MERCREDI DECISIF POUR OUMAR AMPOÏ BODIAN ET RENE CAPAIN BASSENE
Demain mercredi sera un jour décisif pour Oumar Ampoï Bodian, chargé de mission du Mfdc, et le journaliste René Capain Bassène, chargé de communication à Anrac, présenté comme étant le planificateur de la tuerie de la forêt de Boffa-Bayottes, en 2018
Demain mercredi sera un jour décisif pour Oumar Ampoï Bodian, chargé de mission du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc), et le journaliste René Capain Bassène, chargé de communication à l’Agence nationale pour la relance des activités en Casamance (Anrac), présenté comme étant le planificateur de la tuerie de la forêt de Boffa-Bayottes, en janvier 2018. En fait, ces deux, qui font partie des trois condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité, le 13 juin 2022, à l’issue d’un long procès qui avait tenu en haleine l’opinion, seront, à nouveau, devant la barre de la cour d’appel de Ziguinchor.
Sera jugé aussi César Atoute Badiate, l’ex-chef de la faction du Mfdc de Kassolol (frontière bissau-guinéenne) qui avait écopé de la même peine. Mais ce dernier qui continue à errer dans le maquis, sera, selon toute vraisemblance, une fois de plus jugé par contumace. Après une très longue attente, Ampoï et Bassène seront jugés en appel demain devant la cour d’appel de Ziguinchor qui, à coup sûr, sera bondé de monde. Pour rappel, ils ont été condamnés en première instance pour association de malfaiteurs, participation à un mouvement insurrectionnel et complicité d’assassinat. Une partie de ces accusations n’avaient pas manqué d’intriguer les observateurs en ce sens qu’appartenir au Mfdc n’était plus, en principe, un délit après des accords conclus précédemment entre l’Etat et les responsables du mouvement indépendantiste, dans le cadre de la recherche d’une paix définitive en Casamance. La seule chose prohibée étant la détention d’armes de guerre. Pour preuve d’ailleurs, Oumar Ampoï Bodian, bien connu des autorités, a toujours vécu tranquillement au quartier Lyndiane de Ziguinchor avec sa famille. Mieux, il était même un agent de la société nationale La Poste. Quant à René Capain Bassène, officiellement, il n’a jamais appartenu au Mfdc, même s’il avait été recruté à l’Anrac suite à une entente entre les responsables du mouvement et les autorités de la République pour occuper le poste de chargé de communication. Une manière, avait-on dit, de faciliter le contact entre les deux parties.
Condamnation diversement appréciée
Au-delà de cet aspect, la condamnation du duo Ampoï Bodian-René Capain Bassène, dans le cadre de cette tuerie, a toujours été diversement appréciée par l’opinion et presque tous les observateurs se disaient surpris par le verdict car étant convaincus que l’enquête qui avait conduit à l’arrestation des 22 personnes initialement inculpées n’avait pas respecté toutes les procédures. D’ailleurs, Me Ciré Clédor Ly, l’avocat de la défense avait crié, à l’époque, au scandale. Mieux, il avait accusé le juge d’instruction d’avoir refusé d’entendre certains témoins qu’il avait cités et qui, selon lui, pourraient apporter beaucoup d’informations à propos de cette affaire. Son appel étant rejeté par la chambre d’accusation, il avait tenu un point de presse pour dire que ‘’l’audition de témoins, la confrontation de certains co-inculpés et éventuellement la confrontation avec des témoins désignés par la défense et qui peuvent aujourd’hui apporter la contre-vérité de la vérité supposée établie par l’enquête de gendarmerie. Cette enquête de gendarmerie est une véritable arnaque. Elle s’est contentée de ramasser des innocents, des membres d’une même famille et même des personnes qui n’étaient pas à Ziguinchor au moment des faits pour les impliquer dans une tuerie. On a établi le mensonge, tous les mensonges trouvés dans le procès-verbal d’enquête de la gendarmerie et apporté la preuve avec des alibis de la nonparticipation de ces personnes à ces événements. Mais le juge d’instruction a tout bonnement refusé d’écouter des témoins qui constituaient des alibis, d’écouter des personnes ou des autorités qui pouvaient apporter la preuve que telle ou telle personne ne pouvait pas faire partie de ces tueries’’. Me Ciré Clédor Ly avait poursuivi pour dire que ‘’nous prenons la responsabilité de demander à ce que publiquement le juge d’instruction entende Bachir, à l’époque directeur de la Rts, ainsi que le chef d’état-major actuel de l’Armée sénégalaise qui, à l’époque, pouvait connaître des faits précis pouvant innocenter des personnes qui sont aujourd’hui injustement emprisonnées’’.
Comme pour lui donner raison, douze sur les 25 détenus avaient été libérés le 28 janvier 2022, après avoir passé quatre ans en prison. Et lors du verdict du 22 juin 2022, seuls Oumar Ampoï Bodian, René Capain Bassène et César Atoute Badiate, ce dernier ayant été jugé par contumace, avaient été condamnés. Les autres accusés avaient été acquittés par le tribunal, deux d’entre eux s’en étaient sortis avec des peines couvertes par leur détention préventive. Ils avaient donc été libérés en même temps que leurs camarades acquittés. Quant au chef de village de Toubacouta, Sény Sané (lui-même inculpé), village d’où étaient originaires la majeure partie des inculpés, il était mort en prison suite à une maladie.
Les deux condamnés plaident non coupables…
Les deux condamnés, Oumar Ampoï Bodian et René Capain Bassène, avaient plaidé non coupables et continuent à clamer leur innocence dans cette tuerie. A les en croire, s’ils sont derrière les barreaux, c’est parce qu’ils sont devenus gênants pour beaucoup d’acteurs de la recherche de la paix en Casamance qui, en réalité, ne font que profiter de ce conflit au lieu d’oeuvrer pour une véritable paix.
Réussiront-ils à convaincre la cour d’appel de leur innocence ? C’est tout le suspense lié à ce procès. En tout cas, leurs familles se disent convaincues que la vérité sera dite et que Ampoï Bodian et René Capain Bassène vont rentrer chez eux, après le verdict de ce procès.
Pour rappel, c’est le 6 janvier 2018 que des adolescents partis chercher du bois dans la forêt de Boffa-Bayotte, à une vingtaine de km au sud de Ziguinchor, non loin de la frontière bissau-guinéenne, avaient été capturées et exécutées par des individus armés supposés appartenir au MFDC qui dispose plusieurs bases dans la zone. Selon un bilan qui avait été établi par la gendarmerie, 14 morts et 7 blessés avaient été enregistrés sur le lieu du drame. Seules trois personnes avaient réussi à s’échapper. Une semaine après ce massacre, 22 personnes avaient été arrêtées parmi lesquelles les 16 avaient été placées sous mandat de dépôt.