AMNESTY INTERNATIONAL DÉNONCE UNE «RÉPRESSION INQUIETANTE» AU BÉNIN
Des cas de blessés faisant l’objet de représailles et de harcèlement de la part des forces de sécurité, sous la forme de surveillance et de détentions arbitraires, sont signalés aussi
Un tableau sombre. C’est le constat qu’Amnesty international a fait au Bénin. L’ONG internationale de défense des droits humains a pu relever pour le déplorer dans un communiqué rendu public hier «une répression post-électorale inquiétante». Celle-ci se résume ainsi : «Quatre morts par balles dont une mère de sept enfants, des familles (qui) font face à des obstacles administratifs pour récupérer les corps des victimes (et) des manifestants blessés sont arrêtés et empêchés d’accéder aux soins.»
Dans le détail, on note qu’entre le 28 avril, jour des élections législatives, et le 2 mai dernier, Ai a documenté «la mort par arme à feu, d’au moins quatre personnes composées d’une mère de sept enfants, d’un jeune de 19 ans, un apprenti soudeur décédé des suites de ses blessures (il avait reçu, la veille, une balle à l’abdomen lors des manifestations dans la même ville), et de deux autres hommes». «Tout ce que l’on veut c’est récupérer le corps, procéder à l’enterrement pour pouvoir faire le deuil et passer à l’étape suivante, sans quoi la douleur ne passera pas et on ne pourra pas aller de l’avant», ont déclaré des familles de victimes aux représentants de Amnesty international.
Un blessé grave a été enregistré à Cotonou, la capitale et plus grande ville du pays, où des arrestations arbitraires ont été opérées par les Forces de sécurité. Tout comme des fouilles systématiques ainsi que des interrogatoires de simples passants ont été aussi faits dans le quartier Cadjéhoun où réside l’ancien Président Yayi Boni.
Appréciant cet état de fait, Samira Daoud, directrice régionale adjointe d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale, estime que «les autorités béninoises ont fait le choix d’attaquer de front les droits humains plutôt que de les protéger». A ses yeux, «l’usage excessif de la force est contraire à l’exercice du droit de manifester tel que reconnu par la constitution béninoise et le droit international». D’où son appel aux autorités à «veiller à ce que des enquêtes approfondies et impartiales soient menées sans délai au sujet des personnes tuées par arme à feu et des blessés» mais aussi à «s’abstenir de déployer des militaires dans des opérations de maintien de l’ordre public».
Des cas de blessés faisant l’objet de représailles et de harcèlement de la part des forces de sécurité, sous la forme de surveillance et de détentions arbitraires, sont signalés aussi par Amnesty international. Qui informe de la détention arbitraire d’un homme de 35 ans «à la prison civile de Cotonou depuis le 8 mai pour attroupement non armé». Ce dernier «a été blessé le 1er mai et sa main droite amputée, pour avoir tenté de se débarrasser d’une grenade lacrymogène lancée par les Forces de l’ordre. Sans prendre part aux manifestations, il se trouvait à Cadjehoun à Cotonou non loin du domicile de l’ancien chef de l’Etat Yayi Boni». Dans ce même quartier, «une vingtaine de membres des Forces de sécurité procèdent à des fouilles systématiques à l’entrée des principales rues. L’avocat de Yayi Boni a d’ailleurs été empêché de le rencontrer le 8 mai dernier», renseigne Ai. Ce qui pousse sa directrice régionale adjointe d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale à inviter les autorités à «mettre un terme aux fouilles systématiques et lever toute surveillance aux abords du domicile de l’ancien Président Yayi Boni».
Par ailleurs, Amnesty international relève l’arrestation de nombreuses personnes présumées proches de l’opposition «dans la rue, sans convocation préalable, par des agents de sécurité en civil et à bord de véhicules banalisés». «Des activistes politiques sous pression ont été contraints de quitter le pays pour échapper à des arrestations. Certains d’entre eux sont accusés de ‘’participation à un attroupement non armé pouvant inciter la population à la révolte’’ ou ‘’incitation à la haine et à la violence par l’usage des réseaux sociaux’’.»
«Aucun blessé ne doit faire l’objet d’arrestation ou de détention alors qu’il est en train de recevoir des soins. Les autorités doivent prendre de toute urgence des mesures pour fournir toute assistance nécessaire aux victimes des violences», a encore déclaré Samira Daoud.