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24 avril 2025
Développement
723 TONNES DE CIMENT SAISIES À MBOUR
Les agents du service de contrôle économique de Mbour, accompagnés des éléments de la compagnie de gendarmerie, ont effectué hier, une vaste opération de contrôle du prix du ciment
Les agents du service de contrôle économique de Mbour, accompagnés des éléments de la compagnie de gendarmerie, ont effectué hier, une vaste opération de contrôle du prix du ciment. Au total, ils ont saisi 723 tonnes de ciment et arrêté 41 vendeurs de ciment qui pratiquaient la vente frauduleuse. Ces derniers vont payer une amende allant de 100 mille à 200 millions de francs Cfa.
Les agents du service de contrôle économique de Mbour, accompagnés des éléments de la compagnie de gendarmerie, ont effectué hier, une vaste opération de contrôle du prix du ciment. Au total, ils ont saisi 723 tonnes de ciment et arrêté 41 vendeurs de ciment qui pratiquaient la vente frauduleuse. Ces derniers vont payer une amende allant de 100 mille à 200 millions de francs Cfa.
LE NOUVEAU PLAN ANTI-INONDATIONS DE MACKY SALL
En décidant de remettre un ministère chargé des Inondations dans l’attelage gouvernemental, le chef de l'État se rend compte que la situation va empirer à cause du réchauffement climatique
En décidant de remettre un ministère chargé des Inondations dans l’attelage gouvernemental, Macky Sall se rend compte que la situation va empirer à cause du réchauffement climatique. Au-delà de la gestion des prix des denrées, c’est l’autre préoccupation des citoyens fortement impactés cette année par les conséquences des pluies diluviennes.
Cette année, l’hivernage a été fortement pluvieux poussant le Président Sall à enclencher à nouveau le plan Orsec. Avec les effets dus aux changements climatiques, la situation va sans doute empirer dans les prochaines années. Conscient de la vulnérabilité du pays à ces chocs, Macky Sall a ramené un ministère chargé des Inondations dans l’attelage gouvernemental. Dès son accession au pouvoir, il avait mis en place le ministère de la Restructuration et de l’aménagement des zones d’Inondations (Mrazi), qui devait coordonner la mise en œuvre du Programme décennal de gestion des inondations (Pdgi). Mais, il sera supprimé lors du remaniement de juillet 2014 avec la mise en place d’un ministère délégué chargé de la Restructuration et de la requalification des banlieues et le rattachement de la Darzi au ministère du Renouveau urbain, de l’habitat et du cadre de Vie, en charge de la gestion des inondations. Plus tard, il sera supprimé et remplacé par la Direction de la prévention et de la gestion des inondations. Cette nouvelle création vient renforcer le nouveau Plan décennal de lutte contre les inondations prévu avant décembre 2022. Pour Macky, cela doit être un programme d’investissements «massifs en matière d’assainissement (eaux pluviales), intégrant des projets et zones prioritaires, selon la cartographie nationale des inondations, disponible, et les évaluations techniques et financières, réalisées».
Il faut savoir que le 19 septembre 2012, lors d’un Conseil présidentiel, l’Etat du Sénégal avait établi un Plan décennal de lutte contre les inondations (2012-2022) dont le budget était évalué à plus de 766 milliards F Cfa.
LES ATTENTES DU FORUM DES JUSTICIABLES VIS-À-VIS D'ISMAILA MADIOR FALL
Des chantiers s’annoncent pour le nouveau Garde des Sceaux
Aussitôt son retour effectif à la tête du département de la Justice, des chantiers s’annoncent pour le nouveau Garde des Sceau. C’est ainsi qu’à la suite de la mise place du nouveau gouvernement de «combat et de défis», le Forum du Justiciable, pour une prise en charge «diligente et efficiente des questions judiciaires», invite le professeur Ismaïla Madior Fall, ministre de la Justice, Garde des Sceaux, à accélérer la mise en œuvre des réformes judicaires déjà formulées par les acteurs de la justice et de la société civile.
A travers une déclaration de son Bureau exécutif sur la mise en œuvre des réformes judiciaires, rendue publique hier lundi, le Forum du Justiciable estime que «la mise en œuvre des réformes judiciaires posera certainement les jalons nécessaires au renforcement de notre Etat de droit». Babacar Ba et ses camarades déclinent ainsi leurs propositions de réformes en 13 points. On peut citer : «Prévoir des mesures d’encadrement du principe d’inamovibilité par la définition de la notion d’intérim et par l’énumération des éléments pouvant justifier le recours à la notion de nécessité de service ; Conférer aux membres du Conseil supérieur de la Magistrature le pouvoir de proposition dans le cadre des nominations et des mutations des magistrats».
Ils prônent aussi ceci : «Les membres élus du Conseil supérieur de la Magistrature doivent être en nombre au moins égal à celui des membres de droit ; Ouvrir le Conseil supérieur de la Magistrature à des personnalités extérieures reconnues pour leur expertise et leur neutralité (avocats, universitaires, société civile…) ; Subordonner l’affectation des magistrats du parquet à l’avis conforme du Conseil supérieur de la Magistrature à défaut le faire nommer par le Conseil lui-même ; Instaurer un parquet financier spécialement chargé de traiter les délits économiques et financiers ; Etablir une loi qui prévoit que le ministre de la justice, qui conduit la politique pénale déterminée par le gouvernement, adresse uniquement aux magistrats du parquet des instructions générales. Il ne pourra leur adresser aucune instruction dans des affaires individuelles».
Les autres volets de cette réforme chers au Forum du Justiciable sont : «Instaurer un juge de la détention et des libertés spécialement chargé de statuer sur la mise en détention provisoire et sur les demandes de mise en liberté afin de rationaliser les mandats de dépôt ; Encadrer la détention provisoire en matière criminelle pour en limiter la durée à deux (2) ans ; Privilégier le contrôle judiciaire pour les personnes qui présentent des garanties de représentation en justice ; Rendre effective la mise en œuvre du bracelet électronique comme alternative à la détention pour désengorger les prisons ; Réformer la loi n°81-54 du 10 juillet 1981portant création de la cour de de répression de l’enrichissement illicite (CREI) pour prévoir le droit à un recours effectif ; Assurer l’autonomie budgétaire des juridictions», lit-on dans le texte.
AU MINISTÈRE DE L'ENVIRONNEMENT, UNE INSTABILITÉ AU MÉPRIS DES ENJEUX
Les différents ministres qui se sont succédés à la tête de ce département partent et laissent dernière eux des chantiers colossaux
Les mouvements et instabilité à la tête de certains départements dans les différents gouvernements du chef de l’Etat Macky Sall, n’épargnent pas le ministère de l’Environnement. Plusieurs nominations ont eu lieu sous son règne. Et pourtant, l’Environnement est un secteur aux enjeux multiples. Pis, à part Aly El Aïdar, toutes les autres personnes choisies, ont atterri en terrain inconnu.
L’Environnement fait partie des ministères les plus instables du régime actuels. Aly El Aïdar, Abdoulaye Bibi Baldé, Mame Thierno Dieng, Abdou Karim Sall et désormais Alioune Ndoye, sont les hommes politiques qui ont eu à gérer ce département, depuis l’arrivée du président Macky Sall au pouvoir. La réflexion qui mérite d’être posée est de savoir si une question aussi importante que l’environnement peut s’accommoder avec un changement permanent ?
Les différents ministres qui se sont succédés à la tête de ce département partent et laissent dernière eux des chantiers colossaux. Par exemple, le plastique est une équation que le Sénégal n’arrive toujours pas à résoudre. D’abord, une loi a été votée en 2014, sous Abdoulaye Bibi Baldé, ses résultats n’ont pas été à la hauteur des objectifs. Puis, une autre fut adoptée, avec des mesures coercitives beaucoup plus renforcées, le résultat reste le même : le plastique continue d’inonder rues, espaces et marchés. La consigne sur les bouteilles en plastique n’est toujours pas appliquée, contrairement à ce que dit la loi n°2020-04 du 8 janvier 2020 relative à la prévention et à la réduction de l’incidence des produits plastiques sur l’environnement qui abroge et remplace la première.
