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6 février 2025
L'APPEL DE L'ÉGLISE AU RESPECT DES LOIS
"Il faut que les Sénégalais évitent la technique du contournement", rappelle Mgr Benjamin Ndiaye lors d'un discours à Joal-Fadiouth. Pour l'homme archevêque de Dakar, le respect des institutions est indispensable à la cohésion nationale
L’archevêque de Dakar, Monseigneur Benjamin Ndiaye a rappelé dimanche à Joal-Fadiouth, une commune du département de Mbour (Ouest), l’importance que les institutions de la République soient »respectées et respectables dans leurs missions ».
“Il est important que nous cherchions à vivre la cohésion nationale. Il faut que les institutions soient respectables et respectées dans leurs missions pour que nous puissions avancer ensemble et cela suppose que nous tous nous jouions le jeu du sentiment national“, a dit le chef de l’église catholique sénégalaise.
L’archevêque de Dakar présidait la fête marquant les 175 ans de l’érection juridique de la Paroisse de Joal.
”Quand il y a règlement, c’est pour qu’il soit suivi. Ce n’est pas pour qu’on passe à droite ou à gauche. Si on respecte le règlement, on peut avancer“, a-t-il dit.
L’homme de l’église, invite les sénégalais au respect des lois et des règlements pour vivre en paix.
”J’aime bien rappeler aux Sénégalais que quand nous nous saluons, nous nous souhaitons constamment la paix, mais cette paix-là, elle est à bâtir et ça passe par la vérité dans la parole et dans les gestes“, a souligné M. Ndiaye.
”Il faut que les sénégalais évitent la technique du contournement“, a-t-il ajouté.
L’archevêque qui dit partager la situation actuelle avec les concitoyens, a ajouté : ”ce qui m’importe le plus c’est que le Sénégal vive selon sa constitution. C’est l’essentiel“.
”Tout ce que l’on peut dire et que l’on peut faire, que cela corresponde à la constitution que nous avons adoptée comme citoyens de ce pays“, a-t-il conclu.
LE SÉNÉGAL S'ÉLOIGNE DE SA TRADITION DÉMOCRATIQUE SELON LE MONDE
Le journal français pointe une volonté de manipulation électorale, un mépris des institutions et un risque d'embrasement. Pour la publication, Macky Sall joue un jeu dangereux qui menace la stabilité du "phare de la démocratie" en Afrique de l'Ouest
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 05/02/2024
Dans un éditorial publié le 5 février 2024, le quotidien Le Monde s'alarme du "jeu dangereux" mené par le président sénégalais Macky Sall. En effet, ce dernier a annoncé samedi "de façon surprise" le report sine die de l'élection présidentielle prévue le 25 février, rompant avec "la longue histoire démocratique" du pays.
Selon le journal, "depuis son indépendance en 1960, l'armée n'a jamais menacé le pouvoir" au Sénégal et "une véritable liberté d'expression y nourrit un débat politique dynamique". Ainsi, "depuis 1963, les scrutins présidentiels ont toujours eu lieu à la date prévue".
Or, note Le Monde, Macky Sall "s'était déjà signalé par un comportement alarmant" lorsqu'il avait laissé planer le doute sur sa volonté de briguer un troisième mandat, ce qui est interdit par la Constitution. Finalement, il y avait renoncé en juillet dernier après des "émeutes réprimées dans le sang" en juin.
Pour le journal, "tout se passe comme si le président voulait favoriser la candidature, rejetée par le Conseil constitutionnel, de Karim Wade". En prenant "prétexte de la mise en cause à l'Assemblée nationale, par des élus proches de M. Wade, de l’intégrité des juges constitutionnels", Macky Sall "risque en réalité de mettre le feu aux poudres" alors que le pays a "les nerfs à vif".
Le Monde s'inquiète du "signal" donné et de l'atteinte portée à "la séparation des pouvoirs". Car "que le phare de la démocratie dans la région donne pareil signal ne peut qu’inquiéter sur la pérennité du « modèle sénégalais »".
VIDEO
POUR ABDOU LATIF COULIBALY, MACKY SALL A ARRÊTÉ L'HISTOIRE
Pointant du doigt l'inconstitutionnalité du report électoral, l'ancien secrétaire général du gouvernement dévoile les dessous politiciens de la manœuvre et pointe la responsabilité directe du président dans cette crise démocratique
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 05/02/2024
Abdou Latif Coulibaly, ancien secrétaire général du gouvernement, a accordé une interview à RFI ce lundi 5 février 2024 pour expliquer les raisons de sa démission, survenue deux jours plus tôt. Selon M. Coulibaly, le report sine die du scrutin initialement prévu le 25 février dernier constitue une "entorse" et une "dérive" inacceptable.
