À L'ÉPREUVE DU FMI
Alors que Diomaye Faye réaffirme son engagement envers le FMI, des voix s'élèvent pour questionner la pertinence de cette collaboration. Comment s'affranchir de ces institutions de Bretton Woods ?
Les institutions de Bretton Woods, notamment le FMI, trônent toujours manifestement sur l'économie sénégalaise. Et ce, malgré l'arrivée au pouvoir d'un régime qui promeut la souveraineté sous toutes ses formes.
« Je salue l’esprit collaboratif du FMI, à la suite de la divulgation des résultats provisoires de l’audit des finances publiques du Sénégal sur la gestion 2012-2024 », s'est réjoui le président Bassirou Diomaye Faye tout en réaffirmant son engagement à faire du Sénégal un partenaire sûr et fiable.
En effet, ces propos du chef de l'Etat font suite à la réaction de la porte-parole du FMI, Julie Kozack qui assure aux autorités sénégalaises le soutien de l’institution financière suite à la conférence de presse du Premier ministre Ousmane Sonko sur la situation délétère de l'économie sénégalaise.
« Les autorités ont partagé les résultats de l’audit avec notre équipe. Nous travaillerons étroitement avec elles dans les prochaines semaines pour évaluer l’impact macroéconomique et définir les prochaines étapes », renseigne-t-elle. Mais cette promesse d'assistance du FMI pouvait être une bonne nouvelle pour le Sénégal si les tenants du régime n'avaient pas un regard critique sur ces institutions internationales à commencer par le Premier ministre Ousmane Sonko qui a toujours critiqué l'influence des partenaires comme le FMI sur l'économie sénégalaise. Et il n'est pas le seul.
Le député anticapitaliste Guy Marius Sagna a beaucoup par le passé déversé sa bile sur le FMI. A l'épreuve du pouvoir, le tandem Diomaye-Sonko ne semble pas avoir assez de marge de manœuvre pour ramer à contre-courant du FMI. Et la prépondérance de cette institution financière reste toujours à l'ordre du jour. Les avis de ce partenaire du Sénégal comptent visiblement.
Toutefois, le nouveau régime peut-il s'affranchir du FMI malgré les grandes velléités d'indépendance économique ? Et est-ce que ces institutions sont nuisibles pour l'économie sénégalaise ? Pour l'économiste Demba Moussa Dembélé, la réponse est affirmative. L'organisateur des « samedis de l'économie » trouve que la mission assignée à ces institutions est de renforcer la domination des principaux centres du système, Etats-Unis, Europe, entre autres, sur l’économie mondiale et le système financier international. À l'en croire, il n’a échappé à personne que depuis leur création il y a 80 ans, ces deux institutions sont dirigées respectivement par un citoyen américain et un citoyen européen. « Malgré les énormes transformations intervenues dans l’économie mondiale depuis 1944 », fustige l'économiste.
Abondant dans le même sens, le secrétariat permanent du Réseau Alternatif sur l'Afrique (RASA) estime que le Sénégal est à la croisée des chemins par rapport à ces institutions. « Soit on continue avec le FMI et la Banque Mondiale, soit on se déconnecte progressivement de ces logiques », soutient Dr Cheikh Guèye. Et le fait que, d'après lui, les nouvelles autorités aient la volonté de dire la vérité aux sénégalais, c'est déjà un pas vers la souveraineté. « Mais globalement, le Sénégal n'est pas encore sorti du schéma de la petite économie ouverte, dépendante du financement international, et très peu autonome », constate le prospectiviste.
« J'espère qu'avec le nouveau référentiel des politiques publiques qu'on va prendre comme indicateur, la souveraineté dans les différents domaines...»
Ainsi, en tant que promoteur d'une nouvelle alternative pour l'Afrique, il se veut clair sur les orientations du nouveau régime et du « Projet ». « J'espère que les indicateurs par lesquels nous allons faire progresser notre pays seront définis par nous-mêmes et pour nous-mêmes », recommande Dr Cheikh Guèye avant d'ajouter : « J'espère qu'avec le nouveau référentiel des politiques publiques, on va prendre comme indicateur la souveraineté dans les différents domaines.
Poursuivant toujours son argutie, il indique toutefois que ce chemin de la souveraineté vis-à-vis du FMI ne sera pas un chemin facile ni rapide », déclare-t-il avec véhémence. C'est le seul chemin du vrai progrès. « Le FMI et la Banque mondiale, on doit continuer à travailler avec eux pour qu'on ne travaille plus avec eux les prochaines années », suggère le chercheur.