Le plastique, l'impossible solution
Elle n’est pas la seule directive fortement défendue par le ministre Abdou Karim Sall et qui n’a pas été suivie d’effets. Cette même loi de 2020 interdit les sachets plastiques à usage unique comme la matière utilisée pour le conditionnement des sachets d’eau. La Covid-19 a été une des raisons avancées pour différer l’application de cet interdit ; jusqu’à présent rien de nouveau sous les cieux. Le péril plastique n’est pas le seul mal de l’environnement que le Sénégal n’arrive à pas gérer. La déforestation continue de plus en plus notamment au Sud du pays où les nombreuses mesures mises en place ne font pas abdiquer les braconniers. Le Sénégal subit de plein fouet les effets des changements climatiques avec notamment l’érosion côtière qui menace le littoral, les inondations qui frappent plusieurs localités notamment de grandes villes comme Dakar et banlieue. Le financement de son adaptation est un défi à relever et le pays assurant la présidence de l’Union africaine (Ua) est le porte-voix de la revendication selon laquelle les 20 pays développés responsables de 80% des émissions des gaz à effets de serre devront financer les projets d’adaptation des pays les moins avancées durement éprouvés dont la plupart se trouvent sur le continent.
Les projets de développement risquent d'être préjudiciables
Dans son rapport sur l’état de l’environnement en 2020, publié en janvier 2022, le Centre de suivi écologique (Cse) rappelle l’importance de prendre en compte l’environnement dans les projets de développement. «La sauvegarde de l’environnement est l’un des défis majeurs auxquels devra faire face l’État du Sénégal dans un contexte de croissance démographique de la population (16,2 millions d’habitants en 2019), de pauvreté grandissante (37,8% de pauvres) et de changements climatiques aux multiples impacts».
Il relève ainsi que «le Plan Sénégal émergent (Pse) ambitionne une transformation structurelle de l’économie et de la société à l’horizon 2035. Cette ambition s’appuie sur une exploitation des ressources agricoles (terres, eaux, forêts), minières, pétrolières, gazières et une intensification du tissu industriel du pays, qui doit combiner optimisation et rationalité».
Seulement, le Cse, mettant en garde aussi, de souligner que «les changements environnementaux attendus dans les prochaines décennies risquent de s’amplifier au point d’atteindre ou de dépasser des seuils critiques et irréversibles, si des mesures de sauvegarde adaptées ne sont pas soigneusement élaborées et effectivement mises en œuvre. En effet, une bonne partie de l’économie sénégalaise repose sur des systèmes de production qui, une fois affectés par les crises environnementales, vont nécessairement affaiblir un pays caractérisé par une situation socioéconomique encore fragile».
La pollution va de mal en pis
L’état de l’environnement au Sénégal, c’est également une pollution des océans, de l’air, la perte de la biodiversité et une forte pression foncière qui menace les sites non aedificandi, surtout à Dakar. En outre, les populations voisines d’industries chimiques, continuent de payer cher leur proximité avec ces exploitants de ressources minières. La pollution dans la zone de Mboro est très importante à cause de la présence des Industries chimiques du Sénégal (Ics) et d’autres structures similaires.
Dans la région de Kédougou, l’exploitation de l’or, aussi bien industrielle qu’artisanale, rime avec la destruction de l’environnement. Les substances chimiques telles que le mercure, cyanure polluent les eaux ; les compagnies minières dans leurs activités de recherches, délestent la forêt de ses arbres sans que le suivi idoine ne soit fait en retour.
Dans la capitale, le cas de la Senchim à Thiaroye sur Mer est là pour rappeler qu’il y a nécessité d’être beaucoup plus regardant sur l’environnement pour le bien-être des populations.
Il est à signaler également que les ministres de l’Environnement nommés par le président de la République, Macky Sall, ont plus été des politiques que des hommes du sérail. Il n’y a qu’Aly El Aïdar, militant écologiste, engagé pour la préservation de l’environnement, qui sort du lot.
LA NOUVELLE LÉGISLATURE AU DÉFI DU CONSENSUS
Avec une répartition quasi égalitaire des sièges, les deux forces politiques (pouvoir et opposition) sont condamnées à travailler à une entente y compris pour des questions à fort enjeu politique, sous peine de bloquer le fonctionnement du Parlement
La 14e législature est partie pour vivre une mandature très complexe. En effet, avec une répartition quasi égalitaire des sièges entre pouvoir et opposition, au niveau de la plénière et du bureau, la bonne marche de l’Assemblée nationale est suspendue au consensus de ces forces politiques.
Après une session d’ouverture très mouvementée, le lundi 12 septembre dernier, marquée par l’intervention des gendarmes dans l’enceintre de l’hémicycle, sur demande de la présidente de séance, Aissatou Sow Diawara, pour sécuriser le processus d’élection du nouveau président de l’Assemblée nationale, les députés ont finalement procédé à l’élection des membres du bureau de l’institution parlementaire, le mardi 13 septembre dernier. Composé de 19 membres dont 8 vice-présidents, 6 Secrétaires élus, 2 questeurs et 3 présidents de Groupes parlementaires, cette nouvelle équipe qui a la charge de régler les délibérations de l’Assemblée nationale mais aussi d’organiser et de diriger tous les services de l’Assemblée nationale dans les conditions déterminées par le Règlement intérieur, se singularise par une égalité de représentation entre le pouvoir et l’opposition.
En effet, sur les 20 membres qui le compose dont le président de l’Assemblée nationale, 10 sont issus de la mouvance présidentielle et les 10 autres restants sont des représentants de l’opposition regroupée autour de l’inter-coalition Yewwi-Wallu. Cette situation est tout simplement inédite. C’est la première fois que l’Assemblée nationale soit confrontée à un tel statuquo. Considérée comme la pièce maitresse du fonctionnement administratif de l’institution parlementaire, les deux forces politiques en présence (Pouvoir et opposition) sont condamnées, sous peine de bloquer le fonctionnement du Parlement, de travailler à trouver un consensus même dans les questions à fort enjeu politique. A défaut, notamment en cas de divergence comme cela a été le cas lors de la session d’ouverture du lundi 12 septembre concernant la présence des ministres élus députés, c’est le fonctionnement de cette instance qui risque de connaitre une paralysie qui n’épargnera certainement pas le travail parlementaire dans sa globalité.
Abou Sané, ancien parlementaire : «On va irréversiblement vers des blocages parce…»
«Le bureau de l’Assemblée nationale tel qu’il se présente aujourd’hui ne rassure pas puisque les nouveaux députés sont venus pour changer radicalement les choses alors que les autres qu’ils ont trouvés sur place sont des conservateurs. On va donc vers des blocages puisque les gens ne se feront pas de cadeaux. Mais, pour mieux apprécier ce qui viendra, il faut attendre la mise en place des Commissions puisqu’il y a deux instances au niveau de l’Assemblée nationale : le Bureau et la Conférence des présidents. Le bureau étant déjà composé avec une répartition de membres comme suite : 10 pour l’opposition contre 9 pour la coalition au pouvoir plus le président de l’Assemblée nationale qui a pris l’engagement d’être équidistant le jour de son élection en disant qu’il sera le président de tous les députés.
On va irréversiblement vers des blocages parce que les approches, les contenus, les fonctions sont totalement opposées. A cela, il faut également ajouter la fièvre de la pré-campagne pour la présidentielle de 2024. Avec l’installation des Commissions qui se fera à partir du 20 septembre prochain, nous aurons peut-être une vision plus globale de la perspective qui nous attend notamment concernant la composition de la Conférence des présidents qui forme, avec le bureau, les deux organes déterminants de l’Assemblée nationale. Cependant, j’avoue que l’installation des Commissions ne changera rien. On aura le même scénario puisque les Commissions seront partagées de manière équitable entre la coalition au pouvoir et l’opposition.»
