque éclatante, l’opulence des cités commerçantes révèle un luxe incroyable. Les habitants étaient des « africains authentiques noirs » et la culture négro-africaine a rayonné dans le monde avec une vitalité insufflant des visions religieuses et philosophiques issues de l’Égypte pharaonique.
L’éclatement de ces empires s’opère d’abord au 16ème siècle par l’arrivée des Portugais puis au 19ème siècle avec l’occupation de l’Afrique par l’Europe entière.
Il est aujourd’hui possible, par les travaux des chercheurs, de relire l’histoire de l’Afrique, d’exhumer l’organisation sociale, administrative, judiciaire, les conditions d’enseignement, la technologie, les mœurs, les coutumes pour restaurer la conscience historique.
L’unité de l’histoire ainsi reconstituée peut mener le peuple africain à une unité géographique, économique, philosophique, sociale et culturelle.
L’unité linguistique
Un autre aspect important à souligner est l’unité que représentent les langues africaines par leur système linguistique.
Au moment des grands empires, les langues africaines constituaient le corpus d’échange de l’administration au commerce, l’arabe étant, même après l’islamisation, une langue religieuse et intellectuelle. Avec l’arrivée de l’Europe au 19ème siècle, les langues africaines ont été marginalisées.
Pour parvenir à construire un État fédéral africain, sur la base d’une unité historique, économique et géographique, il faudra reconstituer notre unité linguistique, en faisant le choix de langues africaines appropriées tournées vers la modernité et les piliers de notre culture.
Prenons l’exemple du Sénégal, nous avons pu démontrer la parenté qui existe entre le wolof, le sérère, le peulh et le diola. L’étude des lois linguistiques démontre que l’unité est plus récurrente que les particularismes de chaque langue. Cela repousse tout micro-nationalisme et rassemble au lieu de diviser.
Un autre argument qui a son importance, et les dirigeants doivent s’en préoccuper de manière urgente, la majorité des populations ne maîtrisent pas les langues européennes, considérées comme les langues officielles des États. Ainsi, les populations sont injustement marginalisées sur les questionnements d’ordre institutionnel, politique et démocratique. C’est en cela qu’il est urgent de faire émerger les langues nationales.
Le moment venu et une fois fait le choix d’une langue africaine adaptée, celle-ci devra être enseignée dans le secondaire, dans le supérieur, les manuels rédigés dans cette même langue, devenant ainsi un support fondamental de notre culture moderne.
Pour parvenir à cette unité linguistique, les chercheurs africains, appuyés par les États et leurs dirigeants, doivent mener des activités de recherche efficientes, refusant la facilité intellectuelle et œuvrer pour la renaissance culturelle et linguistique du continent noir.
Unité politique et fédéralisme
Pour en finir avec les micros-États dictatoriaux, éphémères, affaiblis par les intérêts personnels des dirigeants, le continent africain doit entamer « son destin fédéral ». Construire des liens fédéraux, c’est abandonner les liens artificiels des anciennes colonies. Le cas de l’Afrique de l’Ouest représente un potentiel économique majeur, supérieur à la France et à l’Angleterre réunies. Proposons une voie concrète pour mener à une fédération des États africains en réponse à la souveraineté locale qui est une constitution déséquilibrée issue de la colonisation.
Choisir une gouvernance fédérale permettrait de sauvegarder les intérêts particuliers des régions et l’unité africaine.
Bien que l’Occident dise le contraire, l’Afrique est un continent de vide démographique. Le continent doit se repeupler car il possède des sources d’énergie naturelles, des matières premières et des vivres suffisants pour nourrir et entretenir sa population.
Pour délimiter les frontières de cet État fédéral noir, on peut naturellement s’inspirer des frontières historiques des anciens empires africains et en particulier de la situation géostratégique de l’Afrique de l’Ouest.
La nouvelle stratégie
La constitution d’un État africain continental moderne permettra de mettre à terre la mascarade des indépendances qui n’a créé que de la division entre les régions.
Les responsables politiques et les intellectuels doivent être en mesure de dégager des perspectives pour l’Afrique et ce de manière désintéressée et sincère. Être honnête intellectuellement, moralement et animé d’un idéal dégagé de sa propre réussite sont les conditions nécessaires à la réalisation d’un État fédéral d’Afrique noire.
Bicaméralisme
S’appuyant sur notre histoire et celle de l’Égypte pharaonique en particulier, il faut redonner à la femme « une place de choix » et l’associer à la direction des affaires sociales et politiques. Restaurer le bicaméralisme ancestral sur une base moderne, c’est redonner à notre patrimoine culturel un mode efficace de l’élément féminin au service des nations.
Les sources d’énergie
Celles-ci sont nombreuses et présentes un peu partout sur le continent. S’appuyant à la fois sur les mines naturelles et les technologies, elles placent l’Afrique noire au centre énergétique du monde : l’énergie hydraulique, l’énergie solaire, l’énergie atomique avec la présence de gisements importants d’uranium, l’énergie éolienne et l’énergie marémotrice.
Telles sont les ressources énergétiques de l’Afrique noire. Leur utilisation par les africains eux-mêmes et en transformant les matières premières que possède le continent, « permettrait de faire de l’Afrique noire un paradis terrestre. »
La concentration des sources d’énergie permet de dégager huit zones naturelles à vocation industrielle : le Congo, le Gabon, le Nigeria et le Cameroun, le Ghana et la Côte d’Ivoire, la Guinée, la Sierra Leone et le Liberia, la zone tropicale (Sénégal, Mali, Niger), le Soudan nilotique, les Grands lacs, l’Éthiopie, le bassin du Zambèze et l’Afrique du sud
Pour mener à bien l’exploitation de ces ressources et les échanges intercontinentaux, il est également capital de construire et de développer des axes de communication solides (routes, réseaux autoroutiers, voies de chemin de fer, liaisons aériennes, équipements importants pour les transports maritimes : cargos, pétroliers, bananiers).
