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21 avril 2025
Diaspora
par l'éditorialiste de seneplus, alymana bathily
LE MAUVAIS PROCÈS FAIT AU MINISTÈRE DE LA COMMUNICATION
EXCLUSIF SENEPLUS - Certains acteurs du secteur de la presse poussent à la confrontation. Pour les uns, il s’agit de reprendre le combat de l’ancien régime en arrière garde. Rien ne doit plus être comme avant
Alymana Bathily de SenePlus |
Publication 06/12/2024
Mamadou Ibra Kane, le président du Conseil des Diffuseurs et Editeurs de la Presse (CDEPS) est, pour qui le connait, un homme d’habitude pondéré et courtois.
Il ajoute même : « ce 2 décembre 2024 est une date macabre pour la liberté de la presse au Sénégal. Toutes les appréhensions que nous avions depuis plus de huit mois du nouveau régime de Bassirou Diomaye se justifient aujourd’hui. Nous sommes scandalisés, abasourdis… »
Maimouna Ndour Faye de surenchérir : « Ce projet est sournois. Blocage de comptes bancaires, annulation des contrats avec l’Etat, gel des paiements et maintenant ça. Mais qu’ils sachent que nous ne céderons pas ».
Mandiambal Diagne lui, sonne carrément la mobilisation contre le gouvernement : « Nous refusons d’accepter une telle décision illégale. Ma sympathie et mon soutien à tous les acteurs des médias qui font les frais de l’arbitraire du gouvernement de Ousmane Sonko ».
La fronde des patrons
Notons d’abord qu’il s’agit d’une fronde des seuls patrons de presse, aucune organisation professionnelle ne s’y est associée.
Ni le Syndicat des Professionnels de l’Information et la Communication du Sénégal (SYNPICS), ni la Convention des Jeunes Reporters du Sénégal (CJRS), ni l’Association des Femmes des Médias du Sénégal (AFMS) ni le Conseil pour l'Observation des Règles d'Éthique et de Déontologie (CORED) ! En outre, ces patrons font au « gouvernement Sonko » un mauvais procès : celui de vouloir les liquider.
Il est vrai que ce dernier pourrait pour sa part soupçonner certains patrons, du fait de leur proximité, de leur « amitié » déclarée même avec l’ancien président, de vouloir prendre à leur compte le combat de l’ancien régime en alimentant la sédition. Quant au fond, convenons de ceci :
1-Dans un contexte de pluralisme médiatique, la régulation de la presse écrite tout comme de l’audiovisuel est bien évidemment une responsabilité du gouvernement. Le Code de la presse porte précisément sur les modalités de cette régulation notamment par les articles 80 à 93 concernant la presse écrite et les articles 94 à 117, la communication audiovisuelle.
Cette régulation est d’autant plus nécessaire que les acteurs de la presse ont, eux même, naguère appelé à des mesures d’assainissement consistant à « la nécessaire régulation du secteur par les autorités publiques, l’évaluation et la réforme du Code de la presse, le financement adéquat des entreprises de presse, l’adoption d’un Code de conduite pour les médias, la prise en charge de la formation dans les métiers des médias… ».
2-Les 112 entreprises de presse retenues par le ministère de tutelle sont celles qui sont déjà en règle au regard des articles précités du Code de la presse et de ce fait sont éligibles au Fonds d’Appui à la presse. Il ne s’agit nullement comme les patrons de presse font semblant de croire, « d’une liste d’entreprises de presse qui auraient le droit d’exercer sur le territoire sénégalais ».
3-La réglementation relative à la création des organes de presse écrite n’est pas remise en cause, on le sait bien : c’est toujours le principe déclaratif qui prévaut : il suffit d’une déclaration de parution adressée au ministère accompagnée d’un extrait du casier judiciaire du directeur de publication, les nom et adresses du directeur de publication et des propriétaires.
4- Quant à la liberté de la presse qui serait menacée par la régulation, on n’oublie que liberté de presse et responsabilité sociale de la presse vont de pair.
Ceci a été codifié en doctrine dès les années 1947, aux Etats Unis face à l’explosion de la presse, à cette époque. Voici ce qu’établissait dès lors la commission dite Commission Hutchins établie pour étudier comment sauvegarder la liberté de la presse tout en l’astreignant au contrôle : « Il y a contradiction entre l’idée traditionnelle de la liberté de la presse et sa nécessaire contrepartie de responsabilité…La responsabilité comme le respect des lois, n’est pas en soi une entrave à la liberté ; bien au contraire, elle peut être l’authentique expression d’une liberté positive. …Il est trop fréquent aujourd’hui que la prétendue liberté de la presse soit une forme d’irresponsabilité sociale. La presse doit savoir que ses erreurs et ses passions ont cessé d’appartenir au domaine privé pour devenir des dangers publics. Si elle se trompe, c’est l’opinion qu’elle trompe... »
Visiblement certains acteurs du secteur de la presse, au sein de la profession comme au sein de l’administration publique poussent à la confrontation. Pour les uns, il s’agit de reprendre le combat de l’ancien régime en arrière garde, pour les autres, il faut liquider définitivement ces gens qu’on assimile à des ennemis irréductibles.
Une presse indépendante et forte pour une démocratie forte
Ne les suivons pas dans l’escalade. Le Sénégal a besoin d’une démocratie forte pour faire face aux défis du développement tels que formulés par l’Agenda 2050. Une telle démocratie ne saurait bien entendu prospérer sans une presse indépendante et forte.
Convenons-en pourtant : rien ne doit plus être comme avant : le secteur de la presse doit être assaini, l’équité et la transparence doivent prévaloir aussi bien dans l’enregistrement des médias, que dans l’attribution et le contrôle de l’exploitation des fréquences, que dans l’attribution du Fonds d’Appui à la presse.
Les entreprises de presse doivent évidemment se conformer rigoureusement désormais aux prescriptions du Code de la presse notamment en ce qui concerne le profil et les qualifications de leurs responsables et la nécessité d’embaucher le nombre minimum de journalistes professionnels requis.
Elles doivent s’astreindre à reverser désormais les cotisations sociales de leurs employés et à régler leurs impôts. Toutes les prescriptions maintenant exigées des entreprises de presse ne mettent elles pas en cause leur viabilité économique ? Certainement !
Pour le renouveau de la presse
Peut-être doit on courageusement remettre en cause le modèle économique traditionnel ? Peut-être doit on plaider auprès des autorités publiques pour la mise à jour de l’organisation du secteur de la publicité dont la loi de référence date de plus de 40 ans (loi n° 81-58 du 9 novembre 1981) !
La presse a encore de beaux jours devant elle dans notre pays : le nouveau régime pour lequel les Sénégalais ont voté dès le premier tour de l’élection présidentielle du 24 mars 2024 et auquel ils ont donné la majorité des deux tiers aux législatives récentes, s’inscrit dans la continuité républicaine et démocratique.