Interrogé sur les motifs de son départ du gouvernement, le haut fonctionnaire a indiqué vouloir "retrouver [sa] liberté d'expression" et ne plus se sentir tenu par "la solidarité du gouvernement" face à une décision avec laquelle il est en profond désaccord. Pour M. Coulibaly, ni le président Macky Sall, ni l'Assemblée nationale n'avaient le pouvoir de reporter l'élection, arguant que la réforme constitutionnelle de 2016 était censée garantir l'intangibilité du calendrier électoral.
À ce sujet, il a relevé une contradiction majeure dans la position actuelle du chef de l'État, qui affirmait lui-même en 2012 qu'un président ne pouvait "augmenter d'une journée son mandat". Selon l'ex-secrétaire général, "aujourd'hui, [Macky Sall] décide de renoncer à tout ça. Il arrête l'histoire", se déjugant par rapport aux engagements passés.
Abdou Latif Coulibaly a par ailleurs estimé probable l'existence d'"un accord sur les démarches" avec le Parti démocratique sénégalais (PDS) de Karim Wade, principal bénéficiaire du report.
Pour l'ancien ministre, la décision de Macky Sall "n'est pas un avantage pour lui et en rien du tout" sur le plan politique. Elle dénoterait selon lui une tendance chez les dirigeants, "quand on est dans l’exercice du pouvoir, [à croire] que tout est possible". Plus grave encore, M. Coulibaly a affirmé avoir "alerté le président sur les risques" d'un tel report, sans être écouté.
En fin d'interview, l'opposant a déploré l’absence de préparatifs logistiques et administratifs sur le terrain en vue du scrutin, contrairement à ce qui a toujours été fait dans le cadre du processus pré-électoral. Une situation qui révèle, pour Abdou Latif Coulibaly, une volonté délibérée de reporter les élections de la part du pouvoir.
L'INTERNET MOBILE COUPÉ
Le ministre de la Communication justifie cette mesure par la nécessité de contrer la diffusion de propos subversifs en plein contexte de tensions
Les autorités sénégalaises annoncent avoir suspendu « provisoirement » l’internet des données mobiles à partir du dimanche 4 février à 22 heures.
« Le ministre de la Communication, des Télécommunications, et du Numérique informe le public qu’en raison de la diffusion de plusieurs messages haineux e subversif relayés sur les réseaux sociaux dans un contexte de menaces de troubles à l’ordre public, l’internet des données mobiles est suspendu provisoirement à partir du dimanche 4 février à 22 heures », écrit un communiqué de la tutelle rendu public le même jour.
« Les opérateurs de téléphonie sont tenus de se conformer aux réquisitions notifiées », indique la source.
Par Madiambal DIAGNE
MACKY SALL, LE DIALOGUE POUR REFERMER LA DECHIRURE
Macky Sall est contraint et forcé d’en arriver à cette extrémité à laquelle le Sénégal n’était pas préparé. Cela est d’autant plus difficile qu’il ne le fait point pour lui-même
L’histoire dira un jour si le Président Macky Sall a eu tort ou raison de suspendre le processus électoral. Il m’a fait l’amitié de m’expliquer les raisons profondes de la lourde décision qu’il a dû prendre. Il en mesurait pleinement le risque pour sa propre image et le risque réel de tumultes politiques, et même sécuritaires pour le pays. Néanmoins, il a considéré que l’enjeu pour la défense et la préservation de la République, et la viabilité institutionnelle et démocratique en vaut la chandelle. C’est aussi une forme de courage. Mes échanges avec des acteurs de tous bords m’ont aussi permis de me départir d’un certain dogmatisme et de comprendre cette décision, douloureuse et sans doute lourde de conséquences. J’ai même manifesté une grande indulgence à l’endroit du chef de l’Etat en lui précisant me résigner à accepter cette situation. Je ne suis pas le seul dans une telle posture.
