À LOUGA, LES LANGUES SE DÉLIENT SUR LES VIOLENCES GYNÉCOLOGIQUES ET OBSTÉTRICALES
Badiane Diop a perdu son bébé le mois dernier après avoir attendu plus de 5 heures que des sages-femmes se préoccupent de sa situation critique. « Comme toutes les autres, au moment de porter plainte, la famille s’est opposée donc j’ai laissé tomber…»
Au Sénégal, l’émotion est encore vive suite au décès d’Astou Sokhna. La femme enceinte de 9 mois est décédée après 20 longues heures de souffrance à l’Hôpital régional de Louga - à 200 kilomètres au nord du Sénégal. Sa famille a porté plainte pour « négligence » et « non assistance à personne en danger ». Une affaire révélatrice des violences faites aux femmes dans les établissements de santé.
Assise au milieu de ses sœurs et voisines, Maimouna Ba tient entre ses mains un album rempli de photos de sa fille Astou Sokhna, décédée la semaine passée. C’est elle qui accompagnait la jeune femme enceinte de neuf mois à l’hôpital alors que celle-ci appelait en vain le personnel de santé pour soulager ses fortes douleurs au ventre.
« Ma colère est adressée au personnel soignant de l’hôpital, car ils ont été négligents. Ils n’ont aucune considération envers l’être humain », dit Maimouna. « Astou les avait même menacés : “vous me négligez, quand je vous appelle vous ne me répondez pas. Quand je serai rétablie, j’irai vous dénoncer à la direction”. Les sages-femmes lui ont répondu : “c’est parce que tu souffres que tu es en train de délirer”. Astou ne savait pas qu’elle allait mourir là… » Le personnel de l’hôpital rejette la thèse de la négligence et pointe plutôt du doigt leurs conditions précaires de travail.
Mais à Louga, les langues se délient et d’autres femmes commencent à témoigner. Badiane Diop, 26 ans, vient de perdre son bébé le mois dernier après avoir attendu plus de cinq heures que des sages-femmes se préoccupent de sa situation critique. « Comme toutes les autres, au moment de porter plainte, la famille s’est opposée donc j’ai laissé tomber… mais au fond de moi je ne leur pardonnerai jamais ce qu’ils m’ont fait et ce qu’ils ont fait à mon bébé », affirme Badiane.