Un dernier point essentiel pour la renaissance du continent est la formation exigeante des cadres techniques. Il est indispensable de placer les cadres africains dans des conditions de réussite et de responsabilités. De même qu’il faut s’attacher à l’entretien durable de nos constructions et de nos infrastructures, dans un environnement dynamique de développement et d’investissements fiables.
Nous appuyant sur les données historiques, sociales, culturelles et politiques du continent, il est important de comprendre que cette construction du développement continental doit être envisagée dans un esprit d’unité fédérale des États. Les avancées momentanées des micros-États ne constituent pas une force suffisante face aux enjeux stratégiques, économiques et politiques mondiaux.
Cette analyse de la situation du continent africain représente le cœur du développement pour une meilleure connaissance de notre patrimoine, de nos ressources, de nos potentiels, pour le moment toujours assiégés par les puissances occidentales.
Ce n’est pas une utopie de croire à la construction d’un État fédéral d’Afrique noire dans le cadre de la renaissance africaine, c’est une proposition concrète pour faire de l’Afrique le continent majeur du 21ème siècle.
Bibliographie :
Diop, Cheikh Anta, Les fondements économiques et culturels d’un État fédéral d’Afrique noire, éditions Présence Africaine, Paris, 1974 (réédition).
par Abdoulaye Sène
LA PÊCHE ARTISANALE FACE AU MIRAGE PÉTROLIER SÉNÉGALAIS
EXCLUSIF SENEPLUS - GTA-Ahmeyim et Sangomar caractérisés par des études d'impact lacunaires. L’exploitation des hydrocarbures, présentée comme levier de croissance, reste une chimère pour les communautés locales, sans garanties pour la pêche
Pêche artisanale en mer, pétrole et gaz offshore au Sénégal : illusions et perspectives de développement
L’Afrique de l’Ouest est favorisée par des conditions climatiques et écologiques exceptionnelles dotée de zones marines et côtières les plus poissonneuses du monde. Les eaux maritimes y ont une grande productivité biologique du fait de phénomènes de remontée des eaux profondes riches en nutriments à la base de la chaîne alimentaire marine. L’abondance de ressources halieutiques est ainsi une des caractéristiques majeures de la région.
L’espace couvert par les sept (7) États membres de la Commission sous-régionale des pêches[1] (CSRP) est de 1,6 millions de km2 et le littoral s’étend sur près de 3500 kms. La population totale de ces États avoisine 32 millions d’habitants dont 70% vivent près de la côte. La pêche dans ces pays est un secteur de la plus grande importance, en constituant le quart de l’activité économique. Elle pourvoit à la création d’emplois, à l’alimentation et aux exportations des pays de la sous- région.
Selon l'ONU et la FAO, la plupart des grandes ressources halieutiques sont déjà largement surexploitées. Les spécialistes prédisent, qu’au rythme actuel, il n’y aura plus de poisson dans le monde en 2048. Il faut exercer la pleine souveraineté et prendre des initiatives hardies au niveau des Etats de la sous-région et dans les organisations régionales de gestion des pêches.
La situation de la pêche maritime artisanale
Un ensemble de pratiques de pêche remettent en cause la survie de la pêche maritime artisanale : chalutage, pêche des petits poissons pélagiques (pêche minotière), pêche INN et la surexploitation des ressources halieutiques démersales et hauturières.
Le poisson au Sénégal constitue plus de 70 % des apports en protéines animales. Cependant, la pêche artisanale, qui joue un rôle crucial dans la sécurité alimentaire du pays, est menacée par de multiples facteurs : les ressources sont mises à mal par la prolifération des pirogues, l’augmentation de l’effort de pêche et l’insuffisance des moyens de contrôle de l’État notamment l’installation croissante d’usines de fabrication de farines et d’huiles de poisson. Ce contexte met en péril les moyens de subsistance des communautés côtières. De Saint-Louis à Kafountine, en passant par Dakar et Kayar. De ce fait, les communautés locales se mobilisent.
A la faveur de l’industrie gazière et pétrolière, les pêcheurs artisanaux réclament l’érection d’une zone tampon transfrontalière avec la Mauritanie. Si les pêcheurs artisanaux à Sangomar et Jatara font des incursions dans les zones des plateformes pétrolière et gazière, ce n’est pas pour pêcher des petits poissons pélagiques.
La pêche INN
La pêche sénégalaise voit ses ressources halieutiques s’épuiser rapidement. Cette raréfaction s’explique par plusieurs facteurs : l’augmentation de la demande mondiale de poisson, des accords de pêche avec des pays tiers, une surexploitation et une pêche non réglementée (INN).
La pêche est en crise depuis 1990 dans la sous-région en raison de la surpêche, une exploitation abusive par les pêcheurs artisans, les pêcheurs industriels mais surtout la présence très inquiétante de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (Pêche INN). « En Afrique de l’Ouest, la pratique de la pêche INN est désastreuse et destructive pour l’économie maritime et l’écosystème de la région. Il faut le voir pour le croire. Les bateaux restent en mer durant des années et ne vont jamais dans les ports de la sous-région. Ils effectuent des transbordements illégaux de leur pêche à d’autres bateaux, bénéficient de l’avitaillement et des rotations d’équipages en mer. (Tafsir Malick NDIAYE, 2010) ».