Alioune Souaré, ancien député et spécialiste du droit parlementaire : «Il n’y a aucun texte qui dit de manière explicite que les décisions du bureau sont prises par vote ou par consensus»
«L’article 17 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale dit que le Bureau à tous les pouvoirs pour régler les délibérations de l’Assemblée nationale et pour organiser et diriger tous les services dans les conditions déterminées par le présent Règlement intérieur. Autrement dit, il n’y a aucun texte qui dit de manière explicite que les décisions du bureau sont prises par vote ou par consensus. Mais, je sais que dans la pratique parlementaire, le bureau privilégie le consensus. Et à défaut de consensus, il votait. C’est une pratique parlementaire, il n’y a aucun texte qui organise cette méthode de travail. Aujourd’hui, ce qui fait foi dans le travail parlementaire, c’est le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, tout à fait dans le Règlement intérieur qui complète les dispositions de la Constitution puis vient ce qu’on appelle les pratiques parlementaires, c’est-à-dire des règles non inscrites. Le travail parlementaire est régi par ces trois principes : les règles écrites dans le Règlement intérieur, la Constitution et les règles non écrites qui relèvent des pratiques parlementaires. Autrement dit, ce qui se faisait avant par rapport à la prise de décision au niveau du bureau, c’est soit de privilégier le consensus et, à défaut de consensus, le vote.
Maintenant, si ces mêmes pratiques sont maintenues et que demain, le bureau se retrouve en face d’une question sur laquelle il n’y a pas un consensus, qu’est-ce qui va se passer s’il devrait voter ? C’est la grande question d’autant plus qu’il y’a une répartition également des membres du bureau entre la majorité au pouvoir et l’opposition. Bennoo bokk yaakaar a 4 vice-présidents, 3 secrétaires élus, un questeur, un président de groupe ; ce qui fait un total de 9 membres. Et si, on rajoute le président de l’Assemblée nationale, ça fait 10. Yewwi a 3 vice-présidents, 2 Secrétaires élus, un questeur plus un président de groupe parlementaire ; ce qui fait un total de 7 membres dans le bureau. De son coté, Wallu a 1 vice-président, 1 Secrétaire élu et un président de groupe parlementaire. Si vous faites la somme des 3 membres de Wallu plus les 7 de Yewwi, cela fait 10 membres pour l’opposition. Il reste maintenant les Commissions dont la répartition se fera comme la mise en place du bureau».
L'AGENDA AFRICAIN DE LA 77E AG DE L'ONU
Guerre en Ukraine, dérèglement climatique, sécurité alimentaire vont dominer cet événement pendant près d’une semaine, avec quelques rendez-vous africains importants, notamment un sommet extraordinaire de la Cédéao
La 77e Assemblée générale de l’ONU, réunion annuelle des chefs d’État et de gouvernement au siège des Nations unies, s’ouvre ce mardi 20 septembre à New York. Guerre en Ukraine, dérèglement climatique, sécurité alimentaire vont dominer cet événement pendant près d’une semaine, avec quelques rendez-vous africains importants, notamment un sommet extraordinaire de la Cédéao.
Ce mardi 20 septembre, dans l’immense salle vert et or de l’Assemblée générale des Nations unies (ONU), le président sénégalais Macky Sall sera le premier chef d’État africain à monter la tribune, juste derrière le président brésilien, Jair Bolsonaro, qui ouvre traditionnellement les travaux chaque année.
L’après-midi, Macky Sall sera suivi par le président des Seychelles, Wavel Ramkalawan, puis par le Congolais Félix Tshisekedi et le Centrafricain Faustin-Archange Touadéra, l’un après l’autre, et ensuite le chef du gouvernement marocain, Aziz Akhannouch.
Mercredi on entendra les présidents du Nigeria, puis de plusieurs autres pays du continent, dont le Rwanda, Madagascar, le Gabon, la Côte d’Ivoire le Kenya et le Ghana. Ensuite, ce sera le tour des Premiers ministres, puis des ministres de s’exprimer les jours suivants.
Un sommet sur la sécurité dans le Sahel et le golfe de Guinée doit également avoir lieu, en présence de la France, ainsi qu’un « panel de haut niveau », dont des chefs d’États ouest-africains, dont le président nigérien, Mohamed Bazoum, ainsi que le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, et la ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna. Et un sommet extraordinaire de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) est bel et bien confirmé jeudi ou vendredi ; il sera question des 46 soldats ivoiriens détenus au Mali depuis le 10 juillet.
A la mi-journée ce mardi, on pourra entendre sur RFI et France 24 une interview exclusive du ministre des Affaires étrangères du Nigeria, Geoffrey Onyeama, qui confirmera la tenue et l’ordre du jour de ce sommet extraordinaire. Sur RFI, ce sera dans Afrique Midi, à 14h30 heure de Paris, 12h30 TU.
ABDOULAYE ELIMANE KANE RACONTE SA RENCONTRE AVEC LA COVID
L'ancien ministre de la Culture a présenté, mercredi 14 septembre 2022, son livre : SAARABAA, La Covid-19 existe, je l'ai rencontrée. Témoigner c’est contribuer à lutter contre cette maladie en soulignant certains aspects de sa complexité, indique-t-il
SenePlus publie ci-dessous, le texte de présentation du nouveau livre SAARABAA, La Covid-19 existe, je l'ai rencontrée d’Abdoulaye Elimane Kane paru aux Éditions L’Harmattan. L’auteur y revient notamment sur les implications de cette maladie dont il a été victime, à travers des réflexions sociétales, philosophiques et culturelles. La cérémonie de dédicace a eu lieu mercredi 14 septembre 2022 dans l’enceinte de L’Harmattan à Dakar.
« Mesdames, messieurs,
Chers amis, parents et collègues et illustres panélistes,
merci d’ être venus , par ces temps difficiles et encombrés , une actualité dominée par le Magal de Touba , la mise en place de la 14e législature , l’ attente de la formation du gouvernement , les inondations , le coût de la vie et la guerre en Ukraine et sans doute d’ autres urgences.
Mes remerciements vont également au Docteur Abdoulaye Diallo directeur des éditions L’Harmattan Sénégal qui, sans répit, accepte de publier mes ouvrages et d’assister à leur présentation avec une égale courtoisie et marque d’attention.
Mes pensées vont également vers mon ami Charles Becker : depuis bientôt une décennie, il s’est montré d’une disponibilité sans faille pour relire mes manuscrits et effectuer la configuration technique des ouvrages qui en sont issus.
Il m’est également agréable de saluer et remercier deux grands artistes à qui je dois l’illustration qui figure sur la couverture de Saarabaa, illustration intitulée ANDARY, pour rendre hommage à Ndary Lo, célèbre sculpteur sénégalais qui crée des personnages grands et filiformes à l’image de ceux de Giacometti, L’Homme qui marche, sculpture en bronze, étant l’un des plus célèbres qu’on trouve au siège de l’Unesco à Paris.
Je veux nommer Viye Diba, artiste plasticien sénégalais bien connu, mainte fois primé pour ses œuvres, notamment ses installations.
C’est sur son idée et en s’inspirent d’un bas-relief figurant des dents de chien à l’entrée de son atelier, que Pape Ba, photographe et éditeur d’ouvrages, a réalisé cette illustration.
Il s’agit d’un photomontage représentant un funambule jouant d’une guitare traditionnelle et essayant de traverser un précipice, sur un fil tendu entre deux pics géants figurant des dents de carnassier sur fond de ciel bleu mais nuageux.
Le professeur Djibril Samb brillant préfacier de cet ouvrage, a donné dans son texte une contribution substantielle et éclairante sur les questions soulevées par ce témoignage.
Autour de cette table, pour contribuer à la présentation de SAARABBA, le professeur Issa Wone vous a présenté des personnalités du monde universitaire et médical connues pour leurs états de services élogieux en raison de leur expérience et de leurs travaux qui font autorité dans leurs domaines respectifs.
Le professeur Moussa Seydi, chef du service des maladies infectieuses au CHU – Fann de Dakar que l’irruption du nouveau coronavirus, après celle d’Ebola dans le monde et au Sénégal, a propulsé au-devant de la scène.
Je le remercie encore d’avoir fait l’effort de caller dans son agenda très chargé, cette échappée pour prendre part à nos échanges de cet après- midi.
Le professeur Abdoul Almamy Hane, ancien chef du service de pneumologie du CHU- Fann de Dakar, qui a pris sa retraite dans la fonction publique mais qui n’en continue pas moins de mettre son expérience au service de ceux qui souffrent ou ont besoin de conseils.
C’est lui qui a fait dire un jour à un médecin parisien qui s’adressait à moi : « N’abandonnez ni votre médecin ni le traitement qu’il vous a prescrit. »
Je termine cette galerie prestigieuse de portraits par le professeur Issa Wone.
Il fait partie de ceux qui, avec les éditions L’Harmattan, m’ont décidé à faire cette présentation/ dédicace.
