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30 novembre 2024
Diaspora
par Sidy Dieye
QUELLES REFORMES POUR SAUVER L’IPRES ET LA CSS ?
Un milliard ici, quelques millions là : les scandales financiers s'enchaînent dans ces structures, piliers de la sécurité sociale sénégalaise. Ces institutions, censées protéger les travailleurs, semblent devenues le terrain de jeu d'intérêts particuliers
Le récent scandale survenu à la Caisse de Sécurité Sociale (C.S.S.) portant sur 1,8 milliard de francs CFA (relayé par les sites seneweb.com le 6 juillet 2024, Dakaractu.com le 9 juillet 2024 et senego.com le 12 juillet 2024), doit provoquer un déclic pour le contrôle effectif de cette institution par l’Etat.
L’on se rappelle la révélation du site leral.net datée du 03 décembre 2021 sur un scandale de 6 milliards 500 millions FCFA pour l’achat d’un logiciel pour fusionner les deux entités (CSS et IPRES) afin d’avoir un système d’informatique unique et simplifié. A l’époque, le Secrétariat exécutif de l’UNSAS avait exigé « l’audit des deux institutions et un contrôle de la Cour des comptes afin de faire la lumière sur le financement du système d’information et les investissements dans l’immobilier. »
En 2018, les retraités avaient dénoncé un détournement de 572 millions de francs CFA au niveau de l’IPRES et demandé au Président de la République d’alors de protéger l’institution en prenant des mesures fortes (relayé par senenews le 08/10/2020).
Nous remarquons que malgré ces manquements récurrents et les alertes répétées des bénéficiaires et parties prenantes, l’administration de ces deux institutions reste préoccupante. La pression syndicale semble l’emporter, comme c’est malheureusement souvent le cas, quand il s’agit d’exigences de transparence et de reddition des comptes.
Les textes de la CSS et de l’IPRES
La CSS et l’IPRES sont régies par la loi N° 75-50 du 03 Avril 1975 relative aux institutions de prévoyance sociale.
En 1991, suite à l’adoption de la loi 91-33 du 26 Juin 1991, la Caisse de Sécurité Sociale change de statut et devient une institution de prévoyance sociale donc un organisme de droit privé chargé d'une mission de service public. Les statuts de la CSS ont été adoptés le 13 février 1992.
Les statuts de l’IPRES eux, ont été adoptés le 26 juillet 1977. A mon avis, ces textes sont complètement en déphasage avec les réalités actuelles en matière de bonne gouvernance, de pilotage des activités, de stratégie et d’instauration de critères de performance dans la gestion de ces institutions.
Il y a lieu de rappeler qu’un comité de pilotage chargé de formuler les orientations stratégiques et politiques du projet de réforme du cadre juridique de la sécurité sociale a été mis en place en 2015 par le ministère du Travail. Il s’agissait, entre autres, « d’innovations en matière de gouvernance des Institutions de Prévoyance sociale, de gestion technique et financière des branches et d’extension de la protection sociale aux travailleurs jusque-là non couverts ».
Les réformes attendues ne sont toujours pas réalisées.
La composition et le fonctionnement du Conseil d’Administration
L’IPRES est administrée par un Conseil d'Administration paritaire composé de vingt-deux (22) membres comprenant des représentants des membres participants et des représentants des membres adhérents.
Au niveau de la CSS, c’est la même configuration qui est retenue en termes de nombre (22) et de représentants.
Il faut noter que l’état employeur a quatre représentants au Conseil d’Administration de chaque institution au titre de la délégation des membres adhérents. Donc, les organisations syndicales ont un contrôle exclusif sur la gestion de ces institutions, notamment sur :
la nature des prestations ;
✓ les modifications du taux des cotisations ;
✓ la désignation des personnes chargées du fonctionnement de l'institution ;
✓ la gestion des ressources en matière d’investissements et de placement.
Le renouvellement des dirigeants, notamment du Président du Conseil d’Administration et des administrateurs n est pas systématique.
Pourtant, l’Etat, à travers la loi citée ci-dessus, notamment dans ses articles 21, 22 et 23, peut prendre des dispositions spécifiques pour garantir une gestion transparente et efficace de ces institutions afin d’éviter un risque systémique en cas de mauvaise gestion.
3. Les réformes
Les textes de ces institutions doivent évoluer pour permettre une bonne gouvernance avec la mise en place d’organes solides et de principes de transparence et d’éthique. Il s’agira de modifier le fonctionnement, la composition de l’Assemblée Générale et du Conseil d’Administration et de mettre en place des Comités spécialisés avec des compétences et expertises diversifiées, notamment :
Comité d’Ethique et de déontologie ;
❑ Comité d’Audit ;
❑ Comité de Sélection et de Rémunérations ;
❑ Comité d’Investissements.
En outre, un système d’évaluation des dirigeants et du Conseil d’Administration doit être mis en place et assuré par un organe indépendant.
Les réformes de ces institutions doivent toucher notamment :
✓ les conditions d’une protection sociale solide aux profits des travailleurs ;
✓ les modes d'admission et d'exclusion des membres ;
les obligations de toutes les parties prenantes ;
✓ le mode de constitution de l'assemblée générale et les conditions de vote ;
✓ la composition et le fonctionnement du conseil d'administration (mode de cooptation, renouvellement, durée, pouvoirs etc.) ;
✓ les pouvoirs de l’exécutif et le mode de sélection ;
✓ le mode de constitution et de calcul des prestations ;
✓ la constitution et l'emploi des ressources ;
✓ le mode de placement et de retrait des fonds ;
✓ les possibilités d’investissements ;
L’Etat pourrait prendre des dispositions appropriées et urgentes pour assainir et contrôler ces deux institutions avec les décisions majeures ci-après :
L’audit approfondi sur les cinq dernières années, avec un accent particulier sur les acquisitions immobilières, les placements, l’investissement dans les nouvelles technologies, la gestion des ressources humaines etc. ;
La suspension des organes délibérants ;
La mise en place d’une Administration Provisoire ;
La refonte des statuts et règlements intérieurs ;
La revue de la gouvernance : composition, fonctionnement et pouvoirs de l’Assemblée Générale et du Conseil d’Administration, mise en place de Comités spécialisés (Audit, Ethique et Déontologie, Sélection & Rémunérations, Investissements etc.)
Sidy Dieye est spécialiste en gouvernance et stratégie des organisations, Directeur Associé de Axley Bankers Afrique de l’Ouest, ancien Directeur Général de la Banque Islamique de Guinée, membre du MONCAP et Membre fondateur de l’Initiative 2FC.
L'instinct félin de Sonko finira par devenir une faim de félon. Le parrain auréolé de gloire est en apnée, grisé et en même temps frustré. Le compagnonnage est constitué d'activistes plus préoccupés au goût du festin qu'à l'ambition de forger le destin
Au soir du 25 mars 2024, nombreux étaient les Sénégalais surpris par la victoire sans appel, au premier tour de monsieur Bassirou D. Faye, parrainé par Ousmane Sonko, alors frappé par l'inéligibilité. Le scénario surréaliste ressemble aux légendes des héros du Moyen-Âge éprouvés, puis sauvés par les miracles divins.
En effet, de la prison au palais, la conquête de la présidence par la délinquance s'est réalisée à force d'intimidation et provocation, moins par la confrontation des idées et la persuasion. Nos champions gladiateurs dont le noviciat se le disputait à la témérité irrévérencieuse avaient rompu avec les civilités dans une société où le culte de la "kersa"- pudeur, la "sutura - la retenue", entre les "nawle"- citoyen étaient une sorte de code d'honneur non écrit mais intériorisé.
De l'appel à deux cents mille jeunes à rallier pour envahir le palais, aux cris du "gatsa-gatsa" à la substance cannibale, objectif : démembrement corporel du chef de l'Etat à la manière de Samuel Doe, une atmosphère de haine et violence était installée. Le "Mortel Combat" décrété et ses péripéties chaotiques ont entraîné un lot incommensurable de pertes en vies humaines et dégâts matériels que nul acteur politique lucide ne souhaitait voir se poursuivre. Le jeu pluraliste sénégalais n'avait jamais subi auparavant autant d'épreuves mettant en péril son existence. Dans le contexte d'entrée dans une ère pétrolière et gazière, les démons déguisés en sponsors s'adonnaient à la surenchère, instrumentalisant la société "ci-si-vile" et les partis dans le marché de la déstabilisation.
Les tickets d'accès à l'espace public et les primes pour l'agitation permanente étaient donnés aux plus zélés orateurs outranciers. La société entière, tétanisée par les vagues successives d'attaques à la vie des personnes et la destruction des biens se lassait, doutant ainsi de la capacité de l'Etat à assurer le rôle régalien de protection des citoyens. Les déclarations de reprise en main étaient à chaque fois rangées dans les tiroirs du "massalaha", renvoyées aux dialogues à format festif.
Les décisions de l'autorité de l'Etat visant à mettre fin à l'existence des milices privées et aux passe-droits illégalement octroyés à certains groupes religieux et politiques ne sont pas souvent suivies d'effet.
Les reculs du pouvoir devant une violence organisée et coordonnée des groupes clairement identifiés accentuaient la défiance à l'autorité de l'Etat. L'autorité avait auparavant sévi avec rigueur à l'encontre des personnalités plus puissantes sans perdre cet appui de la population. L'ancien président mesurait les risques de dérives attachées à la réaction des forces de sécurité. La crainte du débordement ouvrant les portes aux pires mésaventures habitait les Sénégalais.
Aucune initiative consenduelle ne pouvait pacifier l'espace politique, largement pollué par les discours démagogiques, subversifs. Les voies du parrainage par voix se confondaient aux choix du partage des parts de la proie électorale. À l'insu de tous les acteurs majeurs et mineurs, les parrains épuisés par les bras de fer coûteux devaient se retrouver autour de la table en vue de négocier une solution de sortie de la guerre qui permette à chacun de sauver la face.
