SANTÉ : VERS L'UNITÉ D'ACTION, POUR DES ACQUIS SUBSTANTIELS
L’agitation syndicale en cours est plus le fait de syndicats de base dont les militants sont confrontés aux dures réalités de la crise économique, que des centrales syndicales, qui végètent dans une profonde léthargie
Les 30, 31 mars et le 1er avril prochains, deux grands cadres unitaires des syndicats de la santé vont aller en grève, en même temps. Même s’il ne s’agit pas d’une unité d’action concertée et souhaitable, on ne peut, non plus, imputer cette coïncidence apparente à un pur hasard.
Qu’est-ce qui explique cet essor de luttes syndicales dans notre pays, au moment où la situation économique nationale, sous-régionale et même mondiale semble des plus précaires et incertaines ?
En effet, c’est dans la période, où le gouvernement pensait voir le bout du tunnel après l’épreuve inédite qu’a constitué la dramatique pandémie de la Covid-19, que la guerre russo-ukrainienne risque de plonger la plupart de nos pays dans une crise dont la nature et l’ampleur sont difficiles à évaluer, au regard du bouleversement des paradigmes économiques en cours.
Si nos décideurs en sont arrivés à cette situation des plus inconfortables, ils ne devront s’en prendre qu’à eux-mêmes, car ayant passé le plus clair de temps à faire dans le dilatoire, refusant d’appliquer des accords qu’ils avaient eux-mêmes signés, au moment où ils engageaient l’État dans la création d’institutions budgétivores ou autres dépenses somptuaires, loin d’être prioritaires.
De plus, leur approche des questions syndicales était teintée de subjectivisme voire de mépris, basée sur un postulat erroné, qui voudrait faire des agents de l’État et des travailleurs du secteur moderne de l’Économie des privilégiés par rapport aux populations rurales, dont ils sont pourtant issus et restent les plus grands soutiens.
Toujours fidèle à leur logique anti-travailleurs intrinsèquement liée à leur idéologie libérale, les autorités politiques auront déployé des efforts colossaux pour enfermer la plupart des dirigeants des centrales syndicales dans leur concept incongru de pacte de stabilité sociale, qui a fait long feu.
En effet, l’agitation syndicale en cours est plus le fait de syndicats de base dont les militants sont confrontés aux dures réalités de la crise économique, que des centrales syndicales, qui végètent dans une profonde léthargie par la faute de certains dirigeants, que leurs conditions concrètes de vie ont progressivement éloignées du monde du travail.
Ce sont les transporteurs, qui faisant preuve de détermination et d’un esprit unitaire remarquable, ont ouvert, en décembre 2021, le bal de la contestation syndicale. À leur suite, les enseignants allaient engager des actions vigoureuses, car ayant maintenant compris, que le manque d’efficacité de leurs grèves itératives était en rapport direct avec la fragmentation de leur mouvement syndical. De fait, c’est finalement, grâce à leur unité d’action, qu’ils arracheront les acquis les plus significatifs depuis plusieurs décennies.
Après cela, le gouvernement a accordé des primes aux travailleurs d’autres départements ministériels identifiés par l’étude sur le système de rémunération au sein de l’Administration publique sénégalaise (agriculture, inspection du travail ...) et à certains secteurs des forces de défense et de sécurité.
Force est de constater que le ministère de la Santé et de l’Action sociale a été complètement occulté, alors qu’il est celui dont les agents, ne disposant même pas d’indemnité de logement (pour ceux n’ayant pas de logement de fonction), sont les plus mal lotis, sur le plan du système indemnitaire.
C’est également, celui où le gouvernement a choisi une stratégie de séduction des cadres supérieurs, n’épargnant même pas les ordres professionnels, par l’allongement de l’âge de la retraite et l’octroi de nouvelles primes à eux seuls, qui même insuffisantes, n’ont pas pris en compte les cadres moyens et d’autres catégories de personnel, qui pourtant sont indispensables à la bonne marche du système sanitaire.
Cette démarche discriminatoire a contribué à radicaliser les jeunes travailleurs paramédicaux, prêts à tous les sacrifices pour une amélioration de leurs conditions de vie et de travail.
Malheureusement, les organisations ayant fait les beaux jours de l’autonomie syndicale voire du syndicalisme révolutionnaire, caractérisées par un immobilisme flagrant au niveau de leurs instances de direction, donnent parfois l’impression d’avoir pour vocation de servir d’écran et d’outil de diversion face à la montée de nouvelles forces syndicales.
C’est le lieu de saluer le dynamisme d’organisations comme ceux de la fédération des syndicats de la santé (F2S), qui ambitionne d’entraîner l’ensemble des travailleurs vers de véritables batailles de principe, contrastant avec les habituelles comédies syndicales du passé.
Le moment est donc venu pour la F2S et AND GËSSËM d’aller vers l'unité d'action, pour enfin arracher des acquis substantiels, à l’image du mouvement syndical enseignant.