MULTIPLE PHOTOSLES TRESORS DE L’IFAN
Contes africains, musées, langues nationales, recherche scientifique, niveau de pollution au CO2, botanique, bibliothèques, biologie animale, islam, etc. Tous ces mots apparemment non reliés ont un point en commun : l’Ifan.
Contes africains, musées, langues nationales, recherche scientifique, niveau de pollution au CO2, botanique, bibliothèques, biologie animale, islam, etc. Tous ces mots apparemment non reliés ont un point en commun : l’Ifan. Cette institution est comme un puzzle dont ces mots, et bien d’autres, sont les composants. Une fois chaque pièce identifiée et soigneusement agencée, on se retrouve avec l’image d’une institution qui repose sur deux piliers : la préservation du patrimoine culturel de l’Afrique et la recherche scientifique au service du bien commun.
Dans un contexte de rachat de la bibliothèque de Senghor, il convient de rappeler un événement qui a eu lieu en juillet 2022 : le legs à l’Ifan de la bibliothèque personnelle de Abdoulaye Ly. Cet intellectuel décédé en 2013 à l’âge de 93 ans était le premier sénégalais détenteur d’un doctorat en histoire. Il était aussi le premier assistant de recherche africain de l’Ifan (1954). Conformément à la volonté du défunt, sa famille a remis à son ancienne institution sa bibliothèque riche de 1500 ouvrages. Cet épisode révèle l’un des moyens par lesquels le riche patrimoine de l’Ifan s’est constitué : Le legs. Parmi les hommes ayant transmis leur collection, il y a notamment l’intellectuel arabisant Cheikh Moussa Kamara (1864-1945) ainsi que le Gouverneur Henri Gaden qui aurait également conçu un dictionnaire français-pulaar. Le Fonds initial de la bibliothèque a été hérité de l’Aof en 1938. Par la suite, la collection s’est enrichie avec des achats, des dons, des collectes de terrain, des échanges avec d’autres institutions mais aussi et surtout les publications de chercheurs. Ces ouvrages, archives et manuscrits sont pour les chercheurs et les curieux une source de savoirs ancestraux rares, de témoignages, de résultats de recherches et un moyen de mieux connaitre l’histoire des sociétés africaines.
L’archéologie... en mer
Toutefois, les sources orales et écrites ne sont pas les seuls moyens de retracer l’histoire. L’archéologie nous renseigne sur le passé à travers les vestiges matériels laissés par les sociétés étudiées. Ces vestiges peuvent inclure des artefacts, des structures architecturales, des restes humains, des outils, des poteries, des inscriptions, etc. Ces trouvailles aident à reconstituer et à comprendre les modes de vie, la culture, l’avancée technologique et les relations sociales des civilisations anciennes. L’Ifan a mené plusieurs fouilles archéologiques au Sénégal et en Afrique de l’Ouest. Alors que les fouilles en terre sont plus répandues, l’Ifan a participé récemment à des fouilles en mer à la recherche d’épaves de navires ayant coulé durant l’esclavage. Ce projet mené en collaboration avec une institution afroaméricaine entend retracer l’histoire de l’esclavage en faisant parler les bateaux négriers qui reposent au fond de l’Atlantique. A travers l’état de ces navires et de leurs funestes cargaisons humaines, les chercheurs espèrent faire des découvertes qui vont aider à mieux documenter l’histoire de cette tragédie humaine.
Faire parler des bateaux naufragés
L’Unesco estime à près d’un millier le nombre de navires négriers ayant sombré entre l’Afrique et l’Amérique. Ces accidents sont attribués à plusieurs causes : «Les obstacles à la navigation (mauvaise visibilité, bancs de sable…), ainsi que la rivalité entre puissances européennes, ont précipité vers le fond de nombreuses embarcations et avec elles les milliers d’esclaves qui avaient été forcés d’embarquer», lit-on dans un article publié par l’Unesco et portant la signature du Dr Madické Guèye de l’Ifan. L’équipe de plongeurs-chercheurs sénégalais est menée par le Pr Ibrahima Thiaw, archéologue à l’Ifan. Les recherches se concentrent aux larges de l’île de Gorée. Entre 2016 et 2017, une recherche avait montré qu’il y avait au moins 24 sites archéologiques aux larges de l’île. Il s’agit maintenant d’identifier ces épaves et de collecter des données qui vont renseigner sur les conditions de vie à bord et peut-être les circonstances du naufrage. Certains vestiges pourraient être remontés en surface et conservés dans des musées. Néanmoins, le séjour prolongé en mer peut entrainer une dégradation nécessitant des conditions spéciales de conservation. Or, «le Sénégal n’est pas encore équipé de laboratoire de conservation, élément primordial pour poursuivre les fouilles archéologiques sous-marines», déplore Madické Guèye, Docteur en archéologie sous-marine.
3 grands musées dont l’un situé dans une ancienne prison
L’Ifan dispose cependant d’un réseau de trois musées où sont conservés et exposés des vestiges de l’histoire africaine. Le musée Théodore Monod situé au Plateau à Dakar est consacré à la préservation et à la valorisation du patrimoine culturel africain. Il abrite plus de 9700 objets et vestiges historiques. Le musée historique à Gorée est consacré à l’histoire générale du Sénégal. Ce musée est aménagé dans le Fort d’Estrées qui était une ancienne prison où furent incarcérés des opposants au régime de Senghor. Omar Blondin Diop y trouva la mort en 1973. Cette imposante bâtisse abrite désormais une collection de cartes, d’objets et de pièces «qui retracent l’histoire de l’Île de Gorée, de la traite négrière, des royaumes de la Sénégambie et de l’Islam au Sénégal entre autres», lit-on sur le site de l’Ifan. Toujours situé à Gorée, il y a le Musée de la Mer consacré à l’eau et à la biodiversité marine. Le Sénégal disposant d’îles et de 700 km de côtes, on comprend l’importance accordée à la mer et à ce qu’elle abrite. Après tout, que serait le thièbou djeun sans le poisson ? Le musée abrite une collection de plusieurs centaines de poissons et de mollusques.