Tout le monde a pu observer la retenue, ou la prudence, on peut même dire la compréhension, peu habituelles en de pareilles circonstances, manifestées en chœur par des partenaires traditionnels du Sénégal comme les Usa, l’Union européenne ou des institutions africaines comme la Cedeao et l’Union africaine. Il est clair que Macky Sall est contraint et forcé d’en arriver à cette extrémité à laquelle le Sénégal n’était pas préparé. Cela est d’autant plus difficile qu’il ne le fait point pour lui-même, dans l’objectif de garder le pouvoir, de rester à son poste. Il piaffe assurément d’impatience de rendre le pouvoir à un successeur élu conformément aux règles et principes démocratiques.
L’Assemblée nationale, saisie par une proposition de loi portée par le Groupe parlementaire Wallu, va se prononcer sur la demande de report de l’élection présidentielle. Le report du scrutin devrait être logiquement acté, car on augure que la dynamique de la collaboration entre le groupe parlementaire de la majorité et les députés du Parti démocratique Sénégalais (Pds) lors de l’examen, la semaine dernière, de la résolution instituant une Commission d’enquête parlementaire, sera toujours de mise. Le texte permettant à l’Assemblée nationale d’ouvrir une enquête sur des faits supposés de corruption de membres du Conseil constitutionnel a été adopté par 120 voix contre 24. On envisage difficilement la possibilité d’un vote négatif du texte en raison de la configuration des forces à l’Assemblée nationale. Il restera toujours une incertitude quant à l’issue d’un recours en inconstitutionnalité dont l’éventualité est certaine. Les délais pour un tel recours vont courir avant que le Conseil constitutionnel ne se prononce. Quelle serait la situation si le Conseil constitutionnel retoque la loi ? Cela en rajouterait à l’imbroglio. Tout cela pour dire que, quelle que puisse être l’issue de la bataille procédurale, il s’avérera matériellement impossible de tenir le premier tour de l’élection présidentielle à la date du 25 février 2024. Alea jacta est.
Répondre au dialogue pour sortir de l’impasse
Que restera-t-il à faire ? S’accorder ou se voir imposer un nouveau calendrier électoral. D’où donc la nécessité absolue d’un dialogue politique. Dans une allocution solennelle le 3 février 2024 annonçant la suspension brutale du processus électoral, Macky Sall a invité les acteurs politiques et la Société civile à un nouvel épisode de dialogue. Le vent du dialogue auquel vient d’appeler le Président Macky Sall, souffle fortement et les rares acteurs politiques qui déclarent s’y opposer finiront par s’y rallier ou ils verront l’histoire se définir sans eux. Encore que ledit dialogue politique ne saurait porter que sur les limites d’un nouvel agenda électoral. Au demeurant, le juridisme autour de la situation politique actuelle ne permettra nullement de sortir le pays de cette impasse. Il faudrait prendre de la hauteur et avoir une posture politique et réaliste pour contourner les écueils qui se dressent, par la force des choses, sur le chemin de la marche du pays. Qui pourra rester sur ses certitudes et son dogmatisme pour occulter ou feindre ignorer une situation politique objective ?
Il faudrait sans doute veiller à ne pas trop alourdir l'agenda de ce dialogue. Autrement la mise en œuvre des conclusions qui en découleraient, pourrait prendre du temps et impacterait fatalement sur les délais pour l'organisation de l'élection.
Benno bokk yaakaar, le Parti démocratique sénégalais, la Coalition Idy 2024, comme celle de Aly Ngouille Ndiaye, entre autres, ainsi que de larges franges de la Société civile, seront au dialogue. Cela commence à faire du beau monde. A la vérité, la classe politique n’a pas d’autre choix que de prendre part au dialogue, et les décisions qui en découleront auront une certaine légitimité et s’appliqueront à tout le monde. Est-il nécessaire de rappeler que le 8 mai 2023, dans une chronique intitulée «Dialogue : le possible et l’impossible», nous prévenions Ousmane Sonko et ses partisans qui refusaient d’aller répondre au Dialogue politique convié par le pouvoir, que l’histoire s’écrira sans eux et à leurs dépens ou leur détriment. Ce sont les mêmes acteurs qui, une fois de plus, déclarent rejeter le dialogue pour chercher à imposer un rapport de forces dont ils n’ont pas les moyens de sortir vainqueurs. Voudraient-ils que des acteurs non politiques comme l’Armée finissent par imposer un ordre politique et institutionnel nouveau ? Le cas échéant, ils en pâtiront comme tout le monde, et ce serait jeter le bébé de la démocratie et du système institutionnel du Sénégal avec l’eau du bain. Ce ne sera sans doute pas étonnant qu’ils adoptent à nouveau cette propension au suicide collectif, car ils avaient déjà maintes fois appelé à un coup d’Etat militaire, notamment le 1er juin 2023. Ces incartades avaient conforté la nécessité de dissoudre le parti politique Pastef et devraient disqualifier ses responsables de toute compétition politique et électorale démocratique. C’est là qu’on peut légitiment avoir en travers de la gorge, l’acceptation par le Conseil constitutionnel de candidatures de personnes prônant des coups d’Etat militaires. De telles personnes n’ont indubitablement pas leur place dans le dispositif institutionnel et démocratique, et aucun compromis ou aucune compromission avec elles ne saurait être acceptable. La démocratie ne saurait s’accommoder de putschistes velléitaires.