Il entend renforcer le pluralisme médiatique : tout journal, radio, télévision et média en ligne est bien évidement libre de traiter et de présenter l’information selon sa ligne éditoriale pour peu qu’il le fasse dans le respect des lois et règlements de la République.
LE SÉNÉGAL CHAMPION AFRICAIN DE LA DETTE
Le pays consacre plus du tiers de ses recettes d'exportation au seul remboursement de sa dette, contre moins de 20% pour la plupart de ses voisins. Avec une dette représentant 133% de son RNB et 545% de ses exportations, Dakar bat des records
(SenePlus) - La Banque mondiale vient de publier son rapport sur la dette internationale 2024, et les chiffres concernant le Sénégal interpellent. Avec une dette extérieure culminant à 39,95 milliards de dollars fin 2023, le pays s'impose comme l'un des États africains les plus endettés proportionnellement à ses capacités économiques.
L'analyse comparative révèle une situation alarmante : la dette sénégalaise représente 545% des exportations du pays, un ratio qui pulvérise les moyennes régionales. Cette proportion dépasse largement celle des autres économies majeures du continent : la Côte d'Ivoire (203%), le Ghana (257%), ou encore le Nigeria (163%). Même des pays traditionnellement considérés comme fortement endettés présentent des ratios plus modérés, à l'instar du Maroc avec 180%.
Le poids du service de la dette illustre la gravité de la situation : 37% des recettes d'exportation sont englouties par les remboursements, contre 21% pour la Côte d'Ivoire et 19% pour le Cameroun. Ce fardeau représente 9% du Revenu National Brut (RNB) sénégalais, compromettant sérieusement les capacités d'investissement public dans les secteurs essentiels du développement.
Une dépendance marquée aux créanciers multilatéraux
La structure de l'endettement sénégalais révèle une autre vulnérabilité : la prédominance des créanciers multilatéraux, qui détiennent 50% de la dette. Cette proportion, nettement supérieure à celle observée au Nigeria (33%) ou au Maroc (38%), traduit une forte dépendance aux institutions financières internationales. La Banque mondiale-IDA (23%) et la Banque africaine de développement (10%) figurent en tête des créanciers.
Malgré ces indicateurs préoccupants, le Sénégal continue d'attirer les capitaux. Les flux nets atteignent 10 milliards de dollars en 2023, dont 7,36 milliards de dette nouvelle et 2,64 milliards d'investissements directs étrangers. Ces chiffres, supérieurs à ceux du Nigeria (2,5 milliards) ou du Ghana (0,8 milliard), suggèrent une confiance persistante des investisseurs internationaux.
La situation s'inscrit dans un contexte particulièrement défavorable : hausse globale des taux d'intérêt, ralentissement économique post-Covid, et volatilité des marchés internationaux. La Banque mondiale souligne que ces conditions affectent particulièrement les pays fortement endettés comme le Sénégal.
Un défi crucial pour l'avenir
Cette position de "champion" de la dette pose un défi majeur pour le Sénégal. Le pays doit impérativement augmenter ses capacités d'exportation et diversifier ses sources de financement pour réduire sa vulnérabilité financière. Sans une stratégie efficace de gestion de la dette, le risque d'une spirale d'endettement pourrait compromettre les perspectives de développement du pays.
La comparaison avec d'autres nations africaines montre que le Sénégal a atteint un niveau critique d'endettement qui nécessite des mesures urgentes. Le rapport de la Banque mondiale sonne comme un avertissement : sans correction de trajectoire, le pays pourrait faire face à des difficultés croissantes pour honorer ses engagements financiers.
PAR Less Salla
JUB-JUBAL-JUBBANTI OU LE PARACHÈVEMENT DU SOPI
EXLCUSIF SENEPLUS - Les similitudes sont frappantes entre ces deux mouvements qui ont promis une transformation radicale de la société. Mais le nouveau pouvoir, fort de sa double victoire électorale, semble avoir retenu les leçons de l'échec du PDS
Le rideau vient de tomber sur les élections législatives anticipées du 17 novembre, avec une victoire écrasante du parti au pouvoir Pastef les Patriotes qui rafle 130 députés sur les 165 sièges de l’hémicycle. Ce succès vient couronner celui de la présidentielle du 24 mars qui avait porté le candidat Bassirou Diomaye Faye à la tête du pays, et conforter le parti et ses sympathisants dans leur plébiscite. Le Sénégal a encore une fois montré sa maturité démocratique en se prononçant sans heurt, le jour du scrutin après une campagne teintée de violence et de provocations et dérapages multiples. Avec l’installation de la nouvelle législature le 2 décembre, l’heure est désormais au travail.
Neuf mois après son accession au pouvoir, le Pastef a désormais les coudées franches pour matérialiser son agenda national de transformation Sénégal 2050 présenté à la communauté nationale et internationale le 14 octobre dernier. Cette période de gestation a accouché d’un bébé bien portant et selon la formule consacrée « le bébé et la maman se portent bien ». Maintenant, il faut que le bébé grandisse en bonne santé, soit bien éduqué, et se réalise pleinement dans les 25 prochaines années que représente l’horizon fixé par le référentiel 2050.
La maman Pastef a déjà annoncé que l’éducation de son bébé de projet devra se faire suivant les valeurs du Jub-Jubal-Jubbanti qui incarne la rupture ou changement radical d’avec les modes de gouvernance passés. Cela n’est pas sans rappeler le mouvement Sopi de Maitre Abdoulaye Wade comme dépositaire des frustrations et revendications du peuple, qui avait entretenu l’espoir de transformer le Sénégal en une terre de valeurs partagées comme socle de rayonnement et d’émergence. Malheureusement, ce ne fut pas le cas. De plus, la soi-disant deuxième alternance de 2012 qui émanait des flancs des libéraux, à l’ombre du patriarche Wade a très vite montré ses limites, incapable de changer en profondeur le mode de gouvernance et de gestion de la chose publique pourtant annoncée sobre et vertueuse.
Aujourd’hui, l’avènement des pastéfiens au pouvoir, après une longue lutte faite de multiples rebondissements douloureux et énigmatiques, mettant fin à douze ans de mackyavélisme, fait renaitre l’espoir d’une rupture qui rappelle bien celle qui était attendue de la première alternance sous la déferlante bleue du Sopi.
