L’EMERGENCE D’UN MINI-POLE ECONOMIQUE A LA CITE KEUR GORGUI
AMENAGEMENT DE LA SONATEL, FLORAISON DE STRUCTURES, DIVERSES ACTIVITES…
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La Cité Keur Gorgui, située à Sacré Coeur III, accueille beaucoup de ministères comme le celui de l’Elevage et des Productions animales, du Renouveau urbain, de l’Habitat et du Cadre de vie et d’autres structures qui y ont délocalisé leur siège à l’image de la Société nationale de télécommunication (Sonatel). Cette dernière, avec un siège multifonctionnel qui accueille tous les services de l’entreprise, fait partie des structures qui ont rehaussé le prestige de la Cité Keur Gorgui où plusieurs entreprises de secteurs différents font des affaires. A côté de cette activité formelle, se développe aussi une grande activité économique informelle qui rythme la vie de ce quartier qui porte le sobriquet du président Abdoulaye Wade.
Historiquement, la Cité Keur Gorgui, avec son plan d’aménagement de forme circulaire, emprunte le nom de l’ex-président Me Abdoulaye Wade qu’on surnomme affectueusement «Gorgui» (le vieux). Cette cité construite au début pour l’habitat ne cesse de s’agrandir avec la pléthore de bâtiments en construction. Très imposants et constitués pour la plupart d’immeubles, ces bâtiments abritent, entre autres, le ministère de l’Elevage, le Fonds d’appui aux Sénégalais de l’extérieur (Faise), le Cde (Consortium des Entreprises). C’est là également qu’est niché le siège de la Banque nationale de développement économique (Bnde) qui côtoie plusieurs institutions financières comme la Bimao, la Bicis, la Bis Avec son l’architecture reprenant la lettre «W» qui représente l’initiale du nom de l’ancien Président, la cité regorge d’énormes potentialités sur le plan économique.
En effet, en 2015, la Sonatel (Société nationale de télécommunications) y a étrenné son nouveau siège. Hyper moderne et majestueux, il est orné de vitres à l’image de miroirs visibles à des centaines de mètres et qui illuminent cette partie de la Vdn. Ce joyau a été inauguré par le Président Macky Sall qui l’a baptisé «Miroirs des technologies». Les jours ouvrables, il règne dans la zone une folle ambiance du fait de la multitude de voitures qui entrent et sortent du siège de la Sonatel et des structures voisines.
LE BUSINESS DES LAVEURS DE VEHICULES
Ce dynamisme dans la zone a créé des activités économiques tout autour, même si l’essentiel est encore à l’état d’informel. Avec les milliers de voitures qui stationnent sous les immeubles, les laveurs de véhicules ne se plaignent pas. Mamadou Diallo est l’un d’eux. Trouvé en train de laver un véhicule devant le siège de la Sonatel, cet originaire de la Guinée refuse dans un premier temps de deviser avec nous. Mais après quelques conciliabules, il confie qu’il était auparavant agent-coursier à la Sonatel. C’était avant le déménagement. Mais dès leur arrivée à la Cité Keur Gorgui, il s’est reconverti en laveur de véhicules pour la Sonatel. Maintenant, il lave plusieurs véhicules pour des agents de la maison qui le rétribuent à la fin de chaque mois. «Je suis un salarié, car je suis engagé pour laver les voitures des employés de la Sonatel. Dieu merci, je suis bien rémunéré», soutient notre interlocuteur. Parallèlement, il arrondit ses recettes avec de petites voitures lavées à 500 Fcfa et les 4X4 à 1.000 Fcfa. «C’est avec cette activité que j’entretiens mes parents en Guinée et ma famille qui habite au Sénégal», dit Mamadou Diallo. Comme lui, de nombreux jeunes s’activent dans le lavage des véhicules dans ce quartier. Devant la permanence Oumar Lamine Badji du Parti démocratique sénégalais (Pds), des chauffeurs devisent tranquillement pendant d’autres se restaurent, tout en faisant nettoyer leurs véhicules auprès des jeunes laveurs.