LE TISSERAND DU TEMPS
Ousmane William Mbaye a toujours filmé à Dakar. Il prend ici le parti de déplacer sa caméra tout en restant dans sa logique de gardien de la mémoire, partisan de la réécriture en zigzague de l’histoire africaine à hauteur d’Homme.
Dans les années 1970 - 80, la génération de Ousmane William Mbaye avait entrepris de déconstruire le récit filmique, de l’éclater et d’en faire un récit discontinu en forme de puzzle. Ndar, Saga Waalo le documentaire sur la ville de Saint Louis du Sénégal, 5ième documentaire de Ousmane William Mbaye reflète bien cet esprit. Diverses thématiques traversent le film, s’entrechoquent, s’entrelacent, se décroisent, s’accouplent, se contredisent pour finalement tisser une toile dont les fils de chaine sont : le fleuve, le métissage, le cheval, le pont Faidherbe et les fils de trame : la grande et la petite histoire, l’esclavagisme, le commerce de la gomme arabique, les signares, l’acte de bravoure des femmes de Nder.
Au tout début de sa carrière, Ousmane William Mbaye nourrissait le désir de faire sa grande entrée en cinéma avec son projet de film Talatay Nder, dédié aux résistantes du Waalo et voici que la banque dans laquelle était logée une partie de l’argent de la production ferme boutique entravant ainsi le projet. Ce fut la grande déception. Ces dernières années, un autre projet le taraudait, celui d’un documentaire sur le boxeur sénégalais Battling Siki, champion du monde poids mi-lourds (1922-1923). Mais à la vue du documentaire Siki du réalisateur hollandais Niek Koppen et dont il dit qu’il est un admirable film, cela l’a refréné. Qu’à cela ne tienne ! Avec ses fragments de déception William Mbaye en fera bien quelque chose. Ndar Saga Walo porte les marques de ces déceptions recyclées puisque dans le film sont convoqués et les femmes de Nder avec Natté Yalla comme figure de proue de la résistance et Batting Siki en peinture murale.
Le film de Ousmane William Mbaye replace l’histoire de la ville de Saint-Louis du Sénégal dans ce que l’historien Mamadou Diouf appelle le Temps du Monde à savoir penser l’histoire autrement. L’histoire de cette ville tricentenaire n’est pas à exclure de la grande histoire de l’humanité. C’est ce que dit entre autres le film dont l’épine dorsale est le fleuve aux eaux limoneuses, tantôt tumultueuses, tantôt indolentes voire lascives. Pour calmer le courroux de Mame Coumba Bang, génie des eaux, il faut du sucre et du lait caillé. Mais le film insiste sur le métissage assumé et revendiqué des Saint-Louisiennes et Saint-Louisiens. Le métissage comme terrain commun entre le colonisateur et les natifs. Des métis qui mettent plus l’accent sur leur appartenance africaine qu’européenne. Mais cette appartenance à deux cultures bien qu’avantageuse renferme des contradictions et des incohérences qu’explore la caméra, qui souffle sur l’épaisse couche d’omerta qui ensevelissait le passé esclavagiste de la ville dont les pratiquants n’étaient pas seulement des français mais également des Saint-Louisiens bon teint bon genre. Ndar ville religieuse avec sa mosquée nantie d’une grosse cloche comme à la cathédrale. La ville est semblable à un bateau immobile avec sur son flan, accroché le Bou El Mogdad, bateaux de croisière jumeau de celui du Fizcarraldo de Werner Herzog.