C'est le salaire de la peur qui a prévalu et précipité l'issue de cette longue crise, résolue par combines opaques à l'insu de la société et les acteurs politiques. Au nombre des protagonistes de la "Camorra" politicienne durant cette période critique, se distinguent deux parrains : les présidents Macky Sall et Ousmane Sonko. Il y a certes, les significatifs acteurs caporaux pour emprunter le langage des groupes mafieux. Toutes les instances régulières des partis et coalitions étaient tenus à l'écart de l'entente dont le contenu n'est pas encore connu.
Retenons seulement que ces jeux d'ombre ont permis à notre pays de surmonter une étape dangereuse de son histoire ; accepter aussi que ces décisions engageant le destin de la Nation et leur avenir propre dans un moment si crucial, ne pouvait pas se concrétiser dans un cadre traditionnel. Ce qui est un signe de déficit de notre culture démocratique. Les rapports de forces déterminant l'issue de tout affrontement, c'est au cours d'un entretien avec la presse, le président Macky Sall avait ouvert un pan de ce qui pouvait survenir en défaveur de sa coalition. ll faisait allusion à cette éventualité, la prise en compte de forces organisées, sans dévoiler l'identité ni sa relation à elles. La mise en garde du président Sall aux militants et alliés allait au-delà du jeu démocratique, tel qu'il pouvait être conçu dans un État de droit.
Le dialogue était bien noué entre les irréductibles adversaires. Les répétitifs événements tragiques ne pouvaient pas se reproduire sans de sérieux chocs pouvant affecter la cohésion nationale. Sans doute, le plan initial des deux parrains s'est heurté à la décision du Conseil Constitutionnel. Mais le rapprochement des protagonistes a été une intelligente victoire de la démocratie. Comme nul ne peut se prévaloir du génie divin, il a décidé que c'était les poulains qui seraient les porteurs du destin de la Nation.
Le président Diomaye lui-même, a dit avoir appelé le fils du président sortant pour des considérations humanitaires ; et d'ouverture vers une sortie négociée. Test de solidité par bouleversement social inouï dans une succession au très convoité fauteuil présidentiel, le Sénégal sort renforcé malgré les combinaisons politiciennes. L'esprit rationnel ne pouvait prédire ou s'aventurer à parier sur l'actuel locataire du palais.
Enfin, le frêle sérére à la silhouette fuyante, la voix fluette porté par Rog Sen, il tenait son balai tiré de la forêt sacrée, pour dissiper les "safara" des prédicateurs aux longs chapelets. Le candidat, ancien Premier ministre, Amadou Ba, était le grand favori des faux fabriquants de destin. Ignorant la réalité des mic-macs de l'arène politique, le boy Dakar, enfant du génie de l'océan, n'avait pas fait son "ndeup" pour une récolte des haricots.
Il semblait avoir foi plus à l'administration qu'à ces jeunes "jakartamen" et étudiants passés au lavage des cerveaux de la loge populiste. Le Sénégal peut être débaptisé : de pays de la "Teranga" pour celui des "millions de charlatans". Objectivement, le résultat de cette compétition électorale était connue des protagonistes. La coalition la plus durable de notre histoire politique, solide qu'elle soit, ne pouvait faire face à une conspiration aussi grotesque.
Monsieur Bassirou Jomaay Diakhar Faye est président de la République. Sorti de l'anonymat, il était inconnu de l'écrasante majorité des citoyens à quelques mois du scrutin. Mais qu'à cela ne tienne, il est notre président à tous, même s'il le refuse. Pour la première fois dans l'histoire des chefs d'Etat, encore le Sénégal sort vainqueur de manière inédite de la crise.
Notre président Bassirou Diomaye Diakhare, "mu wara jaxaan" Faye a séduit les Sénégalais par l'humilité et la politesse. Il a dérouté tous les compatriotes en invitant son Premier ministre à "lorgner son fauteuil". La globalité des citoyens apprécient positivement le plus jeune leader du continent dont l'image correspond au substrat de nos socio-cultures : compassion et respect aux anciens. Apparemment du leadership nain, né de l'échec du calcul du parrain, il a à sa disposition une écurie composée des combattants de longue haleine qui ont blanchi sous le harnais, dont son propre oncle et homonyme, les Dialo Diop, Alla Kane, Mao Wane, etc. Des cadres réputés compétents tels que : Mary Teuw Niane, Ahamadou Al Amine Lo et Oumar Samba Ba sont nommés à des postes clés, ce qui semblait un gage de pérennisation du principe de continuité de l'Etat. Mêmes si les figures repoussoires, les "has been" de la trempe de Mme Aminata Mbodj et Habib Sy,anciens ministres sous le président Wade pouvaient modérer les élans de renouveau du personnel politique.
Le duo gagnant au sein de l'executif pourrait bien fonctionner si les deux personnalités savaient, chacune les obligations de sa charge : le premier, son domaine réservé, le second ses missions déléguées.
Sonko, par contre se dévoile de jour en jour en personnage intempestif, bravant tout, se mêlant de tout et ne laissant point l'espace à personne. Pressé, il l'est, dans l'ignorance de la psychologie sociale.
Chez nous, une amitié n'est réelle et sincère que lorsqu'elle se nourrie du respect mutuel et tire sa substance de ce principe religieux :" Aimer pour son prochain, ce que l'on aime pour soi-même.
L'amitié du cheval et du cavalier ne peut pas faire long feu à l'épreuve du pouvoir. Le proverbe africain dit qu'à beau aller au puits, le canari se brise. L'instinct félin de Sonko finira par devenir une faim de félon. Le parrain auréolé de gloire, est en apnée définitive, grisé et en même temps frustré. Le chef politique n'arrive pas à faire la distinction entre l'État et le parti. Diomaye peut être Sonko et Sonko Diomaye ; mais Sonko ressemble à Poutine.
Affronter l'arrogance et les écarts d'un Premier ministre qu'il connaît mieux que quiconque, capable de lancer sa nébuleuse d'insolents de l'internet contre le pouvoir, invite à être prudent.
Le réveil sera brutal pour l'opposant éternel s'il sous-estime la force d'un chef d'Etat qui lui voue encore tous les égards. Le berger finira par abandonner le bélier égaré pour s'occuper de ce qui reste de son troupeau.
Les jeunes sénégalais découvrent de plus en plus le visage de celui qui les faisait rêver d'un État impartial, une justice équitable. Il se révèle de jour en jour, un revanchard, dont la tonalité despotique jure avec la tolérance qui doit apaiser la vie démocratique. La tentative de domestication des pouvoirs législatif et judiciaire est à tous égards une agression de la Constitution. Chaque alternance au Sénégal, ses espérances déçues, les réalisations mal perçues par une population très jeune et pressée, sans mémoire.
La troisième alternance coïncide avec l'irruption des demandes spontanées. Ce n'est pas un éveil des consciences mais l'approfondissement de la participation citoyenne. Le gain par la manipulation est très rentable, le populisme s'accommode du manque d'éducation des acteurs politiques. La promesse de rupture faite par les nouveaux tenants du pouvoir, concernant les appels à candida-ture et autres, vont vite passer de mode car le compagnonnage est constitué de buzzards, activistes plus préoccupés au goût du festin qu'à l'ambition de forger le destin.
Les meilleures intentions du leader politique glissent et se dissipent par la légèreté du compagnonnage. L'éducation citoyenne est la clé du développement pour tout gouvernant engagé à tirer son peuple vers le haut. Sous ce registre, les actions sur le terrain, mobilisant les populations constituent une source importante de motivation.
Le jeune président BDF devra, de la manière la plus élégante et courageuse assumer la plénitude de sa fonction en apaisant les cœurs et les esprits. Respecter et faire respecter les normes d'une administration impartiale,transparente. Le panafricanisme rationnel repose sur la prise en compte de la réalité continentale, savoir que les pays, les peuples n'évoluent pas à un même rythme.
Il faut agir sur les axes d'intégration arrivés à maturité et non forger les convergences fictives sur de réelles antagonismes. Les pseudos panafricains ont tout faux en fustigeant la marche de la démocratie auSénégal alors qu'ils sont incapables de lutter pour des avancées démocratiques face au pouvoir mi-centenaire de Biya au Cameroun, encore moins essayer de régénérer l'héritage des martyrs tels Félix Moumié et Ruben Um Nyobe. En d'autres termes, le rêve du panafricanisme ne se réalisera qu'à la condition que chaque démocrate balaie d'abord le devant de sa porte. La réussite de la politique intérieure est ce qui permet de gagner une écoute objective à côté des frères du continent.
C'est par l'obtention des résultats palpables que l'on peut formuler les offres crédibles aux populations du continent. En lieu place du "Projet mystique", la Coalition Diomaye Président devrait sans complexe s'approprier le PSE en y intégrant les conclusions des Assises nationales. En conclusion, nous constatons le président Diomaye Faye bien entré dans la fonction, s'élevant de jour en jour à la qualité d'homme d'Etat ; ce qui est rassurant pour le Sénégal. Par contre, c'est inquiétant et il est regrettable de le dire : son mentor et ami n'évoluera pas, car collé à son péché originel de contestataire non révolutionnaire, combinard, dissimulateur, manipulateur.
Dis-moi qui tu hantes, je te dirai qui tu es. La visite du Premier ministre à son collègue malien Choguel Maiga a prouvé qu'il n'est pas prêt à se muer en homme d'Etat. Comment comprendre que le Premier ministre ayant mangé à tous les râteliers des régimes militaires au Mali et en voie d'être limogé pour fraude sur le cumul de salaires de DG et ministres, dénigre systématiquement devant l'invité officiel, la première institution du pays sans qu'il ne pipe un mot de l'ingérence déplacée.