Nous écrivions à ce sujet, dans une tribune intitulée L’insoutenable légèreté de Maître : Discours de la méthode, publié dans l'édition du vendredi 2 décembre 2005 du journal Le Quotidien : « Pour tous les Sénégalais, désormais actionnaires de l’alternance, l’accession de Maître Abdoulaye Wade au pouvoir inaugurait une nouvelle ère de rupture d’avec l’ancien système socialiste et ses méthodes décriées sous tous les fronts, par les politiques, la société civile et les différentes couches de la population qui réclamaient un nouveau leadership. La demande sociale rimait avec un appel à l’espoir par le changement profond des méthodes jusque-là appliquées. Le slogan Sopi, que l’on traduit à tort et de manière réductrice par le substantif « changement », était plus que jamais d’actualité pour le peuple qui vivait une véritable « révolution » pacifique et ordonnée. Mais le Sopi, plus qu’un changement de personnes auquel l’opinion l’avait faussement réduit (« tout le monde sauf Diouf »), veut en réalité dire « Changeons !» L’impératif ici contraste avec le substantif statique « changement », en ce que le verbe appelle à une double action d’introspection et de mutation vers un Sénégal régénéré à travers un nouveau contrat social qui affranchirait ses citoyens des gabegies et pratiques clientélistes des socialistes usés par le pouvoir à l’aube du troisième millénaire. Le peuple sénégalais venait ainsi de signer un chèque à blanc à Maître Wade et rempli d’espoir, avait misé sur le vieil homme pour renvoyer les pratiques du dinosaure socialiste à la préhistoire. »
Nous retiendrons ici que le « Sopi » traduit mécaniquement par « changement » avait été dévoyé de sa portée transformatrice. En réalité, le « Sopi » comme slogan fait appel à l’action et devrait être plutôt traduit par « Changeons ! » Et là se posent les questions suivantes : changer qui ? quoi ? comment ? Pour répondre à ces interrogations, il faudrait disséquer les trois dimensions que renferme le concept même de Sopi. Tout d’abord au niveau individuel, le Sopi comme transformation de soi, c’est-à-dire de sa manière de voir et d’être qui a longtemps été théorisé comme le nouvel homo-senegalensis, affranchi des pesanteurs du post-colonialisme et conscient de sa propre responsabilité dans son émancipation. Ensuite, vient la dimension Sopi comme l’appel à changer sa manière de faire vis-à-vis de son entourage. Et enfin, la dimension du Sopi vu comme l’injonction de changer les habitudes et les modes opératoires et de gouvernance au niveau collectif.
Changeons ! La première étape du Sopi est donc celle de la transformation personnelle, se changer soi-même, comme premier gage de rupture car il nécessite de remplacer notre logiciel intérieur par une prise de conscience et un dépassement personnel. Une fois ce travail accompli, changeons nos comportements pour impacter positivement les choses autour de nous et transformer notre environnement direct. Puis, changeons notre action collective et corrigeons les erreurs du passé pour sortir du statu quo ante, et réaliser nos aspirations légitimes en tant que peuple. Toutefois, le PDS et son leader Maitre Wade une fois au pouvoir ont péché sur le « comment ? ». Comment transformer cette manne du Sopi en ciment fédérateur d’une société avide de changement et de dépassement ?
Pour comprendre cet échec, il faut se rappeler, qu’en s’installant au palais, les premiers mots du président Wade étaient : « nos problèmes de sous sont terminés », son premier directeur de cabinet, Idrissa Seck dixit (d’ailleurs on attend toujours le livre « Lui et moi » qu’il nous avait promis). Quel message envoie-t-on à sa jeunesse, à son peuple qui aspire au changement et à une gestion rigoureuse des maigres deniers publics, avec une déclaration pareille ? L’accession au pouvoir et faire de la politique d’une manière générale était désormais vue comme un moyen de s’enrichir rapidement. De plus, c’est sous le magistère de Maitre Wade que nous avons entendu dire que « xalis da niu key lijenti » une sorte d’hymne à la roublardise légitimée par certains actes des proches et sympathisants du président et autres arrivistes qui engraissaient la thèse de l’enrichissement illicite. Dès lors, la vertu qui devait être érigée comme soubassement du Sopi pour porter la rupture tant désirée, était absente.
Comment changer soi-même, son entourage et son mode de fonctionnement de manière durable si l’attitude et le comportement donnés par le leadership au sommet du pays ne sont pas louables ? La suite du magistère de Maitre Wade est assez révélatrice du désenchantement de la population devant les pratiques affairistes, clientélistes et dérives antidémocratiques du pouvoir libéral qui fut sanctionné aux urnes en 2012, faute d’avoir su répondre de manière satisfaisante à la demande sociale, malgré quelques réalisations notables au plan des infrastructures.
La situation actuelle ressemble fort à celle de la première alternance en matière d’engouement populaire mais surtout par le parcours des deux figures politiques et chefs de partis emblématiques du PDS et du Pastef qui ont porté leurs mouvements respectifs au sommet, à savoir Maitre Abdoulaye et Ousmane Sonko. Ils ont des traits de personnalités et des trajectoires similaires à bien des égards. Le charisme et l’aura des deux personnages, leur côté populiste, la nature de leur combat contre un establishment décrié par le peuple appelant à la rupture, et leur panafricanisme affiché, sont autant de points communs qu’ils partagent allègrement.
Toutefois, la différence majeure qui pourrait voir le parti Pastef porter et parachever le combat jadis entamé par le PDS à travers le Sopi, est dans la manière de gérer le pays une fois au pouvoir. Là où le PDS a rencontré des difficultés à transformer le Sopi en action par manque de repères et valeurs partagées, le Pastef a, aussitôt arrivé au pouvoir, élevé la droiture ou « jub » comme valeur cardinale de son action. Ainsi, le triptyque Jub-Jubal-Jubbanti (ou Se redresser-Redresser-Dresser) a été érigé comme la colonne vertébrale qui va soutenir la réalisation du projet de société de Pastef tel qu’il a été présenté aux Sénégalais et théorisé à travers le référentiel 2050.
Jub ou « Se redresser » : c’est se tenir droit, c’est être honnête. C’est un appel à s’assumer, à changer soi-même, comme l’a été la première étape du Sopi, au niveau individuel après une prise de conscience. Le Sénégalais, à l’instar des ex-colonisés a longtemps marché courbé, la tête en bas, ignorant le plus souvent ses droits les plus élémentaires et subissant la loi du plus fort. Le temps est venu de se redresser, de relever la tête et de marcher droit.
Jubal que l’on peut traduire par redresser, mettre sur le droit chemin, vise à changer les comportements et impacter positivement son entourage, correspondant à la deuxième étape du Sopi décrite plus haut. C’est faire ce qui est juste et faire son devoir.
Jubbanti ou Dresser, veut dire littéralement « remettre à la verticale », c’est-à-dire détordre ce qui est tordu ou rectifier ce qui est hors champs, ou encore mettre sur les rails c’est-à-dire ramener sur le droit chemin. Il y a là, la notion de corriger les choses, pour le bien commun. En fait, toutes ces actions du Jub-Jubal-Jubbanti sont mues par le désir de rendre compte, à soi-même et à son peuple. Le pouvoir en place a donc donner le la.
