GAZAOUI LIVES MATTER
EXCLUSIF SENEPLUS - On comprend que les Européens, qui sont à l’origine du plus grand massacre de juifs de l’Histoire, répriment leur désapprobation par peur de se voir rappeler leur passé, mais les autres ?
C’est sans doute une première dans l’histoire moderne qu’une armée, puissante et sophistiquée armée d’avions, d’hélicoptères[D1] , de drones, de chars et de mitrailleuses, prenne d’assaut…un hôpital civil, défonce ses murs, fracasse ses portes, envahisse les salles d’urgence et saccage leur matériel , tire dans les couloirs, fouille et déshabille le personnel à la recherche de suspects , et pour tout dire, transforme en champ de bataille une institution dont la vocation est de soigner et de soulager les douleurs ! Je me rappelle qu’autrefois on mettait à proximité des hôpitaux un panneau sur lequel étaient inscrits deux mots « Hôpital : Silence ! », mais c’est apparemment une recommandation dont se moque l’armée israélienne, et de toute façon cela fait des semaines que les deux mille malades, blessés ou réfugiés de l’hôpital Al Shifa, ainsi que son personnel, ont perdu le sommeil, troublé par ailleurs par la mort, par manque d’oxygène d’une quarantaine de nourrissons !
Les images des atrocités commises par le Hamas sont diffusées sur tous les médias, religieusement projetées devant les élus européens, mais qui peut dire ce qui s’est passé à Gaza depuis plus d’un mois ? Les reporters de guerre se font embedded dans les chars israéliens, ne diffusent que les images filtrées (non censurées ?) par l’armée israélienne, mais combien parmi eux ont pris le risque , l’honneteté,de s’intéresser et de montrer au monde la détresse des deux millions et demi de Gazaouis, qui n’ont ni eau ni électricité, ni réserve alimentaire ni médicaments, qui sont coupés du monde extérieur faute de connexion, qui enterrent leurs morts dans des fosses communes ?Il y bien longtemps que personne à Gaza n’a pris un bain ,il y a des habitants qui ne mangent plus que du crû ,qui boivent de l’eau à moitié saumâtre, qui brulent du carton pour faire du feu…et ces témoignages viennent des institutions humanitaires qui sont encore en place. Qui ,parmi ces audacieux reporters, a porté témoignage du sort des femmes et des hommes abandonnés à eux-mêmes et qui errent comme des âmes en peine du nord vers le sud de la bande, en file indienne en rasant les murs et en trainant des enfants et des chariots? Qui s’est penché sur les mères qui portent dans leurs bras leurs enfants mourants ou tués par les bombes, ou suite à l’interruption des soins faute d’électricité, et sur les centaines de malades et de blessés qui agonisent sur des lits crasseux? Qui raconte le désespoir des Palestiniens de Cisjordanie, qui ne sont pourtant pas en guerre, quand les colons israéliens s’amusent à aller casser du Bédouin, comme on va jouer à la marelle, brulent leurs maisons et arrachent des oliviers vieux de plusieurs siècles .Quand un terroriste (mais pour les autorités israéliennes tout arabe est terroriste, au moins en puissance),ou présumé tel est dans le collimateur de l’armée israélienne, celle-ci n’hésite pas, pour l’éliminer, à lancer une bombe sur un camp de réfugiés, sans se soucier du nombre de victimes collatérales que cette opération peut provoquer. Le gouvernement israélien a déclaré que tous ces gens-là n’étaient que « des animaux, qu’ils seraient traités comme tels » et que leurs vies ne valent pas celles des Israéliens ! Personne ou presque, parmi ceux dont les voix comptent dans le monde, ne crie pourtant au scandale (seul Human Rights Watch a trouvé ces mots « répugnants »), et aucun pays (à l’exception, curieusement, du Chili et de la Colombie et aussi de l’Afrique du Sud) n’a pris des sanctions contre un gouvernement qui foule aux pieds les lois internationales !
Qui eût pensé, il y a trois quarts de siècle, dans l’euphorie qui a entouré la création de l’état d’Israël, que parmi les descendants des rescapés des camps d’extermination allemands, du ghetto de Varsovie ou de la Rafle du Vel d’hiver, on verrait surgir des tortionnaires, que leur gouvernement aurait recours- (ce sont des institutions internationales ,des observateurs indépendants et même des Israéliens favorables à la paix qui l’affirment)-à l’apartheid, à des crimes de guerre, à l’expropriation de terres ,et qu’il ferait l’objet, à lui seul, de plus de la moitié des condamnations votées par l’Assemblée générale de l’ONU ,celle-là même qui avait permis à Israël d’exister?
On en est là : un état de 9 millions d’habitants défie le monde, insulte ou menace les plus faibles, fait du chantage ou morigène les puissants. On comprend que les Européens, qui sont à l’origine du plus grand massacre de juifs de l’Histoire, répriment leur désapprobation par peur de se voir rappeler leur passé, mais les autres ? Pas seulement les Arabes, mais le monde entier : le problème des Palestiniens n’est ni ethnique ni confessionnel, il ressort du droit, de la justice et de l’humanité.
Aujourd’hui aucun pays démocratique dans le monde ne devrait garder des relations diplomatiques normales avec l’État d’Israël.