Ousmane William Mbaye tisse à sa manière le temps de l’histoire. Ndar Saga Waalo place le passé de la ville dans le présent, entortille les préoccupations anciennes autour de celles actuelles et futures sous la voix de la jazzwomen Aminta Fall et celle de Baaba Maal. Documentaire d’archives aux images contemplatives, le film recourt à la photographie, au dessin animé, aux archives filmiques, à l’iconographie, au coloriage, aux rushs de son film Mère-bi. Le montage joue avec le transparent qui fait naitre des images fantômes par dédoublement.
, Les personnes qui interviennent sont fascinés par cette ville, qu’ils refaçonnent de manière contradictoire. Ils sont historienne, historien, conservatrice de musée, propriétaire d’hôtel, enseignant, citoyen. Le réalisateur oblitère leur profession en ne mettant sur écriteau que leur nom. Il les ravale au rang de gens ordinaires qui conversent entre eux.
Ousmane William Mbaye a toujours filmé à Dakar. Il prend ici le parti de déplacer sa caméra tout en restant dans sa logique de gardien de la mémoire, partisan de la réécriture en zigzague de l’histoire africaine à hauteur d’Homme. Disons !
LE DECRET N° 2024 -106 DU 3 FEVRIER 2024 EST ATTAQUABLE DEVANT LA COUR SUPREME
En signant le décret n°2024 -106 du 3 février 2024 portant abrogation du décret n°2023-2283 du 29 novembre 2023 portant convocation du corps électoral après la publication de la liste des candidats, Macky Sall a violé la Constitution et le Code électoral
En signant le décret n°2024 -106 du 3 février 2024 portant abrogation du décret n°2023-2283 du 29 novembre 2023 portant convocation du corps électoral après la publication de la liste des candidats par le Conseil constitutionnel, le président de la République, Macky Sall, a violé la Constitution et le Code électoral. Dès lors que la révision constitutionnelle annoncée dans son message n’est pas encore actée. Conséquence, ce décret annulant le scrutin présidentiel du 25 février 2024 est attaquable devant la Chambre administrative de la Cour suprême. C’est la conviction de Ndiaga Sylla, Expert électoral.
«L’article 31 de la Constitution prévoit l’intervalle de temps durant lequel doit se tenir l’élection présidentielle.
Le Code électoral, dans son article LO. 137, précise que le décret de convocation des électeurs est pris au plus tard 80 jours avant la date du scrutin.
En annulant le décret n°2023- 2283 du 29 novembre 2023 portant convocation du corps électoral après la publication de la liste des candidats parle Conseil constitutionnel, le président de la République a violé la Constitution et le Code électoral. Dès lors que la révision constitutionnelle annoncée dans son message n’est pas encore actée.
Par conséquent, le décret n°2024 -106 du 3 février 2024 est attaquable devant la Chambre administrative de la Cour suprême. Pour se conformer à la Constitution, au Code électoral et à l’article 2 du Protocole Additionnel de la CEDEAO, seul le Conseil constitutionnel peut décaler la date du scrutin en application des dispositions de l’article 34 de la Constitution.
De plus, il va falloir envisager de déroger à l’article 27 de la Constitution. Or c’est impossible en vertu de l’article 103 de la Constitution qui instaure la clause d’éternité relativement au nombre et à la durée du mandat du Président de la République.
La bataille pour l’adoption du projet de révision constitutionnelle se rude au sein du l’Assemblée nationale avec l’exigence de recueillir 3/5 des députés.
En tout état de cause, le 2 avril 2024, la passation du pouvoir devra avoir lieu», a réagi Ndiaga Sylla, Expert électoral.
Par Abdoulaye THIAM
MACKY, LE COUP DE TONNERRE
Le président porte une atteinte grave à la démocratie sénégalaise qui était une petite embellie dans la grisaille ouest africaine
Coup de tonnerre au Sénégal ! Le président de la République, Macky Sall dont le second mandat prend fin le 2 avril prochain, a pris un décret ce samedi 3 février, à moins de 24 heures du démarrage de la campagne électorale, pour reporter sine-die l’élection présidentielle prévue le 25 février 2024
Le chef de l’Etat estime qu’ily a des soupçons de corruption qui pèsent sur des juges du Conseil constitutionnel et qu’une candidate (Rose Wardini) a été arrêtée et poursuivie pour parjure suite à la découverte de sa double nationalité, pendant qu’un autre, Karim Meissa Wade a été écarté à cause de sa deuxième nationalité française dénoncée par Thierno Alassane Sall, également candidat à la Présidentielle.