Et c’est lui qui m’a présenté au professeur Seydi pour les besoins de cette rencontre. Le professeur Seydi, en plus de son accord a pris, discrètement comme à son habitude, une part non négligeable à la préparation de cette cérémonie.
Je me réjouis de constater qu’Issa, fils de mon regretté cousin, le professeur Ibrahima Wone, a suivi les pas de son illustre père en choisissant lui aussi une carrière de médecin/enseignant et en manifestant un intérêt particulier pour la santé publique.
Ils sont tous très sollicités et leurs responsabilités leur laissent peu de loisir : j’apprécie qu’ils aient fait preuve d’amitié et de générosité pour lire et commenter ce témoignage que je verse dans la corbeille de l’abondante littérature consacrée à l’apparition et à la pandémie due au nouveau Coronavirus.
La pandémie n’est plus l’épicentre de l’actualité mais il ne me semble pas décalé de discuter d’un témoignage sur la Covid-19, même dans un petit livre dont le motif principal est de soutenir qu’il ne faut, sous aucun prétexte, placer la santé au-dessous d’aucune autre priorité.
Mais je dois confesser que ce texte m’a donné bien du fil à retordre.
La volonté de le produire a été présente dans mon esprit dès que certains contours de l’épidémie et ses nombreuses conséquences ont été expliqués.
Mais je concevais autrement le contenu d’une telle contribution, avant d’être contaminé par le virus sans pour autant avoir commencé à l’écrire.
L’infection et l’hospitalisation ont complétement changé la donne : écrire sur cette expérience pouvait prendre différentes formes : un roman, une nouvelle, un entretien organisé ou un petit essai.
La forme de journal intime a vite pris le dessus pour deux raisons : le besoin de fixer, pour mémoire, les étapes, événements et faits significatifs de cette expérience, pour ma gouverne personnelle essentiellement.
Du fait de la singularité de cette affection, je me suis trouvé en dialogue avec moi-même, pour comprendre ce qui m’est arrivé et donner un sens aux rapports que j’ai eus avec différents protagonistes de cette affaire, notamment le personnel médical.
Pour ces deux raisons, j’ai été confronté au dilemme suivant : faut-il le publier ou le garder simplement comme journal personnel ?
Au moment de trancher, les avis de quelques personnes dont j’ai mentionné les noms dans la page des remerciements, m’ont aidé à prendre cette décision.
Le désir de partager mes réflexions, impressions et sentiments avec les hommes et femmes du monde médical et ceux et celles qui ont été malades de la Covid-19 a été décisif.
Je voudrais à présent m’arrêter un moment sur les composantes de ce récit de vie qui n’est pas le premier genre dont je me sois servi puisque, on s’en souvient sans doute, j’ai déjà publié une chronique portant sur l’asthme dans mon autobiographie intitulée : « Philosophie sauvage. La vie a de longues jambes. »
Ce cas-ci comporte plusieurs aspects qu’on ne trouve pas dans le premier.
Il fait l’objet d’une publication à part alors que la chronique sur l’asthme est insérée dans des textes ayant d’autres objets de réflexion que la maladie.
Comme l’a si brillamment montré le professeur Djibril Samb dans sa préface, Saarabaa a toutes les caractéristiques d’un récit : chronologie, descriptions de personnages et de lieux péripéties et dénouement.
Sur ce point je n’ai pas manqué de noter pour moi-même une question qui pourrait venir à l’esprit du lecteur et qui est la suivante : était-il nécessaire de produire ce foisonnement de détails, de portraits d’hommes et de femmes, d’événements et de circonstances, de références à ma famille, mon épouse, mes enfants, des parents et des amis quand, ce qui est attendu de l’auteur, est de parler du virus, de ses manifestations et de l’issue de cette affection sur la personne qui fait ce récit ?
Aucun détail n’est ici, superflus, tous les éléments de la trame de ce récit, même les plus apparemment anodins, anecdotiques ou subjectifs, sont justifiés et ordonnés à une fin principale : faire comprendre comment cette maladie a été vécue par l’auteur de ce récit et expliquer le type de rapports institués entre protagonistes de ce récit de vie, notamment entre le patient et les médecins.
Prenons un exemple : j’ai longuement décrit la cabine 21 où j’ai séjourné un mois, le personnel médical qui y venait, la périodicité des visites, et mon voisin de chambre auquel j’ai consacré des paragraphes conséquents.
Sans ces maillons on ne comprendrait pas l’articulation de certains éléments de l’énigme constituée par les positions opposées des deux médecins chargés de mon dossier sur la question de savoir si tel jour je devais sortir de l’hôpital.
Sans la présence et les propos innocents de mon voisin de chambre cette contradiction n’apparaitrait pas et une part significative de mes interrogations sur la prise en charge médicale disparaitrait.
En science et dans le domaine médical des divergences d’appréciations ne constituent pas forcément un scandale, ni ne mettent en cause la connaissance scientifique et ses mérites. Souvent ce sont des faits de cette nature qui font progresser la science.
Mais du point de vue du patient qui en est informé cela peut constituer une source d’angoisse.
J’ai donc dès le départ voulu donner à ce livre, Saarabaa, laCovid-19 existeje l’ai rencontré, une valeur de témoignage à partager.
Devant la maladie différentes conduites sont possibles et l’on ne peut que respecter et comprendre celle des infectés de la Covid-19 qui n’estiment pas nécessaire de partager cette expérience sous une forme éditoriale ou publique.
Le plus important, en effet, est de recouvrer la santé et de travailler à la préserver.
Dans nos sociétés africaines, sénégalaise en particulier, contrairement à une longue tradition du monde occidental depuis la Renaissance et l’invention de l’imprimerie et du concept d’individu, la publicité d’actes de vie personnelle va souvent à contre-courant d’une certaine éthique de la retenue, de la pudeur, du secret, de l’ésotérisme et de la confidentialité.
Ce type d’interrogation a effleuré l’esprit de tout auteur d’une autobiographie.
La volonté de témoigner peut absoudre l’auteur en ce que cette pandémie semble être, de toutes celles qui sont connues, la plus dévastatrice et la plus menaçante non seulement pour la vie de chacun mais aussi pour la collectivité, voire la civilisation et même l’humanité.
Témoigner c’est donc contribuer à lutter contre cette maladie en soulignant certains aspects de sa complexité, la diversité des modalités de sa manifestation et pour donner aux autorités sanitaires l’avis des infectés rescapés sur les problèmes de prise en charge médicale.
Voici à présent un autre argument pour justifier cette forme de témoignage.
Il s’agit d’un argument philosophique spécifique.
Ce qu’on appelle en philosophie leproblèmeduMal constitue un des objets usuels de la pensée philosophique : pourquoi le Mal sur Terre, est-ce le fait des hommes ou celui d’une puissance qui les dépasse ?
De manière plus prosaïque la violence, la souffrance, la maladie, la mort constituent différentes figues du Mal diversement vécues et interprétées.
La maladie et la mort, deux visages du Mal sur Terre, sont perçues à la fois comme logiques dans l’ordre du vivant (notre vulnérabilité et notre finitude) et indésirables dans l’ordre de l’existence.
L’intérêt de ce rappel est d’en arriver à cette idée fondamentale en philosophie : la question du sens : quel sens donnons-nous à ce qui est vécu. Et, ici, quel sens donnons-nous à la maladie ?
La maladie fait partie de la vie. Être malade c’est encore être en vie et espérer vivre plus longtemps.
À condition que les moyens soient ordonnés à cette fin et qu’une communication appropriée permette au malade de contribuer à sa propre guérison.
Au titre des questions implicites qui se trouvent au cœur de ce témoignage en voici une qui est révélatrice de l’effet Covid sur la psychologie des populations en général, des patients en particulier.
Avec cette hospitalisation, ma perception de l’hôpital a brutalement changé.
J’ai été, à plusieurs reprises, hospitalisé pour cause de mal asthmatique. Et l’hôpital m’était jusque-là apparu dans son sens originel d’hospice – lieu où l’on offre l’hospitalité et le réconfort.
Pour la première fois je me suis montré rétif à cette hospitalisation, suite à cette infection par le nouveau coronavirus.
J’ai exprimé dans ce texte, sous des formes différentes, mon souci et ma volonté d’abord d’éviter d’y entrer, ensuite d’en sortir, en me fondant sur ce que je ressentais à différentes étapes et qui me semblait justifier ce souhait et cette volonté.
