CESAR ATOUTE BADIATE A PERDU LE CONTROLE DE LA FACTION DE KASSOLOL…
César Atoute Badiate, ex-chef de l’aile militaire du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc), a connu des heures de gloire dans le maquis casamançais.. erre le long de la frontière bissau--guinéenne
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César Atoute Badiate, ex-chef de l’aile militaire du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc), a connu des heures de gloire dans le maquis casamançais. Il a été pendant près de deux décennies le chef incontesté du front sud (frontière bissau-guinéenne) de Atika, la branche armée du mouvement indépendantiste.
Il a réussi à y créer un véritable bastion après avoir chassé Salif Sadio, le chef d’état major du mouvement, devenu son ennemi juré. Il a fait face à toutes les tentatives de le déstabiliser et les a déjouées. À un moment donné, il a failli perdre son trône. En réalité, certains sages de l’aile civile s’étaient activés pour le retour dans le maquis de feu Ousmane Niantang Diatta, un des fondateurs de Atika qui était revenu à la vie civile suite à des frustrations. Ces sages avaient estimé que c’était un énorme gâchis que ce vieux briscard (Gnantang) prenne sa retraite alors qu’il disposait de pouvoirs mystiques inégalés au sein du Mfdc. Ils voulaient donc à tout prix le faire revenir. Un retour que le vétéran avait accepté tout en exigeant ‘être intronisé chef du front sud à la place de César Badiate, une fois revenu dans le maquis. Ce dont ce dernier n’avait pas voulu entendre. Cette fin de non recevoir opposée à la principale exigence d’Ousmane Gnatang Diatta avait retardé ce retour de plusieurs années.
Création d’une nouvelle faction pour César
Finalement, ceux qui menaient campagne pour le faire revenir trouveront une formule consistant à créer une nouvelle faction placée sous son commandement. C’est ainsi que naquit la faction de Sikon (dans la zone du Balantakounda) sous la houlette de Niantang qui avait comme principaux collaborateurs Kompasse Diatta et Adama Sané. Cette faction, bien que n’ayant jamais eu des démêlées avec les éléments de César, ne les piffait pas non plus. Gnantang dirigera cette faction de Sikon jusqu’aux années 2010, année où il est tombé gravement malade. Il fut alors exfiltré discrètement du maquis par des proches parents qui le conduiront à Bissau où il avait pris l’avion à destination de Dakar avec l’aide des émissaires du président Wade lui-même sollicité par feu Ansoumana Badji, le secrétaire général du Mfdc de l’époque. Malgré les traitements reçus à Dakar, son état continuait à s’aggraver. Finalement, il fut transféré en Espagne avec l’aide de l’Etat. Après un an de traitement, il finit par retrouver une santé relative. Mais entre- temps, ses éléments, qui l’accusaient de trahison, avaient déjà pris la décision de le faire remplacer par Kompasse Diatta.
Ancien proche collaborateur de Salif Sadio
Pour ceux qui ne le connaissent pas encore, César Atoute Badiate est originaire du Kassa (département d’Oussouye), il est natif du village d’Emaye situé dans la commune de Oukout. Avant son enrôlement dans le maquis, il exerçait le métier de maçon. Il a participé à la construction de l’actuelle SOMIVAC de Ziguinchor qui abrite plusieurs services publics et particulièrement de développement rural. Il faisait partie des proches collaborateurs de Salif Sadio avant de déserter le maquis pour aller se réfugier en Guinée-Bissau suite à un conflit qu’il a eu avec ce dernier. C’est en 2000 qu’il est revenu dans le maquis avec la complicité de l’abbé Diamacoune Senghor. Ce dernier voulait évincer Salif Sadio de la tête du maquis. C’est ainsi qu’il avait effectué un séjour secret à Bissau entre les deux tours de l’élection présidentielle sénégalaise de 2000. Il tiendra plusieurs réunions avec des officiels bissau-guinéens, César et des compagnons de ce dernier à l’hôtel du 28 septembre à Bissau pour préparer une expédition contre Salif qui régnait en maître tout le long de la frontière bissau-guinéenne. Ce qui était perçu comme une menace par le régime de Coumba Yala, fraîchement élu président de la République dans une Guinée-Bissau qui n’était pas encore complètement sortie de la guerre civile qui opposait le président Nino Vieira et son ancien chef d’Etat major de l’armée, Ansoumane Maneh. En fait, Salif Sadio avait prêté main forte à Maneh qui, en retour, l’avait fortement armé après la guerre. Coumba Yala craignait donc que Salif retourne ses armes contre lui, d’autant que son allié Ansoumane Maneh refusait de reconnaître son autorité après son élection à la tête de la Guinée-Bissau. Donc, il était de l’intérêt du président Yala que Salif soit affaibli. C’est ainsi qu’il a décidé de soutenir le projet de l’abbé Diamacoune visant à destituer Salif Sadio qui lui tenait tête. Et c’est César Atoute Badiate qu’il choisira pour conduire cette mission. L’expédition partit de Bissau avec une impressionnante logistique fournie par les autorités de Bissau avec comme principal objectif d’arracher le commandement du maquis des mains de Salif Sadio. Un groupe de combattants armés jusqu’aux dents conduits par César et épaulés par l’armée bissau-guinéenne se dirigera vers Kassolol par voie maritime et s’emparera de cette base stratégique de Salif Sadio.
