COVID-19, LA VACCINATION, UN CASSE-TETE POUR LES FEMMES ENCEINTES
Désormais recommandée dès le premier trimestre de la grossesse, la vaccination protège les femmes enceintes, plus exposées aux risques que les autres, ainsi que leur futur enfant, à la Covid-19
Désormais recommandée dès le premier trimestre de la grossesse, la vaccination protège les femmes enceintes, plus exposées aux risques que les autres, ainsi que leur futur enfant, à la Covid-19. Si plusieurs futures mamans acceptent, beaucoup se posent des questions et certaines refusent de se faire vacciner. Reportage.
La vaccination contre la Covid-19 reste un choix difficile pour de nombreuses femmes enceintes. Beaucoup s’interrogent, dès l’annonce de leur grossesse. Vais-je bien supporter le vaccin ? Y aurait-il des effets secondaires pour moi ou le bébé ? C’étaient les principales craintes de Denise Samba, avant de, finalement, se faire vacciner. Teint clair, mise bien soignée, Mme Samba est secrétaire. Pour sa première grossesse, elle a été confrontée à un véritable dilemme, d’autant que ses documentations sur Internet ne la rassuraient guère.
Certains parlent de fausses couches, de morts in utero ou de malformations. Après son mariage, elle est restée, quelques années, sans recevoir la grâce de la conception. De ce fait, elle ne voulait pas prendre le risque de perdre sa grossesse, à cause d’un vaccin. ‘’Il y a des rumeurs de thrombose et de fièvre qui obligent à l’hospitalisation. Finalement, quand on lit ça, on se dit que ce que peut provoquer le vaccin, c’est la même chose que la Covid-19. J’avais vraiment peur de perdre ma grossesse, à cause d’un mauvais choix. La nuit, avant de dormir, j’ai fait une prière en demandant à Dieu de me guider dans mon choix, de me montrer la bonne voie. Au réveil, le lendemain matin, je suis partie directement prendre le vaccin’’, confie Mme Samba.
Suzanne Ndiaye, comptable dans une société à Dakar, s’est aussi fait vacciner. Elle n’a pas eu une once de doute sur l’efficacité des vaccins. Au marché Sandaga, où nous l’avons rencontrée sous un soleil ardent, elle traine un sachet. La dame, en plus d’être enceinte, est diabétique. Depuis le début de la pandémie, elle se protège comme elle peut contre la Covid. Elle a pris la décision ferme de se vacciner, malgré les réserves de son gynécologue. Ce dernier, explique Mme Ndiaye, ne voulait pas qu’elle se vaccine, tant qu’il n’a pas suffisamment d’éléments sur les vaccins.
De l’autre côté, son médecin diabétologue lui mettait la pression pour qu’elle se vaccine. ‘’J’ai lu tout ce qui se dit sur les risques des femmes enceintes non-vaccinées. En plus, je suis diabétique. Je préfère me protéger et sauver mon enfant que de me retrouver dans un lit d’hôpital ou à la morgue’’, explique-t-elle.
‘’On fait tout ce qu'il faut pour le bien-être de notre enfant à naître’’
Sira Thiam milite aussi pour la vaccination. Soutenant que lors d'une grossesse, les femmes suivent les recommandations de ne plus fumer, de ne pas s'auto-médicamenter, d’adapter leur alimentation, leurs activités sportives, etc. ‘’On fait tout ce qu'il faut pour le bien-être de notre enfant à naître. Il en va de même pour les recommandations liées à la vaccination. Il s'agit d'une recommandation de médecins, de gynécologues. N'étant pas spécialiste du sujet et étant soucieuse de faire les choses convenablement, je suis l'avis des experts en la matière’’, souligne-t-elle.
Nicole Garron est une jeune Martiniquaise vivant au Sénégal. Elle pense que si elle n'avait pas eu le projet d'avoir un enfant, elle se serait faite vacciner, dès lors que cela a été ouvert à sa tranche d'âge. ‘’J'ai profité de ma consultation préconceptionelle pour mettre mes vaccins à jour, n'ayant aucune méfiance vis-à-vis de cela. Concernant le cas particulier de la Covid-19, il semble que le vaccin soit la seule issue. Alors, je pense qu'il est important de participer à cet effort collectif’’, souligne Mme Garron.
Néanmoins, elle précise, dans le cadre d'une grossesse, ‘’qu'il est nécessaire de laisser chaque couple, de concert avec le gynécologue ou le médecin traitant, décider de ce qu'il veut faire concernant le vaccin anti-Covid-19. Même si les premières études sont rassurantes, le recul est encore mince. Je comprends les couples réticents au vaccin. Mais aujourd'hui, ils ne peuvent plus vraiment décider. Même si la vaccination n'est pas obligatoire, une femme enceinte a le choix suivant : se faire vacciner contre son gré, ne pas se faire vacciner et ne pas avoir accès aux lieux publics sans passe sanitaire. Car c'est de ça qu’il s'agit’’, argumente-t-elle.
“Je suis soucieuse que les vaccins ne sont pas étudiés à long terme sur le corps des femmes enceintes’’
Les médecins et les scientifiques recommandent la vaccination des femmes enceintes. Car non seulement c’est sans risque, mais elles font même partie du public prioritaire. Toutefois, de nombreuses mamans ou futures mamans ont peur et pensent que les gynécologues manquent encore de recul sur les vaccins pour franchir le cap.
Parmi elles, certaines refusent d’ailleurs totalement de se faire vacciner. C’est le cas de Yassine Diop, 29 ans et enceinte de 6 mois. Elle a décidé de ne pas se faire vacciner durant sa grossesse. Car, au moment de la conception, soutient-elle, beaucoup de médecins lui ont déconseillé de le faire. ‘’Je fais partie de plusieurs communautés en ligne éco-féministes et plusieurs personnes vaccinées évoquent un dérèglement de leur cycle menstruel. Je suis soucieuse que les vaccins ne sont pas étudiés à long terme sur le corps des femmes enceintes et des femmes en général’’, expose la jeune femme.
Yassine s’inquiète, particulièrement, de ce que le vaccin peut entraîner d’un point de vue gynécologique. “Les témoignages partagés citent des dérèglements des cycles menstruels d’habitude très réguliers, un flux menstruel anormalement abondant, ainsi que du spotting chez des femmes ménopausées. Cela m’a pris des mois pour me reconnecter et guérir les blessures liées à cette partie de mon corps. Les effets indésirables que le vaccin pourrait avoir sur l’appareil génital féminin me préoccupent, à court et long terme“, déclare Mme Diop.
Edwige Ntap précise que, d’une manière générale, la future maman se méfie des vaccins en tout genre. “J’y vais toujours à reculons avec la médecine allopathique, hormis pour certaines chirurgies. Je suis tout de même à jour sur mes vaccins et j’ai fait certains rappels récemment. Mon scepticisme concerne particulièrement les vaccins contre la Covid-19. Je suis encore hésitante à le faire après l'accouchement. J’ai beaucoup de doutes et d’incertitudes pour le moment’’, justifie-t-elle.
Le 9 août 2021, le ministère de la Santé et de l’Action sociale du Sénégal a recommandé la vaccination des femmes enceintes contre la Covid-19. Dans une note d’information adressée aux médecins-chefs de région, il a été annoncé que les précautions qui étaient préconisées dans la vaccination contre la Covid-19 chez les femmes enceintes sont levées. Aussi, les anciens malades guéris du Covid-19 et les femmes allaitantes font partie de la cible à vacciner.