Compatriotes patriotes ! Méditez la parole du président Joe Biden, cette semaine à Chicago à la Convention des démocrates, je cite : "You can't say you love your country only when you win" (tu ne peux pas prétendre aimer ton pays, quand c'est seulement lorsque tu gagnes). L'Afrique vous regarde, cher fils de NDiaganiao. L'Histoire avance masquée avait coutume de dire le vieux Maodo Mamadou Dia. Votre posture, vous ne la devez à personne qu'à Dieu et au peuple. Ecoutez votre foi et votre conscience et non les regards inquisiteurs des critiques à la gratitude. Osez les ruptures d'avec tout ce qui retient ou minore votre, je dis notre vaste potentiel de brillance sur les plans économique, politique, culturel, scientifique et diplomatique. Votre combat pour tous sera mené par tous.
Le Sénégal a besoin de serviteur et non de chef instigateur de conflits inutiles. La cohésion nationale est au prix de la reconnaissance des diversités de courants, d'opinions et tolérance des oppositions. Une nette recomposition des pôles politiques se dessine au Sénégal. Les plus significatives seront au nombre de quatre :
1-Les partis de la Coalition Diomaye Président ;
2-La retrouvaille dite "bloc liberal" qui semble regrouper les transfuges du PDS et l'APR, ce qui consacre la mort de la coalition Benno Bokk Yakaar.
3-Les membres de la "Nouvelle Responsabilité" autour d’Amadou Ba,
4-Les forces composées de figures qui émergent par leur hardiesse et courage en face du gouvernement. Elles ont nom : Bougane Gueye Dani, Thierno Bocoum, Thierno Alassane Sall, Anta Babacar Ngom, PUR, les partis traditionnels : PS, AFP, PIT, LD auront le choix entre la création d'un pôle de gauche ou se liguer avec les forces citées ci-dessus.
Le processus de mutation de la classe politique s'accélère en vue du prochain scrutin législatif. Les dénominations et slogans ne vont pas fondamentalement changer.
Je termine avec cette prière de Marc-Aurèle, note qui doit inspirer tous ceux qui s'engagent dans la lutte pour le progrès social :"Que la force me soit donnée de supporter ce qui ne peut être changé et le courage de changer ce qui peut l'être mais aussi la sagesse de distinguer l'un de l'autre".
Makkane est ancien ministre-conseiller, chef du bureau économique de l’ambassade du Sénégal à Washington, poète-écrivain.
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L'HISTOIRE AU SERVICE DE LA VÉRITÉ
Pour l'historien Mamadou Diouf, la tragédie de Thiaroye 44 est une clé pour décrypter les mécanismes de la domination coloniale, remettre en question l'identité sénégalaise actuelle et nourrir les ambitions souverainistes du pays
Mercredi 21 août 2024, la RTS a accueilli l'éminent historien Mamadou Diouf, professeur à l'université Columbia de New York, pour une interview sur l'avenir du Sénégal et son passé colonial. Au cœur de cet entretien : la commission chargée d'organiser le 80e anniversaire du massacre de Thiaroye, que Diouf préside.
"Thiaroye 44 n'est pas qu'un simple fait historique, c'est un tournant dans la conscience africaine", a déclaré Diouf. Cette tragédie, où des tirailleurs sénégalais furent massacrés par l'armée française en 1944, cristallise selon lui les contradictions de l'empire colonial français et l'éveil des revendications africaines.
La commission, mise en place par le gouvernement, a pour mission de "faire la lumière sur ce passé pour mieux éclairer notre avenir", explique l'historien. Elle rassemblera preuves, témoignages et documents pour établir enfin la vérité sur ces événements longtemps occultés.
Pour Diouf, l'étude de Thiaroye est cruciale à plusieurs titres. D'abord, elle permet de comprendre les mécanismes de la domination coloniale et ses séquelles. Ensuite, elle offre un miroir à la société sénégalaise actuelle, questionnant son rapport à l'histoire et à la France. Enfin, elle s'inscrit dans une démarche plus large de souveraineté et de panafricanisme, chère au nouveau gouvernement.
"En revisitant Thiaroye, nous ne cherchons pas la revanche, mais la justice et la vérité", insiste le professeur. "C'est un acte politique qui éclaire le chemin que nous avons choisi : celui de la souveraineté et de l'unité africaine."
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UN ÎLOT DE PAIX INTERCONFESSIONNELLE
Joal-Fadiouth, avec ses 8000 habitants, est un laboratoire de tolérance et de respect mutuel. Dans ce lieu, les différences de foi ne sont pas des barrières, mais des ponts. Chrétiens et musulmans célèbrent ensemble la vie et partagent leur dernier repos
Au large des côtes sénégalaises, l'île de Joal-Fadiouth brille comme un phare d'espoir. Ce petit paradis de 8000 âmes incarne une vision rare du vivre-ensemble, où musulmans et chrétiens tissent une tapisserie sociale harmonieuse.
Le symbole le plus marquant de cette union ? Un cimetière mixte, où les défunts de toutes confessions reposent côte à côte, témoignant d'une fraternité qui transcende la mort. Dans les rues parsemées de coquillages, les fêtes religieuses sont célébrées collectivement, effaçant les frontières entre les communautés.
Pourtant, ce havre de paix n'est pas à l'abri des remous politiques. Les débats récents sur le port du voile à l'école ont fait trembler les fondements de cette entente cordiale. Les habitants, conscients de la fragilité de leur trésor, s'efforcent de préserver leur modèle de coexistence.
Fadiout incarne ainsi un défi audacieux : celui de maintenir vivace un idéal de tolérance dans un pays laïc mais majoritairement musulman.
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ATEPA RIPOSTE À MADIAMBAL
L'architecte annonce la création d'un mouvement citoyen baptisé "AMOR" (Amis du Monument de la Renaissance), citant "des individus sans foi ni loi" qui tenteraient d'imposer leur volonté grâce à des "moyens financiers douteux"
Dans un rebondissement inattendu de l'affaire opposant l'architecte Pierre Goudiaby Atepa au journaliste Madiambal Diagne, le premier a lancé une contre-offensive. Devant le siège de l'UNESCO à Paris, l'architecte a annoncé la création d'un mouvement citoyen baptisé "AMOR" (Amis du Monument de la Renaissance).
Cette initiative survient quelques jours après les accusations de Diagne, affirmant qu'Atepa aurait menacé de "casser" son immeuble en construction aux Mamelles. L'architecte, sans évoquer directement ces allégations, a appelé dans sa vidéo, à une mobilisation pour "sauvegarder l'environnement" autour du Monument de la Renaissance.
Il a notamment évoqué "des individus sans foi ni loi" qui tenteraient d'imposer leur volonté grâce à des "moyens financiers douteux". Cette déclaration semble faire écho aux propos de Diagne, qui évoquait une possible instrumentalisation des autorités pour entraver ses projets immobiliers.
lettre d'amérique, par rama yade
INDUSTRIES CULTURELLES CRÉATIVES, LE SOFT POWER AFRICAIN
Du cinéma à la mode, en passant par la musique et les arts visuels, l'Afrique affirme son identité et change le narratif global sur le continent
Le soft power est le nouveau hard power. Selon l’Unesco, le secteur créatif pourrait créer 20 millions d’emplois et générer 20 milliards de dollars de revenus par an en Afrique. Le continent a besoin de la création de 18 millions d’emplois par an pour combler le déficit d’emploi qui ne cesse de s’aggraver suite à l’explosion démographique. Les industries culturelles et créatives, devenant un marché économique en plein essor, pourraient y prendre une part précieuse. Le patrimoine culturel africain était déjà partout, influençant le blues, la salsa, le rap, le reggae et même le disco. Son influence était visible dans la peinture de Picasso, les pyramides d’Egypte et les sculptures de la Grèce antique. Ce qui est plus nouveau, c’est la reconnaissance croissante du public. Une nouvelle visibilité et des opportunités économiques émergent.
Aux sources de l’essor des industries culturelles et créatives
Deux phénomènes sont à l’origine de cette révolution. D’abord, la croissance démographique sur un continent qui, en engageant le doublement de sa population d’ici 2050, voit arriver une classe moyenne plus éduquée, consommatrice, et surtout une jeunesse innovante dont les moins de 15 ans constituent 40% de la population africaine. Nés avec l’internet, le mobile et les plateformes telles qu’Instagram, Twitter, TikTok, Youtube, Facebook, et Snapchat où ils peuvent euxmêmes créer et promouvoir leurs propres contenus, ces jeunes ne regardent pas le monde de la même manière que les générations précédentes.
Ensuite, la plus grande révolution digitale de ces vingt dernières années qui s’est produite en Afrique s’est traduite par une croissance exponentielle du marché de la téléphonie mobile. Selon l’Association mondiale des opérateurs et constructeurs de téléphonie mobile (Gsma), le taux d’adoption des smartphones devrait passer de 51 à 87% entre 2022 et 2030, avec un quadruplement du trafic des données mobiles en Afrique subsaharienne. Ces changements s’opèrent dans tous les secteurs, dans la banque à distance, les cryptomonnaies, les paiements et, bien sûr, l’arrivée de l’Intelligence artificielle accélèrent ces phénomènes. La culture de l’entrepreneuriat, déjà présente en Afrique, s’en trouve considérablement encouragée à travers le phénomène croissant des startups.
La conjonction de ce double phénomène démographique et technologique a fortement impacté le secteur culturel.
Nollywood plus fort qu’Hollywood
Prenons l’exemple du Nigeria, qui est devenu la plus grande économie africaine après l’inclusion de Nollywood dans la mesure de son Pib en 2016. Aujourd’hui, le marché du divertissement au Nigeria est devenu l’industrie culturelle la plus dynamique au monde. Chaque année, 150 millions de téléspectateurs regardent plus de 2500 films produits au Nigeria, dépassant de loin Hollywood si bien que, selon la Nigerian Entertainment Conference, le marché du divertissement et des médias du Nigeria devrait atteindre un chiffre d’affaires de 14, 82 milliards de dollars en 2025, contre 4 milliards de dollars de revenus enregistrés en 2013. Dans les cinq années qui viennent, l’organisation annonce une croissance annuelle de 16, 5% du secteur grâce à une connectivité en hausse et une hausse des abonnés.