LES GARGOTES ET «TANGANA» AUSSI…
A quelques jets de pierres de là, se trouve la Banque Islamique du Sénégal (Bis) qui est en phase de finition. Elle jouxte le groupe CMS, l’agence Dakar de la Banque des Institutions mutualistes d’Afrique Juste à côté du chantier de Cde (Consortium des Entreprises), Khady Ly, 28 ans, taille moyenne, y tient son activité de restauratrice. Souriante et correcte pour attirer la clientèle, elle explique : «avant, je vendais des sandwichs dans une école de la place. Mais depuis 4 ans je me suis installée avec ma mère à la Cité Keur Gorgui pour tenir notre restaurant. Et Dieu merci, les affaires marchent très bien. Notre cible, c’était les ouvriers de la Cité Keur Gorgui, mais actuellement nous recevons les mécaniciens, quelques employés de ces entreprises, des élèves, car nous faisons de bons sandwichs. Nous recevons aussi des passagers et même des journalistes », ironise Khady Ly. Leur restaurant est ouvert du lundi au dimanche de 7 heures à 19 heures. Elles servent le petitdéjeuner jusqu’à 12heures. Et à partir de 13 heures, le déjeuner est servi. Quid du chiffre d’affaires ? Elle préfère ne pas en parler. Cependant, elle n’y voit aucun rapport avec l’installation de Sonatel dans la zone, même si elle reconnaît que le quartier a gagné en prestige.
En dehors de Khady Ly, des restaurants plus modernes offrent leurs services aux nombreux agents des Ministères et des autres structures sis dans la zone. Ces derniers, aux heures de pause-déjeuner, viennent se restaurer. Cependant, certaines restauratrices, sous le couvert de l’anonymat, soutiennent que l’arrivée de la Sonatel n’a pas augmenté leur chiffre d’affaires, car l’essentiel de leur clientèle vient des Ministères, agences, banques et même des écoles de formation.
DES CLINIQUES ET DES ECOLES DE FORMATION
A 150 mètres du nouveau siège de la direction commerciale de Dakar Dem Dikk (Ddd), se trouvent des écoles de systèmes français et anglais. Le secteur de l’éducation étant productif, on assiste aussi à la prolifération des Ecoles de formation professionnelle à la Cité Keur Gorgui. Parmi celles-ci, BEM (Bordeaux Ecole Management), l’Institut de santé et la HEIC (Hautes études en information et communication). A l’entrée de cette école de formation en journalisme et communication, on tombe sur une étudiante-journaliste en deuxième année du nom de Amélia Antonine Dacosta. Cette dernière confie qu’elle a choisi cette école pour la qualité de son enseignement et la disponibilité des matériels pédagogiques. «C’est un cadre idéal pour apprendre. L’environnement est calme, le lieu accessible et nous disposons d’une bonne connexion Wifi. J’habite à Grand- Dakar et après quinze minutes de marche je suis à HEIC», souligne notre interlocutrice.
Les structures de santé aussi ne sont pas en reste. On y trouve la clinique «Cardio 24» qui reçoit des malades venant de partout à travers le pays et même de la sous-région pour des interventions chirurgicales. Il y a aussi la clinique «Providence», située non loin du domicile de l’ancien ministre Habib Sy. Cette clinique reçoit des patients venant des sociétés logées dans la cité mais aussi des riverains. C’est ici aussi qu’est implantée la clinique «Keur Gorgui». Ces responsables disent s’acquitter de leurs taxes fiscales vis-à-vis de l’Etat et participent au développement économique du pays tout en recrutant. En face de la Bnde, se dresse la clinique «Suma Assistance» devant laquelle flottent deux drapeaux (celui du Sénégal et celui de la structure). Cet établissement sanitaire, qui célèbre en 2016 ses trente ans d’existence au service de la santé, est très visible dans le quartier. La cité dispose d’une pharmacie fonctionnelle 24 heures /24heures.