Pourtant je sais par expérience que, c’est pour leur bien et par nécessité qu’on admet et retient des patients à l’hôpital.
Malgré les chiffres qui assurent un nombre plus élevé de guérisons que de morts cette nouvelle perception est très certainement due au sentiment d’enferment et d’incertitude qu’au cours de cette période la notion d’hospitalisation a engendré.
Ce changement de regard peut expliquer en partie les rapports médecin/patient qui ont caractérisé mes relations avec les deux principaux soignants ayant eu en charge mon dossier.
Mais d’autres facteurs s’y sont sans aucun doute, également greffés : le manque de personnel qui ne leur a pas permis d’être souvent disponibles, la complexité de cette maladie, leurs propres soucis de membres du corps médical exposés et vulnérables comme tout le monde.
Ils me pardonneront d’ajouter qu’ils me sont apparus comme ayant une certaine propension à se fier presque exclusivement aux instruments de mesure qui leur permettaient de connaitre l’évolution de mon état de santé.
La technologie a rendu d’immenses services à la médecine et à l’humanité et il en sera certainement ainsi et de plus en plus.
Mais la santé relève plus du qualitatif que du quantitatif et s’apprécie en termes de ressenti du patient.
Pourtant, je ne doute pas un instant de ce que leur vocation et leur formation les aient préparés à savoir que ce ne sont pas des chiffres qu’ils ont à soigner mais des êtres de chair et de sang et qui plus est, des êtres humains.
Au titre d’autres questions plus explicites j’ai abondamment brodé sur trois sujets qui reviennent dans mes méditations d’individu aux prises avec une maladie chronique.
En m’inspirant d’un adage de la langue Pulaar j’ai insisté, dans ce livre, sur la primauté de la santé par rapport à toutes les raisons d’ordre économique et tous les arguments de décision et d’orientation des politiques publiques qui ont eu, à un moment ou à un autre, à ne pas prendre un compte suffisant de la santé.
Celal woni afo ngalu : « La santé est l’article premier de la prospérité », dit cet adage.
Je me suis employé à montrer que les traductions littérales et non littérales de cette expression renvoient à deux visions opposées des questions de priorité :
d’un côté celle d’ une conception de type techno- économique, principalement soucieuse de rentabilité et de profits, conception qui a conduit aux difficultés et aux traumatismes révélées par cette pandémie ;
de l’autre celle qui correspond à l’ esprit de cette parole de sagesse à savoir que la santé est cette forme de prospérité garante de toutes les autres.
En lisant récemment Jacques Attali, j’ai vu que ce qu’il appelle « économie de la vie » correspond bien à la leçon qu’il demande de tirer des erreurs des sociétés occidentales les plus développées économiquement et qui sont celles qui ont le plus souffert de cette pandémie. Il élève une nouvelle vision du monde et un changement de politiques publiques au rang de nécessité pour passer de la simple survie de l’humanité à une véritable assurance de vie et de prospérité, avec la santé et l’éducation comme piliers de cette nouvelle orientation.
L’hôpital, la santé publique et l’éducation appellent un changement de regard, un autre paradigme si l’on ne veut pas faire sombrer l’économie elle-même et l’humanité avec elle.
La question souvent débattue dans la presse du monde occidental, au sein des instances sanitaires internationales ou régionales, l’idée d’ une « exception africaine » face à cette pandémie, en termes de nombre d’infectés, d’hospitalisés et de morts, a été abordée dans Saarabaa.
N’ayant aucune expertise dans aucun domaine, encore moins dans celui- ci, en attendant de connaitre l’explication scientifique de ce phénomène, je me suis jeté à l’eau en hasardant une hypothèse tirée d’une sorte d’empirisme naïf : à savoir que, pour le cas du Sénégal, contre toute logique et toute exigence de discipline, c’est la vie sociale, culturelle et religieuse qui pourrait avoir fabriqué une certaine immunité collective.
Mais je n’ai pas oublié que toute l’histoire de la philosophie est un tissu de ruses avec le sens commun, usant de procédés ambivalents pour faire de ce mode de connaissance un marchepied, l’élevant dans un premier temps à la dignité de bon juge pour, l’instant d’après, le récuser comme aveugle à des réalités plus profondes.
Bachelard nous a averti de longue date « Les intuitions sont bonnes, elles servent à être détruites. »
Je suis donc un homme doublement averti pour ce qui est de la valeur de cet argument.
Mais c’est pour le moment la seule explication qu’il me semble pouvoir tirer de l’observation. Seule la science nous édifiera sur la question.
À cet argument à l’emporte-pièce j’ai ajouté celui que je tiens d’un de mes maitres à l’université de Paris, Georges Canguilhem, philosophe et médecin de son état, connu dans l’histoire contemporaine de l’épistémologie historique pour l’importance qu’il accorde au concept de normativité et par extension à celui d’auto-normativité.
Ce concept signifie en gros que la santé n’est pas un état de nature déjà donné dont les écarts par excès ou par défaut sont cause la maladie.
Entre la pathologie et la santé il y a une différence de nature et non de degré. Il n’y a pas en matière de santé une norme statique, universelle et pérenne, valable pour tous les individus et tous les patients face à la maladie.
La spontanéité de la vie et la créativité de l’organisme offrent à ce dernier, face aux pathologies, de tolérer des infractions à la norme habituelle et de créer des normes nouvelles.
« La santé, écrit- il, c’est le luxe de tomber malade et de s’en relever ».
Et pour preuve qu’on ne peut pas la fixer dans des normes immuables, notre philosophe a cet autre aphorisme particulièrement instructif : « Aucune guérison n’est retour à l’innocence biologique. »
En extrapolant et en appliquant ce concept d’auto normativité à ce qu’on appelle « exception africaine », face à la pandémie et en y voyant une explication de son immunité collective relative, j’ai trouvé une caution intellectuelle à cette hypothèse.
Mais ma conviction demeure que c’est la science qui nous donnera la bonne réponse et que sa réponse ne récusera pas forcément l’idée d’exception africaine.
Enfin, dernière question d’intérêt philosophique abordée dans ce livre : le statut épistémologique de la médecine.
C’est un biais par lequel on peut faire l’éloge de la médecine.
Car d’un bout à l’autre de ce témoignage, m’appuyant sur mon expérience de néo-hospitalisé et observant ce qui se passe dans le monde depuis l’irruption du nouveau coronavirus, je n’ai eu cesse de faire l’éloge des médecins et de la médecine.
Partons encore d’une formule de Canguilhem : « La médecine est un art au carrefour de plusieurs sciences ».
Chaque terme de cet aphorisme renvoie à la singularité de cette discipline.
Expliciter cela est un exercice délicat qui consiste à tenir ensemble deux exigences : la médecine appartient au monde des sciences mais en tant que technique il y a dans sa pratique une part d’opacité que la loi scientifique ne peut rendre entièrement transparente et qui ne relève de rien d’irrationnel ou d’une quelconque sympathie envers l’obscurantisme.
C’est la part d’humanisme qui consiste à traiter le patient en ne se contentant pas de le réduire à un ensemble de chiffres - si utiles et pertinents soient – ils, personne n’en disconvient - mais comme un être humain ainsi que Hippocrate l’a très tôt et constamment recommandé dans sa conception holistique de la médecine.
En guise d’illustration, mon collègue, le professeur Djibril Samb, qui a eu la bonté de préfacer ce petit livre, rappelle fort opportunément à la fin de son texte cette recommandation de Hippocrate au médecin : « veiller jusqu’au parfum qu’il porte, lequel doit être agréable et n’avoir rien de suspect » .
Hippocrate avait à l’avance anticipé sur des cas comme le mien, moi qui suis allergique à certains parfums, pas à tous fort heureusement.
Je voudrais terminer cette présentation sur trois notes.
La première est relative au vaccin et à la vaccination et à la nécessité de promouvoir une culture scientifique pour tous.
Les audaces d’interprétation sur l’immunité collective et « l’exception africaine » ne m’ont pas fait perdre de vue le caractère impératif d’une politique et d’une action résolue pour la vaccination universelle.
Cette précision relève de ce que nous devons, en même temps que l’humanisme, faire de la culture scientifique et de la croyance en la valeur de la science un des piliers de l’éducation et de l’émancipation.
