DES MINISTRES POUR ÉVITER LES SINISTRES
Les gouvernements se suivent et se ressemblent. Maintes fois, c’est sur un air de déjà-vu. Pour les ultimes foulées du magistère en cours, une nouvelle équipe est attendue. On peut s’interroger sur l’urgence qu’il y a à changer.
Les gouvernements se suivent et se ressemblent. Maintes fois, c’est sur un air de déjà-vu. Pour les ultimes foulées du magistère en cours, une nouvelle équipe est attendue. On peut s’interroger sur l’urgence qu’il y a à changer. Ce n’est pourtant pas fantaisiste de remanier à ce moment précis. Il faut rapidement décharger le premier ministre dorénavant plus occupé à se faire élire. Le chef du gouvernement est désormais l’homme d’un camp. La partialité est trop flagrante alors que le poste qui est le sien exige hauteur et concentration. Toute l’énergie du candidat est bouffée par les calculs et manœuvres politiques. Le mélange des genres ne peut pas perdurer. Il doit faire la preuve qu’il est l’homme de la situation. Qu’il a pris l’étoffe d’une bête politique. Aller au charbon, plonger dans l’univers de requins qu’est la politique durcit le cuir ou laisse des blessures de guerre.
On remanie aussi pour évincer les canards boiteux par trop nombreux qui ne donnent pas satisfaction. En général, ce sont ceux-là qui n’étaient même pas ministrables mais qu’une erreur de casting a laissé siéger en conseil des ministres. Chez eux, la transparence est toujours l’égale de l’incompétence. Tout le temps, ils se cachent. Ni vus ni connus. Pour apercevoir leur ombre, il faut épier les images de ce même conseil rembobinées le mercredi soir à la télé. Au demeurant, chaque diffusion des séquences rappelle les effectifs pléthoriques. Le seul fait que le premier ministre soit titulaire des départements de l’élevage et des sports est aussi bizarre qu’édifiant. Derrière le cumul, se cache une moralité. Il y a bien moyen de resserrer et d’avoir moins d’embonpoint si on a une volonté de fer. Mais trêve de naïveté. C’est moins la contrainte du respect des équilibres que le clientélisme politique, cette propension à distribuer à la carte des strapontins qui fait faire de terribles coq-à-l’âne aux gouvernements successifs de passage.
Un travail domestique de titan attend
Le prochain à devoir former aura une forte coloration politique. Si coloré soit-il, cet attelage devra faire preuve de la plus grande neutralité. C’est d’abord sur la bonne organisation de l’élection présidentielle qu’il sera jugé. Sur ces aspects fort heureusement, l’administration sénégalaise sait y faire. Même en se bornant à expédier les affaires courantes, la nouvelle équipe qui passera comme l’éclair n’en doit pas être prête et opérationnelle sur le champ. Le parti de la demande sociale, le premier parti du Sénégal déborde de toutes parts. Il est plus que jamais écarlate de colère et de rage. Ça fait des décennies que les dirigeants se cassent les dents sur la détresse et l’exaspération de l’écrasante majorité de la population. Un travail domestique de titan attend au tournant ceux qui seront presque jetés en pâture en figurant dans la prochaine composition.
Le saupoudrage est à éviter. Il ne fait pas un projet. Ce n’est que poudre aux yeux que se jettent ceux qui l’expérimentent. Les slogans non plus ne font pas une stratégie face aux défis et problématiques qui cernent le pays. Malgré les éléphants blancs et ciment des bâtiments et viaducs qui n’impressionnent plus personne, tout ou presque a l’air de marcher sur la tête. Ceux qui sont appelés à la rescousse à la dernière minute pour imaginer les solutions croulent eux-mêmes sous le poids des dossiers. On en a déjà fait l’expérience. Les illusions sont vite perdues. Il ne reste plus que l’immobilisme qu’on mélange à desseins avec l’émergence. Dans sa fonction éminemment politique, le bon ministre est tout bonnement celui qui administre pour éloigner le sinistre et la sinistrose aux administrés.