La pêche INN est très organisée et ne respecte aucune législation des Etats côtiers. Les bateaux pirates développent impunément leurs activités, ils échappent toujours au contrôle. Les Etats n’ont pas les moyens d’asseoir une véritable police des pêches et que les eaux sous leur juridiction ne sont pas surveillées.
« Les chalutiers attrapent tous les poissons disponibles sans considération d’espèces protégées ou de normes de sécurité. Ils détruisent les filets des pêcheurs artisans locaux, cassent leurs pirogues et mettent leur vie en danger. Ils détiennent des filets lourds qui vont draguer l’océan détruisant l’habitat marin mais surtout les nurseries pour les juvéniles ; ce qui empêche les poissons de se reproduire. (T. M. Ndiaye, 2010) »
En matière de la loi sénégalaise, les ressources halieutiques des eaux sous juridiction constituent un patrimoine national. Le droit de pêche dans les eaux maritimes sous juridiction sénégalaise appartient à l’Etat qui peut en autoriser l’exercice par des personnes physiques ou morales de nationalité sénégalaise ou étrangère. La gestion des ressources halieutiques est une prérogative de l’Etat.
L’obligation de débarquement s’avère être une arme redoutable dans la lutte contre la pêche illicite.
L’aquaculture et les usines de farine de poisson
Les petits poissons pélagiques qui constituent l’essentiel de l’alimentation des Sénégalais, sont massivement transformés en farine de poisson, ce qui aggrave la surexploitation des ressources. En effet, entre 3 et 5 kg de poisson produisent 1 kg de farine de poisson. Ainsi, les ressources halieutiques, au lieu d’être destinées à l’alimentation humaine locale, partent vers les élevages de poissons carnivores et d’autres animaux comme les volailles ou les porcs dans des fermes d’élevage à l’étranger. Il y a un véritable boom de l’aquaculture à l’échelle mondiale (Chine, Norvège et Turquie), qui entraîne une demande accrue de farines de poisson, issues principalement de petits poissons pélagiques comme les sardinelles.
L'aquaculture constitue une réponse aux besoins croissants de poisson et à la surpêche. En 2022, 94,4 millions de tonnes de poissons et animaux de mer sont issus de l'aquaculture, un chiffre en augmentation régulière alors que les chiffres de la pêche de capture restent globalement stables autour de 92 millions de tonnes. Les trois principaux exportateurs sont la Chine continentale (12 %), la Norvège (8 %) et le Vietnam (6 %)22.
L'aquaculture reste dépendante de la pêche dans la mesure où 11 % de la masse des poissons sauvages pêchés dans le monde servent de nourriture aux poissons d'élevage.
L'aquaculture est présentée comme une réponse aux besoins croissants de poisson et pour mettre fin à la surpêche. Le boom de l’aquaculture à l’échelle mondiale, notamment en Chine, en Norvège et en Turquie, entraîne une demande accrue de farines de poisson, issues principalement de petits poissons pélagiques comme les sardinelles.
En augmentation constante depuis le début des années 2000, la production aquacole a dépassé la production halieutique pour la première fois en 2022, représentant près de 51 % de la production totale de produits de la mer, selon les chiffres de l’agence des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) figurant dans le rapport sur la situation mondiale des pêches et de l’aquaculture (2024).
La part de l'aquaculture dans la production totale d'animaux aquatiques a augmenté de 4% en 1970 à 51% en 2022. L'Asie concentre 70% de la production en 2016. Un peu plus de la moitié (57,7 %) des fermes sont en eau douce et élèvent des carpes et des tilapias. L’aquaculture fait aussi de l’élevage marin (saumon, thon, daurade, mollusques et crevettes) et la production de plantes aquatiques.
L'aquaculture, qui est préconisée par l’industrie et les pouvoirs publics, est une solution illusoire et une fausse promesse. D’abord, elle a besoin des ressources halieutiques comme aliment pour nourrir sa production, ensuite son coût économique, social et environnemental n’est pas viable pour se substituer à la pêche maritime artisanale. C’est une illusion de voir l’aquaculture nourrir les populations sénégalaises. C’est seulement un complément à la pêche maritime artisanale devant la surpêche et la surexploitation des ressources halieutiques. C’est la pleine souveraineté sur nos mers qui peut permettre à la pêche maritime nationale (artisanale et industrielle) de remplir sa fonction d’alimentation des populations sénégalaises.
Les qualités nutritionnelles du poisson d'élevage sont parfois inférieures à celles du poisson sauvage, comme c'est le cas du saumon d'élevage, qui contient souvent moins d'oméga-3 que le saumon sauvage.
L'aquaculture a contribué au développement ou à la circulation de maladies qui sont redoutées des aquaculteurs en raison des pertes qu'elles peuvent occasionner.
La pêche minotière
Il faut signaler la présence de la pêche minotière dans nos côtes ; la pêche minotière est une pêche industrielle et artisanale intensive destinée à alimenter les filières industrielles par des petits poissons pélagiques (alevins et juvéniles) de faible valeur commerciale, que l'on transformera en farines et huiles de poisson principalement pour l'aquaculture. La pêche minotière se pratique avec des filets à petites mailles qui capturent de grandes quantités de poissons, principalement de petits pélagiques ; elle n'est pas sélective. Sa zone de prédilection est le Chili, Pérou, Chine, Japon, États-Unis, Danemark. Elle compense l'effondrement des stocks de poissons sauvages d'intérêt commercial.
La pêche minotière, par opposition à la pêche alimentaire, est spécialisée dans la capture d’espèces transformées en farines, en huiles par les usines de réduction. On l’appelle aussi « pêche à finalité industrielle » (Carré, 2006). Elle est pratiquée artisanalement sous la forme de « pêche migrante » entre le Sénégal et la Mauritanie.