Des prétextes plus que fallacieux qui apportent de l’eau au moulin des détracteurs de Macky Sall qui l’ont toujours suspecté de vouloir s’offrir un «mandat cadeau», à l’image de Laurent Gbagbo de la Côte d’Ivoire. Un scénario ubuesque digne d’un film hollywoodien.
Pis, Macky Sall porte une atteinte grave à la démocratie sénégalaise qui était une petite embellie dans la grisaille ouest africaine. Pathétique ! Inacceptable ! Inconcevable dans un pays qui, depuis son accession à l’indépendance n’a jamais reporté, pas une seule fois, son élection présidentielle. Et pourtant ce ne sont pas des alibis et des arguments qui manquaient pour les prédécesseurs de Macky Sall. Un juge constitutionnel a été froidement assassiné, des policiers ont été pris dans un guetapens et lâchement liquidés sous le régime socialiste. Mais, Abdou Diouf président de la République d’alors n’a jamais songé à reporter la présidentielle. Plus récemment, quand le Conseil Constitutionnel, a validé la candidature de Abdoulaye Wade pour un troisième mandat, 11 sénégalais ont trouvé la mort. Mais jamais le pape du SOPI n’a envisagé de repousser la présidentielle pour s’offrir un «bonus», comme du reste le théorisait d’ailleurs Idrissa Seck, alors chef de l’opposition sénégalaise (il était deuxième à la présidentielle de 2007).
L’opprobre sur les institutions
C’est Ousmane Sonko et ses partisans qui vont rire sous cape. Sans occulter Alpha Condé, voire Yaya Jammeh. Le leader de l’ex-Pastef a été accusé de tous les noms d’oiseaux à cause de discours sur la neutralité et l’impartialité de certains juges. Aujourd’hui, c’est le gardien de la Constitution, celui qui est considéré comme la clé de voûte des institutions, le père de la nation, le président du Conseil supérieur de la magistrature, chef suprême des armées qui jette en pâture des magistrats en créditant des soupçons de corruption sur des juges du Conseil Constitutionnel. Il veut aussi nous faire croire que notre Assemblée nationale sera en conflit contre le Conseil Constitutionnel. Il veut nous faire croire qu’une enquête parlementaire des députés acquis à sa cause, qui se comportent comme des moutons de Panurge sont capables de nous élucider sur ce supposé cas de corruption. Cette même Assemblée nationale n’avait-elle tenté le coup avec la fameuse affaire des 94 milliards avant que l’OFNAC ne refroidisse leurs conclusions ? Triste sort pour le pays de Senghor, de Abdou Diouf et de Abdoulaye Wade.
Troisième mandat à tout prix
C’est désormais clair, net et limpide. Macky Sall n’a jamais voulu quitter le pouvoir. D’ailleurs, il a toujours usé de toutes sortes de subterfuges pour se présenter à nouveau. Son «ni oui, ni non», le limogeage de toutes les personnes qui osaient dire non au troisième mandat, la promotion de qui ceux qui le soutiennent et le théorisent, la très tardive déclaration aux allures d’une contrainte pour finalement renoncer à briguer les suffrages des Sénégalais, tout a été savamment orchestré pour lui baliser la voie.
On croyait alors que le Président Sall avait fini par entendre raison. Que nenni ! La preuve, c’est le choix porté sur Amadou Ba. Un choix qu’il qualifie de «raison» contre un éventuel choix de «cœur». Comme au théâtre chinois, tel un habile marionnettiste, il tire les ficelles, distribue les rôles. Usant du machiavélisme jusqu’au bout, il se débarrasse d’un de ses fidèles lieutenants, El Hadji Mamadou Diao dont le seul péché est d’avoir osé déclaré sa candidature. Aly Ngouille Ndiaye avait déjà fini de quitter le navire. Quant à Abdoulaye Daouda Diallo, il lui demande de rester sans rester. Le président du Conseil économique, social et environnemental (CESE) organise sa capitulation sans prononcer le nom de Amadou Ba, dans un discours fait en français, en wolof et de poular
N’empêche, la machine électorale se met en branle. Nous nous épargnons des forfaitures de la Direction générale des élections (DGE), du limogeage spectaculaire des membres de la CENA, et de l’installation de la nouvelle CENA en violation totale des textes.
