A NOS BRAVES SEPT SAGES : HIC RHODUS HIC SALTA
Dans « L’honneur et l’argent », François Ponsard écrivait: «Quand les bornes sont franchies, il n’y a plus de limites ». Le Sénégal en est-il arrivé là ? Le décodage des codes d’honneur est-il perturbé ? Que se passe-t-il ? Je cherche.
Dans « L’honneur et l’argent », François Ponsard écrivait: «Quand les bornes sont franchies, il n’y a plus de limites ». Le Sénégal en est-il arrivé là ? Le décodage des codes d’honneur est-il perturbé ? Que se passe-t-il ? Je cherche.
Il me souvient, cependant, un éditorial d’une densité remarquable fait par un grand journaliste du nom de Madiambal Diagne. Cet éditorial était inspiré par le sentiment de colère suite à la décision du Conseil Constitutionnel de Janvier 2012, validant la 3 ème candidature de Maitre Wade.
Madiambal y relatait le courage et l’empathie d’un « bon petit juge » qui avait refusé de condamner une dame qui avait volé un morceau de pain pour se nourrir, au motif que si dans une société, une personne est obligée de voler du pain pour ne pas mourir de faim, la condamner serait une injustice. Admirons la frontière entre le droit et la justice !
Madiambal brocardait les 5 juges d’alors et sous le titre de son édito, citait Alexandre Dumas fils en ces termes « Les grands hommes perdent à être vus de près »
Que c’est vrai ! Que c’est actuel ! Par ces temps de crises et de tensions, où sont les Grands hommes ?
Les hommes des grands moments. Heureusement qu’au Sénégal nous avons sept sages. La loi constitutionnelle votée par 104 députés leur sera soumise bientôt. Se déclareront-ils incompétents puisque c’est une loi constitutionnelle ou bien vont-ils apprécier les effets de l’application de cette loi sur l’ordre ou le désordre constitutionnel ?
Ils ont rendez-vous avec eux-mêmes et avec l’histoire. Ici c’est Rhodus, il faut sauter
Dans l’une des fables d’Esope, (le voyageur vantard), il raconte le récit d’un homme qui se plaisait à décrire ses propres exploits surhumains dans un coin éloigné (Rhodus) avec des témoins qu’il se vantait de pouvoir faire venir pour confirmer. Il s’est trouvé un passant pragmatique qui lui lança : Ici c’est Rhodus, saute comme tu le proclames!
Le Sénégal doit aussi remercier Dieu de nous avoir offert sept sages, sept sauveurs d’une démocratie débranchée qui a perdu ses codes. Ils sont supposés être des juristes chevronnés, pleins de sciences, équipés d’un code d’honneur et conscients de la dignité de leur fonction.
A la requête qui leur sera bientôt soumise pour invalidation de la loi constitutionnelle, les membres du CC ont déjà répondu depuis 2016.
Les membres du CC savent aussi sûrement qu’ils n’ont pas le droit d’imposer à l’armée de rendre le 4 Avril 2024 les honneurs à un quelconque citoyen autre que le Président de l’Assemblée Nationale, assurant la fonction suite à la vacance du pouvoir, le cas échéant.
Les membres du CC savent aussi qu’ils ont une dette vis-à-vis d’un ancien vice-président du Conseil assassiné il y a 30 ans, par des hommes liés au PDS, au demeurant, initiateur de cette loi funeste.
On ignore les raisons du silence de certaines autorités comme les Professeurs Serigne Diop, Kader Boye ou El Hadj Mbodje.
Notre espoir pour sauver le pays repose sur le considérant no 32 de la décision 1/C/2016 du 12-2- 2016 qui interdisait de toucher à la durée du mandat.
« Considérant en effet que ni la sécurité juridique ni la stabilité des institutions ne serait garantie; si la durée des mandats en cours régulièrement fixée au moment où ceux-ci ont été conférés pouvait être réduite ou prolongée.
Le Conseil indique sans équivoque que la durée d’exercice du mandat est fixée au moment de prêter serment. Fixée veut dire fixée. Aucune dérogation ne peut changer ce qui est fixe à moins de vouloir verser dans les calembredaines de notre sympathique ministre de la justice qui cherche à se convaincre elle-même que si le Président continue à exercer ses fonctions jusqu’à l’installation de son successeur en 2025, il aura exercé un mandat de 5 ans fixé par l’article 27 de notre Constitution et respecté l’article 103 de la même constitution.
Autrement dit pour notre ministre, si le Président qui a prêté serment en 2019, reste en fonction jusqu’en 2025, il aura exercé un mandat de 5 ans. L’intelligence artificielle fait des miracles ! Messieurs Les Sages.
Le 27 janvier 2012, le CC avait validé la 3 ème candidature de Maitre Wade. Le 29 janvier 2024, vous avez écrit et signé ceci : Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif.
Le CC, fidèle à ses principes de rigueur et de transparence, entend exercer toutes les missions qui lui sont dévolues par la Constitution et les lois de la République.
Vous êtes indépendants ? Prouvez le ! Ici c’est la Constitution, sauvez-la !
Mamadou Barro
Juriste et Economiste d’entreprise,
Sacré-Cœur 1, Dakar