Cette « pêche migrante » est le fait de la pêche minotière artisanale et industrielle que les accords de pêche bilatérale entre le Sénégal et ses voisins favorisent. Après le chalutage qui a dévasté les habitats et les fonds marins, c’est autour de la demande minotière de ravager les petits poissons pélagiques. Ces espèces sont capturées par la senne tournante de la pêche migrante et de la pêche industrielle étrangère.
Il faut arriver à la réduction drastique de l’effort de pêche des sennes tournantes ; il faut réviser les accords de pêche Mauritanie-Sénégal jusqu’alors réservés exclusivement aux sennes tournantes.
Quant au Sénégal, les captures des petits pélagiques fluctuent selon les années et avoisinent les 300 000 tonnes en moyenne sur la période 2009 – 2018 avec une tendance linéaire à la hausse. La production la plus faible a été enregistrée en 2010 avec 266 900 tonnes alors que la plus élevée fut en 2016 avec 339 900 tonnes.
« Les gouvernements mauritanien, sénégalais et gambien doivent soutenir l’élimination de la capture de poissons sauvages à des fins d’alimentation aquacole et animale. Toute aquaculture dépendante de poisson sauvage ne devrait plus recevoir aucune subvention ou autre mesure de soutien gouvernementale » CCFD, Terre solidaire, 2024.
Les usines de farines de poisson menacent la sécurité alimentaire et mettent en danger la pêche maritime artisanale (pêcheurs, transformateurs-trices, mareyeurs). Elles sont une cinquantaine en Mauritanie et moins d’une dizaine au Sénégal.
La pêche minotière est une forme d’activité qui contribue au phénomène de surpêche. La lutte contre la surpêche et la pêche illicite vont à l’encontre du développement de l’aquaculture. Il faut comprendre que l’aquaculture est fortement dépendante de la surpêche, de la production de farine de poisson et de la pêche INN.
Au Sénégal, les organisations de la société civile (Adepa, Apapram, Conipas, etc.) autour de de la pêche artisanale luttent contre l'utilisation de poissons sauvages dans les chaines d'approvisionnement de l'aquaculture car les usines de farines de poisson menacent la sécurité alimentaire.
La pêche maritime artisanale est en danger face aux usines de farine de poisson mais également elle subit la menace née de l’exploitation des ressources pétrolières et gazières récemment découvertes au Sénégal et en Mauritanie.
Pétrole et gaz offshore
Au moment où le monde s’éloigne d’une économie à forte intensité de carbone, l’Afrique est en passe de devenir un géant des hydrocarbures.
Les transitions vers les énergies propres progressent et la structure de l’économie chinoise évolue, la croissance de la demande mondiale de pétrole ralentit.
C’est dans cette écorégion ouest-africaine que sont concentrées les flottilles de pêche industrielle qui défient au quotidien la pêche artisanale jusque dans ses derniers retranchements. Avec la poursuite de l’exploitation pétro-gazière, la survie de la pêche artisanale se pose à terme et les conflits iront crescendo. Il est inacceptable que la pêche artisanale soit délogée de nos mers puisque des communautés entières en vivent.
Depuis 2001, pratiquement toutes les zones côtières et marines, y compris des zones primordiales de biodiversité, des zones de pêche clés et des sites de tourisme importants ont été divisés en blocs ouverts aux activités d’exploration pétrolières et gazières.
La découverte au Sénégal du gisement pétrolier de Sangomar (ex SNE) en 2014 puis celui du gaz naturel de Grand Tortue/Ahmeyin (GTA) en 2016 suscite beaucoup d’intérêt et d’espoir certes, mais mérite d’attirer une attention particulière quant à sa mise en valeur.
Si les développements de Sangomar (pétrole) et de GTA-Ahmeyim (gaz) se poursuivent, les communautés locales et nationales ne recevront probablement pas les avantages économiques promis, mais devront subir les dommages environnementaux et économiques. L’exploitation des hydrocarbures, prétendument source de croissance et de développement pour les nations, ne sont que de fausses promesses d’amélioration économique pour les communautés locales et nationales si on ne tient pas compte des conditions d’exercice des activités de la pêche. Les communautés locales font beaucoup de sacrifices pour recevoir le développement pétro-gazier et doivent également faire face à la réparation des dommages causés aux écosystèmes et aux populations. Le développement pétrolier/gazier proposé ne produira pas les avantages économiques promis si nous n’exerçons pas la plénitude de notre souveraineté énergétique et maritime.
Le pétrole de Sangomar
Le pétrole de Sangomar est exploité dans une région maritime qui présente les caractéristiques suivantes: (i) la zone est écologiquement sensible du fait des caractéristiques de ses écosystèmes très riches en biodiversité ; (ii) la dépendance socioéconomique des populations par rapport au milieu naturel est très forte et (iii) les populations sont très inquiètes de l’exploitation pétrolière et gazière au vu de ses potentielles répercussions sur le milieu marin et les écosystèmes du delta de Saloum qui sont déjà très éprouvés du fait du changement climatique et de la pression anthropique. Zone érigée en site Ramsar, le delta du Saloum est une nurserie de classe exceptionnelle ; sa préservation est de mise.
C’est un projet national qui a un impact transfrontalier avec la Gambie et dont les répercussions s’étendent jusqu’en Guinée Bissau.
L’exploitation pétrolière en cours va naturellement avoir des conséquences négatives substantielles sur l'économie locale, l'environnement et qui sont de nature à menacer la cohésion et la stabilité sociale des communautés du delta du Saloum et au-delà.