En effet, les premières mesures de reddition des comptes sont en phase avec les promesses de campagne et combat du Pastef depuis sa création, laissent espérer que la démarche est logique et soutenue. Le discours de la méthode pastéfienne est jusque-là cartésien, donc rationnel. Les moyens de mettre en œuvre leur projet de société, le référentiel 2050, sur base de rupture, sont déployées au fur et à mesure de l’évolution de leur trajectoire allant de la conquête à l’exercice du pouvoir. C’est ce que le PDS n’a pas pu réussir avec la déconnexion entre la lutte vers le sommet et la réalité des faits dans l’exercice du pouvoir. L’aurait-il réussi que Macky Sall ne serait certainement pas arrivé au sommet de l’État, pour en plus décevoir les espoirs de tout un peuple à qui il avait promis la patrie avant le parti.
Aujourd’hui, le Pastef a une belle occasion de réaliser la vraie deuxième alternance du Sénégal, à travers le Jub-Jubal-Jubbanti, en instaurant un mode de gouvernance basé sur la droiture avec des atouts tangibles de faire de l’équité sociale une réalité. En effet, qui dit droiture invoque les valeurs d’honnêteté, de dignité, de liberté, et de fierté. Le jub-Jubal-Jubbanti appelle les Sénégalais à se tenir droit, libres et à marcher ensemble vers la prospérité et le développement. Pour cela, il faudrait que la justice soit là pour tout le monde. La réussite du projet exige que le nouveau leadership se tienne droit et s’applique les règles qu’il invite les citoyens à adopter. Ce n’est qu’ainsi que la population qui s’érige désormais en sentinelle de la démocratie et de la justice sociale, pourra accompagner et veiller sur la mise en œuvre du référentiel Sénégal 2050. La page des compromissions devra être définitivement tournée, et une nouvelle s’ouvrir. Le futur du Sénégal sera écrit par les dignes fils et filles du pays ou ne sera pas.
En réalité, le Jub-Jubal-Jubbanti est voué à réussir là où le Sopi a buté, c’est-à-dire sur l’affranchissement de tout un peuple qui désormais relève la tête et décide de prendre son destin en main. Le renouveau du Sénégal est en marche et se caractérise déjà à l’interne par la reddition des comptes, et la mise en place d’un pool judiciaire financier, la séparation effective des pouvoirs avec l’indépendance affirmée de la justice, l’assainissement du secteur galvaudé de l’audiovisuel, l’exigence du paiement des impôts en souffrance auprès des entreprise, les actions prises en vue régler le secteur de l’immobilier et mettre fin à la gabegie foncière du patrimoine national. A l’externe, déjà, nous observons la redéfinition des relations avec les institutions de Bretton Woods, la renégociation des contrats d’affaires désavantageux pour le pays, le suivi alerte de l’exploitation de notre énergie pétrolière et gazière, mais aussi le départ annoncé des troupes étrangères stationnées sur le territoire sénégalais dont celle de l’ancienne métropole particulièrement, qui représenterait urbi et orbi, une étape importante dans l’affirmation de notre souveraineté nationale. La commémoration ce 1er décembre, des 80 ans de la tragédie des tirailleurs sénégalais du camp de Thiaroye en 1944, qui a vu la France reconnaitre ce massacre, en est belle une illustration.
Toutefois, le chèque à blanc signé par le peuple en faveur du pouvoir n’est pas dépourvu de conditionnalités intrinsèques. Nul n’a envie de revoir les pratiques abusives d’un passé récent se reproduire, et les leaders du Pastef en sont certainement conscients et sont donc avertis. La période de grâce est terminée, place à l’action : Sopi ak Jub-Jubal-Jubbanti !
SEMBÈNE ET THIAROYE : QUAND LA CAMÉRA EXPLORE L'HISTOIRE
EXCLUSIF SENEPLUS - Grâce à des œuvres comme celle de Sembène, l’histoire coloniale, souvent racontée à sens unique, trouve une pluralité de voix. il fut un éclaireur, un gardien d’une mémoire que d’autres voulaient tout simplement annihiler
Il est des hommes dont la vie s’érige en pont entre l’oubli et la mémoire, entre le silence imposé et les vérités proclamées. Ousmane Sembène est de ceux-là. Soldat de deuxième classe de 1944 à 1946, puis artiste en révolte permanente jusqu’à sa mort en 2007, il fut le témoin d’un siècle blessé par le colonialisme. Avec sa caméra comme arme et son imagination comme boussole, il a révélé les plaies béantes de l’histoire, parmi lesquelles celle du massacre de Thiaroye, le 1er décembre 1944.
Thiaroye demeure une cicatrice vive, un cri étouffé que Sembène a refusé de laisser disparaître. Ce lieu, où les tambours de la mort résonnèrent au rythme des mitrailleuses coloniales, incarne la trahison de ses valeurs supposées par un système de domination. Les tirailleurs sénégalais, de retour en Afrique après avoir survécu aux horreurs des camps allemands, espéraient pouvoir prétendre à un minimum de reconnaissance. Ils furent pourtant fauchés pour avoir réclamé leurs soldes et leur dignité. Le colonialisme tue deux fois : une première fois par la violence, une seconde fois par l'effacement des mémoires. Ousmane Sembène, en soldat devenu le vigile spirituel de ses camarades de combat, refusa cette double condamnation.
Il importe aujourd'hui plus que jamais de rappeler son parcours.
En février 1944, jeune maçon et apprenti-mécanicien, il rejoint le camp des Mamelles à Dakar en tant que soldat. Avec Djibril Mbengue et Omar Samb, il intègre la classe de 1944, un an plus tard que prévu. Pendant trois mois, il reçoit une instruction militaire, avant d’être affecté au Niger, dans la Troisième Compagnie de Transport, à l’annexe Artillerie. Là, pendant deux années d’un labeur harassant, il traverse l’enfer du désert : les convois interminables pour le ravitaillement des troupes d’Afrique du Nord, la chaleur accablante, la mort omniprésente signalée par le vol des charognards. Ces années de privations et de souffrances le marquèrent à jamais, façonnant en lui une conscience aiguë de l’injustice et du devoir de dire.
Rentré à Dakar en 1946, Sembène n’obtient même pas le certificat de bonne conduite. La même année, il s’embarque clandestinement pour Marseille, où il devient docker au Vieux-Port. C’est dans les bibliothèques du Parti communiste qu’il découvre la littérature, “comme un aveugle découvre la lumière”. Cette découverte le transforme et il publie Le Docker noir en 1956. Mais bientôt, il troque la plume pour la caméra, le cinéma étant à ses yeux plus accessible à son peuple que la littérature.
Avec Camp de Thiaroye (1988), réalisé avec Thierno Faty Sow, il laisse éclater sa révolte, racontant l’histoire des tirailleurs sénégalais revenus d'Europe brisés, mais dignes. Leur révolte légitime face au refus des autorités françaises de payer leurs droits se termine dans un bain de sang, mettant à nu les contradictions d’un système colonial qui exige loyauté et sacrifices tout en niant l’humanité de ceux qu’il exploite. Pendant le tournage, Sembène et son équipe font face aux intimidations : des avions de surveillance français survolent son plateau et son film sera interdit en France pendant dix ans (1988-1998). Mais il persévère et transforme cette œuvre en un monument mémoriel, empêchant ainsi Thiaroye de sombrer dans l’oubli.
