UNE ELECTION, DES PROGRAMMES ET DES ENJEUX
ELECTIONS DE REPRESENTATIVITE DES CENTRALES SYNDICALES
Rationnaliser la table de négociations et promouvoir une légitimité des syndicats dans la défense des intérêts des travailleurs, sont les principaux objectifs recherchés par les autorités en organisant les élections de représentativité des centrales syndicales, ce 30 mai 2017. Elles sont 14 en lice parmi celles-ci, la CNTS, l’UNSAS et la CNTS/FC. Elles sont portées respectivement par Mody Guiro, Mademba Sock et Cheikh Diop. Trois «mousquetaires» aux divers profils avec des revendications plus ou moins «communes».
Les travailleurs sénégalais sont appelés ce 30 mai 2017 aux urnes à l’occasion des élections générales de représentativité des centrales syndicales. L’Etat veut mettre fin à ce désordre et rationnaliser, par ricochet, la table de négociations face à une prolifération des syndicats regroupés dans les centrales. Les autorités veulent avoir moins d’interlocuteurs. Du moins, ceux les plus représentatifs pour aller à «l’essentiel».
Organiser ces élections est un pas pour atteindre leurs objectifs. Les résultats attendus du 30 mai 2017 constituent deux enjeux majeurs. Pour l’Etat, il est question d’avoir plus de lisibilité et de légitimité dans la représentation et la défense des droits et intérêts des travailleurs. Pour les centrales syndicales, ce rendez-vous crucial est un moment de réunir le mouvement syndical longtemps fragmenté. Elles ont compris que l’unité syndicale est primordiale pour la matérialisation des revendications. Malgré les efforts consentis par les autorités, elles restent constantes, notamment la Santé et de l’Electricité, les collectivités locales, l’industrie alimentaire, en plus des enjeux sur le pétrole et le Gaz. Le contexte est loin de la période de dilatoire de certains acteurs syndicaux. Cette possibilité de la détermination de la représentativité des organisations professionnelles d’employeurs par voie d’élections est symbolisée entre autres, par trois leaders du mouvement syndical sénégalais. Il s’agit de Mademba Sock, Mody Guiro, Cheikh Diop.
Mademba Sock, le teigneux !
Pour cette élection du 30 mai, le secrétaire général de l’Unsas charme les enseignants. Mademba Sock a obtenu le soutien de Mamadou Lamine Dianté et l’affiliation du syndicat des enseignants libres du Sénégal/Originel.
En tournée à l’intérieur du pays, Mademba Sock a tendu la main aux enseignants pour un vote massif au profit de l’Unsas. Il avance comme argument la défense des intérêts des éducateurs et l’amélioration de leurs conditions de travail. Ces arguments avancés convainquent-ils les enseignants ? La personne de Mademba Sock rassure-t-elle les enseignants ? En attendant les résultats de ces élections pour trouver réponse à cette question, Mademba Sock aura cet atout d’une personne réputée tenace.
Teigneux ! Oui, dans la prise en charge des préoccupations des travailleurs, notamment les difficultés auxquelles ils rencontrent.
Il doit sa célébrité à la grève de l’électricité en 1998 qui lui avait valu un emprisonnement de six mois. Il était accusé d’avoir orchestré un black-out qui avait mis Dakar dans l’obscurité un soir. Ces élections de représentativité ne sonnent-elles pas la fin de ces «monuments syndicaux» ? En tout cas, Mademba Sock sonne le glas en annonçant que « si l’Unsas gagne, il va se retirer ». Car, soutient-il, «de jeunes leaders syndicaux compétents, à même de prendre le flambeau de la lutte syndicale, ont émergé aujourd’hui, et qu’”après avoir connu plusieurs alternances politiques, le pays doit connaître une alternance syndicale».
Décidant de se lancer dans une dynamique de reconstruction d’un mouvement syndical solide et de reconfiguration de la carte syndicale du pays, Mademba Sock, en plus d’avoir obtenu le soutien de Sutsas de Mballo Dia Thiam et les syndicats de la Sénélec, la SDE et les transporteurs et chauffeurs, s’engage à la revalorisation de la fonction enseignante.