Prise de Kassolol de Salif Sadio
Cela s’est passé le 28 décembre 2000 à l’aube, après d’âpres affrontements qui ont duré plusieurs heures. La prise de cette base permettra de libérer certains chefs de guerre du Mfdc, faits prisonniers par Salif et qui devaient être exécutés. Dans ce groupe des prisonniers figurait un certain Mathieu Assine alias Youri Gagarine, très redouté à l’époque. Cet assaut de la base de Kassolol sera suivi d’autres violents affrontements qui vont durer plusieurs semaines entre les deux camps ennemis.
Au finish, César, qui bénéficiait d’un fort soutien de l’armée bissau-guinéenne, réussira à chasser les fidèles de Salif de Kassolol pur devenir maître des lieux. De nouveaux affrontements éclatèrent encore entre les deux frères ennemis dans le courant de l’année 2006. Mais, comme en 2000-2001, César et ses hommes, qui avaient encore l’appui de l’armée bissau-guinéenne, en sortirent vainqueurs, obligeant Salif et ses troupes à se replier dans la zone de Binjaloum non loin de Barakamandjioka, située dans le secteur de Boutoupa Camarakunda. Quelques semaines après, Salif rejoint le nord-Sindian, près de la frontière gambienne, où il a créé un nouveau quartier général. Et depuis cette dernière confrontation, César règne en maître à Kassolol et au niveau de ses bases satellites. Mais ces heures de gloire sont désormais à conjuguer au passé. En effet, il a perdu le commandement de Kassolol, depuis quatre ans maintenant, apprend ton de sources sûres. Les raisons ? Ses hommes qui le soupçonnaient d’être en intelligence avec les émissaires de l’Etat l’ont vomis. Pour eux, cela est une haute trahison. C’est ainsi que Henrique Diédhiou, un adversaire déclaré du natif d’Emaye, a profité de cette atmosphère confuse pour prendre le commandement de Kassolol qu’il dirige depuis lors. Badiate et un petit groupe de fidèles parmi lesquels un certain Rambo errent aujourd’hui sans base le long de la frontière bissau-guinéenne. La signature des accords de paix entre le gouvernement sénégalais et certaines franges du Mfdc le 13 mars 2022 à Bissau à laquelle il avait pris part l’a davantage éloigné de ses anciens fidèles. Ces derniers affirment aujourd’hui à qui veut l’entendre qu’il a paraphé ces accords en leur nom sans, au préalable, les informer. Cela est une autre trahison, estiment-ils. Mieux, disent-ils, César les a toujours utilisés pour ses intérêts personnels. À propos des accords de Bissau, ils disent qu’il les a signés pour tenter de se soustraire de la justice sénégalaise qui l’a condamné à la perpétuité dans le cadre de la tuerie de Boffa Bayottes et sous peine d’être contraint de quitter le territoire bissau-guinéen parle président Umaro Sissoko Embalo. Bref, selon ces combattants, ces accords signés par leur ancien chef César Atoute Badiate ne les engagent pas. Signalons qu’avant lui, ses anciens principaux lieutenants, Daouda Simendaou et Antoine Diamacoune (un neveu de l’abbé Diamacoune) avaient été désavoués par les combattants quand ils avaient accepté de se rendre à Dakar pour discuter avec les représentants du président Maître Abdoulaye Wade. Des informations non confirmées qui avaient circulé à l’époque indiquaient qu’ils avaient reçu des passeports diplomatiques afin de se rendre en Espagne. Étaient-ils partis ou pas ? Mystère et boule de gomme ! En tout cas, ils ne sont jamais revenus dans le maquis et aujourd’hui personne ne sait où ils se trouvent. Selon une source, dont nous n’avons pas pu faire confirmer les dires, des sages du Mfdc essaieraient de rétablir les ponts entre Badiate et ses anciens fidèles. Il y aurait eu, à ce propos, des discussions qui auraient permis de trouver une entente sur le fait que Badiate serait libre de retourner à Kassolol. D’après la même source, jusque-là, l’ancien chef du front sud vivrait toujours loin du groupe. Selon nos informations, lui et son lieutenant, Rambo, vivent reclus quelque part à la frontière bissau-guinéenne.