LE MONDE CÉLÈBRE MANDELA, HÉROS UNIVERSEL
JOHANNESBURG, 06 déc 2013 (AFP) - Le monde entier était vendredi sous le choc de la mort de Nelson Mandela, auquel il a rendu un hommage sans précédent, promettant que son infatigable combat pour la réconciliation et contre le racisme resterait une source d'inspiration.
Premier parmi les grands de ce monde, Barack Obama a annoncé sa venue aux obsèques du héros planétaire de la lutte pour la liberté la semaine prochaine. Il y retrouvera de très nombreux dirigeants internationaux.
Nelson Mandela, entré dans l'histoire pour avoir arraché sans trop de violences l'Afrique du Sud au régime ségrégationniste de l'apartheid, s'est éteint jeudi soir à l'âge de 95 ans. Il sera inhumé dans son village d'enfance de Qunu (sud) le 15 décembre, après une semaine de cérémonies.
"Je ne doute pas un seul instant que lorsque j'entrerai dans l'éternité, j'aurai le sourire aux lèvres", avait-il dit lorsqu'il est devenu le premier président noir d'Afrique du Sud, heureux de voir son pays grandir en paix après des décennies de ségrégation raciale.
Depuis son décès, les hommages ont déferlé sur le premier président noir d'Afrique du Sud, célébré pour avoir bâti sans haine ni esprit de vengeance une nation démocratique multiraciale, après avoir passé vingt-sept ans dans les geôles de l'apartheid.
Par delà la mort, Mandela a d'ailleurs, symboliquement, réuni dans l'émotion des camps opposés. Etats-Unis et Iran, Chine et Dalaï Lama, Palestiniens et Israël, ont souvent usé des mêmes mots pour lui rendre hommage.
Vendredi, le président sud-africain Jacob Zuma a annoncé des funérailles nationales pour "Madiba", le nom de clan dont usent affectueusement ses compatriotes, "fils exceptionnel de notre pays et père de notre jeune nation".
Auparavant, une cérémonie sera organisée le 10 décembre dans l'immense stade de Soweto. Là où Mandela avait fait sa dernière apparition publique, à l'occasion de la Coupe du monde de football 2010. Puis, du 11 au 13 décembre, sa dépouille sera exposée à Pretoria, au siège de la présidence, afin que ses compatriotes puissent venir s'incliner dans un dernier adieu.
Toute la semaine prochaine a été déclarée "semaine nationale de deuil" par Jacob Zuma. Nelson Mandela est mort chez lui, des suites d'une infection pulmonaire, pour laquelle il avait été hospitalisé de juin à septembre.
Le Dalaï Lama pleure "un ami cher" Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a salué en lui "une source d'inspiration" pour le monde entier.
A Paris, un sommet pour la paix et la sécurité en Afrique s'est ouvert symboliquement sous la présidence du prix Nobel de la paix 1993: "Aujourd'hui, c'est Nelson Mandela qui préside les travaux de ce sommet (...), c'est un symbole et en même temps une exigence de responsabilité", a lancé le président français François Hollande, à l'ouverture du sommet.
Aux Etats-Unis, le président Barack Obama, lui aussi premier président noir de son pays, a ordonné de mettre les drapeaux américains en berne jusqu'à lundi soir. Deux autres illustres prix Nobel de la paix et leaders spirituels de leurs communautés respectives, le Dalaï Lama et l'archevêque Desmond Tutu, ont rendu hommage à celui qui était leur ami.
Le chef spirituel tibétain a salué "un ami cher, un homme de courage, de principes et à l'intégrité incontestable". L'archevêque sud-africain, 82 ans, est apparu bouleversé vendredi et n'a pas pu retenir des larmes lors d'une allocution devant la presse.
Mandela, a-t-il dit, était "une incroyable icône d'humanité, de compassion (...), un symbole de réconciliation, de pardon et de magnanimité". "Suggérer que l'Afrique du Sud pourrait partir en flammes (après le décès de Mandela) --comme certains l'ont prédit-- revient à discréditer les Sud-Africains et l'héritage de Madiba", a-t-il ajouté.
Le pape François a loué pour sa part "l'engagement tenace montré par Nelson Mandela pour promouvoir la dignité humaine de tous les citoyens de la Nation et forger une nouvelle Afrique du Sud basée sur les fermes fondations de la non-violence, de la réconciliation et de la vérité".
Plus étonnants pour un ancien chef d'Etat, les hommages venus du monde de l'économie, des défenseurs de la nature, de l'Unicef, et de bien d'autres organisations de la société civile dénotaient le charisme d'un homme qui avait fait de la compassion et de l'écoute de l'adversaire son mode de gouvernance.
Les militants de la lutte contre le sida lui ont notamment exprimé leur gratitude pour avoir contribué à "briser la loi du silence" et les préjugés autour de cette maladie mortelle. "Nelson Mandela était une figure majeure dans la lutte contre le sida. (...)
Ses actions ont aidé à sauver des millions de vies et à transformer l'état de la santé en Afrique", a déclaré Michel Sidibé, directeur exécutif de l'agence de l'ONU pour la lutte contre le sida (Onusida). L'Onusida a notamment rappelé sa décision en 2005 de révéler publiquement que son fils Makgatho était mort de complications dues au virus du sida.
Le monde du sport secoué Le monde du sport, auquel Mandela était très attaché, n'était pas en reste: "Grâce à son extraordinaire vision, il a réussi à faire de la Coupe du monde 1995 un instrument pour favoriser l'émergence d'une nation, juste un an après les premières et historiques élections démocratiques en Afrique du Sud", a rappelé le président de la Fédération sud-africaine de rugby Oregan Hoskins, ajoutant: "Son nom prendra place parmi les plus grands libérateurs et humanistes aussi longtemps que vivra l'humanité."
Au Brésil, qui accueillait vendredi le tirage au sort du prochain Mondial de football, l'émotion était immense également: "Il était mon héros, mon ami, mon compagnon dans la lutte en faveur de la cause du peuple et pour la paix dans le monde", a écrit sur son compte Twitter Pelé, la légende du football brésilien.
Une image sur grand écran de l'ex-président sud-africain et héros de la lutte anti-apartheid est apparue en ouverture de cet événement, soulevant les applaudissements de l'assistance.
En Afrique du Sud, dès l'annonce du décès, des centaines de personnes de toutes origines se sont rassemblées dans la nuit près de sa maison de Johannesburg.
L'ambiance n'était pas au recueillement mais à la célébration, avec des chants anti-apartheid ou à la gloire de Madiba, repris en choeur par la foule qui agitait des drapeaux et scandait parfois "Viva Mandela" ou "Longue vie à Mandela".
Vendredi matin, dans le township de Soweto où vécut Mandela, et d'où partit la révolte des Noirs opprimés, les habitants exprimaient avant tout leur gratitude: "L'inévitable s'est produit.
C'est un jour triste mais l'Afrique du Sud et le monde s'y attendaient et nous pouvons remercier Dieu pour (l'oeuvre de) sa vie", dit à l'AFP le frère Sebastian, à l'église catholique Regina Mundi, point de ralliement sous l'apartheid.
"Il était une inspiration pour le monde entier", a réagi Frederik de Klerk, le dernier président blanc sud-africain et ancien adversaire politique qui avait fait sortir Mandela de prison avant de négocier la transition démocratique et de partager en 1993 le prix Nobel de la Paix avec lui.