Et il n’y a pas que Nollywood : le nombre de sociétés de production au Kenya, en Afrique du Sud, au Maroc, en Côte d’Ivoire n’a jamais été aussi important. Au Sénégal, à quelques semaines de la Biennale de Dakar, le succès se renforce à chaque édition avec, selon les organisateurs, «ses 250 000 visiteurs dont plus de 50 000 proviennent de l’étranger, 11 000 professionnels, plus de 3000 créateurs, artistes de la matière, manufactures, galeries, maisons d’excellence, fondations et institutions», et que le New York Times qualifiait de «l’un des plus grands -et certainement le plus vibrant événements d’art contemporain sur le continent africain» dans un article de juin 2022.
Comme souvent, en particulier dans un continent où les enjeux de développement sont massifs, artistes et créateurs déploient une réflexion qui, faisant écho aux défis de l’époque, évoque le changement climatique, la résolution des conflits ou encore les questions de gouvernance.
Un nouveau récit africain
Avec la mode, le cinéma, les arts visuels, les sites culturels, les médias, le design, les jeux vidéo, la musique, les livres et même le sport, les industries créatives changent le récit africain. Au-delà des opportunités économiques croissantes, c’est sans doute leur plus grande force. Enfin, les Africains parlent d’eux-mêmes, décrivent leur réalité comme dans la série à succès Maîtresse d’un homme marié et leur vision de l’avenir avec le joyeux et futuriste Iwaju. La diaspora a aussi un rôle important dans ce nouveau narratif partagé avec le reste du monde, à l’image du succès mondial de Black Panther : Wakanda Forever, qui mettait en vedette des acteurs africains primés à Hollywood comme Lupita N’yongo ou Daniel Kaluuya. Dans ce film, les Dora Milaje rappelaient les Amazones du Benin, les boubous violet des membres de la famille royale la tenue des Touaregs et la coiffure de Ramonda celle des femmes Mangbetu du Congo.
Ce secteur sert également à amener le monde en Afrique. Fidèle à une vieille tradition qui a vu les films de Hitchcock jusqu’à la série Mission impossible y être tournés, le Maroc, par exemple, accueille de nombreux studios de cinéma hollywoodiens à Casablanca et Ouarzazate, et su faire de ses événements culturels comme le Marathon des Sables ou le Festival de Fez des musiques sacrées du monde, des rendez-vous internationaux.
Entraînées par ces succès, les plateformes occidentales ont considérablement enrichi leurs portefeuilles africains : la comédie musicale Black is King, produite par Disney, célébration de l’Afrique par Beyonce, produite par Disney, tandis que Netflix et Amazon développent à la fois des licences et du contenu original de sociétés de production locales africaines ayant l’ambition d’une distribution mondiale. Les services de streaming africains sont également en plein essor, comme Boomplay et ses 60 millions. Côté luxe, des maisons telles que Dior et Louis Vuitton, qui se sont toujours inspirées des créations africaines, organisent des défilés dans les capitales africaines désormais. Les marques de prêt-àporter comme H&M et Zara intègrent des inspirations africaines aussi. Les Fashion Week, de Johannesburg à Lagos, sont fréquentées par des célébrités internationales. Dans l’industrie musicale, le lauréat nigérian d’un Grammy Award, Burna Boy, a été le premier artiste africain à faire salle comble dans un stade américain après la sortie de son album en 2022, et le premier artiste nigérian tête d’affiche du Madison Square Garden. Il a été nommé parmi les 100 personnes les plus influentes de 2024 par le Time.
Des artistes africains laissés à eux-mêmes
Cependant, en dehors de quelques artistes africains cotés, les artistes africains ne vivent pas bien de leurs créations. Ils sont laissés à eux-mêmes. Pour des Irma Stern, Marlene Dumas, Mahmoud Said, William Kentridge, y compris des crypto-artistes reconnus comme la Franco-Sénégalaise Delphine Diallo ou le Nigérian Osinachi qui vend ses NFT à plus de 200 000 dollars chez Christie’s, combien d’artistes africains, peintres, sculpteurs, danseurs ne bénéficient d’aucune reconnaissance et vivent même dans la pauvreté ?
Un coup d’œil rapide sur le prix auquel se vendent les peintures des artistes dans les rues des capitales africaines pour réaliser à quel point leur travail ne fait l’objet d’aucune reconnaissance, et d’abord financière. Dans la musique, les artistes africains tirent beaucoup moins de valeur de leurs créations que leurs homologues occidentaux. Par exemple, sur Spotify, alors que le paiement moyen pour 1000 streams aux Etats-Unis se situe entre 5 et 10 dollars, il est inférieur à 0, 5 dollar dans les pays africains. Malgré quelques événements phares tels que le Fespaco de Ouagadougou et la Biennale de Dakar qui, elle-même, a dû être reportée cette année pour des problèmes de financement, les industries créatives africaines ne sont pas beaucoup soutenues par les gouvernements en Afrique : seulement 1, 1% du Pib africain leur est consacré et elles constituent moins d’1% de l’économie créative mondiale évaluée à 2, 2 milliards de dollars. La plupart des gouvernements africains n’ont pas ratifié la Charte pour la renaissance culturelle africaine adoptée en 2006, dans le but de préserver et de promouvoir le patrimoine culturel africain. Les quelques bourses qui existent proviennent des instituts français, Goethe, ou du programme Acp-Union européenne. Les banques d’Etat chinoises sont de plus en plus impliquées, participant au financement de l’Opéra d’Alger et du Palais des Congrès de Yaoundé. Du côté africain, il n’y a guère que la Banque panafricaine d’import-export (Afreximbank) qui a pris la première initiative d’envergure avec une enveloppe de 500 millions de dollars destinée à soutenir les industries créatives et culturelles en décembre 2020. Malgré quelques déclarations d’intention regroupées dans l’aspiration numéro 5 de l’Agenda de l’Union africaine promettant «une Afrique dotée d’une forte identité culturelle, d’un patrimoine commun et de valeurs et d’éthique partagées» et quelques projets à concrétiser comme le Grand Musée de l’Afrique à Alger, l’organisation panafricaine n’a pas encore pu faire coïncider ses ambitions avec les engagements constatés de la part des Etats.
L’enjeu crucial de la propriété intellectuelle
Les besoins sont énormes : le manque d’infrastructures (espaces de production, salles de cinéma et de concerts), le faible nombre de maisons d’édition et la faible capacité de formation (administrateurs, managers, techniciens, experts numériques etc.). Néanmoins, la vulnérabilité des industries créatives africaines n’est pas que financière, elle est aussi légale et tient à la faiblesse de la réglementation en matière de droits de propriété intellectuelle. Cette question affecte considérablement la protection des créateurs, notamment les droits d’auteur, la négociation des contrats, la production, la distribution et l’accès aux marchés internationaux et, au final, la rentabilité financière des créations.
De nombreuses institutions financières et investisseurs n’étant pas familiers du secteur créatif, ils ne comprennent pas comment évaluer et tarifer les risques, ce qui rend l’accès au capital difficile et coûteux malgré les opportunités pour les investisseurs. En plus de cela, la piraterie, les pratiques de contrebande et le trafic illicite rendent le marché africain difficile à lire. D’une certaine manière, ces enjeux font écho à la question de la restitution des œuvres d’art africain spoliées. Il s’agit encore et toujours d’avoir la pleine souveraineté sur la création africaine.
Une réflexion stratégique sur les droits de propriété intellectuelle est la première mesure urgente à laquelle les Etats devraient s’atteler. La monétisation d’un secteur économiquement prometteur est la seconde. De l’économie du textile au tourisme, ce sont des chaînes de valeur qu’il convient de créer tout en démocratisant l’accès à cette industrie. Le terreau est fertile : en Côte d’Ivoire, les femmes possèdent 80% de l’économie du textile.
L’Afrique a toujours été une terre de création dont l’influence a essaimé partout, mais sans la reconnaissance qui aurait dû aller avec. Le bouleversement technologique actuel, en redistribuant les cartes, offre une occasion unique aux artistes de briller sans se cantonner aux limites de leurs frontières nationales. Cette révolution culturelle est en train de modifier considérablement le paysage créatif mondial. Il revient désormais aux Etats de prendre les mesures règlementaires qui s’imposent pour faire de cette industrie une véritable politique publique et même un puissant outil de politique étrangère.
Rama Yade est Directrice Afrique Atlantic Council.
par Yamar Samb et Ousmane Mané Kane
LE 26 AOÛT 1958, VALDIODIO NDIAYE ET L’ACTE 1 DE L’INDÉPENDANCE DU SÉNÉGAL
EXCLUSIF SENEPLUS - Son discours face à Gaulle, empreint de courage et de conviction, a marqué un tournant dans la lutte pour la souveraineté nationale. Il est temps de réhabiliter la mémoire de cet homme d’État qui a osé dire « non » au colon
Yamar Samb et Ousmane Mané Kane |
Publication 21/08/2024
L’œuvre de Valdiodio Ndiaye très décisive, pour l’indépendance du Sénégal mérite une place privilégiée dans les annales de l’histoire des luttes pour la décolonisation des peuples d’Afrique et l’accession des États concernés à la souveraineté internationale. Le 26 août marque l’anniversaire de son discours mémorable qu’il eût à prononcer devant le Général De Gaulle, pour défendre l’opposition du Sénégal au projet de Communauté française qui devait être approuvé par le référendum du 28 septembre 1958.
