QUAND SENGHOR A FAILLI RÉSOUDRE LE CONFLIT ISRAÉLO-PALESTINIEN
En 1971, quatre présidents africains croyaient tenir une solution au conflit. Mais le revirement d'Israël sonna comme une trahison pour le continent. Depuis, l'Afrique noire reste engagée auprès des Palestiniens
«Marche pour la Palestine au Sénégal», «L’ apartheid» d’Israël contre les Palestiniens pire qu’en Afrique du Sud, accuse Pretoria». Ces deux titres repris par la presse internationale illustrent le soutien de l’Afrique noire à la cause palestinienne. Tout commence au début des années 1970 par une mission diplomatique entreprise par 4 présidents africains menés par Léopold Sédar Senghor. Par la suite, d’autres actions fortes vont venir renforcer ce soutien à la Palestine.
En 1971, quatre présidents africains se rendent en Israël dans l’espoir de faire aboutir des efforts diplomatiques entrepris depuis la fin de la «Guerre de Six Jours» (1967). Au terme de cette guerre, la Commission Jarring est mise en place pour aboutir à un accord de paix durable entre Israël et ses voisins arabes. Les négociations calent sur la question de la rétrocession des territoires annexés par Israël : le Sinaï égyptien, le Golan syrien et la Cisjordanie. En un essai, l’Afrique allait-elle réussir là où les autres initiatives diplomatiques se sont avérées infructueuses ? C’est ce qu’espéraient Senghor (Sénégal), Ahidjo (Cameroun), Mobutu (Zaïre) et Gowon (Nigéria). Ces quatre présidents mandatés par l’Oua (Organisation de l’unité africaine) rencontrent le leader palestinien, Yasser Arafat, puis Golda Meir, la Première ministre israélienne. Ils leur font une proposition de sortie de crise acceptée par les deux parties. L’accord impliquait la création d’un Etat palestinien viable avec des frontières sûres aux côtés d’un État israélien dont le droit à l’existence sera reconnu par les pays arabes. Senghor obtient même de Golda Meir que le chef de la diplomatie israélienne évoque l’accord négocié à la tribune des Nations Unies. Malheureusement, «un quart d’heure avant de prendre la parole, Abba Eban reçut de Golda Meir, sa Première ministre, l’ordre d’enlever de son discours le passage acceptant la proposition des quatre chefs d’État africains», rapporte Abdou Diouf qui était alors Premier ministre. La raison de ce revirement n’est pas connue mais pour l’Afrique, cette initiative diplomatique était plus qu’un échec, c’était une humiliation collective. A partir de ce moment-là, le soutien à la Palestine sera constant tandis que les relations avec Israël vont s’envenimer.
L’Afrique et le Sénégal au chevet de la Palestine
Deux ans plus tard a lieu la guerre du Kippour opposant Israël à l’Egypte et à la Syrie. Sous la pression des pays arabes usant de l’arme du pétrole et par solidarité pour l’Egypte, presque tous les pays africains rompent leurs relations diplomatiques avec l’État hébreux. Au même moment, l’Afrique multiplie les gestes de soutien à la Palestine. En 1975, le Sénégal est désigné pour présider le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien. En 1977, le Sénégal est le 1er pays d’Afrique noire à recevoir Yasser Arafat à qui fut aussi remis un passeport diplomatique sénégalais pour faciliter ses déplacements sur le continent. En 1988, c’est en Algérie que Yasser Arafat proclame l’indépendance de l’Etat palestinien. Le Sénégal est l’un des premiers pays à reconnaitre l’Etat palestinien et sera par la suite imité par une majorité de pays africains. Le Cameroun et l’Erythrée sont les seuls pays du Continent à refuser cette reconnaissance. Plus récemment en 2016, le Sénégal a parrainé à l’Onu une résolution condamnant la colonisation par Israël de territoires palestiniens.