La culture scientifique n’est pas l’affaire d’un jour ou des scientifiques seulement.
Elle a besoin de volonté politique, de pédagogies appropriées et de persévérance. Notamment souligner et prouver que cette culture scientifique n’est pas antinomique d’une croyance et d’une pratique religieuses intelligentes et tout à fait conforme à certaines prescriptions des écritures saintes.
Et à propos de vaccination, pour qu’elle soit universelle, une des conditions à satisfaire est bien évidemment que le vaccin soit à la portée de tous.
La deuxième note porte sur SAARABAA, titre de l’ouvrage, concept et facteur psychologique d’accompagnement de ma rencontre avec la Covid-19.
Œuvre musicale à la fois célèbre et somptueuse, le fait d’avoir écouté différentes interprétations de cet air , à commencer par celle de Samba Diabaré Samb, au moment le plus critique de mon infection, à une heure tardive d’une nuit d’insomnie, a eu pour conséquence de faire naitre dans mon esprit l’ambiguïté de sa signification alors qu’en dehors de son refrain je ne savais rien du contenu de cet air, ni son origine ni sa destination.
J’ai dit dans le texte que son refrain, Nanu dem saarabaa, nanu ni bi saarabaa, a eu pour moi l’effet d’un mantra au cours de mon hospitalisation avec des sentiments oscillant entre angoisse et confiance.
C’est quoi un mantra ?
Un mantra, c’est un élément verbal, un mot par exemple, répété mentalement et volontairement, soit dans des exercices à caractère mnémotechnique soit dans d’autres à caractère mystique comme par exemple le zikre.
Par ailleurs, chacun a fait l’expérience, après une longue écoute d’un air ou d’une partition musicale, d’avoir continué à percevoir des lambeaux de flonflons, des bribes de sons, longtemps après la cessation des conditions qui en étaient à l’origine. Voire de les fredonner plus ou moins machinalement. Donc involontairement.
Sa persistance et son surgissement à différentes étapes de mon traitement m’ont fait considérer le refrain de Saarabaa comme un mantra. Mais dont la répétition n’est pas volontaire.
Et j’ai consacré la dernière partie de l’ouvrage aux investigations que j’ai menées, après ma sortie d’hôpital et pour les besoins de ce témoignage, afin d’en savoir plus.
Le résultat auquel je suis arrivé, avec l’aide des professeurs Lamane Mbaye et Massamba Guèye me donne tout à fait satisfaction.
Saarabaa symbolisant un lieu mythique, un lieu qui n’existe nulle part mais ayant valeur d’horizon désirable, j’ai interprété le mantra qu’a constitué pour moi ce refrain comme une métaphore de la santé.
A savoir, une sorte de paradis perdu quand domine la maladie et la douleur.
Ou bien alors l’espoir du retour d’un « âge d’or », celui d’avant la maladie et dont on ne s’aperçoit de la valeur de « paradis » relatif qu’après l’avoir perdu.
J’en ai fait une deuxième interprétation en extrapolant l’idée de lieu mythique pour souhaiter qu’à la lumière de cette pandémie, et après avoir tiré les leçons de nos errements, imprévoyances, négligences, détournements coupables d’objectifs, une nouvelle utopie permette à l’humanité d’aller vers un nouvel « âge d’or « où la santé serait la reine des priorités.
Voici enfin, dernière note ne figurant pas dans l’ouvrage mais est induite par les observations faites sur le nombre de cas d’infectés, d’hospitalisés et de décès, ici et dans le monde.
Il s’agit de considérations relatives à la perception que nous avons de la maladie d’abord (ce virus existe-t-il et si oui pourquoi est-il resté inconnu) ; ensuite la qualité et le nombre des victimes à travers les informations données par les médias et les autorités sanitaires.
En termes d’exigence démocratique et de besoin d’information le rôle de pouvoirs et la portée de leur influence n’est plus à démontrer.
Il s’agit plutôt de notre psychologie collective face à l’actualité en général, aux évènements dramatiques en particulier, notamment les accidents, les maladies et la mort dont les médias et les avis circonstanciés des autorités étatiques et/ou médicales se font l’expression et le relai.
Face aux conséquences désastreuses de cette pandémie qui dure encore et dont on ne connait pas tous les ressorts nos pensées vont vers ceux que nous avons connus et aimés et qui n’ont pas eu la chance que d’autres ont eue.
Parmi eux d’illustres personnalités du monde de arts, des Lettes, de la politique, de la science et d’autres domaines de la vie publique.
Mais il y a également ces milliers d’autres victimes de la Covid-19 qui ne sont ni des stars, ni des hommes et des femmes connus, ces milliers d’anonymes pour le grand public mais dont, évidemment, la perte est connue et a été ressentie par leurs proches endeuillés et confrontés aux conséquences d’un tel traumatisme.
La raison en est simple : les médias s’adressent aux masses et les masses ont besoin de mythes : événements choc, personnalités en vue et qui les ont fait rêver, notamment.
Mais ce fait laisse en creux des réalités plus profondes.
« Être, c’est être perçu » : voilà une formule du philosophe idéaliste du 17e siècle Berkeley, qui pourrait interprétée pour les besoins de cette problématique, éclairer la signification de cette différence de perception et les conséquences qui en découlent.
Formule fausse en première instance car n’être pas vu n’empêche pas d’exister, le philosophe l’ayant lui- même souligné dans un premier temps.
Par exemple la Tour Effel quand on n’est pas à Paris et en face de cette œuvre monumentale.
Par exemple, ce virus dévastateur qu’est le Covid-19 avant le déclenchement de la pandémie à Wuhan en Chine.
Mais formule vraie, en deuxième instance : si personne ne regarde la Tour Effel que reste-t-il de sa valeur : l’image de la ville, les retombées du tourisme et la qualité de la vie culturelle ?
De même le virus du Covid-19 existait bel et bien, d’abord non perçu, puis, dans le même élan s’est révélé à l’humanité tout en causant les dégâts qu’on n’a pas encore fini de dénombre.
Est-on à l’abri d’autres virus inconnus et inaperçus et dont on risquerait de subir les méfaits en même temps qu’ils apparaitraient en pleine lumière ?
Question qui permet de revenir à la formule complète du philosophe anglais : « être c’est être perçu ou percevoir »
D’où l’importance de la recherche scientifique et la nécessité de la doter de moyens conséquents privilégiant ces questions vitales.
Formule valable donc par rapport à la question suivante : le nombre de cas positifs aux tests et le nombre de morts recensés dans le monde et dans chaque pays correspond-il au nombre réel de victimes ?
Du point de vue statistique, les cas non perçus, par exemple faute d’instruments de mesure ou d’équipes qualifiées pour en connaitre, sont-ils marginaux ou, au contraire, de nature à montrer que cette pandémie a été plus dévastatrice qu’on ne l’a pensé.
Ces oublis, omissions et méconnaissances liées à différents facteurs sont- ils de nature à remettre en cause jusqu’ à l’idée « d’exception africaine » ou bien demeurent elles marginales bien que déplorables comme toute perte de vie humaine ?
Mesdames, messieurs, chers amis, parents et collègues merci infiniment d’être venus et d’avoir pris part, chacun à sa manière, à ces échanges où nos trois invités de marque, les professeurs de médecine Seydi, Hane et Wone, nous ont aidé à prendre la mesure exacte des questions qu’inspirent l’expérience d’une rencontre avec le Covid-19. »
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L'OPPOSITION PARLEMENTAIRE ANNONCE DES HEURES CHAUDES AU PARLEMENT
Les députés de l’opposition ont annoncé ce lundi en conférence de presse, une panoplie de propositions de loi et d’enquêtes parlementaires à soumettre prochainement à l'Assemblée nationale afin. Ils entendent "exercer pleinement le mandat du peuple"
Les prochains mois à l’Assemblée nationale ne risquent pas d’être plus calmes. Les députés, membres de l’opposition, ont annoncé une panoplie de propositions de loi, d’enquêtes parlementaires et de lettres écrites qui risquent de créer des tiraillements à l’hémicycle.