De surcroît, le delta du Saloum subissait déjà une dégradation sensible, liée aux actions de l’homme, qui impactent la mangrove, la pêche et leurs activités connexes, ressenties par les communautés locales.
L’exploitation pétrolière est source de dégradation des écosystèmes du delta du Saloum. Elle entraîne aussi la détérioration de l’environnement marin par les pollutions dues au trafic des navires, des rejets d’hydrocarbure etc., qui impliquent la baisse de la production halieutique. Les conséquences seront constatées non seulement sur les activités socio-économiques et les activités connexes mais également sur la dégradation de la santé des populations et la valeur monétaire de perte de la biodiversité et des habitats naturels.
L’exploitation du champ Sangomar offshore se fait à près de 90 km des côtes sénégalaises. Cette localisation du site dans la zone économique exclusive du Sénégal peut amener à présager que l’impact le plus probable s’avère être une pollution localisée en haute mer, suite à un déversement de pétrole en tête de puits. En réalité, une opération de production pétrolière implique un processus long et complexe susceptible de générer de la pollution à chaque étape.
C’est le trafic maritime qui est la principale cause de pollution liée au pétrole au niveau mondial (413.100 tonnes). La deuxième source la plus polluante est constituée des activités terrestres (140.000 tonnes) et c'est la production offshore qui représente la plus petite source de pollution.
L’exploitation des hydrocarbures comporte des risques sécuritaires énormes et une série de coûts sociaux et environnementaux présents et futurs, directs et indirects, qui doivent être comparés aux bénéfices qu'ils apportent. Le risque le plus redouté dans l’industrie pétrolière est la marée noire du fait de son ampleur et de ses conséquences socio-économiques et environnementales.
En cas de pollution suite à un incident ou accident d’exploitation, les écosystèmes aquatiques et terrestres pourraient être affectés, ce qui causerait des dommages sur les espèces. Les coûts liés aux marées noires pourraient être bien pires que les attentes actuelles et les messages de l’industrie. L’émission des gaz à effet de serre, méthane (gaz très dangereux) et gaz carbonique, peut survenir à tout moment (éruption de puits, explosion de plateforme, déchets des eaux de production).
L'exploitation pétrolière offshore du champ de Sangomar pose un risque significatif pour la pêche artisanale.
Le gaz GTA-Ahmeyim
Projet transfrontalier, GTA-Ahmeyim se situe sur une zone de pêche Jatara ; elle est un récif corallien traditionnellement fréquenté par les pêcheurs de Saint Louis. C’est un projet d’intégration économique entre la Mauritanie et le Sénégal. Jatara fait partie d’une dizaine de sites de pêche qui a survécu à la dévastation du chalutage de fonds marins par la pêche industrielle.
Le champ gazier qui présente des réserves estimées à 450 milliards de m³ est situé dans des formations rocheuses sous le fond marin situé à 125 km des côtes et couvre une surface totale réputée égale à 9 463 km².
Elle abrite une installation flottante appelée FPSO (unité flottante de production, de stockage et de déchargement) et une plateforme à environ 35-40 km de la côte pour le prétraitement du gaz et l’élimination des liquides du gaz.
Le risque de collision entre les pirogues des pêcheurs et les navires de soutien qui sortent des zones d'exclusion de sécurité est présent en permanence. Il y a aussi l’impact qui porte sur la perte d’équipement de pêche pour les pêcheurs artisanaux et l’interférence entre les mouvements des navires avec les filets de pêche artisanale.
La superposition des zones de pêche et des sites d’exploitation gazière met en relief les menaces qui pèsent sur l’activité de pêche. Les zones de pêches sont occupées par l’industrie gazière avec l’érection d’une zone d’exclusion de 500 m de rayon. La perte des pêcheries au profit du développement des activités d’exploitation gazière accompagne les conflits d’usage de l’espace et des ressources halieutiques.
Il faut également noter le rétrécissement de la zone de pêche ; ce qui ne préserve pas l’Aire Marine Protégée (AMP) du fait des incursions fréquentes des pêcheurs.
La perturbation de l’environnement marin et côtier, l’altération des écosystèmes marins et côtiers et la perte de la biodiversité marine constituent des impacts négatifs.
Le gaz et le pétrole constituent un facteur d’insécurité maritime.
Expériences négatives d’ailleurs et faiblesses dans la gestion environnementale et sociale
La littérature foisonne d'exemples malheureux des dégâts causés par l'industrie pétro-gazière en Afrique et dans le monde développé : États-Unis, Gabon, Ouganda, Nigéria, etc. La promesse de bénéfices économiques est une fausse promesse : les arguments de l’industrie et de ses partisans que l’exploration et le développement des hydrocarbures sont porteurs d’amélioration en apportant plus d’emplois et de revenus plus élevés pour les populations, des investissements dans les soins de santé, les écoles et autres services sociaux et publics ; elle est chimérique.
Les bénéfices du développement pétrolier/gazier proposé iront aux riches (au Sénégal mais principalement dans d’autres pays), laissant les membres des communautés locales, et en particulier les pauvres, faire face aux dégâts laissés derrière eux.
La littérature mentionne que l’exploitation des hydrocarbures génère une série de coûts économiques, sociaux, environnementaux et culturels présents et futurs, directs et indirects, négatifs qui doivent être comparés aux bénéfices qu'ils apportent.
Dans la sous-région, le Nigeria, premier producteur de pétrole africain, est aussi le pire pays en termes de pollution pétrolière. La région la plus touchée est le delta du Niger.
