REPORT DE LA PRÉSIDENTIELLE, ISMAILA MADIOR FALL S’EXPLIQUE
Le report n'a pas été initié par le Président de la République, mais par le groupe parlementaire du Parti démocratique sénégalais (PDS) nommé "Liberté, Démocratie et Changement".
Qui a initié le report de l'élection présidentielle ?
Le report n'a pas été initié par le Président de la République, mais par le groupe parlementaire du Parti démocratique sénégalais (PDS) nommé "Liberté, Démocratie et Changement". Ce groupe a soumis à l'Assemblée nationale la proposition de loi constitutionnelle visant à modifier les dispositions de l'article 31 de la Constitution de la République du Sénégal. La proposition de loi stipule que, contrairement à l'article 31 qui prévoit que l'élection présidentielle doit avoir lieu entre 45 et 30 jours avant la fin du mandat du président en fonction, l'élection serait reportée au 25 août 2024. L'objectif de cette proposition est de reporter l'élection présidentielle à août 2024, permettant ainsi au président actuel de rester en poste jusqu'à l'investiture de son successeur. Un amendement parlementaire a par la suite modifié la date de l'élection présidentielle au 15 décembre 2024.
Quelles sont les raisons justificatives du report ?
Le report est justifié par plusieurs raisons, notamment : Une crise entre l'Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel concernant des accusations de corruption de juges constitutionnels. La création d'une commission d'enquête parlementaire pour examiner cette affaire et les procédures de vérification des candidatures par le Conseil constitutionnel. La contestation des accusations par les membres du Conseil constitutionnel, qui demandent une enquête approfondie. La découverte de fraudes liées à la nationalité de certains candidats. La perte de crédibilité du Conseil constitutionnel en tant que juge électoral, pouvant entraîner le rejet des résultats des urnes et des contentieux électoraux. Le risque de contestations des résultats électoraux menaçant la stabilité politique du pays.
Quelle est la procédure mise en œuvre pour le report ?
La procédure a commencé par une proposition de loi constitutionnelle émanant des députés, notamment du groupe parlementaire du PDS. La proposition a été envoyée au Président de la République pour consultation, et celui-ci en a pris acte. La proposition a été approuvée en commission et adoptée par une majorité des 3/5 des suffrages exprimés par l'Assemblée nationale le 5 février 2024. Il s'agit d'une dérogation aux dispositions de l'article 31 de la Constitution, permettant un réajustement du calendrier électoral sans remettre en question la durée du mandat fixée par l'article 27 de la Constitution. Cette disposition dérogatoire est temporaire et prendra fin avec l'organisation de la prochaine élection présidentielle.
Quel est le rôle du Président de la République dans la mise en œuvre du report ?
Le Président de la République n'est pas à l'origine de cette initiative. Sa responsabilité se limite à donner un avis favorable, défavorable ou simplement à prendre acte de la proposition, cette dernière option ayant été choisie. Après l'adoption de la loi constitutionnelle, il revient au Président de la promulguer conformément aux délais prévus par la Constitution.
Quelle est la nouvelle date de l'élection présidentielle ?
Suite à l'approbation de cette loi constitutionnelle, la prochaine élection présidentielle est prévue pour le 15 décembre 2024.
Quand expire le mandat du Président de la République suite à l'adoption de la loi constitutionnelle ?
Selon le principe établi, le président actuel reste en fonction jusqu'à l'investiture de son successeur, prévue en janvier (si l'élection se conclut en un seul tour) ou en février (en cas de second tour).
Le Conseil constitutionnel peut-il censurer la loi constitutionnelle ?
Non. Selon une jurisprudence constante, le pouvoir constituant est souverain et ne peut être sujet à un contrôle. En conséquence, le Conseil constitutionnel s'est toujours déclaré incompétent pour contrôler une loi constitutionnelle, et cette dernière bénéficie donc d'une injusticiabilité. De même, certains décrets, comme celui abrogeant la convocation du collège électoral, sont considérés comme des actes de gouvernement et ne peuvent faire l'objet de recours pour excès de pouvoir.
Y a-t-il des précédents de lois constitutionnelles dérogatoires à la Constitution ?
Oui, il existe au moins deux précédents. La loi du 18 décembre 1962 qui a ajouté un article à la Constitution, modifiant les pouvoirs du Président du Conseil. La loi du 19 février 2007 qui a modifié la loi prolongeant le mandat des députés élus en avril 2001.
Y a-t-il un précédent de report d'une élection présidentielle dans l'histoire du Sénégal ?
Oui, l'élection présidentielle prévue initialement pour décembre 1967 a été reportée au 25 février 1968.
Quelle appréciation peut-on faire de cette loi au regard du parcours démocratique ?
Cette loi est perçue comme consolidante car elle réorganise simplement le calendrier électoral sans prolonger le mandat au-delà de l'année prévue (2024). Elle vise à prévenir les risques liés à un processus électoral potentiellement problématique. Elle est vue comme une base pour un dialogue national visant à garantir des élections libres, justes et transparentes dans un Sénégal pacifié et réconcilié.