À la veille de l’indépendance, l’avant-projet constitutionnel du référendum a créé un désaccord entre les deux futurs chefs du premier exécutif de l’État du Sénégal indépendant, Mamadou Dia, qui deviendra le Premier ministre, chef du gouvernement et Léopold Sédar Senghor, président de la République[1]. Le premier souhaite la rupture avec l’ancienne puissance coloniale, alors que le second propose le maintien du Sénégal dans une communauté avec la France, autrement dit une « indépendance immédiate mais pas immédiatement ». Le désaccord entre les deux hommes s’accentuera au lendemain de l’indépendance du Sénégal, en outre, sur la manière de gouverner le pays par un exécutif bicéphale.
Dans ces rapports conflictuels entre Mamadou Dia et Léopold Sédar Senghor, Valdiodio Ndiaye a été un soutien de taille pour le premier. On peut même remarquer que dans son allocution historique devant le Général De Gaulle, il n’a pas mentionné Léopold Sédar Senghor absent de cette rencontre, alors qu’il s’est donné la peine d’évoquer les motifs d’absence de Mamadou Dia. Il n’est donc point étonnant que Valdiodio Ndiaye soit plus tard co-inculpé avec Mamadou Dia pour tentative de coup d’État contre le président de la République, Léopold Sédar Senghor. Ils seront arrêtés en même temps que trois autres ministres, puis traduits devant la Haute Cour de justice.
En effet, arrivé le moment d’accueillir le Général de Gaulle, les deux hommes qui devaient porter la voix du peuple sénégalais ont brillé par leur absence. Léopold Sédar Senghor est allé passer ses vacances en Normandie comme d’habitude, à une période de l’année où il ne veut pas les manquer. Parti en Suisse pour se soigner, Mamadou Dia y serait retenu pour une cure que ses médecins lui auraient déconseillé d’interrompre. Auraient-ils vraiment pratiqué la politique de la chaise vide ? La réponse à cette question divise les témoins de cette histoire.
Telles sont les péripéties qui ont amené Valdiodio Ndiaye à prononcer son mémorable discours du 26 août 1958 devant le Général de Gaulle, en qualité de ministre de l’intérieur devant assuré l’intérim en l’absence du président du Conseil du gouvernement, Mamadou Dia. L’histoire l’aura à jamais retenu comme étant celui qui a eu le courage d’affronter le Général de Gaulle, pour lui signifier en des termes clairs, la position du peuple sénégalais en faveur du "non" au référendum qui devait se tenir (I). Contrairement à ce que certains pensaient, ce "non" n’avait rien d’irréfléchi, de spontané ou de populiste ; il avait bien un sens dans la pensée de Valdiodio Ndiaye (II).
La défense du "non" au référendum du projet de « Communauté française »
Valdiodio Ndiaye est du nombre des grands artisans de l’indépendance de la République sénégalaise qui n’avaient pas manqué au rendez-vous de l’histoire en étendant leur influence lors de la campagne du "non" relatif au projet de référendum. Son opposition à ce projet (1) s’inscrit en droite ligne avec le mot d’ordre du congrès de Cotonou (2).
L’opposition claire de Valdiodio Ndiaye au projet de « Communauté française »
Depuis la Loi-cadre du 23 juin 1956 et le nouveau statut applicable en 1957, il y avait un régime de semi-autonomie dont l’existence n’avait ni assise souveraine, ni reconnaissance internationale. Son positionnement ne valait que par rapport à la métropole et au sein de l’Afrique occidentale française. Certains leaders africains considèreront cette Loi-cadre comme une supercherie. D’ailleurs, le président d’alors du Conseil du gouvernement sénégalais, Mamadou Dia, dénonçait cette supercherie dans un entretien paru dans l’hebdomadaire Afrique Nouvelle du 8 janvier 1957 en ces termes :
« nous sommes contre les décrets d’application de la Loi-cadre tels que le gouvernement les a préparés […] d’une part, ils n’apportent aucune satisfaction aux Africains qui aspirent à gérer leurs propres affaires, et d'autre part, ils arriveront à désorganiser les services communs et à rendre impossible leur fonctionnement. Il ne s'agit pas d'une décentralisation mais d'une désorganisation. Quant au Conseil de gouvernement, d'après les projets de décrets, il comprend non seulement des membres désignés mais le Gouverneur en est le président et cela nous apparaît inacceptable, alors que nous nous attendions à un véritable exécutif local. »
Valdiodio Ndiaye était au nombre de la frange de l’élite africaine qui voyait le projet de Communauté française comme une volonté inavouée de maintenir la tutelle métropolitaine sur les futurs indépendants États africains.
Les absents les plus présents que furent Léopold Sédar Senghor et Mamadou Dia lors de l’évènement historique pour des raisons encore discutées, n’ont pas empêché Valdiodio Ndiaye de tenir un discours que Mamadou Dia qualifiera plus tard de « raide ». Dans son mémoire, Mamadou Dia, reconnut que Valdiodio Ndiaye, « (…) en accueillant De Gaulle en des termes assez raides, a fait un discours conforme à (ses) positions, celles du "non" au référendum »[2].
Mbaye Jacques Diop quant à lui disait à propos de ce fameux discours « (…) le contenu de chaque mot et la tonalité de chaque phrase avaient été conçus avec habileté et pesés pour exprimer au mieux la persuasion. Ces propos furent prononcés avec un brio et un art oratoire qui traduisaient le talent et la conviction de notre porte-parole. Il était visiblement ému, très conscient de porter la légitime aspiration du peuple sénégalais, voire des peuples d’Afrique » [3].
Valdiodio Ndiaye adressa au Général de Gaulle un discours d’accueil dont certains passages sont entrés dans l’Histoire et demeure d’actualité :
"Nous disons indépendance d’abord et, en nous fixant ce préalable, nous ne faisons qu’interpréter l’aspiration profonde de tous les peuples d’Afrique noire à la reconnaissance de leur personnalité et de leur existence nationale. L’indépendance est un préalable, elle n’est pas une fin en soi. [...] Nous disons indépendance, et nous disons ensuite unité africaine" ».
Une telle déclaration démontre à quel point Valdiodio Ndiaye incarnait la figure de l’anticolonialisme, contrairement à Léopold Sédar Senghor qui manifestait encore un certain attachement à la puissance coloniale et qui aurait promis à de Gaulle un "oui" du Sénégal au référendum. On se souvient des propos louangeurs par lesquels le quotidien de l’extrême droite, l’action française, avait décrit Senghor comme « le type de ces élites indigènes dont la France a le droit d’être fière »[4].
Une position en phase avec le mot d’ordre du congrès de Cotonou
Le congrès de Cotonou tenu du 25 au 27 juillet 1958, auquel avait pris part des leaders sénégalais, aura pour intérêt de dévoiler à la face du monde que l’Afrique française avait la ferme volonté de s’affranchir de tous les complexes coloniaux. Ce faisceau d’énergies individuelles et de volonté collective s’était cristallisé le 26 août 1958 dans ce qui est resté dans l’Histoire comme la « Journée des Pancartes »[5], même si le héros du jour était un certain Valdiodio Ndiaye avec son fameux discours.
Les congressistes de Cotonou perçoivent le projet de "Communauté française" comme une démarche qui s’inscrit de nouveau dans le sillage des sagas de la mythologie de la décolonisation ; un projet qui n’était rien d’autre qu’un réaménagement de l’ordre colonial en y associant des africains relais de la métropole.
À y voir de près, on peut considérer le "non" défendu par Valdiodio Ndiaye, comme une opposition au "oui" porté par des « élites de compromis » défendant une indépendance sous tutelle métropolitaine. Valdiodio Ndiaye était au nombre de ceux qui avaient la conviction que ces élites de compromis, en s’installant à la tête des États africains dont l’indépendance devenait certaine, allaient être les nouvelles garantes de la domination de la puissance coloniale. Il fallait donc se prémunir contre les risques de connivence entre les leaders africains qui prendraient la direction du pouvoir et les autorités métropolitaines qui perpétueraient le projet colonial, après les indépendances, sous d’autres formes. Le héros du 26 août 1958 a su transmettre à de Gaulle, la position du gouvernement du Sénégal conforme aux résolutions du congrès de Cotonou.
L’on peut se souvenir de son discours lorsqu’il déclarait :
« Nous, gouvernement et Assemblée territoriale, sommes tous membres de l’Union progressiste sénégalaise, section sénégalaise du Parti du regroupement africain, donc fidèles aux décisions du congrès de Cotonou ».
Valdiodio Ndiaye, brillant avocat occupant les fonctions de ministre de l’Intérieur au sein du gouvernement territorial et secrétaire général adjoint de l’Union progressiste du Sénégal (UPS), avait déjà affiché clairement sa position sur le projet de « Communauté française » proposée par le gouvernement français. À la différence de Senghor qui était plutôt favorable à une indépendance « retardée » d’après les confessions de Mamadou Dia, Valdiodio Ndiaye avait publiquement marqué son opposition au projet de « Communauté française ».
Valdiodio Ndiaye et son compagnon Mamadou Dia avaient peaufiné leurs idées et stratégie en s’inscrivant dans la logique de leurs précurseurs anticolonialistes.
Le sens du "non" sénégalais dans la pensée de Valdiodio Ndiaye
Le "non" sénégalais avait un sens dans la pensée de Valdiodio Ndiaye. En effet, la fusion du mouvement panafricain anti-impérialiste avec celui de la lutte pour l’indépendance des colonies africaines en un bloc devait mener vers les États-Unis d’Afrique. La richesse de son discours réside dans le fait qu’il exprime avec l’éloquence qui sied les aspirations des peuples africains qui voulaient autant leur indépendance immédiate (1) que leur projet d’unité africaine (2).
L’expression des aspirations africaines à l’indépendance
Le brillant avocat que Valdiodio Ndiaye était, le prédestinait à plaider les causes légitimes exprimées par ses compatriotes et frères africains pour qui, la liberté de s’associer est une chose et le droit de se séparer d’un compagnonnage en est tout aussi une autre. On rapporte que lors de la visite du Général De Gaulle, il n’a pas manqué de transmettre courageusement et fidèlement les aspirations africaines indépendantistes exprimées au sortir du Congrès de Cotonou tenu du 25 au 27 juillet 1958 à travers les trois mots d’ordre ci-après :
1- Indépendance immédiate,
2- Nation fédérale africaine, c'est-à-dire Unité africaine sous forme d’une nation fédérale,
3- Confédération de peuples libres et égaux.
