ALIOUNE TINE DÉPLORE UNE SITUATION SÉCURITAIRE ET HUMANITAIRE DÉLÉTÈRE AU MALI
Le président d’Afrikajom center, Alioune Tine en qualité d’expert indépendant a récemment séjourné dans le pays
Alioune Tine en tant qu’expert indépendant, de retour au Mali, dresse un tableau sombre du pays. La situation humanitaire et sécuritaire fait craindre le pire. Pis, les groupes terroristes gagnent du terrain et ont fini d’occuper une bonne partie du territoire.
Le président d’Afrikajom center, Alioune Tine en qualité d’expert indépendant a séjourné au Mali. Après sa visite et des conclusions tirées sur les échanges de ses différentes rencontres, il se dit « préoccupé par la détérioration rapide, continue et généralisée de la situation sécuritaire au Mali avec la recrudescence et la fréquence des attaques armées et des violences commises par les Groupes extrémistes violents au nord, au centre et aux alentours de Bamako ».
Parmi les attaques les plus récentes de ces groupes figurent celle menée contre le camp militaire de Tessit en date du 7 août 2022, au cours de laquelle selon le bilan officiel, 42 militaires ont été tués et 22 autres blessés. Son constat est aussi « qu’il règne un climat délétère marqué par la suspicion, la méfiance avec un rétrécissement continu de l’espace civique, le durcissement des autorités maliennes de la transition et un malaise qui n’épargne pas les partenaires internationaux, notamment les tensions diplomatiques exacerbées par les effets pervers du contexte de forte polarisation géopolitique internationale ». Sur ce, Alioune Tine appelle les autorités maliennes de la transition, avec l’aide de la communauté internationale et africaine, « à repenser et réadapter de façon urgente les réponses et stratégies sécuritaires qui n’ont pas encore donné les résultats escomptés pour la protection efficace des populations civiles et de leurs droits humains fondamentaux».
Concernant la situation sécuritaire, Alioune Tine trouve que le Mali est confronté à de sérieux défis dont les indicateurs les plus évidents sont : l’augmentation récente du nombre des personnes déplacées internes ainsi que la fermeture des écoles en raison de l’insécurité. Alioune Tine dit sur cet aspect, « depuis ma visite de février 2022, le nombre des 3 personnes déplacées internes et d’écoles fermées a augmenté respectivement de 7,82% (allant de 350110 à 377519) 1 et de 9,91% (passant de 1664 à 1829 écoles) ». Sa visite dans la région de Ménaka, au nord du pays, et les échanges avec les principaux acteurs (administration, société civile, système des Nations Unies) ont concordé avec « la préoccupante détérioration de la situation sécuritaire et des droits humains depuis le mois de mars 2022 ». En attestent, signale-til, trois de 4 cercles que compte la région (soit 75% du territoire) sont sous le contrôle des groupes extrémistes violents.
75% DU TERRITOIRE MALIEN SOUS LE CONTRÔLE DE GROUPES EXTRÉMISTES
En raison de l’insécurité croissante, « plusieurs dizaines de milliers de personnes déplacées en provenance de ces cercles sous contrôle des groupes extrémistes violents ont trouvé refuge dans la ville de Ménaka. A la date du 5 août 2022, la ville de Ménaka comptait plus de 50.000 personnes déplacées », signale Alioune Tine. Toujours sur le plan sécuritaire, il a trouvé que la quasi-totalité des acteurs rencontrés ont reconnu que l’insécurité régnait également dans la ville de Ménaka. Selon tous ces acteurs, les responsables de cette insécurité seraient les membres des mouvements armés signataires et d’inclusivité présents à Ménaka. Certains membres de ces mouvements commettraient des exactions contre les populations civiles, notamment des meurtres, des enlèvements, des braquages, des extorsions de fonds par la perception illégale de « taxes », notamment au niveau des points de contrôle (checkpoints) illégaux qu’ils érigeraient sur la voie publique en toute impunité.
En ce qui concerne la situation des droits humains, Alioune Tine s’inquiète de la persistance des violations et atteintes graves aux droits humains. Du 1er janvier au 30 juin 2022, la MINUSMA a documenté 1304 violations des droits humains et atteintes à ces droits, soit une augmentation de 47,17% par rapport à la période précédente (1er juillet au 31 décembre 2021) au cours de laquelle la MINUSMA avait documenté 886 violations des droits humains et atteintes à ces droits. Ces violations ont été principalement documentées dans le centre du Mali, suivi du Nord du Mali et enfin du Sud.
Toutefois, Alioune Tine s’est réjoui de la mise en place d’une commission de rédaction de la Constitution en date du 10 juin 2022 ainsi que l’adoption par les autorités maliennes d’un calendrier de la transition d’une durée de 24 mois, assorti d’un chronogramme détaillant les différentes étapes menant aux élections et au retour d’un régime civil. Il salue aussi la promulgation en date du 24 juin 2022 d’une nouvelle loi électorale qui prévoit la mise en place d’un organe unique et indépendant de gestion des élections, dénommé Agence Indépendante de Gestion des Elections (AIGE).
L’approche participative adoptée par la Commission de rédaction de la Constitution qui organise des activités pour informer et recueillir les contributions de tous les acteurs maliens est salutaire juge-t-il. Comme recommandations, Alioune Tine souhaite que les autorités maliennes et la communauté africaine et internationale d’entretiennent un dialogue constructif global pour garantir la stabilité et la sécurité du Mali et renforcer la protection des droits fondamentaux des populations civiles et éviter l’isolement du Mali. Il invite également les autorités à prendre toutes les mesures appropriées pour le respect et la protection de la liberté d’expression et de la presse conformément aux obligations pertinentes du Mali en matière des droits humains et dans le contexte du processus électoral en cours, tous les droits et libertés fondamentales doivent pouvoir s’épanouir. Les groupes armés doivent immédiatement cesser toutes les hostilités et les attaques dirigées contre les civils, et de respecter les droits humains et les libertés fondamentales des populations civiles.