PASTEF MULTIPLIE LES CANDIDATURES POUR PASSER LES MAILLES DU PARRAINAGE
L’objectif est de déjouer les manœuvres du pouvoir en place pour qu’au moins un candidat de la mouvance puisse se qualifier.
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Même si rien n’est encore définitif quant à la participation d’Ousmane Sonko à la prochaine élection présidentielle, les choses commencent à prendre tout de même forme. Après le décret de dissolution de son parti, le Pastef, et sa radiation des listes électorales, l’opposant emprisonné vient de recevoir un nouveau coup de la Direction Générale des Elections qui a refusé de remettre à son mandataire les fiches de parrainages pour le scrutin de février prochain. Mais malgré tout, Ousmane Sonko, loin d’avoir abdiqué, essaye de contourner les manœuvres du pouvoir en place en multipliant les candidats à la candidature pour la prochaine présidentielle. Pour le moment, les candidats se réclamant de Pastef ou de sa mouvance sont au nombre de quatre.
Le vent d’incertitudes qui assombrit l’avenir politique de Ousmane Sonko, en tout cas pour la prochaine élection présidentielle, est loin de s’estomper. Depuis son lit d’hôpital prison, il réfléchit sur la stratégie à mettre en place pour déjouer les manœuvres du pouvoir en place pour l’écarter de la course pour le palais présidentiel. Après son arrestation et la dissolution de son parti, il a été radié des listes électorales. Trois actes majeurs posés par l’État qui pourraient le rendre inéligible et donc anéantir ses chances d’être candidat en février prochain. Toutefois rien n’est encore définitif dans cette disqualification du leader de Pastef puisqu’il a déposé des recours auprès des juridictions compétentes pour contester ces décisions qu’il juge illégales et relevant d’une tentative de l’éliminer. Face à cette situation et en attendant que ces recours soient tranchés — bien évidemment, il ne se fait aucune illusion sur le sort qui sera réservé à ces recours par la justice aux ordres du pouvoir en place —, il a décidé pour parer à toute éventualité de multiplier les candidats à la candidature. Ils sont quatre tous du Pastef à s’être présentés vendredi dernier à la Direction Générale des Elections (DGE) pour retirer leurs fiches de parrainage. Une pluralité de candidats qui peut être diversement appréciée. Si certains y voient une façon pour le leader incontesté de l’opposition de reconnaître son inéligibilité, d’autres pensent que cette multiplicité de candidatures procède plutôt d’une stratégie politique mise en place pour brouiller les cartes et montrer au régime que, quoi qu’il fasse, les tentatives visant à l’éliminer sont vouées à l’échec.
La DGE a-t-elle joué franc jeu ?
Une chose est sûre : les partisans de Ousmane Sonko restent droits dans leurs bottes. Officiellement en tout cas, ils n’ont qu’un seul et unique candidat pour la prochaine élection. Un candidat que personne ne peut empêcher de prendre part au scrutin du 25 février prochain. Pour autant, au vu de la tournure des choses, il y a de quoi émettre des réserves sur la fermeté de leur position. En acceptant qu’en plus du candidat déclaré, Ousmane Sonko, que quatre personnes issues de leurs rangs aillent retirer les fiches de parrainages, les membres de Pastef semblent bel et bien préparer un plan B. Ce, malgré leurs dénégations et nonobstant la bataille judiciaire entreprise pour contester toutes les décisions prises par le régime du président Macky Sall et visant à invalider la candidature du leader des « patriotes ». En tout cas, ses partisans jugent « maladroite » l’attitude de la Direction Générale des Elections (DGE), coupable d’avoir refusé de remettre des fiches de parrainage au mandataire d’Ousmane Sonko, Ayib Daffé, et l’accusent de vouloir se substituer au Conseil constitutionnel pour décider qui doit ou ne doit pas être candidat à la mère des élections. Sur ce point ils évoquent le cas de Karim Wade qui, bien que son nom ait