Les peuples africains aspiraient à plus d’autonomie vis-à-vis des puissances étrangères et le combat pour y parvenir demandait, pour le cas du Sénégal, le concours de ses élites et de celui de sa jeunesse. La mise en œuvre des résolutions du congrès de Cotonou demandait de l’organisation et de l’engagement et Valdiodio Ndiaye en avait pris la pleine mesure lorsque qu’il appelait les Sénégalais à une manifestation dans l’ordre et la dignité.
De Gaulle et les officiels à ses côtés affichaient de larges sourires face à l’accueil chaleureux auquel ils ont eu droit à Dakar. Certes, étaient au rendez-vous les drapeaux tricolores, les enfants des écoles, et les costumes traditionnels habillant des « figurants » bienveillants. Mais la rumeur contestataire était tout aussi perceptible, mêlée aux vivats et les couvrant parfois. Ce fond de protestation sonore était ponctué par des slogans indépendantistes très audibles. Le tapage ne s’apaisa pas dans la foule amassée entre l’aéroport et la ville, tout au long du trajet prévu. Par prudence, les autorités préférèrent changer au dernier moment de trajet. Plutôt que de passer par la Médina, les voitures officielles (le général se tenait comme à l’accoutumée dans une limousine décapotée) empruntèrent la corniche.
Tout a été savamment orchestré pour accompagner le discours de Valdiodio Ndiaye avec les actes qui siéent. Mbaye Jacques Diop jugeait l’approche sénégalaise astucieuse dans la mesure où, disait-il : « Elle se fondait sur une complémentarité : aux hommes politiques, notamment ceux déjà en place dans le gouvernement interne, la mission de porter le verbe jusqu’aux plus hautes tribunes. Aux jeunes, une action de terrain qui devrait être la plus visible possible. Les seconds devaient en quelque sorte être le bras armé, dans les rangs du peuple, de notre revendication nationale. Ils soutenaient les premiers »[6]. La stratégie avait bien fonctionné d’autant plus que la présence des jeunes porteurs de pancartes sur lesquelles étaient mentionnées des réclamations pour l’indépendance immédiate n’avait pas laissé le Général de Gaulle sans état d’âme. »
En réponse aux cris de ces jeunes, de Gaulle visiblement énervé lance les paroles ci-dessous demeurées célèbres :
« Je veux dire un mot d’abord, aux porteurs de pancartes. Je veux leur dire ceci : "Ils veulent l’indépendance. Qu’ils la prennent le 28 septembre". Oui, l’indépendance, que les porteurs de pancartes la prennent le 28 septembre prochain. »
La défense du projet d’unité africaine
À Cotonou, les congressistes démontrèrent à quel point la proposition française s’inscrivait en faux avec l’air du temps, et la liberté de se confédérer entre États africains fut leur mot d’ordre. Pas que l’indépendance immédiate des territoires africains sous domination coloniale, le congrès de Cotonou avait préconisé la création des États-Unis d’Afrique conformément à la conférence panafricaine de Manchester du 13 au 21 octobre 1945 dont la résolution affirmait que « les divisions et frontières territoriales artificielles créées par les Puissances impérialistes son des mesures délibérées visant à empêcher l’unité politique des nations ouest-africaines »[7].
À Dakar, l’option pour l’unité africaine sera réitérée par le Mouvement de Libération Nationale (MLN) dans un manifeste signé et publié à la veille de l’accueil du Général de Gaulle. Les signataires du manifeste soutinrent la proposition des « États-Unis d’Afrique Noire comme idéal collectif moteur pour l’ensemble des Africains »[8] et appelèrent à répondre « NON au référendum du général de Gaulle, en hommes libres et fiers »[9].
Pour la France devenue moins hostile à l’indépendance, la nouvelle stratégie devait consister à éviter que les territoires déjà morcelés ne se reconstituent en de vastes structures fédérales dont elle perdrait le contrôle. D’ailleurs, c’est pour cette raison que le Général de Gaulle a soumis aux colonies françaises la proposition d’une autonomie à l’intérieur d’une communauté française.
Valdiodio Ndiaye est un panafricaniste convaincu de la nécessité d’un État fédéral africain. Mais il savait sans doute qu’en prononçant son discours devant le président de la toute puissante France, il prenait un risque à la fois pour sa carrière politique personnelle et pour l’avenir du Sénégal. Il se trouve ainsi pris dans un étau, pas seulement constitué du peuple sénégalais, mais surtout, entre les tenants des résolutions du congrès de Cotonou et la France coloniale hostile au panafricanisme indépendantiste. Toutefois, il a choisi de porter la voix de plusieurs générations de panafricanistes ayant toutes soutenu la création des États-Unis d’Afrique à l’occasion de diverses rencontres tenues en Europe et en Afrique.
Étant du nombre de la frange de l’élite africaine qui partageait l’idée selon laquelle l’indépendance immédiate devait être suivie d’actes tendant vers la réalisation de l’unité africaine pour le salut africain, Valdiodio Ndiaye défendait, non sans conviction, cet idéal d’unité africaine puisque c’en était un. Il semblait comprendre que la concrétisation d’une nation africaine fédérale demandait du temps et que les peuples devaient d’abord aspirer à une indépendance immédiate avant de se lancer dans le projet qui était à tout le moins noble et ambitieux. C’est ce qu’on pourrait comprendre dans les propos de son discours lorsqu’il dit :
« L’indépendance est un préalable, elle n’est pas une fin en soi. [...] Nous disons indépendance, et nous disons ensuite unité africaine (…) Nous disons Indépendance d’abord, mais en nous fixant ce préalable, nous ne faisons qu’interpréter l’aspiration profonde de tous les peuples d’Afrique Noire à la reconnaissance de leur existence nationale. »
La figure de ce grand homme mérite d’être réhabilitée à l’aune d’une histoire que les Sénégalais doivent se réapproprier.
Yamar Samb est Professeur agrégé des Facultés de Droit
Université Gaston Berger de Saint Louis.
Ousmane Mané Kane est Enseignant-Chercheur / Assistant en Droit public
[3] DIOP (Mbaye-Jacques), Une vie de combat, Dakar, L’Harmattan, 2013, p. 68.
[4] QUEVENEY (Claude), « Les élites indigènes et la culture », L’Action française, 04 octobre, 1937, p. 6.
[5] L’un des faits marquant de la journée du 26 août 1958 au Sénégal a été aussi la présence de porteurs de pancartes où étaient mentionnées les réclamations d’indépendance immédiate. Les porteurs de pancartes étaient à la traque du Général de Gaulle dont le convoi avait changé d’itinéraire pour éviter de les rencontrer. Depuis ce jour, la date du 26 août est considérée au Sénégal comme la « Journée des pancartes ».
EXCLUSIF SENEPLUS - Notre souhait ardent est que l’État lui rende un hommage officiel posthume pour offrir son exemple à la jeunesse qui mérite de connaitre l’ampleur et la qualité de la contribution scientifique de ce chercheur hors-pair
Ndiaga Loum et Ibrahima Sarr |
Publication 21/08/2024
« Vivant, je veux bien être modeste, mais mort, il me paraît naturel qu’on reconnaisse mon génie... » - Michel Audiard
Quarante jours déjà que Momar-Coumba Diop a été mis en terre. Sa disparition a été un choc brutal pour sa famille biologique et sa « famille très étendue », selon les termes de son ami Jean Copans dans la préface de l’ouvrage Sénégal 2000-2012. Les institutions et politiques publiques à l’épreuve d’une gouvernance libérale (Karthala, 2013, 836 p.). Le vendredi 19 avril dernier, comme à son habitude, Momar nous envoya une photo prise par son ami Charles Becker, à l’issue d’un déjeuner dans un restaurant parisien, vers Port Royal-Bertholet, et sur laquelle il était en compagnie de Robert Ageneau, le fondateur des éditions Karthala, devenu son ami depuis leur première rencontre en 1989. Sur l’image, Momar nous semblait en pleine forme. Et nous étions loin d’imaginer que l’irréparable allait se produire quelques semaines plus tard. Lorsqu’à partir du 28 mai dernier nous n’avions plus de ses nouvelles, nous avions pensé qu’il lui était arrivé quelque chose car Momar ne restait pas une journée sans faire signe.
Nous discutions quotidiennement avec lui de la situation politique nationale, surtout avec la crise qui a opposé depuis mars 2021 le pouvoir central et l’opposition dite « radicale ». L’avenir du Sénégal le préoccupait au plus haut point. La décision du président Macky Sall de reporter la présidentielle de février-mars 2024, à la veille de l’ouverture de la campagne électorale, menaçait sérieusement la stabilité du pays. Dans ce contexte préélectoral, le pays est resté debout à l’issue de cette rude épreuve, surtout grâce au Sénégal laïc et citoyen célébré par Pathé Diagne dans Le Sénégal sous Abdoulaye Wade. Le sopi à l’épreuve du pouvoir (Paris, Karthala, 2013, 840 p.), ouvrage publié sous la direction de Momar. Ce Sénégal laïc et citoyen, qui avait fait échec à la tentative du président Wade d’exercer un troisième mandat, a cette fois-ci fait face à la pression de grande envergure exercée par le président Macky Sall. L’alternance du 24 mars 2024 traduisait un rejet de ce dernier et de ses hommes, mais aussi de l’opposition classique. Elle marquait également ce que Pathé Diagne a appelé « la fin du cycle senghorien ». Cette alternance enthousiasma Momar. C’est parce qu’il souhaitait surtout une transformation qualitative des conditions de vie des Sénégalais. Et le rêve lui semblait permis.
