«L’IMMIXTION DES POLITIQUES DANS LE SYSTEME DE PASSATION EST EN TRAIN DE LUI FAIRE PERDRE SON INDEPENDANCE ET SA CREDIBILITE»
ABDEL KADER NDIAYE, PRESIDENT DU SNBTP DIAGNOSTIQUE LES PROCEDURES DE PASSATION DES MARCHES PUBLICS

Même si globalement, le système des marchés publics sénégalais est conforme aux standards internationaux, il demeure que «l’immixtion des politiques dans le système de passation est en train de lui faire perdre son indépendance et sa crédibilité». Telle est la conviction d’Abdel Kader Ndiaye, président du Snbtp qui a fait une communication, avant-hier, devant le Cese sur l’évaluation des procédures de passation des marchés.
«Notre système des marchés publics est dans une large mesure conforme aux bonnes pratiques internationales (standards Ocde). (…) Tous les acteurs de la réforme s’accordent sur les progrès incommensurables enregistrés dans la période 2007-2009 qui font du Sénégal aujourd’hui une belle vitrine en matière de bonne gouvernance / marchés publics». Voilà schématisé le constat général fait par Abdel Kader Ndiaye qui traitait du thème «l’évaluation des procédures de passation du Code des marchés publics», avant-hier, devant le Conseil économique, social et environnemental (Cese). «Globalement, la qualité de notre système de passation se situe à un niveau satisfaisant» avec un taux global de satisfaction de 82% en 2008, de 89% en 2009 et de 86,7% en 2011(source consultant), soutient-il avec euphorie.
«Globalement, la qualité de notre système de passation se situe à un niveau satisfaisant»
Ombre au tableau cependant. Le président du Syndicat national des entreprises du bâtiment et des travaux publics (Snbtp) parle de «dysfonctionnements» constatés dans le dispositif de passation des marchés publics et de «contre-performances du système de passation qui se répercutent sur la gestion des ressources et des délais». Et dans ce cadre, il dénonce «l’immixtion des politiques dans le système de passation (qui) est en train de lui faire perdre son indépendance et sa crédibilité». Ce qui, d’ailleurs, selon lui, risque de «remettre en cause la confiance de certains acteurs clefs tels que les partenaires techniques et financiers, le secteur privé et la société civile».
Il ne manque pas de s’interroger sur les motifs avancés par les politiques pour justifier les modifications du Code des marchés publics, notamment les «lenteurs» invoquées. Quelles sont les bases de cette assertion? Où est l’étude qui mesure ces lenteurs ? Quels sont les responsables de ces lenteurs?», se demande-t-il dubitatif parce que n’ayant «pas vu d’études approfondies traitant scientifiquement ou spécifiquement de ces questions», à part une «compilation de délais des procédures et quelques recommandations d’Auditeurs».
«Des modifications doivent être objectives, pertinentes et non taillées sur mesure»
Rappelant que dans les modifications de la période 2010 à 2011, les autorités gouvernementales arguaient que «le Cmp a été parfois un frein indiscutable à l’action du gouvernement dans les cas d’urgence que d’autres codes ont su pourtant appréhender avec dextérité…», M. Ndiaye estime que cela a «trahi les intentions inavouées des politiques qui ne sont préoccupés que par le mode de passation gré à gré», surtout constate-t-il qu’«il sera difficile de faire coïncider toujours le calendrier de l’homme politique et le calendrier des procédures et d’utilisation des ressources publiques». Selon lui, «personne n’est opposé aux principes des modifications». Un bon code est «dynamique», estime-t-il, «mais des modifications doivent être objectives, pertinentes et non taillées sur mesure».
Et en l’espèce, «la plupart de ces modifications sont des clés pour faire sauter les verrous rencontrés par les politiques pour la passation de marchés par entente directe». Il renseigne, par exemple que, «le champ d’application du nouveau Code exclut des contrats éligibles à la concurrence une part importante de dépenses publiques de l’Assemblée nationale, du Cese» qui n’est ainsi «pas soumise au champ des marchés publics», des décrets ont été «pris en dehors de la règlementation» pour autoriser à la Senelec de s’approvisionner directement à la Sar (décret 2011-865 du 22-07-2011), entre autres exemples».