Après plus d’une décennie de mise en valeur de Gadiaga (Forteza Corporation), le constat laisse penser que les ressources naturelles qui devaient être exploitées pour l’amélioration des conditions de vie des populations dont elles appartiennent selon la constitution du Sénégal, sont devenues source d'aggravation de leur précarité.
Les études d’impact réalisées pour GTA-Ahmeyim et Sangomar comportent des insuffisances notoires au plan de gestion environnemental et social ; il faut déplorer l’absence d’études des coûts environnementaux, sociaux, économiques et culturels dans les études de faisabilité.
Compte tenu de ces manquements, il est diligent d’empécher la poursuite de l’exploitation du pétrole sur les autres sites pressentis dans l’écorégion ouest-africaine tant que les effets environnementaux ne soient pas bien circonscrits et maitrisés dans une optique de la préservation des intérêts des communautés des pêcheurs.
Au demeurant, il n'est pas trop tard pour prendre les devants en renforçant la résilience des populations face aux effets du changement climatique et en favorisant une gestion plus durable des écosystèmes et de la biodiversité du delta du Saloum.
La demande mondiale de pétrole ralentit. La pollution climatique a des impacts négatifs partout dans le monde, en particulier dans les pays tropicaux, sur le PIB, les revenus et l’emploi. Ces impacts négatifs s’intensifient avec la poursuite des émissions de gaz à effet de serre. Quels que soient les impacts immédiats et directs du développement pétro-gazier sur les travailleurs, les entreprises et l’économie du pays, les impacts négatifs des changements climatiques les annuleront.
Le coût des énergies renouvelables, y compris l’énergie solaire, a chuté si rapidement qu’elles constituent déjà aujourd’hui la forme d’énergie la moins chère. Cette tendance ne fera que consolider la transition vers l’abandon des combustibles fossiles au cours de la prochaine décennie. Il n’existe aucun argument économique valable contre le passage rapide des combustibles fossiles polluants à des sources d’énergie plus propres.
L'exploitation pétrolière, tout en étant potentiellement lucrative, peut avoir des conséquences négatives substantielles sur l'économie locale, l'environnement, et la société. Il comporte également des risques budgétaires.
En effet, opérer une exploitation de gisements d’hydrocarbures ou d’autres ressources minérales qui soit économiquement rentable, socialement équitable et écologiquement tolérable est quasi impossible. De ce fait, les pouvoirs publics, quand ils décident de valoriser ces ressources, doivent renforcer leur vigilance dans la gestion environnementale et réviser leurs modes de gouvernance de manière à garantir aux populations une vie décente dans un environnement sain, pour éviter les tensions sociales.
Les pêcheurs artisans constituent la force des communautés côtières et l’aquaculture artisanale (même industrielle) ne saurait tenir lieu et place des pêcheurs artisans. La défense de la pêche maritime artisanale est un impératif pour sauvegarder les droits humains, sociaux et culturels, environnementaux et économiques des communautés locales et nationales. L’aquaculture une illusoire promesse de reconversion des pêcheurs artisans. Il faut doter les pêcheurs d’un armement moderne pour éviter les conflits avec l’industrie pétrolière, stopper l’émigration clandestine, la perte de la biodiversité, l’insécurité et la piraterie.
Toute catastrophe, qui découlerait de la production du gaz ou du pétrole, aura ainsi un impact transfrontalier considérable sur les écosystèmes et les communautés dans cette région. Aucune plateforme pétrolière n’est à l’abri de marée noire causant des dégâts environnementaux, économiques et sociaux considérables.
Il faut renforcer le cadre de gestion de l’exploitation pétrolière et gazière en impliquant davantage les populations et en leur tenant un langage de vérité.
C’est la pleine souveraineté sur nos mers qui peut permettre à la pêche maritime nationale (artisanale et industrielle) de remplir sa fonction d’alimentation des populations sénégalaises.
La renégociation des contrats d’hydrocarbures est souhaitable pour notre souveraineté énergétique et l’exigence d’une pêche maritime durable pour défendre les communautés côtières, les pêcheurs artisanaux et l’environnement.
El hadj Bara Deme et Pierre Failler, « La pêche migrante au Sénégal, en Mauritanie et Gambie : un mécanisme d’approvisionnement des industries de farine de poisson », VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [En ligne], 23-1 | Avril 2023, mis en ligne le 03 avril 2023, consulté le 31 décembre 2024.
Tafsir Malick Ndiaye (2010), la pêche illicite non déclarée et non réglementée en Afrique de l’Ouest
[1] Il s’agit du Cap Vert, la Gambie, la Guinée, la Guinée-Bissau, la Mauritanie, le Sénégal et la Sierra Leone. La CSRP est une organisation intergouvernementale ayant pour mandat la règlementation des Pêches des États membres.
Par Aliou Gabou Cissé, Ma Serigne Dièye & El Hadji Farba Diop
HABITER ET PANSER LE SINE
Il faut s’inspirer d’un New Deal Citoyen où le Sine sera au carrefour d’initiatives audacieuses et porteuses de progrès, avec un accent mis sur le savoir, le savoir-faire et le savoir-être ; un retour à la source par l’appropriation culturelle
Aliou Gabou Cissé, Ma Serigne Dièye & El Hadji Farba Diop |
Publication 13/02/2025
« La conscience de soi est en soi et pour soi quand et parce qu’elle est en soi ; c’est-à-dire qu’elle n’est qu’en tant qu’être reconnu. » - Hegel, Phénoménologie de l’esprit, 1941.