Avant Camp de Thiaroye, Sembène avait déjà marqué les esprits avec Émitai (1971), une fresque dédiée aux résistances africaines. Ce film, situé en Casamance en 1940, retrace les conscriptions forcées imposées aux paysans pour servir une guerre qui n’était pas la leur. Il ressuscite la figure d’Aline Sitoé Diatta, héroïne du soulèvement des siens contre l’arbitraire colonial. Avec Émitai, il amorce son combat cinématographique : révéler les non-dits, célébrer les luttes et redonner une voix à ceux que le colonialisme a tenté de réduire au silence.
Ousmane Sembène n’a jamais été seul dans ce combat. Des poètes comme Léopold Sédar Senghor, dans son poème Thiaroye, ont pleuré les âmes des tirailleurs. Keïta Fodéba, dans Aube africaine, dénonçait l’injustice coloniale tout comme, dans les années soixante-dix, Boubacar Boris Diop, dans Thiaroye, Terre rouge. De leur côté, des historiens tels que Mbaye Guèye et Cheikh Faty Faye, confrontés au silence des archives coloniales, ont eu à cœur de reconstituer patiemment les faits, pour briser l’omerta de l’histoire officielle. De jeunes musiciens les ont rejoints pour former en leur compagnie un chœur puissant contre l’oubli.
L’art est une mémoire vivante. Il interroge, dérange et éclaire les zones d’ombre. Grâce à des œuvres comme celle de Sembène, l’histoire coloniale, souvent racontée à sens unique, trouve une pluralité de voix. Le cinéma et la littérature deviennent des outils de réappropriation, permettant aux peuples africains de se réconcilier avec leur passé.
Sembène disait que l’artiste est le témoin de son époque. Il fut bien plus qu’un témoin : il fut un éclaireur, un bâtisseur de ponts entre les générations, un gardien d’une mémoire que d’autres voulaient tout simplement annihiler.
La commémoration du 80e anniversaire du massacre de Thiaroye va au-delà du simple hommage. Elle incarne une volonté politique forte, celle de rendre justice aux victimes et de célébrer le travail des artistes, écrivains et historiens qui ont refusé de se taire. Elle est un appel à regarder le passé en face, à en tirer les leçons, pour bâtir un avenir plus juste et plus humain.
Au-delà de Sembène, soldat, artiste et militant, cette commémoration est un acte de reconnaissance envers tous ceux qui pendant des décennies ont puissamment fait retentir les voix des oubliés. Elle est dédiée à ces panafricains qui nous ont appris que la mémoire est un combat, un flambeau à transmettre pour que jamais le mensonge n'impose le silence à la simple vérité historique.
par l'éditorialiste de seneplus, Arona Oumar Kane
UNE FAILLE DE SÉCURITÉ DANS LA DÉMOCRATIE SÉNÉGALAISE
EXCLUSIF SENEPLUS - Un président par intérim avoué, un dauphin Premier ministre et une majorité écrasante : le Sénégal de 2024 rappelle 1981, quand Senghor transmit le pouvoir à Diouf de façon monarchique
Arona Oumar Kane de SenePlus |
Publication 03/12/2024
L’article 35 alinéa 2 de l’ancienne loi constitutionnelle no 76-27 du 6 avril 1976 de la République du Sénégal disposait :
“En cas de démission ou de décès du président de la République ou lorsque l'empêchement est déclaré définitif par la Cour Suprême, le Premier ministre exerce les fonctions de président de la République jusqu'à l'expiration normale du mandat en cours. Il nomme un nouveau Premier ministre et un nouveau gouvernement dans les conditions fixées à l'article 43”.
C’est cette fameuse loi constitutionnelle qui avait valu au Sénégal la transmission du pouvoir d'un président de la République à un autre, sans le passage obligé par la sacro-sainte élection présidentielle. Ainsi, le 1er janvier 1981, sur la simple volonté du président Senghor, qui avait démissionné la veille, Abdou Diouf devenait le nouveau président de la République du Sénégal pour le reste d’un mandat qui allait jusqu’en 1983.
Cette transmission du pouvoir, peu démocratique, s’était pourtant déroulée de manière pacifique, dans un climat social apaisé et n’avait fait l’objet d’aucune contestation populaire. Il faut dire que la perspective de voir un président, qui sentait le vent de l’impopularité commencer à lui souffler doucement dans le dos, partir de lui-même était suffisamment satisfaisante pour que le geste fût plutôt salué par les populations. A cela, il faut ajouter le fait que nous étions dans un contexte où les bouillantes et très actives organisations politiques et celles de la société civile n’avaient pas la force de mobilisation et l’influence qu’elles ont de nos jours.
On peut cependant noter quelques similitudes, avec le contexte actuel, qui questionnent sur la stabilité institutionnelle de notre système démocratique. Cette dévolution quasi-monarchique du pouvoir avait, en effet, été rendue possible grâce à une révision, quatre ans auparavant, de la Constitution de 1963, qui modifiait les règles de suppléance à la tête de l’Etat. Cette réforme majeure avait été simplement décidée par le président Senghor - après s’être choisi un dauphin - et votée par une Assemblée totalement contrôlée par son parti, le PS.
Le président Abdoulaye Wade avait également bénéficié d’une majorité qualifiée, soit trois cinquièmes des députés, et l’avait même utilisée pour créer un poste de vice-président, jamais pourvu. Il avait aussi un dauphin apparent, mais contrairement à Senghor, il s’était heurté à une résistance populaire farouche. Les présidents Diouf et Sall ont eux-aussi pu, à des moments de leurs magistères, disposer de cette majorité qualifiée mais ni l’un ni l’autre n’avait de dauphin apparent, encore moins la volonté de transmettre le pouvoir à un tiers.
Aujourd’hui, nous avons tous les ingrédients favorables à un retour à cette forme de dévolution du pouvoir. D’abord, un chef de l’Etat, M. Bassirou Diomaye Faye, élu dans des circonstances particulières qui en font un président par défaut, ce que l’intéressé reconnaît et assume volontiers. Lors d’un entretien avec la presse sénégalaise, il avait encouragé son premier ministre M. Ousmane Sonko, comme pour faire taire les détracteurs, “non pas à lorgner son fauteuil mais à le regarder clairement”. Il avait ajouté qu’il se bat depuis 10 ans pour que M. Sonko s’installe dans ce fauteuil, qu’il n’a pas renoncé à cette ambition et qu’il n’y renoncera jamais. Cela fait du Premier ministre un dauphin clairement déclaré.