Ici les explications du député Birame Souleye Diop, président du groupe parlementaire de Yewwi.
par l'éditorialiste de seneplus, jean-claude djéréké
ALIOUNE DIOP, GRAND DÉFENSEUR DE LA CULTURE AFRICAINE
EXCLUSIF SENEPLUS - Le fondateur de Présence Africaine était d’abord un accoucheur d’idées. C’est à juste titre que Césaire le présenta comme “un des guides de notre époque”. Il restera selon Mongo Beti, "celui qui a permis aux Noirs de s’exprimer"
Jean-Claude Djéréké de SenePlus |
Publication 19/09/2022
Alioune Diop n’était pas aussi célèbre qu’eux mais n’en fit pas moins qu’eux pour l’émancipation de l’homme noir car c’est grâce à lui que plusieurs générations d’Africains purent lire et aimer Hampaté Bâ (Mali), Aimé Césaire (Martinique), Kwame Nkrumah (Ghana), Bernard Dadié (Côte d’Ivoire), Léon Gontran-Damas (Guyane), Alexis Kagame (Rwanda), Wole Soyinka (Nigeria), Sembène Ousmane (Sénégal), Eza Boto (Cameroun) et d’autres auteurs publiés par Présence Africaine, la maison d’édition qu’il créa en 1949. Diop était d’abord cela : un accoucheur d’idées, celui qui révèle les talents cachés. C’est à juste titre que son compatriote Léopold Sédar Senghor le compara à Socrate, le père de la maïeutique et que Césaire le présenta comme “un des guides de notre époque”. Cet homme né en 1910 à Saint-Louis (Sénégal) fut aussi un jeteur de ponts entre les continents, entre les cultures, entre les religions, parce qu’il désirait ardemment que les hommes se débarrassent de leurs préjugés pour se rencontrer et se parler.
Enfant, il fréquente l'école coranique mais, en 1944, c’est la foi catholique qu’il embrasse en recevant le baptême des mains d’un prêtre dominicain, Jean-Augustin Maydieu, et en prenant le nom de Jean. Guy Tirolien, poète antillais, explique que “c’est, avant tout, par soif d’une spiritualité neuve et par besoin d’élargir, non sans déchirement, sa quête passionnée de l’homme” (cf. ‘Hommage à Alioune Diop’, Paris, Présence Africaine, 1978).
Ses études primaires et secondaires, il les fait à Dagana, puis à Saint-Louis où il décroche le baccalauréat classique (Latin-Grec) en 1931. Deux ans plus tard, il débarque à l’Université d’Alger pour étudier les Lettres classiques. Il y aura pour condisciple Albert Camus. C’est en 1937 qu’il arrive à Paris pour poursuivre sa formation. En 1939, du fait de la Seconde Guerre mondiale, il est mobilisé comme soldat. Démobilisé en 1940, il est tour à tour enseignant au Prytanée militaire de La Flèche, professeur au lycée Louis-le-Grand, chargé de cours à l'École nationale de la France d'outre-mer.
Entre décembre 1946 et novembre 1948, il siège au Sénat de la IVe République sous les couleurs de la SFIO (Section Française de l'Internationale Socialiste). C’est Mamadou Dia du BDS (Bloc Démocratique Sénégalais) qui lui succédera. Ayant vite compris que ce n’est pas en politique qu’il sera plus utile, Alioune Diop fonde en 1947 la revue littéraire ‘Présence Africaine’. Michel Leiris, Jean-Paul Sartre, Albert Camus, André Gide, Théodore Monod, Richard Wright, le Père Maydieu, Merleau-Ponty et Aimé Césaire feront partie du comité de patronage de la revue. Le numéro consacré aux Antilles et à la Guyane est saisi en 1962 par le parquet de la Seine pour “atteinte à la sûreté de l’État”. Senghor écrit régulièrement dans la revue entre 1947 et 1960. En 1949, Alioune Diop lance les éditions Présence Africaine. En 1956, il organise à la Sorbonne le premier congrès des écrivains et artistes noirs. Des intellectuels, écrivains et artistes du monde entier militant pour la décolonisation participent à ce congrès. La même année, est créée la Société africaine de culture (SAC). Alioune Diop en sera le secrétaire général et l’Haïtien Jean Price-Mars, le premier président. On doit à la SAC le deuxième congrès des écrivains et artistes noirs (Rome, 26 mars-1er avril 1959), le premier Festival mondial des arts nègres (Dakar, 1966), le Festival d'Alger (1969) et celui de Lagos (1977). Alioune Diop contribue à la préparation du Concile Vatican II (1962-1965) en organisant le colloque de Rome (26-27 mai 1962). Il s’agissait pour les prêtres et laïcs africains de réfléchir sur la personnalité africaine et le catholicisme.
En 1969 (31 juillet-2 août), pour la première fois, un pape catholique foule le sol africain. Lors de son voyage à Kampala (Ouganda), Paul VI déclare que les Africains peuvent et doivent avoir un christianisme africain. En réponse, la SAC confie à Alioune Diop et au Camerounais Georges Ngango la mission d'obtenir du pape l'autorisation d'organiser les états généraux du christianisme africain. La SAC réunira à Abidjan (12-17 septembre 1977) plusieurs penseurs africains autour du thème “Civilisation noire et Église catholique”. En 1968, Alioune Diop réussit à régler le différend opposant Senghor au Centre Louis-Joseph Lebret fondé et dirigé par les prêtres dominicains de Dakar. Le 26 juin 1968, en effet, le président sénégalais avait envoyé une lettre au nonce apostolique de Dakar. Cette lettre regrettait le fait que “les pères dominicains, qui ont la direction morale des étudiants catholiques, se laissent diriger par eux dans des entreprises de subversion, téléguidées de Pékin”. Senghor souhaitait donc que les frères prêcheurs quittent le Sénégal avant le 31 juillet 1968 pour ne pas avoir à les expulser. C’est la médiation de Diop, début 1969, qui permit aux Dominicains de continuer leur apostolat dans la capitale sénégalaise.
Marié en 1945 à la Camerounaise Christiane Yandé Diop et père de quatre enfants, Alioune Diop s’éteint, le 2 mai 1980 à Paris. 15 ans après, l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) crée un prix d’édition africaine pour lui rendre hommage. Le prix est décerné tous les deux ans à la Foire internationale du livre et du matériel didactique de Dakar (FILDAK). Sa famille et ses amis célèbrent le centenaire de sa naissance en 2010. Une plaque est apposée sur la maison familiale à Saint-Louis le 10 janvier de la même année. Le 12 janvier, une conférence est organisée par l'Université Gaston Berger de Saint-Louis sur sa vie et son œuvre. Djibril Tamsir Niane, historien guinéen et auteur de ‘Soundjata ou l’épopée mandingue’, est présent à cette conférence. Un colloque, qui devait examiner l’œuvre d’Alioune Diop face aux défis contemporains, rassembla en mai 2010 de nombreuses personnalités parmi lesquelles le président sénégalais Abdoulaye Wade, Wole Soyinka, Cheikh Hamidou Kane, l'ancien directeur général de l'Unesco Amadou-Mahtar M'Bow, la veuve et les filles d'Alioune Diop. Le 17 août 2011, l’Université de Bambey est devenue Université Alioune Diop de Bambey. Cette reconnaissance est d’autant plus méritée que Diop a beaucoup fait pour la culture africaine et le respect de l’homme noir dans le monde. Ce panafricaniste dans l’âme était capable de mettre ensemble intellectuels européens, américains et africains, croyait à la force du dialogue. Si son influence était discrète, elle n’en était pas moins réelle sur les intellectuels africains nés dans les années 1930. C’est le cas de Jean-Marc Ela qui confesse que c’est en lisant Alioune Diop qu’il comprit que le fait d’opposer la tradition à la modernité est peu pertinent dans la mesure où il y a du rationnel et de l’irrationnel en tout être humain, dans toute société, qu’elle soit moderne ou traditionnelle. Ela ajoute que c’est de cette vision qu’il s’est inspiré pour écrire ‘L’Afrique à l’ère du savoir : science, société et pouvoir’ (Paris, L’Harmattan, 2006), ouvrage où il appelle les nouvelles générations de chercheurs africains à relever le défi de “réinventer la science pour participer à la construction des sociétés où l’être humain peut s’épanouir dans toutes les dimensions de son existence”.