On croyait alors avoir bu le calice jusqu’à la lie. Macky Sall décide de porter l’estocade à travers Mame Mbaye Niang qui débarque sur les plateaux de la TFM, le matin même de conseil national de l’APR pour descendre Amadou Ba en plein vol. Le candidat de BENNO se retrouve avec des ailes mouillées mais reste zen. Pendant ce temps, l’opposition surtout le camp de Sonko s’organise autour de Bassirou Diomaye Faye, cloué dans sa cellule de prison. Inédit !
Des candidats débarquent à la RTS pour enregistrer leur première sortie médiatique. Sauf que le chef de l’Etat ne veut pas d’élection. En l’absence d’insurrection souhaitée, de la démission du chef du gouvernent, il sort de son imagination un conflit entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel pour tout arrêter sans préciser de date de la tenue de l’élection. Un coup d’Etat constitutionnel aux conséquences incommensurables.
PLUS ON VA S’ACHEMINER VERS LE MOIS D’AVRIL, PLUS CE SERA DIFFICILE POUR MACKY SALL DE RESTER MAITRE DU JEU
Selon Momar Thiam, docteur en communication politique, le Sénégal risque de plonger dans une incertitude politique avec cette décision du président Macky Sall d’annuler le processus électoral
Selon Momar Thiam, docteur en communication politique, le Sénégal risque de plonger dans une incertitude politique avec cette décision du président Macky Sall d’annuler le processus électoral. Invité de l’émission Objection de la radio Sudfm (privée) hier, dimanche 4 février, le spécialiste en communication politique par ailleurs directeur de l’école des Hautes études en information et en communication (Heic) invite le chef de l’Etat Macky Sall à convoquer sans délais un dialogue en vue de fixer la date de l’élection présidentielle avant le mois d’avril prochain pour, dit-il, éviter que « le temps le fragilise davantage ».
La décision controversée du président de la République d’annuler le processus électoral risque de plonger le Sénégal dans l’incertitude. L’avis est de Momar Thiam, Conseiller en communication directeur de l’école HEIC. Invité de l’émission Objection de la radio Sudfm (privée) hier, dimanche 4 février, docteur Momar Thiam s’est voulu clair et explicite sur les risques que court Macky Sall. « A la date du 2 avril, d’un point de vue constitutionnel, il ne sera plus président de la République. Et la loi prévoit en cas de vacance du pouvoir que le président de l’Assemblée nationale puisse assurer l’intérim pendant trois (03) mois et organiser les élections. On n’en est pas encore là et j’espère qu’on n’en sera pas là », a-t-il précisé tout en faisant remarquer que « c’est au président de prendre les devants, de convoquer rapidement comme il l’a souhaité ce dialogue avec comme premier point : la date de l’élection présidentielle dans les 2 ou 3 mois ». Poursuivant son analyse, l’expert en communication de prévenir dans la foulée qu’ «plus on va s’acheminer vers le mois d’avril, plus ce sera difficile pour lui d’avoir encore la main et de rester maitre du jeu »
« La première conséquence de sa décision d’annuler le processus électoral, c’est qu’il n’est plus tout à fait le maitre du jeu. Et la malédiction de fin de règne va faire que tous les actes qu’il va poser seront contre-productifs. C’est déjà le cas avec l’abrogation du décret n° 2023-2283 du 29 novembre 2023 portant convocation du corps électoral qui est plus ou moins contre-productif dans l’opinion et dans une bonne partie de l’opposition, de la société civile et de non partenaires à l’international », a-t-il expliqué avant de marteler. « S’il ralentit la prise de décisions pour ce qui d’une date effective pour cette élection présidentielle de 2024 avantlemois d’avril, il se trouvera davantage fragilisé même dans son propre camp puisque certains verront que le pouvoir est finissant et qu’à partir d’avril, il ne sera pas, constitutionnellement parlant, président de la République. Il sera comme un citoyen lambda »
Par Vieux SAVANÉ
MENACE SUR LA RÉPUBLIQUE
Il y a là assurément comme une fenêtre d’opportunité qui s’offre à Amadou Bâ pour s’affranchir, engranger de la sympathie, s’émanciper et adopter une posture conquérante pour construire en toute autonomie son propre destin
Comme un révélateur des relations heurtées en cours au sommet de l’Etat, il est permis de penser que le Premier ministre, ancien candidat de Benno Bokk Yaakaar à la présidentielle, a été dédit si ce n’est pris de court, lui qui appelait urbi et orbi à la tenue de l’élection à date échue, persuadé affirmait-il, de la remporter au premier tour.
