CE QUE JE CONNAIS DE LA PRESTATION DE SERMENT DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Inséré pour la première fois dans la Constitution sénégalaise de 1963, le serment du président a depuis lors connu plusieurs révisions. Retour sur les étapes clés ayant transformé cet acte solennel
La prestation de serment du président de la République est une tradition républicaine ancienne pratiquée dans beaucoup de démocraties modernes. Il s’agit d’une séance solennelle au cours de laquelle le nouvel élu officialise son entrée en fonction en prononçant son serment. Celui-ci est généralement un petit texte d’une phrase ou de quelques mots dont le contenu s’apparente à une promesse faite à la Nation par le Président nouvellement élu et qui s’engage à remplir fidèlement sa mission confiée à lui par le Peuple.
Au Sénégal, la prestation de serment est instituée à la suite de l’adoption de la Constitution du 7 mars 1960. Absente dans la première Constitution de 1959 et de celle du 26 août 1960, elle fut introduite avec la Constitution approuvée par le Référendum du 7 mars 1963. Cette constitution est adoptée après la crise politique de décembre 1962 ayant opposé le président de la République, Léopold Sédar Senghor, au président du Conseil, Mamadou Dia. Le texte relatif au serment du président de la République est ainsi consacré par l’article 31 de ladite constitution libellé comme suit :
« Le président de la République est installé dans ses fonctions après avoir prêté serment devant la Cour suprême. Il jure solennellement de remplir fidèlement la charge de Président de la République du Sénégal et de consacrer toutes ses forces à défendre la Constitution. »
Ainsi, Léopold Sédar Senghor fut ainsi investi président de la République devant les membres de la Cour suprême disposant ainsi de tous les attributs lui permettant d’assumer pleinement la charge de président de la République du Sénégal.
En 1967, à la faveur de la première révision constitutionnelle, le président Léopold Sédar Senghor introduit quelques modifications dans le texte de la prestation de serment. L’article 31 de la Constitution est libellé comme suit :
« En présence de Dieu et devant la Nation sénégalaise, je jure de remplir fidèlement la charge de président de la République du Sénégal, d’observer et de faire observer scrupuleusement les dispositions de la Constitution et des lois, de consacrer toutes mes forces à défendre les institutions constitutionnelles, l’intégrité du territoire et l’indépendance nationale et de ne ménager aucun effort pour la réalisation de l’unité africaine ».
Les rédacteurs de la Constitution soulevèrent la lourdeur du passage consacré à la prestation. Il fut, en effet, constaté que la conjonction de coordination « et » est utilisée cinq fois dans la même phrase et qu’il convenait de la réécrire en vue de l’alléger et de permettre une lecture plus facile. Ce texte fut adopté et il connut de légères modifications en 1976 coïncidant avec la quatrième révision constitutionnelle du 19 mars 1976.
Une deuxième observation relative à la mention « En présence de Dieu et » fut tout simplement supprimée. Le deuxième alinéa de l’Article 31 de la Constitution de 1963 fut écrit dans les termes suivants :
« Devant la nation sénégalaise, je jure de remplir fidèlement la charge de président de la République du Sénégal, d’observer comme de faire observer scrupuleusement les dispositions de la Constitution et des lois, de consacrer toutes mes forces à défendre les institutions constitutionnelles, l’intégrité du territoire et l’indépendance nationale, de ne ménager, enfin, aucun effort pour la réalisation de l’unité africaine ».
Le texte de la prestation serment du président de la République connut une deuxième modification relative au lieu de la prestation de serment. Si jusque-là ce rituel était accompli à huis clos devant les membres de la Cour Suprême, les rédacteurs jugèrent qu’en raison de l’importance que revêt cet acte dans l’agenda de la République de l’organiser en séance publique. Cette option me semble être une rupture majeure dans l’histoire de ce cérémonial républicain et dénote surtout une volonté des autorités de la République de donner à cet évènement un cachet populaire et démocratique. Ce choix était d’autant plus cohérent et opportun que le nouveau président de la République, Abdou Diouf, avait institué le multipartisme intégral. Il fut précisé, désormais, que la séance de prestation de serment du président de la République devant la Cour suprême est publique.
Le président Abdou Diouf est alors investi le 1er janvier 1981 au cours d’une séance solennelle de la Cour Suprême. Cette cérémonie fut surtout marquée par le discours du président de la Cour Suprême, Kéba Mbaye, lorsqu’il lança au nouvel élu la phrase suivante : « Les Sénégalais sont fatigués ».
Depuis cette date, le serment du président de la République est reçu devant les magistrats de la Cour Suprême en séance publique. La prestation de serment du président de la République, Me Abdoulaye Abdoulaye Wade fut jusque-là la seule cérémonie qui répondit au cachet populaire de cet événement organisé au stade Léopold Sédar Senghor. Mais à la faveur du Référendum de 2001, le texte de la prestation de serment fut encore légèrement revu en faisant réapparaître la mention « Devant Dieu et » et le mot « enfin » fut aussi supprimé. Le texte lu par le président de la République nouvellement élu est rédigé ainsi qu’il suit :
« Devant Dieu et devant la Nation sénégalaise, je jure de remplir fidèlement la charge de Président de la République du Sénégal, d’observer comme de faire observer scrupuleusement les dispositions de la Constitution et des lois, de consacrer toutes mes forces à défendre les institutions constitutionnelles, l’intégrité du territoire et l’indépendance nationale, de ne ménager aucun effort pour la réalisation de l’unité africaine ».
Tout compte fait, depuis cette date, l’article consacré à la prestation du président de la République nouvellement élu est resté le même. La séance de prestation du quatrième président de la République, Macky Sall, se déroula en 2012 au King Fadh Palace et en 2019 au Centre international Abdou Diouf de Diamniadio (CICAD). C’est dans ce haut lieu, symbole du Sénégal moderne, que le cinquième et plus jeune président de la République du Sénégal, Bassirou Diomaye Diakhar Faye prononcera son serment devant les membres du Conseil constitutionnel, les corps constitués, les membres du corps diplomatique, les Autorités religieuses, civiles et militaires, etc.