KFC - SEDIMA, LES RAISONS D'UN MARIAGE
La chaîne américaine de restauration rapide, a changé de stratégie de pénétration en abandonnant l’idée d’exporter de la viande de volaille au Sénégal, pour finaliser un accord d’exploitation de franchise avec le géant sénégalais du poulet
Premièrement, avec une production annuelle de 100 millions de poulets et prés de 650 millions d’œufs pour une consommation nationale autour de 60 à 70 millions de poulets, le secteur avicole du Sénégal, est donc autosuffisant et peut même se permettre d’exporter vers d’autres marchés. C’est donc un marché arrivé à maturité, comme on dit dans le jargon des investisseurs, pour KFC.
Et dans ce marché autosuffisant en production et consommation et mature en retour sur investissement sur chaque franc dépensé, le leader du secteur au Sénégal, est sans conteste, le Groupe Sedima avec notamment 32% de part de marché dans l’aliment de volaille; 28% de part de marché dans la vente des poussins et 20% de part de marché dans la minoterie dans laquelle il s’ est lancé depuis 2016. Le Groupe Sedima, grâce à sa minoterie, est la seule entreprise dans le secteur au Sénégal et dans la sous-région ouest africaine, à être certifiée ISO 22000; une norme internationale relative à la sécurité des denrées alimentaires.
Deuxièmement,le marché sénégalais de l’aviculture, considéré à l’échelle du marché africain et mondial de la volaille, est un marché très étroit (un tout petit marché) en termes de consommateurs et d’efficience. Mieux, alors qu’elle abrite 13% de la population mondiale, l’Afrique ne fournit que 4% des produits aviaires dans le monde et un africain ne consomme en moyenne qu’un œuf toutes les 5 ou 6 semaines, tandis qu’un japonais en consomme presque quotidiennement.
Même constat pour la viande de volaille où en une année, un Africain ne consomme en moyenne que 3,3 kg de viande de volaille, contre 28 kg pour un français et une moyenne mondiale de 14 kg.
Troisièmement, en cas de procédure contentieuse à intenter contre l’Etat du Sénégal à l’OMC (Organisation mondiale du commerce) au niveau de l’Organe de règlement des différends, à propos de la mesure d’interdiction d’importation de poulets au Sénégal en vigueur depuis 2005, les coûts de procédures (honoraires des avocats d’affaires à payer) ainsi que la durée de la procédure (il faut au minimum trois années avant un premier verdict) ont été évalués.
Pour un si petit marché, l’enjeu ne vaut pas la peine de se déplumer pour KFC (Kentucky Fried Chicken) appelé PFK pour Poulet Frit Kentucky au Québec. KFC déjà présente dans 16 pays d’Afrique, a décidé de mettre le paquet sur la partie francophone du continent avec l’ouverture de son premier fast food à Tunis en janvier 2018.
L’aboutissement de 2 ans de négociation
Ce sont donc ces trois raisons qui ont poussé la marque KFC qui était initialement intéressée par le marché avicole sénégalais, à renoncer. Andrew Havinga, le directeur pour les nouveaux marchés africains de la célèbre enseigne au logo rouge et blanc (avec une tête de grand-père rassurant, représentant son fondateur Harland David Sanders), voit dans le Sénégal «un marché en expansion».
Aujourd’hui, KFC, la chaîne américaine de restauration rapide, a changé de stratégie de pénétration du marché sénégalais, en abandonnant l’idée d’exporter de la viande de volaille au Sénégal, pour finaliser un accord d’exploitation de franchise avec le géant sénégalais du poulet, Sedima, pour l’ouverture de deux restaurants à Dakar avant fin 2018.
La Sedima sera détentrice à 100% de la franchise sénégalaise alors que l’exploitation des KFC en Côte d’Ivoire, est menée par une co-entreprise entre Vivo Energy Côte d’Ivoire et KFC Baobab Côte d’Ivoire. C’est la première fois que KFC choisit un producteur avicole et non un distributeur, pour porter le développement de son enseigne dans un pays.
La longueur de la procédure ayant abouti à la signature du contrat est due à la rigueur et à l’exigence dont a fait montre la partie américaine dans la délivrance de son quitus. « Il fallait satisfaire à beaucoup de normes et de standards, car il s’agit d’alimentation pour les humains. Les équipes de KFC ont dû auditer tout notre système, notre organisation, nos investissements, nos installations, etc. », renseigne Anta Babacar Ngom, la DG du groupe Sedima.