UNE LEGENDE NE MEURT JAMAIS
L’avant-première africaine du film «Essamaay : Bocandé la panthère» du réalisateur sénégalais Macky Madiba Sylla a eu lieu hier, mardi 16 janvier dans la salle de l’hôtel Président de Yamoussoukro.
L’avant-première africaine du film «Essamaay : Bocandé la panthère» du réalisateur sénégalais Macky Madiba Sylla a eu lieu hier, mardi 16 janvier dans la salle de l’hôtel Président de Yamoussoukro. Le film retrace le parcours d’une légende du football sénégalais, Jules François Bocandé décédé en 2012.
C’est le tir de l’attaquant Sadio Mané lors de la finale de la Coupe d’Afrique des Nations, Can-2022 au Cameroun que le Sénégal a remporté pour la première fois de son histoire, qui ouvre et ferme le film. Ce 06 février 2022, l’immense joie des Sénégalais replonge les esprits dans la qualification du Sénégal en Can-1986 en Egypte, grâce au but historique de Jules François Bocandé. Ce dernier a marqué l’histoire du football sénégalais, africain voire mondial. Un parcours exceptionnel que le réalisateur Macky Madiba Sylla retrace dans un film intitulé « Essamaay: Bocandé la panthère» qui a été projeté hier, mardi dans la salle de l’hôtel Président de Yamoussoukro. L’hôtel qui sert d’ailleurs de tanière aux Lions du Sénégal pour les besoins de la Can-2023.
De Ziguinchor à Tournai en Belgique en passant par Dakar jusqu’à Metz (France), le film ne laisse rien de la vie de l’ancien joueur et entraîneur de l’équipe nationale de football du Sénégal : son enfance, ses débuts dans le football, ses sélections, ses succès. « Essamaay: Bocandé la panthère » fait aussi revivre les spectateurs les moments forts de la carrière de Jules François Bocandé. Tout ceci est accompagné des témoignages d’anciens joueurs et entraîneurs de l’équipe du Sénégal ou du monde entier comme Claude Leroy, Roger Mendy, Omar Gueye Sène, Luc Sonor. Des journalistes sportifs ne sont pas non plus en reste à l’image du Doyen Abdoulaye Diaw. Mais également la famille du joueur. «Quand vous parlez de star sans forcer, le gars est une star », reconnaît Aliou Cissé dans le film.
Ziguinchor, c’est là où tout a commencé pour Jules François Bocandé. Dans le document, on le voit raconter ses débuts dans le football. « J’ai perdu mon père très jeune. J’étais élevé par une dame. Elle ne comprenait pas ce que c’est le football. C’était trop difficile », disait-il. Après avoir joué au Sénégal, le natif de Casamance dépose des valises à Tournai en Belgique avant de se retrouver dans des clubs français. « Jules était un garçon très agréable, dit son entraîneur. Il n’avait peur de personne. Il avait une bonne technique», raconte son entraîneur.
Cependant, même si la projection du film a été faite en marge de la Can, on note une absence des autorités dans la salle. Ce que le réalisateur n’a pas apprécié. Macky Madiba Sylla déplore aussi le fait de ne pas pouvoir faire parler Sadio Mané dans le film. «Le regret, c’est juste avant le penalty de Sadio Mané, de ne pas entendre sa voix, lui commenter. Il n’allait pas apparaitre à l’écran. Ça aurait donné surle plan cinématographique quelque chose de formidable. On ne voit pas son visage. On voit ses mains, un peu sa coiffure. On entend sa voix, il commente : il allait apparaitre de dos pas plus d’une minute », souligne le réalisateur.
Né en 1958, le fils prodige de Ziguinchor Jules François Bocandé est décédé en 2012 des suites d’un Avc. Il aura marqué des générations, sur tous les continents et restera une icône pour les amoureux du football.