été retiré du fichier électoral en 2019, avait pourtant pu faire retirerses fiches de parrainage par le biais de son mandataire. Les camarades du maire de Ziguinchor se demandent donc qu’est-ce qui a changé entre-temps pour que ce qui était valable pour fils du président Abdoulaye Wade ne le soit pas pour Ousmane Sonko alors qu’aucun texte allant dans le sens du retrait des fiches de parrainage n’a fait l’objet de révision depuis la dernière élection présidentielle. Toujours est-il que, pour pallier à toute éventualité et éviter de tomber dans le piège du pouvoir, les Pastefiens ont pris les devants pour demander à quatre de leurs responsables d’aller retirer les fiches de parrainage. Cette stratégie longuement mûrie par le camp de Ousmane Sonko est perçue par beaucoup d’observateurs comme une bonne réponse politique au camp d’en face. Toutefois, dans les rangs de l’APR nos sources très informées renseignent que les positions sont partagées entre ceux qui crient victoire et d’autres surpris par la démarche adoptée par les partisans de Ousmane Sonko déterminés à faire en sorte qu’un candidat issu de son camp puisse se substituer à lui. Rappelons que jusqu’à présent Ousmane Sonko n’a pas reçu d’acte de notification de son retrait du fichier électoral. Aussi des spécialistes du droit vont plus loin pour expliquer que tant qu’il n’y a pas une décision de justice condamnant définitivement le leader de Pastef, la DGE ne peut en aucun cas refuser de remettre des fiches de parrainage à son mandataire. Les mêmes spécialistes ajoutent qu’à l’heure actuelle il y a d’autres prétendants à la magistrature suprême dont la candidature pose juridiquement problème mais c’est au Conseil constitutionnel sur leur éventuelle validité. Malgré tout ils ont bénéficié de la fiche en question
Coup de génie ou aveu de d’inéligibilité de Ousmane Sonko ?
En alignant quatre personnes sur la ligne de départ de la présidentielle, le Pastef a surpris plus d’un. Longtemps cantonnés dans leur position de faire de Ousmane Sonko leur seul et unique candidat, ses partisans ont, contre toute attente et au dernier moment, positionné quatre potentiels candidats pour la course versle palais Présidentiel. Une façon pour non seulement brouiller les cartes sur le nom de leur futur candidat au cas où Sonko serait définitivement recalé mais également de faire montre de leur génie politique face aux manœuvres des tenants du régime en place. Cette démarche bien mûrie commence déjà à susciter beaucoup de commentaires du fait du mystère qui l’entoure. Mais malgré le mutisme des pastefiens, des voix s’élèvent pour interpréter leur stratégie comme un vrai coup de génie politique pour éviter de tomber dans le même piège tendu en 2019 à Khalifa Sall et Karim Wade. En effet, certainement par manque de stratégie, leurs entités politiques n’avaient pas prévu de candidats de substitution à temps et avaient donc fini par déclarer forfait. C’est pourquoi, pour ne pas tomber dans le même piège que les deux « K », Ousmane Sonko a très tôt pris les devants. Toutefois il reste d’autres batailles à mener à savoir le maintien de la discipline qu’on leur connait en termes d’organisation et de fonctionnement de leur parti. S’ilsrestent dans cettemême dynamique, ils ont des chances d’aller jusqu’au bout de leurs ambitions en dépit de l’absence de leur leader toujours en détention. Certes, pour le moment, on ignore encore l’option finale entre la pluralité des candidats ou le choix d’un candidat unique. Si la première option est retenue on risque d’aller vers un éclatement des voix qui risque d’hypothéquer une qualification au second tour.
Mais puisque près de cinq mois nous séparent encore de la prochaine présidentielle, des rebondissements ne sont pas à écarter. Pour l’instant, les avocats de Ousmane Sonko ont décidé de déposer des recours contre le refus de la Direction générale des Elections de remettre des fiches de parrainage au mandataire de leur client.