CORONAVIRUS : "CE QUI FAIT TENIR LA SOCIÉTÉ, C'EST D'ABORD UNE BANDE DE FEMMES"
Christiane Taubira rend hommage aux femmes, "majoritaires dans les équipes soignantes, aux caisses des supermarchés, dans les équipes qui nettoient les établissements"
Le ton martial ("Nous sommes en guerre") du président Emmanuel Macron, lors de son allocution télévisée du 16 mars dernier, n'était pas le bon, a jugé lundi 13 avril sur France Inter Christiane Taubira, ancienne ministre de la Justice. "Je pense que des femmes en situation d'autorité, de pouvoir, auraient abordé les choses différemment", a-t-elle ajouté. "Elles auraient vu plus facilement que ce qui fait tenir la société, c'est d'abord une bande de femmes", a salué Christiane Taubira, rappelant qu'elles sont "majoritaires dans les équipes soignantes, aux caisses des supermarchés, dans les équipes qui nettoient les établissements".
"Je n'ai pas envie de sombrer dans la facilité et dire que le président s'est trompé de registre, a déclaré Christiane Taubira. Il a probablement intentionnellement voulu secouer les consciences et bousculer les emportements. Ceci étant, je pense très sincèrement que des femmes en situation d'autorité de pouvoir auraient abordé les choses différemment. Plutôt que d'avoir recours à ce corpus viril, martial, sans doute qu'elles auraient vu plus facilement que ce qui fait tenir la société, c'est d'abord une bande de femmes, parce que les femmes sont majoritaires dans les équipes soignantes - même si nous saluons aussi avec autant gratitude les hommes - parce que les femmes sont majoritaires aux caisses des supermarchés, parce que les femmes sont majoritaires dans les équipes qui nettoient les établissements qui travaillent encore, et qu'elles sont souvent majoritaires dans la fonction publique qui tient encore."
"Et elles le font depuis longtemps ou presque. Depuis toujours, ce sont les femmes qui portent les métiers de soin, le soin en général, dans sa conception la plus large", a expliqué l'ancienne Garde des Sceaux.
"Il ne s'agit pas de révoquer les hommes" pour autant, a plaidé Christiane Taubira. "Mais c'est un effet de loupe tout à fait intéressant et qui doit interroger la société, qui doit interroger le pouvoir dans sa nature, dans sa masculinité et dans ses projections viriles. Qui doit nous interroger, nous, parce que la source du pouvoir, c'est nous, nous sommes encore une démocratie. Qui doit nous interroger aussi sur l'impact du regard sur la société", a développé l'ancienne ministre, qui a rappelé que "le patrimoine, le corpus culturel des femmes, historiquement, est différent que celui des hommes, qui ont été dans des positions, de génération en génération, de domination".