EST-CE VRAI QUE SEULEMENT 7% DES COMMUNES DISPOSENT D'UN PLAN D'URBANISME AU SÉNÉGAL ?
Africa Check a examiné cette déclaration du ministre Abdou Karim Fofana, lors de l'émission « Jury du dimanche » de I.Radio, le 18 août dernier

Le ministre sénégalais de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique Abdou Karim Fofana a récemment déclaré que « seulement 7 % des communes au Sénégal, disposent d’un plan d’urbanisme ».
Il était l’invité du « Jury du dimanche », une émission hebdomadaire de la radio privée sénégalaise I.Radio, le 18 août 2019.
Quelles sont les sources d’Abdou Karim Fofana ?
Se basant sur une « étude de son ministère », M. Fofana explique à Africa Check : « on est passé de 26 % avant l’Acte III de la décentralisation à 7 % après, car le nombre de communes est passé de 120 à 553, (les villes de Dakar, Guédiawaye, Pikine et Rufisque exclues) ».
« La communalisation intégrale a baissé le taux en faisant passer les communautés rurales en commune de plein exercice », poursuit le ministre de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique.
L’Acte 3 de la décentralisation sous-tend, selon le gouvernement sénégalais, une volonté d’asseoir « une véritable politique de développement et de mise en valeur des potentialités des territoires, à l’horizon 2022 et élaborer une loi d’orientation pour le développement durable des territoires (LODT) ».
Qu’est-ce qu’un plan directeur d’urbanisme ?
« Les plans directeurs d’urbanisme fixent les orientations générales et indiquent les éléments essentiels de l’aménagement urbain, dans le cadre du plan national d’aménagement du territoire », lit-on dans le code de l’urbanisme du Sénégal consulté par Africa Check.
« Ils intègrent et coordonnent les objectifs de l’Etat, des collectivités locales, des organismes publics ou privés en matière de développement économique et social. Les plans directeurs d’urbanisme s’appliquent aux communes, à des parties de communes ou de communautés rurales, à des agglomérations, ou des parties d’agglomérations que réunissent des intérêts dans le cadre de l’intercommunalité », indique le document.
Que disent les données disponibles ?
Selon la Revue d’urbanisation « Villes Émergentes pour un Sénégal Émergent », de la Banque mondiale, publiée en 2015, « le taux de couverture des villes par des plans d’urbanisme est inférieur à 30 % ; et le secteur est dominé par la question de l’habitat spontané dont l’importance est estimée à 40 % à Dakar et à 25 % dans les villes de l’intérieur. L’occupation de zones inondables qui touche 50 % des ménages dakarois est l’une des retombées les plus visibles de ce manque de planification urbaine ».
Un tableau obtenu des services du ministère de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique, répertorie la situation globale des Plans directeur d’Urbanisme (PDU) et de leurs dates d’approbation.
Au total 122 communes sénégalaises ont des PDU parmi lesquels 40 ont été approuvés par décret. Cela représente environ 7,18 % des 557 communes que compte le Sénégal.
« 15 % de couverture avant la communalisation intégrale »
« Le taux de moins de 30 % de couverture des villes par des plans d’urbanisme traduit le faible maillage territoriale en matière de planification urbaine », explique le Docteur Lamine Ousmane Cassé, enseignant chercheur à l’Université Gaston Berger de Saint Louis du Sénégal.
Pour ce géographe spécialiste des questions urbaines, ce taux prend en compte des plans directeurs réalisés il y a plus de 15 ans et qui ne répondent plus aujourd’hui aux besoins de planification des villes.
« La prise en compte des seuls documents toujours en application conduirait à retenir un taux sensiblement plus faible, de l’ordre de 15 %. Ces pourcentages s’entendent avant l’application de l’Acte III de la décentralisation en termes de communalisation intégrale du territoire », indique le rapport de la Banque mondiale 2015.
L’étude de référence « Banque mondiale, Rapport sur le développement dans le monde 2015 » prône une simplification des procédures de planification qui « passe notamment par une simplification du code de l’urbanisme ».
Pas de statistiques à l’Association des Maires du Sénégal
Du côté de l’Association des Maires du Sénégal (AMS), Mbaye Dione, son Sécrétaire général, explique à Africa Check qu’il y a très peu de communes au Sénégal qui disposent d’un Plan directeur d’urbanisme.
« Nous ne disposons pas de statistiques mais cette situation s’explique par le fait que beaucoup de communes étaient des communautés rurales qui n’ont pas assez de moyens pour avoir des PDU », laisse-t-il entendre.
Conclusion : la déclaration du ministre Abdou Karim Fofana est correcte
Le ministre sénégalais de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique Abdou Karim Fofana a récemment déclaré que « seulement 7 % des communes au Sénégal, disposent d’un plan d’urbanisme ».
Selon les chiffres de la Banque mondiale provenant du « Rapport sur le développement dans le monde 2015 », le taux de couverture des villes par des plans d’urbanisme est inférieur à 30 %.
Ce pourcentages portent sur la période précédant l’application de l’Acte III de la décentralisation en termes de communalisation intégrale du territoire, explique le géographe spécialisé sur les questions urbaines Lamine Ousmane Cassé.
Un document des services du ministère de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique fait état de 40 communes qui sont dotées de plans directeur d’Urbanisme (PUD) ayant fait l’objet d’une approbation. Ce qui représente environ 7,18 % des 557 communes que compte le Sénégal.