Grâce à l’ouverture d’esprit d’Alioune Diop, une qualité que lui reconnaissent ceux qui l’ont côtoyé, le premier numéro de la revue Présence africaine bénéficia de la contribution de Jean-Paul Sartre, Albert Camus, Georges Balandier, Théodore Monod…
Au total, le fondateur de “Présence Africaine” (revue et maison d’édition) fut un grand défenseur de la culture africaine à une époque où, en Occident, des esprits racistes et intellectuellement limités soutenaient sans preuves que les Noirs n’avaient rien inventé, qu’ils n’avaient ni histoire, ni culture, ni philosophie. Pour déconstruire ces mensonges et réhabiliter le continent noir, Diop a eu la bonne idée et l’audace de créer un espace pour que ceux qui pensaient comme lui puissent raconter la vraie histoire des Noirs. S’il a fait un grand bien à l’Afrique, c’est avant tout celui-là. J’ai même envie de dire que c’est avec lui et par lui que tout a commencé. Comme le dit joliment Mongo Beti, il “restera celui qui a permis aux Noirs de s’exprimer. Sans cet outil qu’il a forgé, nous serions demeurés ce que nous avons toujours été : des muets”.
par Mamadou Diallo
QUAND LA DIGNITÉ OUBLIE DE NOUS GOUVERNER
Le Sénégal ne doit pas être un théâtre de boulevard où la politique n’est que comédie, où l’on alterne tous les rôles, des plus drôles aux plus dramatiques
Le Sénégal est en proie à une crise de bêtise, de crédulité et de bestialité trop évidente. La vérité est trop sévère. Nous pouvons affirmer sans crainte d’être démenti que le refus de dépassement s’éloigne, la rigueur s’affaisse, le temps de l’effort et de la réflexion s’amenuisent, l’écoute républicaine s’efface au profit de l’agitation permanente.
La prolifération de la violence verbale et décisionnelle, comportementale et physique a fini par installer le désordre dans l’espace public et au sein de nos institutions.
Le spectacle de l’installation de la XIVème législature est surréaliste. Elire un Président de l’Assemblée nationale sous la surveillance des forces de l’ordre présentes dans l’hémicycle.
Le malaise nous paraît trop réel et sérieux pour que ce texte ne débute par un ton : celui de la gravité. Dès lors, tout silence devient lourd de sens et de conséquences.
Le plus grand malheur qui pourrait donc arriver au Sénégal, à ses institutions et à ses valeurs, du fait des intellectuels, des républicains, serait que par intérêt ou par dégoût, par une sorte de remords et de pusillanimité aussi, d’avoir mal usé de sa liberté, il se laisse doucement enfer- mer dans un silence insensé.
Cette violence nous interpelle furieusement. Elle n’est pas fondatrice. En plus, elle ne peut et ne doit être l’horizon politique de la République.
C’est pourquoi, il nous appartient tous ensemble d’apprécier ce qui se passe chez nous, de prendre la mesure de notre intervention, de notre utilité, de son sens.
Laissons les fioritures qui masqueraient la vérité pour nommer les choses. Nous avons choisi le pari de l’aristocratique pour le plaisir de déplaire. Simplement pour ne pas juger en amateur. Nous pointerons du doigt les responsabilités tant au niveau de la majorité que de l’opposition.
La normalité démocratique, l’écoute républicaine, la discussion avant l’action, les considérations plutôt que le mépris, une série d’exigences et de principes jetée aux orties…
Il y a une dégradation constante de la politesse singulière et de l’urbanité collective. Le peuple hurle son indignation : « je ne reconnais plus le Sénégal ». Il est aujourd’hui réduit à vomir son zénith de dédain.
Le Sénégal ne doit pas être un théâtre de boulevard où la politique n’est que comédie, où l’on alterne tous les rôles, des plus drôles aux plus dramatiques.
Nos compatriotes amusés attendent désormais d’être représentés avec sérieux et respect. Ils ne sauraient se satisfaire trop longtemps d’une irresponsabilité destructrice.
Des individus qui agissent, injurient, énervent, exaspèrent, ne sachant séduire, convaincre, voire transformer des écarts de conduite en stratégie.
Oubliant que les invectives et les injures sont flétrissables. Qu’elles ne servent à rien sauf à dégrader davantage celui qui les professe.
Des personnes profitant de la catastrophe absolue d’une culture de l’excuse qui a fini par gangréner le pays pour détruire son image.
Nous pensons qu’il faut nécessairement mépriser les gens parfois sans avoir le sentiment même avec une bonne conscience, pour s’employer à les réduire à leur place.
Nous devons rester un pays de tempérance avec un peuple doté de ses normes, de ses limites et de ses devoirs.
Devant la violence de leurs dérives ordurières de la liberté d’expression qui nous envahit de jour en jour, on ne doit pas céder aux pires tentatives populistes qui nous ramèneraient au temps de l’obscurantisme.
Les alternances politiques ont accéléré des carrières, souvent offertes sans même attendre le tour des saisons. La conséquence : les hautes fonctions ne reviennent par une règle établie aux premiers de la classe. Les opportunistes, les tacleurs, les empêcheurs de tourner en rond et les énergumènes ont raflé la mise. En guise de reconnaissance, le verbe est devenu haut et sot.
Il est urgent de redresser la barre, d’où la nécessité impérieuse de sortir de ce climat délétère et de placer l’intérêt général au cœur des préoccupations nationales. Fini le bal. Sifflons la fin de la récréation. Car l’opéra devient tragique.
Si nous restons amorphes avec un bandeau sous les yeux, se contentant de parlottes éternelles, notre système de valeurs reculera à l’échelle du continent.
Nos concitoyens n’entendent plus voir l’intérêt et le prestige du Sénégal abîmés par des politiciens de chaque camp. Ils exigent que notre pays garde son rayonnement pour ne jamais cesser d’être en Afrique, un modèle et une exception.
Nous devons donc faire preuve d’une volonté de refus qui introduirait partout la raison avec ce ton qui sonne comme un élément à charge contre ceux qui, sous nos yeux, infantilisent nos institutions, distillent la culture du mépris, de peur et de force.
Contre ceux qui croient être les seuls possesseurs de la plénitude de l’action, absorbant toutes les valeurs dans les siennes. Le peuple sénégalais n’étant là que pour recevoir l’action sans en être en tout point les collaborateurs.
Quelle force peut donc avoir la Nation quand ceux qui la commande, mettent leur vanité et leur agressivité à se séparer d’elle, décidés d’avance à ne pas se soumettre à la volonté générale, piétinant tout pour nous imposer la sédimentation de l’inacceptable dans la République ! Le mépris appelle le mépris.
Ce rééquilibrage, certes chaotique, devrait permettre à l’Assemblée nationale de devenir ce qu’elle a vocation d’être : une instance de discussion, de confrontation et d’amendements.
Au regard du contexte actuel, dominé par une atmosphère conflictuelle et radicale, il ne sera pas facile d’imaginer dans ce chaudron parlementaire, des compromis ou bien des accords de circonstance à bâtir texte par texte entre la majorité et l’opposition.
Le pays est fracturé. Et cette XIVème législature débouche sur une assemblée arc-en-ciel difficilement gouvernable. La coexistence ne sera pas émolliente.
Face à la tripartition de la vie politique (Benno Bokk Yakaar, Yewwi Askan Wi et Wallu), il va falloir s’appliquer. Trouver un dénominateur commun : le consensus pour répondre aux impatiences du pays sans pour autant se renier.
Debout, vigoureusement, le peuple veillera à la préservation du socle républicain.
Si le Sénégal a su jusqu’à maintenant rester un havre de paix, il le doit beaucoup à l’intelligence et à la vigilance de tout un peuple. Ce dernier ne tolérera pas le moindre renoncement à ces principes.
Au-delà des appartenances partisanes et quels que soient les changements de majorité politique, le Sénégal doit rester une idée qui s’incarne dans la volonté de vivre ensemble avec un projet et un destin.
Cela requiert un fonds commun : l’attachement à la communauté nationale, à la survie de la société et des libertés.
Il est encore temps de revenir à une perception d’une République sereine et consensuelle, qui n’a pas peur d’elle-même, ni de son avenir, ni de ses talents, ni de son envergure.
Une République démocratique, vertueuse et humaniste, plus grande, plus forte, plus sûre d’elle-même parce qu’elle aura rassemblé tous les enfants de la Nation.
Mamadou Diallo est avocat au Barreau de Paris, docteur en droit.