L’ÉDITION POUR QUOI FAIRE ?

Les auteurs, les éditeurs, les libraires et les imprimeurs sont les protecteurs de notre patrimoine culturel et par conséquent, les garants de la pérennité de notre civilisation. Dans ce monde d’uniformisation et de nivellement, leur rôle de porte-flambeau de la diversité est irremplaçable.
Au surplus, les métiers qui gravitent autour du livre sont essentiels pour aider au développement d’un pays. L’éditeur, pour me limiter à lui, est celui qui publie, et publier c’est littéralement rendre public, c’est-à-dire porter à la connaissance des autres des informations, des connaissances, voire des savoir-faire.
C’est pourquoi une industrie d’édition viable contribue de façon significative au processus de démocratisation, à l’émergence d’une société civile et à la promotion d’une bonne gouvernance.
Il est également avéré que la capacité d’un pays à gouverner démocratiquement est largement diminuée s’il manque à ce pays la possibilité de disséminer l’information. Mais l’information, ce n’est pas seulement la presse.
Pourtant, si l’importance d’une presse libre est bien perçue, le rôle significatif de l’édition est fréquemment sous-estimé. L’édition est l’un des piliers de tout système éducatif. Elle a par conséquent une valeur stratégique.
Instrument pédagogique au départ, le livre devient un moyen d’information sur des faits, un médium au même titre que la presse, la radio et la télévision, un moyen de communication des idées et des connaissances, un moyen de culture et de distraction, un moyen de documentation et de vulgarisation couvrant tous les secteurs de la curiosité et de l’activité humaines.
Loin de s’opposer, le livre et les autres moyens d’information doivent conjuguer leurs actions pour arracher les masses à l’ignorance et les amener à la modernité.
C’est pourquoi être éditeur, c’est répondre à une double vocation : celle d’acteur culturel et celle d’acteur économique, c’est également pour cette raison que nous nous inquiétons de la faiblesse de la production éditoriale africaine qui constitue un obstacle majeur à son développement.
En effet, l’Afrique ne publie que 1,5% des livres qui paraissent chaque année dans le monde, alors qu’elle représente plus de 10% de la population mondiale.
Pour satisfaire ces nombreux besoins en manuels scolaires, elle se tourne vers les pays du Nord qui assurent une grande partie de sa demande et qui empochent, au passage, plusieurs milliards de francs Cfa.
L’importance d’une industrie culturelle comme l’édition n’est plus à démontrer. L’existence d’un tel secteur, capable de satisfaire les besoins en livres de la population, est devenue aujourd’hui plus qu’une exigence.
Le livre est un outil incontournable pour le développement d’un continent. Chaque africain doit pouvoir disposer de suffisamment de livres pour son éducation, sa formation et son épanouissement.
Tout doit être entrepris pour que le livre ne soit plus un luxe pour des millions d’Africains.
Paradoxalement, l’Afrique continue à dépenser chaque année des milliards pour l’achat d’armes, sans pour autant éliminer définitivement l’analphabétisme qui est l’ennemi numéro un du continent.
Le développement de l’édition est aujourd’hui un impératif et l’Afrique ne sortira réellement du sous-développement que lorsqu’elle aura bâti une édition forte, capable de couvrir l’ensemble des besoins en manuels scolaires et des livres de toutes sortes.
Le livre est l’un des meilleurs investissements que l’on puisse faire pour la jeunesse africaine.
Les lecteurs de demain ne s’inventent pas, ils sont aujourd’hui enfants et c’est maintenant qu’il faut agir, en mettant plus de livres à leur disposition. L’édition africaine doit s’appuyer sur ses propres forces, ses auteurs, de talent connus ou méconnus et compter sur ses moyens pour s’asseoir de manière durable.
Les éditeurs locaux n’ont pas souvent visé la masse, seule l’élite qui dispose de moyens les intéresse. Les sujets traités sont souvent éloignés des préoccupations.
L’Afrique doit sérieusement engager la bataille du livre afin de remporter la seule vraie guerre qui vaille dans le continent : la guerre contre l’illettrisme et l’analphabétisme, fléaux dont l’éradication permet d’envisager un réel développement.
En ce qui concerne notre pays, l’adoption de la loi sur le livre, étape décisive vers la mise en place de cette politique nationale du livre, constitue la pierre d’angle de ce combat majeur.