Quelle attitude va-t-il désormais adopter suite à cette déconvenue ? Va-t-il poursuivre son chemin et avaler des couleuvres comme si de rien n’était, en attendant ce qui semble la suite logique, que le président de la République et de l’APR, le démissionne, choisisse un autre Premier ministre et un autre candidat ?
Sera-t-il plutôt tenté au vu des circonstances de prendre son courage à deux mains, de démissionner de son poste de Premier ministre, et de sa posture de candidat « de raison », selon les propres termes de Macky Sall mais contesté dès le lendemain, par une frange importante de l’Apr, son parti. Il y a là assurément comme une fenêtre d’opportunité qui s’offre à Amadou Bâ pour s’affranchir, engranger de la sympathie, s’émanciper et adopter une posture conquérante pour construire en toute autonomie son propre destin.
Pour ne rien arranger, samedi dernier, à quelques heures de l’ouverture de la campagne électorale, le camp présidentiel n’était toujours pas dans l’effervescence. Quasi vide, le siège de l’Apr ne respirait pas l’ambiance de début de campagne électorale. Seule trônait une affiche géante de Macky Sall. Le candidat choisi était par contre royalement ignoré. Rien ne ramenait à lui. Et pourtant, il a été choisi et imposé à son camp en dépit des contestations internes qui se sont parfois violemment exprimées. Est-ce à dire que les signaux ne préjugeaient pas d’une prochaine victoire et qu’ils se sont ravisés pour essayer de sauver les meubles.
La concertation inclusive à laquelle appelle le président serait-elle alors un moyen de s’offrir un petit répit en vue d’apporter des correctifs dans son camp tout en créant de la diversion avec notamment l’idée que les recalés d’avant le décret présidentiel puissent revenir dans le jeu électoral.
A moins que le camp présidentiel essaie plutôt de corser l’addition en direction de la mouvance de « l’ex Pastef ». Après Ousmane Sonko, mis en position d’inéligibilité à la suite de sa condamnation dans le procès l’opposant à Mame Mbaye Niang, espère-t-on le jugement et la condamnation de Diomaye Faye qui le mette hors du jeu électoral ? A moins que la concertation cherche à négocier, quel que soit le cas de figure une immunité pénale pour le président sortant
En attendant c’est le grand charivari. Ca va dans tous les sens, au risque de conséquences graves. Ainsi l’hyper présidentialisme a-t-il encore sévi avec un chef d’Etat, chef de parti, qui décide de tout. Aujourd’hui gageons que les espérances d’approfondissement de la démocratie sénégalaise sont durablement piétinées. Alors qu’il était attendu que les électeurs aillent aux urnes en s’exprimant parrapport aux offres de candidature, il est à craindre que l’on revienne à la case départ avec un corps électoral grandement révulsé par ce qu’il s’est passé avec l’arrêt brutal du processus et par conséquent décide de sanctionner tout simplement le camp du pouvoir. Il y a urgence à revenir à la raison, en restaurant au plus vite l’ordre constitutionnel avant que le Sénégal ne s’installe dans la chienlit. Tous les observateurs s’accordent sur l’absence de légitimité de la mise en berne du démarrage de la campagne électorale. Pour sa part, l’opposition a déjà averti que le mandat du chef de l’Etat prend fin le 2 avril prochain ouvrant ainsi tous les possibles. Mais voilà que Ayib Daffé, membre du groupe parlementaire Yewwi Askan Wi, fait savoir qu’hier dimanche, une proposition saugrenue visant à prolonger le mandat de Macky Sall d’une année supplémentaire est sortie des discussions au sein de la commission des Lois, de la part de députés affiliés à la coalition Benno Bokk Yaakaar.
Ils ont récusé la période de 6 mois émanant de certains de leurs pairs arguant du fait que cette période coïnciderait avec la saison des pluies, ce qui ne serait donc pas propice à l’organisation d’une quelconque élection. Tout ça pour ça serait-on tenté de dire.
La République étant désormais menacée, tout est envisageable. Rien n’est donc à écarter avec cette situation inédite qui voit l’élection présidentielle qui s’est tenue à date échue depuis 1963 être chahutée de manière aussi cavalière. Gardons-nous surtout de tenter le diable car faut-il le rappeler, le pouvoir kaki est à nos portes.