FRATERNITÉ ABRAHAMIQUE
Le Sénégal vient de marquer les 62 ans de son indépendance. Pour un État, ce n’est pas le grand âge. Mais le moment, une nouvelle fois, d’oser et de poser un diagnostic sans complaisance sur le temps écoulé.
Le Sénégal vient de marquer les 62 ans de son indépendance. Pour un État, ce n’est pas le grand âge. Mais le moment, une nouvelle fois, d’oser et de poser un diagnostic sans complaisance sur le temps écoulé. C’est la bouteille à moitié vide. Pas à moitié remplie. La stabilité politique est une subtilité sénégalaise.
Elle est la prunelle de nos yeux. Il faut continuer à la sanctuariser. C’est un immense trésor. La respiration démocratique est un oxygène et une hygiène. Mais dans la République qui est le bien commun, tout ne marche pas comme sur des roulettes. Les soleils des indépendances, la promesse de l’aube et l’euphorie des bâtisseurs, tout ça semble bien loin après toutes ces décennies.
Les impérities successives ont fracassé les rêves les plus fous. On tourne en rond. Chaque génération est un nouveau peuple. De 3 millions en 1960, on est passés à quasiment 20 millions en 2022. Le cinquième recensement général fera la part des choses. La vitalité démographique est un couteau à double tranchant. Elle doit être encadrée par la discipline, l’éducation, la guerre contre la corruption, la fin de la crise d’autorité. La fuite en avant qui continue, c’est la jungle qui s’installe.
La politique de construction d’infrastructures de dernière génération n’est pas une lubie. Elles font entrer dans une autre dimension. On n’est pas figés ni affligés dans la dynamique de modernisation. Il reste entendu que les grands hommes sont ceux qui ont bâti des nouvelles villes. Seulement, prévient Platon, ce ne sont pas les murs qui font la cité, ce sont les hommes.
Le capital humain est partout la plus grande richesse. C’est également un défi considérable. Dire que la jeunesse sénégalaise est en détresse est une évidence. Il faut s’en occuper sans l’infantiliser. On l’a avec soi. Laissée sur le bas-côté de la route, c’est l’avoir en face et frontalement. Ce n’est pas souhaitable. L’insurrection de mars 2021 était alimentée par un grand désarroi.
Le football dont elle s’est gavée matin, midi et soir agit comme une drogue. Les ambitions pour elle sont frelatées par le divertissement. L’éducation, la culture et le respect des règles constituent les ingrédients pour baliser l’avenir.
La jeunesse, comme les autres tranches d’âge, exige la sobriété, le sens des priorités et la fin de la gabegie. L’augmentation du nombre des députés ne coûtera peut-être pas un gros paquet d’argent à l’Etat. Mais le moment est si mal choisi que le coût de la vie explose et qu’on vient de nous inviter à la « mobilisation générale ». La pléthore à l’assemblée ne produira pas de l’efficience. Ça va générer plus de confusion et de vacarme.
Autres temps, autres mœurs. « Le temps est le meilleur moyen qu’a trouvé la nature pour que tout ne se passe pas en même temps ». Parole d’astrophysicien. Le chevauchement du Carême et du Ramadan est un signe des temps. Un message univoque. C’est le besoin de solidarité et d’humanité. De fraternité abrahamique qui ouvre la miséricorde. Nous sommes tous frères et sœurs dans l’unité de l’espèce humaine.