Le développement ne se rêve pas, il se crée ! Cette assertion devrait être inscrite au fronton de toutes les villes sénégalaises, comme pour rappeler aux citoyens, leur rôle fondamental dans le progrès du Sénégal. Cette compréhension des enjeux de l’heure conforte l’idée d’une dynamique sociopolitique qui devra être centrée sur la conscientisation, la formation, l’éducation et la résilience de la jeunesse sénégalaise.
Le véritable défi politique qui a parfois résisté à l’ambition ferme des différents régimes qui se sont succédé à la tête du pays, a été de résorber la lancinante question du chômage chronique des jeunes, de leur formation et de susciter l’espoir en eux. Dès lors, cette bombe sociale inquiète de plus en plus malgré les alternances consommées, s'appuyant sur les idées et réformes brandies lors les professions de foi, puis consumées, au temps des joutes électorales. La cadence des actions politiques s’est vue freinée par la célérité du progrès démographique qui place le Sénégal parmi les pays ayant une forte population juvénile avec 75% de citoyens âgés de moins de 35 ans, soit un âge médian de 19 ans. De telles statistiques peuvent être perçues autant, comme une opportunité qu’un obstacle, surtout quand on mesure la position socio-économique du pays, qui nous confine parmi les moins avancés avec des indices de développement humain encore très faibles. Ce fait a résisté aux efforts des gouvernements et à la dynamique populaire d’où les tares notées dans la territorialisation des politiques publiques qui devaient servir à polariser des actions de développement appréciables en termes d’impacts socio-économiques, de lutte contre la pauvreté endémique, d’amortissement de la régression de l’économie rurale, et enfin, d’autonomisation des secteurs porteurs de croissance.
Aujourd’hui, pratiquement toutes les villes du Sénégal en pâtissent et tentent de subsister face à la ségrégation spatiale qui privilégie la région de Dakar au détriment de l’interland sénégalais. Ainsi, des zones comme Fatick, longtemps soumis à une léthargie soutenue sur tous les plans malgré le choix populaire fait en 2012, sur l’un de ses illustres fils, Macky Sall, ancien Premier ministre, devenu président de la République du Sénégal. Cette haute distinction n’a pas servi à assouvir la soif d’espérance nourrie par les fatickois en voyant leur édile porté au pinacle de la gouvernance suprême de la République.
Dès lors, après 12 ans de magistère, à la chute de l’ancien régime du fils du terroir, on assiste à une grande désillusion. Celle d’une ville toujours en manque d’infrastructures aux normes, d’une économie chancelante, d’une municipalité aux moyens résolument limités et symptomatique d’un déficit de schéma de gouvernance efficace. S’y ajoutent à cela, les relents de la pression sociale que subit la jeunesse locale, souvent en proie aux débits de boissons alcoolisées florissants, à la drogue circulante, aux infections sexuellement transmissibles (IST) drainées par la prostitution déguisée, et à l’insécurité grandissante. Tout récemment, un rapport du ministère de l’Éducation nationale fait état de plusieurs cas de grossesses précoces notées dans les écoles…
Cependant, ce cocktail nocif dans le Sine cohabite paradoxalement avec un éveil citoyen, un renouvellement de la classe politique et une floraison d’organisations de jeunesses enclines à contribuer à l’effort de développement local dans le continuum des ambitions ratées par les anciens barons locaux sous Macky Sall. Faut-il croire à une réappropriation de l’espace sociopolitique fatickois par la jeunesse intellectuelle ?
« Dis-moi quelle jeunesse tu as, je te dirais quel pays tu auras », ces propos attribués le plus souvent au président Abdoulaye Wade, consacrent une vision claire du rôle fondamental des jeunes dans la construction d’un pays surtout, quand ces derniers sont bien formés et ivres des valeurs de Jom, de Ngor, de Fula et de Fayda.
D’ailleurs, ce mindset (état d’esprit), sine qua non au progrès personnel et collectif, rappelle éloquemment le discours du président Américain John F. Kennedy qui affirmait par excellence : « Ne demander pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais préoccupez-vous de ce que vous pouvez apporter à votre Nation ». Fort de cette idée, et conscient de la réalité tangible à Fatick, l’intellectuel Sine-Sine se doit d’être un citoyen engagé par et pour le changement, à travers la proposition de plans de ruptures et de réformes systémiques. Il ne doit ni prêcher la résignation, ni l’abandon de l’espoir ardent, encore moins adopter une politique de l’autruche face à ses responsabilités. Il doit plutôt pousser à la réflexion, à l’action, à la prospective. La véritable rupture serait donc de poser les jalons à l’aune d’une citoyenneté proactive soucieuse de l’éducation, de l’économie numérique, de l’environnement, de la salubrité publique, de l’entrepreneuriat, du chômage des jeunes, de la sécurité des personnes et des biens, des problèmes de mœurs, etc. C’est clairement une invite à créer les conditions d’un espace scientifique et intellectuel de qualité.
