PREMIÈRES TURBULENCES AU SEIN DU PASTEF
Le parti essuie les critiques de ses propres rangs. En cause, la faible représentation féminine au gouvernement et le profil de certaines personnalités nommées. L'organisation politique est en effet accusée de s'écarter de ses engagements initiaux
(SenePlus) - Pour la première fois depuis sa création il y a six ans, le parti au pouvoir Pastef fait face à une fronde interne concernant les récentes nominations à des postes clés de l'État. Des voix discordantes s'élèvent chez les partisans de Bassirou Diomaye Faye et d'Ousmane Sonko, remettant en cause la faible représentation féminine au gouvernement ainsi que le profil de certaines personnalités nommées.
"Comme si nous n'avions pas de femmes aussi compétentes que les hommes !", se désole Mabinta Djiba, une élue du Pastef, citée par Le Monde. Parmi les 25 ministres nommés le 5 avril, seulement quatre sont des femmes. Une responsable du Mojip, le mouvement des femmes du parti, déplore "un déséquilibre qui s'accentue" tandis qu'Alassane Ndao, chercheur en sciences politiques, souligne : "Il n'y a que très peu de femmes au sommet du mouvement."
Face à cette fronde naissante, une liste de noms de femmes aurait été transmise au duo exécutif en vue des prochaines nominations, selon des sources internes au Pastef citées par le quotidien français.
Au-delà de la parité, c'est l'opacité de certaines nominations qui est pointée du doigt par les militants, alors que la transparence était un cheval de bataille du parti. "Et les appels d'offres ?", interpelle ainsi un membre du Pastef, faisant référence aux promesses de recrutements ouverts à tous dans la fonction publique.
"Pour le moment, ce n'est pas la priorité, balaie un proche du président. On veut aller vers la transparence mais on ne peut pas mettre le pays entre parenthèses pour lancer des appels à candidatures", justifie Ibrahima Diallo, le chargé de communication du parti.
Plusieurs éditorialistes se sont en effet étonnés des dernières nominations à la tête d'entreprises publiques le 15 mai, avec par exemple un médecin devenu directeur de la Loterie nationale. "Ils sont pris entre deux feux : le contrôle citoyen qui appelle au respect des promesses, et les aspirations de leurs partisans qui veulent être associés au pouvoir", analyse Elimane Haby Kane dans les colonnes du Monde.
A l'exception du secrétaire général de la présidence, ce sont désormais des proches et alliés du duo Faye-Sonko qui occupent les postes clés, comme le chef de la sécurité d'Ousmane Sonko nommé à la tête du Port de Dakar. Des nominations stratégiques restent à venir, notamment à la tête de la Direction des impôts et domaines, corps d'origine des deux dirigeants.
Cet épisode marque un début de fronde interne depuis l'arrivée au pouvoir du Pastef, qui devra concilier les attentes contradictoires de transparence et de redistributions des postes. Un défi de taille pour ce parti qui s'était donné pour ambition de rompre avec les anciennes pratiques.