DES NÉGOCIATIONS SÉRIEUSES ENTRE L’ETAT DU SÉNÉGAL ET LE MFDC EXIGÉES
SEDHIOU : MARCHE À GOUDOMP DES FEMMES POUR LA PAIX EN CASAMANCE

Plusieurs centaines de femmes, toutes de blanc vêtues et issues des organisations de la société civile de la région de Sédhiou ont battu le macadam, avant-hier samedi 25 avril dans la commune de Goudomp pour exiger de l’Etat du Sénégal la réouverture des négociations « sérieuses et transparentes » avec le mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC). Les plaies encore béantes du conflit armé séparatiste peinent à se cicatriser. Les terres polluées de mines, le bétail arraché à leurs propriétaires alors que le foncier déstructure le tissu social. Le point sur la table, ces guerrières de la paix entendent désormais s’inviter au dialogue et constituer les piliers de cette paix.
La paix, rien que la paix et tous pour la paix en Casamance, c’est le vœu pieux des femmes, en rangs serrés, toutes de blanc vêtues et issues des différentes organisations de la société civile de la région de Sédhiou qui ont pris part, samedi dernier, à une marche pacifique dans les rues de la commune de Goudomp dans l’extrême sud du pays frontalier à la Guinée Bissau. L’initiative porte les empreintes de l’association USSOFORAL, appellation de l’harmonie en langue Diola. Par ce cri de cœur charrié par un conflit armé trentenaire, ces femmes entendent exiger l’ouverture des négociations transparentes et sérieuses entre l’Etat du Sénégal et le mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC). Un appel d’autant plus justifié que des accrochages ont récemment opposé des éléments du maquis et les forces armées sénégalaises dans la zone de Oussouye.
Mme Diédhiou Lalia Sambou la présidente de la plate forme des femmes pour la paix en Casamance a dévoilé ici un coin du mémorandum en ces termes « nous femmes des organisations de la société civile, profitant de la journée régionale de mobilisation des femmes, regrettons que le conflit qui oppose le MFDC à l’Etat du Sénégal perdure depuis plus de trente ans. Il a causé de nombreuses victimes en terme de perte de vies humaines, de mutilés de mine et de disparus, les déplacés, les violences faites aux populations notamment aux enfants et aux jeunes, aux vols de bétail et de biens, aux enlèvements de personnes, aux viols, aux braquages de véhicules, aux prises d’otage, à la destruction d’infrastructures ».
Et de poursuivre « les conséquences sont désastreuses sur le développement du Sénégal en général et sur la Casamance en particulier dans les secteurs de l’agriculture, de l’élevage, du tourisme, des transports, de la santé et de l’éducation ». L’insécurité de part et d’autre des frontières rame à contre courant de la paix indique le mémorandum « les exactions commises en zone de frontière surtout lors des pèlerinages religieux, les vols de bétail, dans les rizières et les champs freinent le retour de la paix ». Et dans la dynamique en cours pour ce retour définitif de la stabilité, ces femmes exigent leur implication dans la recherche de solutions concertées « nous recommandons une plus grande implication des femmes, des jeunes, des coutumiers et religieux dans la recherche de solution définitive ».
Pardon et reconciliation
Dans ce mémorandum toujours lu par Lalia Sambou, les manifestantes exhortent le MFDC à accepter la reprise des opérations de déminage en Casamance pour dépolluer les terres « nous demandons au MFDC de permettre la reprise des opérations de déminage en Casamance, car sans cela, les terres resteront inexploitées ». Le pardon et la réconciliation au sein des différentes communautés, c’est aussi un autre impératif pour arriver à des résultats concrets a déclaré Lalia Sambou « nous encourageons les communautés à promouvoir la paix, à bannir la stigmatisation, la haine et la violence et à s’engager résolument dans le pardon et la réconciliation ». Ceci étant, ces femmes des organisations de la société civile de Sédhiou invitent l’Etat du Sénégal à accélérer le processus de désenclavement des régions sud et de baliser la voie de l’émergence économique aux masses laborieuses éprouvées par des décennies de conflits « recommandons à l’Etat du Sénégal de diligenter le processus de désenclavement de la Casamance et de renforcer les capacités d’intervention des agences et ONGs qui interviennent en Casamance parmi lesquelles l’agence pour la relance des activités économiques et sociales en Casamance et le projet pôle de développement de la Casamance » ont fait remarquer ces femmes partout où elles sont passées dans leur itinéraire de marche.
Dans les rangs, une autre femme, la casquette de parlementaire bien vissée, la député de Goudomp Mariama Mané s’engage à porter le plaidoyer à l’hémicycle « très honnêtement, nos femmes souffrent car elles ne peuvent plus générer des recettes en raison de l’insécurité qui fait qu’elles n’arrivent plus à valoriser les produits de cru comme l’anacarde, les vallées et les champs sont infestés de mines, c’est vraiment dur. C’est la raison pour laquelle je porterai le plaidoyer à l’assemblée afin que le processus soit davanatge renforcé en direction de la paix ».
L’adjoint au préfet de Goudomp Babacar SARR qui a reçu le mémorandum promet de transmettre le document à qui de droit. Mais en attendant le silence définitif des armes, le calme précaire constaté au sein des différents états majors du maquis, donne les raisons de croire un jour, peut être pas si lointain, à la paix des braves, celle d’une Casamance unie et prospère pour le bien de la postérité.