En plus de cette volonté affichée du prince, nous avons un parti présidentiel qui vient de remporter une victoire écrasante aux élections législatives anticipées, sous la houlette du dauphin présidentiel, qui a encore une fois démontré son intelligence stratégique hors du commun. Quelle que soit l’opinion des uns et des autres sur les méthodes et la personnalité du leader du Pastef, force est de reconnaître qu’on a affaire à un véritable génie politique qui déroule, depuis 10 ans, une stratégie gagnante qui le rapproche de plus en plus de ce fameux fauteuil.
Cette nouvelle majorité qualifiée, remportée haut la main, est largement suffisante pour opérer le type de révision constitutionnelle dont il est question. Il suffit en effet que le président Faye soumette à la nouvelle Assemblée un projet de loi constitutionnelle reprenant la lettre de l’ancien article 35 et qu’il obtienne l’adhésion de seulement 99 des 130 élus Pastef pour qu’une telle loi soit adoptée. Sans avoir besoin de passer par un référendum, avantage d’une révision qui serait portée par le chef de l’exécutif. Autant dire que, sur le plan politico-législatif, cela passerait comme une lettre à la poste.
Ensuite, une promulgation de la nouvelle loi par le président de la République, après contrôle de conformité par le Conseil constitutionnel, suivie d’une démission dans la foulée, et le Premier ministre lui succéderait immédiatement. En toute légalité. Cela pourrait se faire dès après l’ouverture de la première session ordinaire et l’installation de la nouvelle assemblée, le 2 décembre 2024, ce qui avec les délais de rigueur pourrait nous amener à une prestation de serment dès janvier 2025 !
Le Conseil constitutionnel, qui serait probablement saisi à la vitesse de l’éclair par l’opposition parlementaire, pourrait toutefois retoquer une telle révision. Il pourrait le faire notamment grâce à une interprétation de l’alinéa 7 de l’article 103 de la Constitution actuelle, qui réaffirme la forme républicaine de l’Etat et stipule l’impossibilité de réviser le mode d’élection du président de la République. Le Conseil pourrait tout aussi valider cette hypothétique loi en arguant que l’article 103 traite de l’élection et pas de la suppléance. C’est tout le sens de la notion d’interprétation qui donne à l’instance juridictionnelle le pouvoir de trancher en dernier ressort.
Bien évidemment, tout cela n’est qu’un scénario de politique-fiction, car ni le président de la République, ni son Premier ministre, n’ont déclaré avoir ce projet de dévolution par voie législative. Ils avaient certes évoqué l’idée de la création d’un poste de vice-président, mais le candidat Diomaye Faye avait bien précisé que ce serait dans la perspective de l’élection de 2029. On peut penser, par ailleurs, que le combat démocratique durement mené par le duo Diomaye-Sonko, au nom de la souveraineté populaire et des valeurs de liberté qu’ils incarnent, les a probablement immunisés contre cette tentation. Mais, l’histoire récente de la vie politique sénégalaise montre, à suffisance, qu’on ne peut être sûr de rien en la matière. D’autres figures avaient porté un combat politique de haute lutte et fait avancer de façon substantielle la démocratie sénégalaise, pour ensuite céder progressivement à la tentation du tripatouillage institutionnel au service d’ambitions personnelles, claniques ou partisanes. La séquence de la dissolution de l’Assemblée nationale, la veille de la date fixée par décret pour la Déclaration de Politique Générale du Premier ministre, doit être considérée comme une alerte à cet égard. Il s’agissait clairement d’un cas de tripatouillage institutionnel à des fins partisanes.
Quelle que soit la part de réalité dans ce scénario hypothétique d’une transmission extra-électorale du pouvoir, le simple fait que notre corpus juridique actuel rende possible une telle opération pose problème. Cela s’apparente à une faille de sécurité, comme dans les systèmes informatiques, c'est-à-dire un élément constitutif du système pouvant servir à compromettre son intégrité. Une démocratie n’est pas une œuvre finie mais un effort de veille continue et de renforcement des fondations qui la soutiennent. Ces fondations doivent être suffisamment solides et complexes, pour qu’il soit impossible de remettre en cause l’architecture globale par la seule volonté d’un individu ou d’un groupe d’individus.
Cette forme de résilience institutionnelle existe ailleurs dans le monde et doit inspirer. L’exemple le plus emblématique est celui des Etats-Unis d’Amérique où la modification de la charte fondamentale est soumise à des conditions si difficiles à réunir qu’elles en font un texte inamendable en pratique. Pour toucher à un seul des articles et amendements de cette Constitution qui date de 1787, ou en introduire un nouveau, il faut d’abord un vote conjoint des deux tiers des deux chambres du Congrès - ou d’une convention réunissant les deux tiers des États. Ensuite, pour entrer en vigueur, la révision doit être ratifiée par un vote des trois quarts des législatures des 52 États - ou d’une convention équivalente. Avec un tel verrou, ce pays, pourtant figure de proue des innovations technologiques et des mutations sociétales perpétuelles, est régi par la même charte fondamentale depuis plus de deux siècles. La plus récente ratification remonte à 1992 et porte sur le 27e amendement proposé en … 1789, soit plus de deux cent ans auparavant !
Cette forme de stabilité constitutionnelle doit être recherchée ; elle doit être un objectif dans le projet de transformation porté par les nouvelles autorités. Il s’agit, pour reprendre la formule de l’ancien président ghanéen, Jerry Rawlings, de « faire en sorte que si le diable lui-même venait à se retrouver à la tête du pays, certaines procédures, certaines pratiques l'empêcheraient de faire ce qu'il veut. Il serait obligé de faire ce que le peuple attend de lui ». Tant qu’il sera possible, dans notre pays, de faire modifier la Constitution par une centaine de députés, sans passer par un référendum, nos institutions resteront bien loin de ce niveau de résistance au diable, indispensable à l'exercice d’une véritable démocratie.
Les promesses du nouveau régime sénégalais se heurtent à une réalité plus complexe que prévu. Les députés de Pastef s'agitent autour des nominations pendant que le pays s'interroge sur sa direction
Hier, au moment où les députés de Pastef captaient l’attention de l’opinion autour d’une guerre de postes et de nominations, le pays ne cessait de se perdre en conjectures sur la direction vers laquelle la gouvernance du président Diomaye Faye nous menait. Si le nouveau régime politique a promis bien de choses au peuple, personne n’a encore vraiment noté de changement véritable. Parfois même, on a plus l’impression que les choses sont en train de régresser.