Nous avons connu Momar à la fin de nos études doctorales grâce à notre ami, l’archéologue Ibrahima Thiaw de l’IFAN. Nous connaissions bien les travaux de Momar. Notre ami Thiaw estimait qu’il nous fallait collaborer avec Momar et bénéficier de ses conseils avisés. Ce que ce dernier accepta de bon cœur. Ainsi, nous avons vécu avec Momar près d’une vingtaine d’années de compagnonnage. Nos relations avaient fini par déborder le cadre de la recherche pour devenir amicales voire fraternelles.
Nous appartenons aux sciences de l’information et de la communication considérées comme une « inter-discipline » car situées au carrefour des sciences humaines et sociales auxquelles elles empruntent leurs concepts et leurs méthodes. Nos objets sont ceux des médias et de la culture. Nous privilégions une démarche pluridisciplinaire pour les analyser. L’interrogation d’une part de leurs conditions de production et d’émergence, et d’autre part des conditions de leur réception nous autorise à faire appel à la sociologie, à l’histoire, au droit, à la sémiotique, et à l’anthropologie, notamment celle des mondes contemporains chère à Marc Augé. Nous procédons donc à une traversée des disciplines que nous retrouvons non seulement dans les travaux de Momar, mais aussi dans les ouvrages collectifs qu’il a dirigés.
Le début d’une aventure
Après son recrutement à l’Université de Dakar, en 1981, Momar porta sur les fonts baptismaux un groupe de recherches, avec ses amis de la Faculté des Lettres et Sciences humaines comme les historiens Mohamed Mbodj, Mamadou Diouf et Babacar Diop dit « Buuba », les philosophes Souleymane Bachir Diagne et Aminata Diaw, les géographes Latsoucabé Mbow et Paul Ndiaye, le juriste Tafsir Malick Ndiaye et l’économiste François Boye. Leur aspiration, comme Momar l’a rappelé souvent dans ses écrits, était de forger une autonomie intellectuelle, d’être à même d’influencer les orientations, l’écriture et le déroulement des travaux menés sur le Sénégal. Ils avaient surtout bénéficié de l’appui de leurs aînés Boubacar Barry et Abdoulaye Bathily du Département d’Histoire. Leur rencontre avec (le défunt) Thandika Mkandawire, à l’époque directeur exécutif du Codesria, a été une étape importante dans le cheminement intellectuel et professionnel de Momar et de ses amis. En leur ouvrant les portes de son institution, Thandika Mkandawire leur a permis d’accéder à des travaux novateurs, de découvrir d’autres traditions de recherches et d’engager des confrontations scientifiques avec des chercheurs de l’Afrique francophone et de l’Afrique anglophone. Momar a toujours insisté sur le fait que si certains membres de ce groupe n’avaient pu terminer leurs thèses d’État ou avaient renoncé à les rédiger – une étape pourtant importante pour gravir de nouveaux échelons dans la hiérarchie universitaire - c’est parce qu’ils étaient engagés corps et âme dans leur agenda de recherches.
Ce groupe a publié en 1992, sous la direction de Momar, Sénégal. Trajectoires d’un État (Dakar, Codesria, 501 p.), un ouvrage axé sur une histoire économique et sociale du Sénégal, traduit en anglais sous le titre Senegal. Essays in statecraft (Dakar, Codesria, 1993, 491 p.). Mais Momar s’était déjà révélé en 1990 à travers la publication, avec son ami Mamadou Diouf, de Le Sénégal sous Abdou Diouf (Paris, Karthala, 1990, 439 p.) consacré au Sénégal post-senghorien. Momar remit ça en 1994 avec deux ouvrages collectifs : Le Sénégal et ses voisins (Dakar, Sociétés-Espaces-Temps, 326 p.) et La crise de l’agriculture africaine (Dakar, Sociétés-Espaces-Temps, 149 p.). Suit en 1999 Les figures du politique en Afrique. Des pouvoirs hérités aux pouvoirs élus ((Paris-Dakar, Codesria/Karthala, 444 p), co-édité avec Mamadou Diouf, et qui constitue une somme de travaux sur les systèmes de transfert du pouvoir en Afrique.
Après l’exil aux États-Unis d’Amérique de ses amis Mohamed Mbodj, François Boye, Mamadou Diouf et Souleymane Bachir Diagne, Momar sentit la nécessité de renouveler son groupe de recherches en faisant appel à de jeunes chercheurs. Au début des années 2000, il élabora un projet intitulé « Sénégal 2000 » dont l’objectif était de montrer, à partir de divers territoires de recherche, les changements et ruptures que le Sénégal a connus aux plans politique, socio-culturel et économique entre 1960 et 2000.
Momar se distingua par ce que Jean Copans a qualifié d’« activisme éditorial ». Nous ne pouvons énumérer ici la longue liste d’ouvrages collectifs publiés sous sa direction. Nous pouvons néanmoins en citer quelques-uns. En 2002, Momar a co-édité La construction de l’État au Sénégal (Paris, Karthala, 2002, 231 p.) avec Donal Cruise O’Brien et Mamadou Diouf. En outre, les résultats du projet de recherche « Sénégal 2000 » sont publiés en trois volumes par les éditions Karthala : Le Sénégal contemporain (Paris, 2002, 656 p.), La société sénégalaise entre le local et le global (Paris, 2002, 723 p.) et Gouverner le Sénégal (Paris, 2004, 301 p.).
Un passeur de connaissances exceptionnel
En 2004, Momar fonda avec un groupe d’amis - constitué entre autres de Charles Becker, Ousseynou Faye, Ibrahima Thioub, Ibou Diallo, Alfred Inis Ndiaye et Ndiouga Adrien Benga - le Centre de recherche sur les politiques sociales (Crepos). Un centre qu’il dirigea de manière bénévole jusqu’en 2009. Le Crepos lui a rendu hommage à travers l’ouvrage Comprendre le Sénégal et l’Afrique d’aujourd’hui. Mélanges offerts à Momar-Coumba Diop (I. Thioub et al., Paris, Karthala, 2023, 720 p.).
Les relations de Momar avec ses jeunes collègues et amis étaient surtout empreintes de respect et d’estime. Il jouissait d’une forte personnalité et faisait montre d’une grande intransigeance sur les questions d’éthique ou de morale. Il tenait aussi à sa liberté comme à la prunelle de ses yeux. Son agenda de recherches n’était pas inspiré ou dicté par une institution publique ou privée sénégalaise ou par une fondation étrangère. En outre, comment parler de Momar sans évoquer sa pudeur, sa discrétion légendaire, et sa grande modestie. Lorsque nous le félicitâmes, après la parution des « Mélanges », il nous remercia pour nos contributions respectives, en ajoutant : « J’essaie tout simplement de rester fidèle à ma fonction de missionnaire laïc ». Tel était Momar, loin du culte du moi, préférant les arias légers aux symphonies bruyantes, et toujours au service des autres.
Momar était un passeur de connaissances exceptionnel. Il tenait absolument à assurer la relève et consolider l’héritage scientifique africain et sénégalais. Il savait créer les contacts avec les grands éditeurs pour le compte des plus jeunes chercheurs et assurait personnellement le suivi éditorial. Sa rigueur scientifique était telle qu’aucun détail de forme ou de fond n’échappait à sa vigilance. Cette générosité intellectuelle spontanée, vraie, sincère est une source d’inspiration, mieux, une école de vie pour nous, ses jeunes frères. Nous ne pourrons rien faire sur ce plan qui pourrait égaler son investissement, son engagement, mais nous avons le devoir moral d’essayer de suivre son exemple pour honorer sa mémoire.
Comme le souligne avec raison notre collègue Abdourahmane Seck, dans un témoignage intitulé « Une lettre à ma nièce... », publié dans les « Mélanges » offerts à Momar, nous devons à ce dernier « une dette impossible à rembourser ». Momar nous a fait l’honneur de nous intégrer dans sa « famille très étendue ». Il nous coopta également dans l’équipe devant participer à la réédition de l’ouvrage Le Sénégal et ses voisins, projet qu’il n’a pu hélas boucler.
Cet intellectuel magnifique était notre ami. Nous tenons à lui rendre un hommage mérité. Ne soutenait-il pas, avec Mamadou Diouf, à travers une contribution intitulée « Amady-Aly Dieng. La trajectoire d’un dissident africain » [publiée en avril 2007 dans la presse quotidienne dakaroise, pour exalter le « Doyen », après que ce dernier a offert sa bibliothèque à l’Université Cheikh Anta Diop] que « la communauté universitaire doit honorer ses membres les plus éminents car l’hommage aux créateurs est une manière de constituer une communauté solide de chercheurs ». Dieu fasse que Momar puisse continuer à nous inspirer. Notre souhait ardent, à travers ce témoignage, est que l’État lui rende un hommage officiel posthume pour offrir son exemple à la jeunesse qui mérite de connaitre l’ampleur et la qualité de la contribution scientifique de ce chercheur hors-pair qui a su faire briller l’UCAD, l’IFAN et donc le Sénégal, partout où la science sans frontière a pu se rendre.
Ndiaga Loum, UQO (Canada)
Ibrahima Sarr, CESTI-UCAD (Sénégal)
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LE GOUVERNEMENT OUVRE LA CHASSE AUX ACCORDS LÉONINS
Une commission d'experts vient d'être mise en place pour passer au crible les contrats stratégiques du pays. Son objectif ? Redonner au Sénégal la maîtrise de ses ressources stratégiques, selon le Premier minsitre
Dans une démarche audacieuse, le gouvernement vient de dégainer son arme contre les contrats léonins : une commission d'élite composée des meilleurs experts du pays.
Sous la houlette d'Ibrahima Diop, cette dream team de hauts fonctionnaires s'apprête à passer au crible chaque virgule des conventions existantes. Leur mission ? Traquer les déséquilibres, débusquer les failles juridiques et redonner au Sénégal la place qui lui revient dans ses partenariats économiques.