Très fréquentée, la zone est aussi le carrefour du petit commerce. On y retrouve des revendeurs de cartes téléphoniques, de fruits, de cacahuètes, de café Touba. Avec l’explosion des sociétés, les points chauds se multiplient aussi pour restaurer les employés des Ministères, de Sonatel, des agences, des directions et même des riverains. Ce qui fait vraiment de cette zone un vrai pôle économique en gestation. Même la route qui mène à la stèle Mermoz est devenue commerciale à cause des embouteillages. Aux heures de pointe, les marchands à la sauvette profitent des bouchons pour se faufiler entre les véhicules et proposer leurs articles. Ainsi, un vendeur de journaux indique que son activité tourne correctement. «Tous ces acteurs du secteur informel tirent leur épingle du jeu à la Cité Keur Gorgui», clame-t-il.
«LA CITE TIENT SA GENEROSITE DE SON HOMONYME, ME WADE»
Avec les chantiers qui pullulent dans la cité qui porte le surnom de l’ex-président de la République Me Abdoulaye Wade, les gérants de quincaillerie affichent le sourire. D’autant qu’ils écoulent bien leurs matériels et enregistrent d’importantes marges bénéficiaires. Sourire aux lèves, un employé d’une quincaillerie affirme que la Cité tient sa générosité de son homonyme Me Abdoulaye Wade, ce qui fait que toutes les activités y marchent sans problème. Cette zone dynamique sur le plan économique est aussi un coin très prisé par les organes de presse. Le siège de votre journal «L’As» se trouvait juste à côté à Sacré Cœur III pendant 10 ans (2005-2015) avant de déménager en début d’année en ville. La radio «Sud FM» première radio privée du Sénégal qui vient de fêter ses 22 ans de présence, se trouve aussi dans cette cité où elle est devenue un repère pour certains visiteurs inhabituels. Le Groupe «D Média» de Bougane Guèye Dany a aussi installé une partie de ses services en face du grand rond-point de ladite Cité. Cependant même si le déménagement a été annoncé en grande pompe, l’ensemble du groupe n’est pas encore sur place. Le groupe «Canal horizons» a une succursale à la Cité Keur Gorgui où il livre ses services.
AVIS D’EXPERT : Faire de Keur Gorgui une cité exclusive d’affaires
Avec le dynamisme qui règne dans la Cité Keur Gorgui où plusieurs structures importantes de l’économie moderne élisent domicile, d’un point de vue projection, il serait plus opportun de faire de cette Cité un lieu exclusivement destiné aux affaires. Même si au plan économique, aucune étude n’a chiffré la valeur ajoutée créée par les structures et les agents économiques qui s’activent dans l’espace de la Cité Keur Gorgui, notre interlocuteur pense qu’on pourrait aller vers le modèle des ‘’Clister’’ ou cités d’affaires. Siré Sy, directeur général du Cabinet Africa World Wide Group, consultant en géostratégie et géo économie indique que de plus en plus dans le monde, à côté de l’activité qu’il y a dans les zones industrielles où on produit et transforme, on a des cités d’affaires où il n’y a que des services. Dans ces cités d’affaires, l’économie des services se libère et on assiste à une création de richesses dans le secteur tertiaire des services. Ainsi, le consultant suggère de voir comment on peut instaurer ce modèle à la Cité Keur Gorgui. «Cela peut être un modèle complémentaire pour les zones franches industrielles. Le secteur des services gagnerait à être développé par l’aménagement des cités d’affaires en des cités d’affaires dédiées où on ne fait que du business», analyse Siré Sy. Sur ce, il se demande si la Cité Keur Gorgui ne gagnerait pas à être reclassée en une cité exclusivement dédiée aux affaires car le caractère hybride de la citée (habitation et affaires) peut être contreproductif. A l’image de la Silicon Valley aux Etats Unis qui est un terreau fertile à la création technologique et aux affaires, il serait très opportun d’avoir deux cités d’affaires, à Dakar et à Diamniadio à côté du parc industriel pour un essor de l’économie des services.