Les pluies, l’agriculture, l’économie…
Juste pour illustrer, le pays a connu cette année des inondations parmi les plus terribles qu’il ait jamais connues au cours des deux dernières décennies. Une bonne partie de l’arrière-pays a été inondé, et on a compté même des morts, emportés par le débordement des eaux du fleuve Sénégal. Si la ville de Touba n’a pas été épargnée, c’est à peine si certains ont pu noter que la capitale Dakar a eu à se plaindre d’un trop-plein d’eaux de pluie cette année. Il aurait été délicat de le rappeler, si l’on ne voulait pas magnifier le travail accompli par le Président Macky Sall pour en finir avec les inondations. Au contraire, c’est beaucoup plus gratifiant de tourner en dérision les plus de 766 milliards de francs Cfa prétendument gaspillés sous le prétexte de lutte contre les inondations. Ce programme décennal de lutte contre les inondations avait été remis en cause il y a deux ans, après de fortes inondations dont la commune de Keur Massar avait été victime. Pourtant, il n’a pas fallu longtemps pour démontrer que les ouvrages d’assainissement avaient fait l’objet de sabotage. Des personnes malintentionnées avaient délibérément bloqué les ouvrages d’écoulement des eaux de pluie, afin manifestement de provoquer des inondations. Et cela avait été réussi. Maintenant que les motifs politiques de ces sabotages ont disparu, la commune n’a plus revécu cette année, la hantise de fortes pluies d’hivernage.
Mais dans les zones qui n’avaient pas été concernées par ce programme, l’histoire a été bien différente. Au point que le ministre de tutelle a dû sortir, sous forme de pirouette, que l’hivernage de cette année n’était «pas (leur) hivernage»… Les victimes ont dû apprécier.
Mais il n’y a pas que la gestion de la pluie. Dans ces colonnes, nous nous sommes intéressés plusieurs fois à la préparation et la gestion de l’actuelle campagne agricole, pour affirmer que les paysans ne se retrouvaient pas dans les déclarations triomphatrices de la tutelle. Tout le monde se rend compte maintenant, avec le démarrage de la compagne de commercialisation de l’arachide, que les prévisions les plus pessimistes sont en train d’être dépassées. Il suffit, pour s’en convaincre, de se rendre compte que le ministre de l’Agriculture et son homologue du Commerce sont revenus sur leur décision d’interdire l’exportation de l’arachide. La mesure aurait d’ailleurs été très difficile à mettre en œuvre, malgré la mobilisation des Forces de défense et de sécurité (Fds) dont ce n’est d’ailleurs pas le rôle.
Sonko et ses chiffres falsifiés
Ne parlons pas non plus des agrégats macro-économiques. Au mois de septembre dernier, le gouvernement, avec le Premier ministre Sonko en tête, a déclaré que les chiffres de l’économie, sur lesquels les prévisions budgétaires ont été établies, et qui ont été présentés à ce jour aux partenaires économiques et financiers, étaient tous «falsifiés», et que la situation économique du pays était profondément dégradée. La conséquence de ces déclarations ne s’est pas fait attendre. La grande partie des financements espérés des partenaires, même du Fonds monétaire international, a été gelée. Tout le monde retient ses fonds, le temps de voir la direction que le pays prend. Au point que l’on voit sur les réseaux sociaux une vidéo où M. Sonko reconnaît que ses déclarations alarmistes sur l’économie du pays «ont contribué à inquiéter les partenaires, et rendu la situation encore plus difficile». Sans doute un faible moment de lucidité…
Qui cache le rapport trimestriel d’exécution budgétaire du 3ème trimestre ?
La question qui se pose est qu’il faudra que la Cour des comptes publie bientôt son rapport sur la gestion budgétaire 2023, qui correspond à la dernière gestion du régime de Macky Sall. On verra alors si cette institution prendra le contre-pied des décisions qu’elle a annoncées durant les douze années du mandat de Macky Sall, et viendra renforcer les déclarations de l’actuel gouvernement. Ou si la Cour des comptes va réaffirmer son indépendance et produire un rapport en droite ligne de ce qu’elle a toujours produit, et qui traduit l’intégrité de la gestion des finances du pays.
En attendant d’en savoir plus, on se rend compte que le gouvernement actuel a décidé de verser dans le dilettantisme. Contrairement aux bonnes habitudes auxquelles on a été habitués à ce jour, il n’a toujours pas publié le Rapport trimestriel d’exécution budgétaire, pour le troisième trimestre. Le rapport aurait dû être publié depuis le mois de septembre dernier. A ce jour, sur les sites du ministère des Finances et du budget, aucune information n’est donnée sur cette lacune. Le dernier document du genre date de juillet dernier. Or, la publication de ce document est prévue par la loi. D’ailleurs, il est toujours indiqué que «le présent rapport est préparé en application de l’article 70 de la loi organique n° 2020-07 du 26 février 2020 relative aux lois de finances et publié conformément aux dispositions prévues au point 6.6 de l’annexe à la loi n° 2022-12 du 27 décembre 2022 portant Code de transparence dans la gestion des Finances publiques».
Les mauvaises langues diraient sans doute que le gouvernement a des choses qu’il ne souhaiterait pas communiquer au public en ce moment. Car si l’on se réfère au document précédent, on voit que le niveau d’exécution budgétaire n’est pas aussi catastrophique, pour une «économie en ruine», selon les termes du chef du gouvernement. On note en effet, dans le Rapport d’exécution du second trimestre, que «comparées au deuxième trimestre 2023, les ressources du budget général ont évolué à la hausse de 79, 14 milliards F Cfa en valeur absolue, soit 4, 3% en valeur relative. Cette hausse est imputable aux ressources internes (+99, 83 milliards F Cfa, soit +5, 7%) grâce au bon niveau de recouvrement des recettes fiscales (+121, 60 milliards F Cfa, soit +7, 5%), notamment des impôts directs et indirects qui ont respectivement augmenté de 77, 18 milliards F Cfa (soit 10, 7%) et 38, 00 milliards F Cfa (soit 4, 1%), par rapport à l’année précédente». Tout le reste du document est dans la même veine. Si dans l’intervalle, la situation s’est fortement dégradée, le gouvernement devra alors de bonnes explications au Peuple. Et même au contraire, si elle devenait encore plus dramatique, les pouvoirs publics pourraient toujours encore chercher à enfoncer leurs prédécesseurs, et trouveront toutes les explications qui leur passeront par la tête.
On peut imaginer que les choses leur seront rendues encore plus faciles, maintenant que l’Assemblée a pris fonction. Mais les députés savent aussi que leur priorité sera de voter rapidement le budget qui va accélérer la mise en œuvre de la Vision 2050, le Pse du tandem Diomaye-Sonko. Ils ne doivent pas traîner les pas, car ils connaissent les urgences du pays. Et surtout, s’il y a un conseil à leur donner, c’est de réellement encourager la promotion de la transparence, afin d’encourager le monde des affaires à retrouver la confiance en ce pays.
LA QUINZIÈME LÉGISLATURE DÉVOILE SA STRUCTURE DIRIGEANTE
Sous la direction du président Malick Ndiaye, l'institution met en place une équipe dirigeante composée de dix-sept membres, répartis entre la présidence, les vice-présidences, le secrétariat et la questure
L’Assemblée nationale du Sénégal, dirigée par le député Malick Ndiaye, a élu lundi un nouveau bureau à la suite d’intenses débats au cours d’une longue journée d’installation de la quinzième législature, a constaté l’APS.