Dans un contexte mondial ponctué de guerres technologiques et /ou politiques, de repli économique et commercial, conjugué à un inconfort au plan national, dû à des marges de manœuvres budgétaires et financières limitées - sous asphyxie des institutions de domination néolibérale - il faut s’inspirer d’un New Deal Citoyen (NDC) où le Sine sera au carrefour d’initiatives audacieuses et porteuses de progrès. Ce sera un progrès endogène avec un accent mis sur le savoir, le savoir-faire et le savoir-être ; un retour à la source par l’appropriation culturelle et historique, et des actions d’envergure économiques, sociales et citoyennes. Cela consiste à convier les acteurs autour du New deal citoyen pour résorber les velléités sociopolitiques et bouter définitivement les raisons majeures du retard ou du moins, de l’appauvrissement de la ville. En effet, les tensions sociales et les blocages politiques souvent observés dans les villes en difficultés sont les reflets d'un manque de dialogue et de coordination entre les différents acteurs (citoyens, élus, entreprises, associations, etc.). Il s’agit donc d’une approche inclusive et participative, en plus d’une invite à la résolution des problèmes structurels qui freinent le développement de Fatick. Les préceptes hérités de la culture africaine particulièrement chez les sérères dont la fonction du Ngel ou Pènc (Agora) en wolof, prédisposent au dialogue, à la concertation sur les choses hautement importantes pour le devenir de la société. Joseph Kizerbo, en brillant historien, affirme à ce propos : « A tous les niveaux, l’Africain était avant tout un être social. Toutes les étapes de la vie étaient marquées par des réunions. C’est pour cela qu’on a parlé du débat permanent africain qui était instauré sous les arbres – la palabre – où chacun avait non seulement la liberté d’expression, mais l’obligation de s’exprimer. »
Ce réflexe culturel s’accommode de l’appel vers un N.D.C permettant d’identifier les priorités et de coconstruire des solutions adaptées aux réalités locales. Qu’en sera-t-il de ce Pèncoo citoyen ?
Allons vers des fora citoyens, des ateliers de réflexion ou les plateformes numériques pourraient servir de tribune d’expression des idées ! Pourquoi ne pas instaurer les Assises du Sine ?
Autant d’approches systémiques qui convoquent une volonté collective forte et un engagement citoyen dont l’objectif serait de bâtir une ville plus juste, prospère et plus résiliente.
Des jalons importants sont posés à travers des initiatives portées par une bonne partie de la jeunesse fatickoise qui œuvre incessamment et de façon désintéressée à la promotion, à la réhabilitation et à la vivification des valeurs citoyennes. La formation, le culte de l'excellence, la solidarité, la promotion du vécu associatif sont les principaux objectifs pour lesquels ils s'investissent. Les actions menées par la plateforme Sine Du Futur ou l'association I'm Talibé sont édifiantes à ce sujet. Elles sont avant-gardistes et agissent pour le futur. L'exaucement de leurs vœux, se reflètera d'ici quelques années, par une jeunesse bien formée, consciente des défis et enjeux de leur époque, redevable à leur terroir et capable de décider pour eux, notamment de choisir - surtout de bien le faire pour ne pas le regretter - leurs dirigeants.
Vivement pour un New Deal Citoyen au Sine !
par Arame Gueye Sène
AIDE AU DÉVELOPPEMENT, LEVIER OU ILLUSION ?
Entre volonté de transformation, dynamiques de dépendance et jeux de pouvoir, la question reste entière : comment construire un modèle où les acteurs locaux ne subissent plus, mais définissent eux-mêmes leur trajectoire de développement ?
À la fin de mes études en économie et sociologie du développement, avec une spécialisation sur les enjeux et pratiques du développement dans les pays du Sud, je ne voulais plus travailler dans ce domaine. Trop de contradictions, trop d’enjeux géopolitiques dissimulés derrière des discours altruistes. Je voyais un écosystème dominé par des logiques d’assistance plutôt que de transformation structurelle, avec des interventions souvent déconnectées des réalités locales et des projets qui disparaissent une fois les financements épuisés.
Je constatais aussi un déséquilibre profond dans la prise de décision : les priorités du développement étaient souvent définies à l’extérieur, par des bailleurs dont les intérêts ne coïncidaient pas toujours avec ceux des populations locales. Loin d’être un levier d’autonomisation, l’aide publique au développement semblait parfois entretenir une forme de dépendance, freinant l’émergence de solutions locales et le renforcement des institutions nationales.
J’étais convaincue que les pays du Sud ne se développeraient pas grâce à l’aide publique au développement, mais plutôt en misant sur leurs propres ressources, en définissant leurs propres stratégies et en repensant leurs modèles de gouvernance.
Pourtant, plus de 10 ans plus tard, j’évolue toujours dans cet univers, au plus près des réalités du terrain. J’ai commencé comme bénévole dans des initiatives locales et des associations, avant de co-fonder Social Change Factory, une organisation engagée pour une jeunesse actrice du changement. Entre-temps, j’ai également travaillé au sein d’ONG internationales et d’agences des Nations unies sur les migrations mixtes et la redevabilité humanitaire découvrant différentes approches et logiques d’intervention.
Et une chose est claire : ce n’est ni blanc ni noir. Et il est impossible de nier que l'aide apporte des solutions. Il est impossible de nier ce que cette aide a permis en terme de vies qui ont été sauvées, d'emplois et d'opportunités qui ont été créés, d'infrastructures permettant un accès à l’eau potable et aux sources d’énergie qui ont été construites et de nouvelles technologies qui ont pu être partagées.
Le développement est une mécanique complexe, où se mêlent besoins réels, stratégies politiques et intérêts parfois contradictoires – qu’ils soient institutionnels ou personnels. Entre volonté de transformation, dynamiques de dépendance et jeux de pouvoir, la question reste entière : comment construire un modèle où les acteurs locaux ne subissent plus, mais définissent eux-mêmes leur trajectoire de développement ?
Quand nous disions récemment dans une tribune collective publiée par Le Monde : « Ne coupez pas l’aide publique au développement, repensez-la » nous ne nous doutions pas que quelques mois plus tard, le gouvernement américain allait décider de suspendre USAID.
Tout cela pose une question essentielle : qui définit les priorités du développement, et dans quel intérêt ? Car, comme le Général De Gaulle le rappelait : "Les États n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts."
Alors, quels devraient être ceux des Africains et Africaines ?