MACKY MADIBA SYLLA, REALISATEUR DU FILM «ESSAMAAY: BOCANDE LA PANTHERE» : « Je voulais réhabiliter Bocandé »
J’ai d’abord écrit le film et quand j’ai commencé à tourner, je suis tombé sur le magnifique livre d’Abdou Latif Diop qui s’appelle Bocandé, l’éternelle légende. J’ai discuté avec lui pour acquérir les droits du livre et à partir de cela, ça m’a donné une mine d’informations. J’ai pu finalement réaliser le film avec son appui, ses archives et surtout le travail extraordinaire qu’il avait déjà entamé. Les difficultés dans la réalisation des films, c’est souvent d’ordre financier. En fait, ça vaut de l’argent. Ce sont des voyages. Il faut payer l’équipe technique, acquérir des archives qui coûtent cher. Il faut aussi payer ce qu’on appelle la post production. C’est-à-dire les montages, les droits d’utilisation de musique. En réalisant ce film, je voulais réhabiliter Bocandé qui était tombé dans l’oubli, que les gens se rappellent de lui mais pas que lui. Vous l’avez vu dans le film, des gens qui ont joué avec lui sont un petit peu tombés dans l’oubli. Roger Mendy, je ne le vois nulle part. Omar Gueye Sène, pareil. Je ne sais combien d’années, il n’a pas fait d’interview. Je voulais que les Sénégalais comprennent que la conquête de cette première étoile a été un long processus et Bocandé et la génération 86 ont joué un rôle extraordinaire dans cette conquête-là. Ça m’a pris 4 longues années pour réaliser ce film. Sadio Mané, j’ai tout fait pour l’avoir dans le film. Je me suis rapproché de son agent marketing mais je pense qu’il n’a peut-être pas compris ce qu’on voulait réellement faire. On a fait un film sur Bocandé, pas une seule autorité de la fédération sénégalaise de football du Sénégal n’a voulu m’accorder une interview. La Fédération n’est pas dans le film. Le président de tutelle aurait dû glisser quelques mots sur Bocandé. Il a été entraîneur de l’équipe nationale, joueur de l’équipe nationale. Ce qui est important, c’est que les générations comprennent qu’elles vont passer, une autre génération va venir. En France, ils ont gardé le lien entre les générations 98 et celle qui a remporté la Coupe du monde en 2018 avec Didier Deschamps. C’est ce que je voulais montrer. C’est pourquoi je remercie Aliou Cissé. Quand je lui ai envoyé la bande annonce, il a dit qu’il comprend maintenant ce que je veux faire. Il m’a accordé une interview au Portugal.
ABOUBACRY BA, JOURNALISTE SÉNÉGALAIS ET DIRECTEUR DE CIS MÉDIA (GUINÉE) : « C’est un document essentiel pour la mémoire collective »
C’est avec beaucoup d’émotion que j’ai pu regarder ce film. Je pense d’ailleurs que Bocandé méritait ça. Le public sénégalais mérite également de connaître qui est vraiment Bocandé. Parce que chaque Sénégalais a un petit bout de Bocandé. Ceux sont ces bouts de souvenirs, ces bouts d’attachement diffusent un peu dans la population qui ont été réuni dans ce même film de Macky Sylla. Et ça fait du coup un document essentiel pourla mémoire collective pour tout ce que Bocandé a offert au peuple sénégalais. Bocandé a été attaché à son pays. Il l’a prouvé à plusieurs reprises. L’équipe nationale, ce n’est pas quelque chose d’anodin pour Bocandé et il réconforte aujourd’hui les Sénégalais dans leur attachement viscéral, presque charnel avec cette équipe du Sénégal. Je pense que c’est l’un des plus grands mérites de ce documentaire. J’ai beaucoup admiré dans le documentaire le témoignage de Luc Sonor (ancien footballeur français) parce qu’il m’a toujours dit, « je pense que vous les Sénégalais, vous ne pouvez pas vous rendre compte combien Bocandé aimait le Sénégal» et en réalisant ce film, on est en train de donner une réponse à cette préoccupation de Luc Sonor.
NDEYE DOME DIOUF, JOURNALISTE À RADIO SÉNÉGAL INTERNATIONAL (RSI) : « Le film montre le chemin qui a été parcouru »
La première impression en regardant ce film, c’était l’émotion. Parce que, c’est un film qui retrace le parcours de Jules François Bocandé, mais au-delà de ça, c’est le parcours de l’équipe nationale. Cela montre le chemin qui a été parcouru car c’était une génération talentueuse mais qui manquait de professionnalisme aussi bien dans la gestion que dans l’environnement. C’est ça qui a plombé cette génération qui avait les moyens intrinsèques d’être des champions d’Afrique et cela montre quelque part tout ce qui a été fait et par l’Etat et par également les responsables du football pour permettre à notre équipe nationale d’être là où il y est. Donc, c’est important que tout le monde voit ce documentaire surtout les jeunes. Parce que l’histoire du football, ce n’est pas Sadio Mané et sa génération. C’est vrai qu’ils ont gagné cette première étoile, mais il y a eu beaucoup de travail qui a été fait avant par des générations précédentes. Il faut qu’on ait également le film de cette génération de El Hadji Diouf qui a marqué durablement le football sénégalais et aujourd’hui qu’on fixe par l’image ce qui est en train de faire cette génération de Sadio Mané. Cela va permettre d’avoir une continuité et une histoire