L’ACTE 3 DU PROCES DE LA BANDE DE FILAOS
Macky n’est plus au pouvoir. Mais l’Association pour la Justice Environnementale est dans la continuité de son combat. Son recours pour excès de pouvoir contre le décret portant déclassement d’une partie de la bande de filaos est à l’ordre du jour ce 29..
Macky n’est plus au pouvoir. Mais l’Association pour la Justice Environnementale est dans la continuité de son combat. Son recours pour excès de pouvoir contre le décret portant déclassement d’une partie de la bande de filaos de Guédiawaye est à l’ordre du jour ce jeudi 29 août 2024 à 10 heures devant la Cour Suprême. Un troisième rendez-vous que les militants de l’environnement espèrent prometteur et surtout protecteur de « cet espace vital » pour les Dakarois.
Le 25 avril 2024, le président de la deuxième chambre administrative n’a pas perdu du temps avec les dossiers inscrits au rôle. Et celui de la « bande de filaos » en fait partie. Il a demandé son renvoi, pour la deuxième fois , pour « instructions ». Dans la salle, coup de froid et interrogations des militants de l’environnement et d’une poignée de personnes. Des habitants de Guédiawaye dont une femme maraîchère « impactée », ont fait le déplacement pour venir assister à l’audience. Quatre mois plus tard, les membres de l’AJE appellent à la mobilisation pour, disent-ils, préserver « cet espace vital pour les Dakarois ». Malgré le doute autour d’un énième renvoi qui plane sur cette affaire, le président de l’organisation écologique, Mamadou Lamine Diagne, garde espoir. Il estime qu’au regard des arguments soulevés (absence d’intérêt général, l’importance de la bande contre l’avancée de la mer ou les conventions en faveur de la protection de la nature ratifiées par le Sénégal…) , le juge devrait trancher en faveur de leur combat. « Avec l’érosion côtière qui hante le sommeil des populations sur la bande de tout le littoral, il urge de les protéger » prévient l’ancien pensionnaire de l’Institut des Sciences de l’Environnement. Il va plus loin et demande à la Cour d’annuler tous les décrets qui « abattent » la forêt. Il vise le décret numéro : 2021-701 approuvant et rendant exécutoire le Plan d’Urbanisme de Détails de la zone nord de Guédiawaye déclassant une superficie de 150, 58 hectares et celui qui porte le numéro : 2023-813 de 826 hectares concernant Yeumbeul Nord – Malika – Tivaouane Peulh.
Le contexte d’un nouveau régime, les attentes des populations et maraîchers…
Ces dernières années, les filaos de Guédiawaye ont perdu de la surface. Il suffit de traverser la VDN 3 pour constater les dégâts causés par les bulldozers. Sur des kilomètres, des terrains nus ou en phase de construction. Ce qui laisse perplexe Thaddée Adiouma Seck, juriste environnementaliste. Il a rappelé à l’issue de l’audience renvoyée du 25 avril dernier que « pour prendre ces décrets, c’est l’argument de la cause d’utilité publique qui est souvent brandi ». « La réalité sur le terrain est tout autre », a-t-il regretté. D’après lui, partout, les bâtiments privés poussent comme des champignons et menacent la survie de la forêt. Aujourd’hui, le nouveau contexte avec l’avènement d’un régime, qui fait de la lutte contre l’occupation illégale et anarchique, son cheval de bataille, n’échappe pas aux écologistes et aux populations. Et d’ailleurs, la zone en « conflit juridique » a été ciblée d’investigations pour les tenants du pouvoir. Mais des habitants de la ville qui dénoncent « un désastre écologique » veulent des actions concrètes en faveur de la protection de la nature. C’est le cas de Cheikh Pouye qui soutient l’action judiciaire. Il se dit « choqué » par le rythme à la fois de destruction et de construction sur le site près du rond-point Malibu. « Petits, je jouais ici avec mes amis, nous y faisions nos feux de camp ». Mais regarde maintenant ce qu’il est devenu », déplore avec insistance le gestionnaire en BTP.
Et pourtant au pied des arbres, toute une économie locale. De Guédiawaye à Tivaouane Peulh en passant par Malika, des maraîchers, hommes – femmes, plus de 22 mille acteurs, de Dakar à Saint-Louis, y gagnent leur vie. Libass Fall, nous l’avions rencontré, dans son champ avec ses enfants. Il exploite 4 hectares de terres et ne cache pas sa colère. « De nos jours, il est question de combattre la migration irrégulière ». Mais « imaginez si je perds mes surfaces cultivables et mes revenus : que vont définir mes fils ? » s’interroge le cinquantenaire. Une question de survie que l’Association pour la Justice environnementale pose sur la table du nouveau régime et de la Cour Suprême.