LA CRÉOLISATION, AU-DELÀ DU MÉTISSAGE
La créolisation est un métissage qui jamais ne s’arrête, et qui très vite dépasse la simple synthèse, ou la seule hybridation de deux absolus, pour rapidement évoluer dans les formes et des figures protéiformes, imprédictibles. (…)
« La créolisation est un métissage qui jamais ne s’arrête, et qui très vite dépasse la simple synthèse, ou la seule hybridation de deux absolus, pour rapidement évoluer dans les formes et des figures protéiformes, imprédictibles. (…)
« La « diaspora », par exemple (que l’on peut définir par l’élargissement d’un centre qui reste déterminant) allait s’augmenter des complexités de la « métaspora », surgissement adaptatif humain loin de son origine, au devenir imprévisible. (…)
« Une « créolité » est une de ces figures collectives inattendues qui surgissent d’un processus de créolisation. (…)
« Les créolités sont chaque fois singulières, même si elles proviennent du même processus de créolisation. (…)
« Mais que l’on se situe dans le processus (la créolisation) ou dans les émergences (les créolités), il demeure un principe actif, essentiel pour comprendre le monde d’après la phase violente des colonisations : la Relation. (…)
« Interviennent aussi les « traces » (…) de tout ce qui constituait le « récit d’origine » (des Amérindiens génocidés, des petits engagés blancs, des Africains laminés par l’esclavage). (…)
« (Édouard) Glissant aura, dès les années 1950, l’intuition que le vieux monde compartimenté d’avant la colonisation allait devenir une entité mobile, ouverte, changeante, essentiellement relationnelle. Il l’appellera : Tout-monde. (…)
« Le fait relationnel est désormais incontournable. On peut y être « sous relation » (ce qu’a provoqué la colonisation) ; on peut y vivre « en relation », c’est-à-dire en construisant nos agentivités dans la matière vivante du monde.
Cet autre monde - qui est déjà là mais que nous devons aussi nous efforcer de concevoir - s’appelle : mondialité. Comprendre la mondialité, la vivre et la construire, demande non pas un « grand récit » terrifiant, non pas une simple militance « décoloniale » mais une gerbe d’histoires inextricables que seul peut animer un imaginaire effervescent de la Relation. »
Extraits de Patrick Chamoiseau, "Créolisation, créolité, relation" in Colonisations. Notre histoire, dir. Pierre Singaravélou, Seuil, 2023