«Madia», le fougueux !
Né le 17 novembre 1951 à Kayes au Mali, Mody Guiro remettra en jeu sa victoire des dernières élections de représentativité de 2011. La Confédération des travailleurs du Sénégal (Cnts) était sortie première avec 39,61% des suffrages valablement exprimés. Mody Guiro avait doublé l’UNSAS (22,41%), la CSA (14,12%), la CNTS/FC (7,43%), la FGTS/B (4,36%), la CDSL (3,74%), etc. Défendre la cause des travailleurs est son exercice préféré. L’enjeu de porter en bandoulière le respect des droits des travailleurs constitue un objectif journalier de Mody Guiro. Titulaire d’un CAP électricien, puis en électro-pneumaticien spécialisé en contrôle atomicien, Mody Guiro se présente côté curriculum vitae comme un scientifique. En revanche, dans la pratique professionnelle, l’homme ne fait pas dans la demi-mesure pour mener le combat de principe. Son passé de «militant communiste» le conduit à s’engager pour l’amélioration des conditions de travailleurs. D’abord en tant qu’adjoint de l’Union des syndicats de Thiès (Ust). Puis délégué et enfin secrétaire régional de l’Ust. Echelonnant les postes, il devint le secrétaire général national avec comme sacerdoce : le respect du droit du travail, santé et sécurité. Madia – c’est son surnom–porte avec fougue les revendications des travailleurs. Sans concessions. Mais, avec responsabilité. Son appartenance à un parti politique (Parti socialiste) n’est pas un handicap pour porter le combat de la liberté syndicale. Pour cette année, Mody Guiro présente le bulletin rouge pour espérer réediter le coup de 2011.
Cheikh Diop, le combattant de la réunification !
Derrière son art de communiquer – il a le verbe facile -, Cheikh Diop est devenu au fil des ans un des syndicalistes les plus en vue d’un mouvement syndical sénégalais effrité et en perpétuelle fragmentation. Né en 1953 à Gandeck, dans un village situé à Bambey, Cheikh est allé milité à la Cnts à la demande de son parti, le Rassemblement national démocratique (Rnd). De fil en aiguille, il occupe les postes en prônant un syndicalisme libre, de contre-pouvoir. Après une scission de la Cnts, Cheikh Diop continue de faire son petit chemin. C’est parce qu’il a choisi de faire du syndicalisme un sacerdoce. Pour ces élections de représentativité du 30 mai 2017, le leaders de la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (Cnts/Force du Changement) part sur deux questions fondamentales pour élaborer sa stratégie pour convaincre les travailleurs sénégalais. Cheikh Diop interpelle doublement les sénégalais en soulevant deux interrogations : Est-ce que le leadership qui a été conféré à une centrale et à son leader lors des dernières élections de 2011, a été correctement assumé ? Est-ce que ce leadership qui a été conféré, a été correctement partagé ?
Deux questions que Cheikh Diop, secrétaire général de la Cnts/Fc tentent de donner des éléments de réponse pour aller chercher la confiance de l’électorat. Des indécis, des abstentionnistes aussi, si l’on sait que le taux de participation était faible à la dernière élection de 2011.
Cheikh Diop estime que « si le monde du travail confère à la Cnts/Fc ce leadership, elle va correctement l’assumer en appelant à des grands rassemblements, organiser des meetings syndicaux, des marches et sit-in pour alerter les décideurs et les employeurs des préoccupations des travailleurs».
Le deuxième axe du programme de Cheikh Diop est relatif à son souhait de «remobiliser toutes les bases du mouvement syndical sénégalais». Car, selon lui, «l’unité syndicale souffre de la dispersion et la désunion des forces syndicales. Plus de 20 centrales syndicales pour moins de 500.000 travailleurs salariés au Sénégal. En revanche, nous constatons en Afrique du Sud qu’il y a des millions de travailleurs pour seulement 3 centrales syndicales».
En s’engageant à la réunification des entités du mouvement syndical pour restaurer la mission du syndicalisme, Cheikh Diop compte aussi se battre pour résorber le passif social et s’employer pour renverser la tendance du dialogue social de restitution en dialogue social porteur de progrès, de conquête.