"Nous ne sommes pas là pour faire table rase", prévient le Premier ministre Ousmane Sonko, "mais pour rééquilibrer intelligemment". Une approche qui promet de secouer le cocotier des habitudes bien ancrées dans les secteurs pétroliers, miniers et autres domaines stratégiques.
Alors que certains craignaient une nationalisation à tout-va, c'est une véritable opération commando qui se dessine. Avec pour mot d'ordre : rigueur, méthode et efficacité. Le message est clair : le Sénégal ne bradera plus ses richesses.
Cette initiative, fruit d'une promesse électorale longtemps attendue, marque un tournant dans la gouvernance économique du Sénégal.
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LE MINISTÈRE DE L'HYDRAULIQUE RÉPLIQUE À CHEIKH DIENG
Face aux accusations de corruption, Cheikh Tidiane Dièye contre-attaque. Il expose sa version des faits concernant le marché de curage de l'ONAS, listant une série de défauts, de la sélection des entreprises aux écarts de facturation alarmants
Le ministère de l'Hydraulique et de l'Assainissement sort de sa réserve dans l'affaire du marché de curage de l'ONAS. Une note explicative publiée ci-dessous, retrace la chronologie d'un contrat qui a failli tourner au désastre. Entre urgence climatique et gestion hasardeuse, le document révèle les coulisses d'un dossier explosif. Cette mise au point intervient alors que le ministre Cheikh Tidiane Dièye fait face à des accusations de corruption de la part du désormais ex-DG de l'ONAS, Cheikh Dieng.
"NOTE SUR LE MARCHE DE CURAGE N°S-DEM
024/2024 DE L'ONAS.
1. Rappel du contexte
Lors du conseil interministériel sur la prévention et la gestion des inondations en perspective de l'hivernage 2024 tenu le 16 mai 2024 à Diamniadio, Monsieur le ministre avait demandé de veiller à la finalisation, au courant du mois de juin 2024, des opérations pré-hivernage, notamment le curage de canaux, le faucardage de bassins et réceptacles, l'entretien de lacs et marigots, l'entretien et la maintenance du matériel et équipements de pompage.
A cet effet, il avait été recommandé au Ministre des Finances et du Budget (MFB) d'accélérer la passation des marchés d'opérations pré-hivernage dans les régions et pour les ouvrages de la première phase du Projet de Gestion des Eaux pluviales et d'Adaptation au Changement climatique (PROGEP), situés dans la banlieue dakaroise.
Toutefois lors de sa prise de service, Monsieur Cheikh Dieng avait constaté que son prédécesseur n'avait pas entrepris les diligences nécessaires à temps pour l'exécution des opérations pré-hivernage dans certaines zones de Dakar et dans les régions. Dès lors la seule issue était de recourir à des procédures d'urgences dérogatoires sur autorisations de la Direction centrale des Marchés publics (DCMP).
A ce titre, en appui à la démarche de l'ONAS de faire passer le marché de curage par appel d'offre restreint en procédure d'urgence, Monsieur le Ministre de l'Hydraulique et de l'Assainissement, avait saisi son homologue en charge des finances par lettre en date du 28 mai 2024 pour solliciter l'accompagnement de la DCMP.
Par la suite la DCMP a marqué son accord par lettre en date du 07 juin 2024 sur saisine de ONAS qui a ciblé 6 entreprises sur la liste restreinte (Gamma Construction et Travaux Publics, Entreprises KEBAS, Entreprise Mbeur Mi , Sénégalaise de l'Assainissement et de Transport, Entreprise Tawfekh Taysir et DELGAS. L'attribution des marchés par l'ONAS a été faite ainsi qu'il suit :
- Le lot 1 (région de Dakar) : TAWFEKH TAYSIR pour 649
413 000 FCFA TTC ;
- Le lot 2 (régions) : DELGAS pour 674 842 000 FCFA TTC.
Le montant total des deux marchés attribués étant de 1 324 255 000 FCFA TTC pour 720.000.000 FCFA TTC inscrits dans le Plan de passation de passation.
2. Constat de défaillances manifestes dans l'exécution des marchés
Près d'un mois après le début des travaux qui devaient durer 45 jours sur la base d'un planning défini de commun accord entre ONAS et les entreprises attributaires, des retards considérables ont été constatés à Dakar et pire une absence de démarrage des opérations dans plusieurs régions. Cette situation révélant l'incapacité des entreprises chargées des travaux a été mise en exergue par le dispositif de suivi rapproché mis en place par Monsieur le Ministre à travers :
- Les visites de terrain ;
- Les rapports des comités régionaux de gestion des inondations présidés par les gouverneurs ;
- Les réunions de suivi hebdomadaire de la gestion des inondations ;
- Les remontées des techniciens de l'ONAS sur le terrain.
En effet, à la date du 26 juillet 2024, soit après consommation de 66% des délais convenus, il a été constaté un faible niveau d'exécution d'à peine 10 % à Dakar et un peu plus 30% dans les régions.
Les investigations menées ont révélé que sur les six (6) entreprises consultées, seule DELGAS avait une expérience connue dans le sous-secteur de l'assainissement. D'ailleurs, les entreprises ayant une expérience et une capacité avérée dans le domaine n'ont pas été consultées.
En plus il a été constaté des écarts de facturation élevés par rapport aux prix moyens des prestations effectuées ces dernières années. A titre illustratif :
- le curage du bassin de la zone de captage est indexé dans le marché de 2024 à 300 000 000 CFA HTV, alors que le montant global du marché de clientèle 2021-2023 le concernant, était de 83 000 000 CFA TTC.
- Le prix unitaire du mètre linéaire « curage des canaux fermés largeur inférieur à 1,5 m avec ventilation » du marché des régions qui était à 1500 FCFA dans le marché de clientèle 2021-2023, est indexée 18 000
FCFA,
- le prix unitaire du mètre linéaire « curage des canaux fermés largeur supérieur à 1,5 m avec ventilation » qui était de 3000 CFA dans le marché de clientèle 2021-2023 du marché des régions, est facturé à 23000 FCFA
Il a été aussi noté que le DAO transmis par la Direction de l'exploitation et de la maintenance (DEM) de ONAS été modifié à son insu. Cela a engendré un écart sur le quantitatif de la rubrique « curage des canaux fermés largeur inférieur à 1,5 m » du marché des régions. En effet dans le devis attribué il est à 6000 ml alors que celui transmis par la DEM est de 40 000 ml. Ce qui engendrerait un surplus de travaux de 34 000 ml avec un impact financier de 612 000 000 FCFA, lequel porterait le cout global des travaux à plus de 1 900 000
000 FCFA en 2024 en lieu et place des 1 324 255 000 FCFA TTC attribués.
3. Mesures prises par le ministre pour remédier aux manquements
Face aux risques élevés d'inondations liés à cet état de fait et aux conséquences graves pouvant en découler, Monsieur le Ministre de l'Hydraulique et de l'Assainissement a, dans un premier temps, interpellé le DG sortant de l'ONAS en l'invitant à trouver d'urgence une solution.
Constatant qu'aucune diligence n'a été entreprise, Monsieur le Ministre a facilité la mise en place d'un groupe de travail technique composé des techniques de l'ONAS désignés par le
Dg sortant et des services du département pour accompagnement. C'est à ce titre qu'une rencontre s'est tenue le 27 juillet 2024 dans les locaux de l'ONAS, à laquelle ont pris part : Le Directeur de l'Assainissement ; le Directeur de la Prévention et de la gestion des inondations, le Directeur administratif et financier de l'ONAS, l'adjoint du Directeur de l'exploitation et de la maintenance (DEM) de ONAS, la Coordonnatrice de la Cellule de passation du Ministère et le Coordonnateur de la Cellule de passation de l'ONAS.
Lors de cette réunion qui avait pour objet d'évaluer le niveau d'exécution des opérations et de proposer des mesures correctives, il a été constaté la véracité de l'ensemble des défaillances citées plus hauts. A l'issu de ses travaux, ledit groupe, tenant compte de l'urgence caractérisée de la situation et de l'impossibilité à recourir aux procédures habituelles, a proposé au Ministre les solutions ci-dessous :
- Pour le lot 1 (Dakar) : l'arrêt de la procédure de contractualisation avec TAWFEKH qui visiblement n'avait pas les capacités requises pour exécuter les travaux et la relance du marché à travers une procédure d'entente directe avec des entreprises dont la capacité est reconnue.
- Pour le lot 2 (régions) : la résiliation partielle du marché.
DELGAS pourrait poursuivre les travaux dans les zones où les activités ont démarré et avancent. Par contre, pour Mbour, Joal, Diourbel, Touba Mbacke, Matam, Podor, une procédure d'entente directe est préconisée avec des entreprises dont la capacité est reconnue.
Toutefois les analyses ultérieures des projets de contrats ont révélé l'ampleur des écarts de prix par rapport aux coûts moyens en cours. Ce qui appelle une remise en cause desdits projets de contrats pour des raisons d'intérêt général et de bonne utilisation des deniers publics.
Sur la base de ce qui précède, Monsieur le ministre a demandé au Dg de l'ONAS par lettre en date du 29 juillet 2024, d'arrêter la procédure avec les deux entreprises concernées et de ne surtout pas signer les projets de contrats.
En outre, compte tenu de l'urgence impérieuse, Monsieur le ministre a saisi la DCMP le même jour pour solliciter l'autorisation de faire passer les marchés par une procédure dérogatoire prévue par le code des marchés publics avec les entreprises ayant la capacité requise et qui ont été proposées unanimement par les membres du groupe de travail.
A partir de ce moment, toutes les diligences devaient être entreprises par ONAS. Avec le changement intervenu à la tête de cette structure, Monsieur le ministre a écrit à la DCMP le 13 août 2024 pour lui signifier que c'est au nouveau DG de conduire la procédure."