Voici la composition du nouveau bureau de l’Assemblée nationale
L'ancien député Abass Fall est nommé ministre du Travail, tandis que Yankhoba Diémé hérite du portefeuille des Transports. Cette nouvelle configuration préserve la stabilité d'un gouvernement toujours sous la conduite du Premier ministre Ousmane Sonko
Le président de la République a procédé à un réaménagement du gouvernement consistant à nommer l’ancien député Abass Fall ministre du Travail, de l’Emploi et des Relations avec les institutions, en remplacement de Yankhoba Diémé, lequel va s’occuper désormais des Infrastructures, des Transports terrestres et aériens.
M. Diémé remplace Malick Ndiaye, qui été élu président de l’Assemblée nationale, lundi.
Voici la liste des membres du nouveau gouvernement :
monsieur Ousmane Sonko, Premier ministre ;
monsieur Ahmadou Al Aminou Lo, ministre, secrétaire général du gouvernement ;
madame Yassine Fall, ministre de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères ;
Général Birame Diop, ministre des Forces armées ;
monsieur Ousmane Diagne, ministre de la Justice, Garde des Sceaux ;
Général Jean Baptiste Tine, ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique ;
monsieur Birame Souleye Diop, ministre de l’Énergie, du Pétrole et des Mines ;
monsieur Abdourahmane Sarr, ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération ;
monsieur Cheikh Diba, ministre des Finances et du Budget ;
monsieur Yankhoba Diémé, ministre des Infrastructures, des Transports terrestres et aériens ;
monsieur Daouda Ngom, ministre de l’Environnement et de la Transition écologique ;
monsieur Amadou Moustapha Njekk Sarré, ministre de la Formation professionnelle (Porte-parole du Gouvernement) ;
monsieur Cheikh Tidiane Dièye, ministre de l‘Hydraulique et de l’Assainissement ;
monsieur Alioune Sall, ministre de la Communication, des Télécommunications et du Numérique ;
monsieur Elhadj Abdourahmane Diouf, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation ;
monsieur Serigne Guèye Diop, ministre de l’Industrie et du Commerce ;
madame Fatou Diouf, ministre des Pêches, des Infrastructures maritimes et portuaires ;
madame Maïmouna Dièye, ministre de la Famille et des Solidarités ;
monsieur Abass Fall, ministre du Travail, de l’Emploi et des Relations avec les institutions ;
monsieur Balla Moussa Fofana, ministre de l’Urbanisme, des Collectivités territoriales et de l’Aménagement des territoires ;
monsieur Moustapha Mamba Guirassy, ministre de l’Éducation nationale ;
monsieur Ibrahima Sy, ministre de la Santé et de l’Action sociale ;
monsieur Olivier Boucal, ministre de la Fonction publique et de la Réforme du Service public ;
madame Khady Diène Gaye, ministre de la Jeunesse, des Sports et de la Culture ;
monsieur Mabouba Diagne, ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de l’Élevage ;
monsieur Alioune Dione, ministre de la Microfinance, de l’Économie sociale et solidaire ;
monsieur Mountaga Diao, ministre du Tourisme et de l’Artisanat ;
monsieur Amadou Chérif Diouf, secrétaire d’État aux Sénégalais de l’extérieur ;
monsieur Ibrahima Thiam, secrétaire d’État au Développement des PME/PMI ;
monsieur Momath Talla Ndao, secrétaire d’État à l’Urbanisme et au Logement ;
monsieur Alpha Ba, secrétaire d’État aux Coopératives et à l’Encadrement paysan ;
monsieur Bacary Sarr, secrétaire d’État à la Culture, aux Industries créatives et au Patrimoine historique.
LE MONDE DÉNONCE L'AVEUGLEMENT FRANÇAIS EN AFRIQUE
Dans un éditorial cinglant, le journal souligne l'inadéquation de la réponse française face aux évolutions du continent, critiquant notamment la nomination tardive d'un envoyé spécial dont le rapport vient d'être rendu caduc
(SenePlus) - La France vient d'essuyer un double revers diplomatique majeur en Afrique, révélateur des limites de sa stratégie sur le continent. Comme le rappelle l'éditorial du Monde du 2 décembre 2024, le Tchad et le Sénégal ont simultanément signifié leur volonté de mettre fin à la présence militaire française sur leur territoire, marquant ainsi un tournant historique dans les relations franco-africaines.
D'après le quotidien français, la coïncidence des annonces est particulièrement significative. Le Tchad a rompu son accord de défense avec la France le 28 novembre, tandis que le Sénégal exprimait sa volonté de voir partir les militaires français. Le Monde souligne que les deux pays invoquent des motivations similaires, citant notamment les autorités tchadiennes qui souhaitent "affirmer leur souveraineté pleine et entière", faisant écho aux propos du président sénégalais Bassirou Diomaye Faye qui s'interroge : "Pourquoi faudrait-il des soldats français au Sénégal ? Cela ne correspond pas à notre conception de la souveraineté et de l'indépendance."
L'éditorial du Monde pointe particulièrement les défaillances de la stratégie française. Le journal met en cause "la politique de petits pas peu lisible d'Emmanuel Macron" et son incapacité à "tirer les enseignements de cette mondialisation du continent." Le quotidien du soir souligne que la France "s'est trop longtemps sentie 'chez elle'" dans ses anciennes colonies, négligeant l'émergence de nouvelles influences, qu'elles soient "américaine, russe, chinoise, turque, saoudienne ou israélienne."
La critique du Monde envers l'exécutif français est particulièrement sévère concernant sa gestion récente de la situation. Le journal relève que plutôt que d'opter pour "la perspective claire de retrait négocié qu'impose la situation", le président Macron a choisi de "gagner du temps" en nommant un envoyé personnel, Jean-Marie Bockel, dont le rapport, qualifié de confidentiel, vient d'être "largement balayé par les décisions de Dakar et de N'Djamena."
Le quotidien conclut son analyse en formulant un avertissement clair : l'exécutif français doit désormais "gagner en clairvoyance, en clarté et en cohérence", sous peine de continuer à avoir "un temps de retard sur les réalités africaines" et de voir son influence décliner au profit des nouveaux acteurs qualifiés de "prédateurs du continent."
Ce double revers diplomatique apparaît d'autant plus significatif qu'il concerne deux pays aux profils très différents : le Tchad, décrit par Le Monde comme "un régime militaire autoritaire", et le Sénégal, présenté comme "une démocratie dirigée par un duo panafricaniste 'antisystème'." Cette convergence, malgré des modes de gouvernement distincts, souligne l'ampleur du défi auquel la France doit désormais faire face dans sa politique africaine.
LE SOUDAN POUSSE LE TCHAD À LARGUER PARIS
La rupture des accords militaires entre le Tchad et la France masque des tensions autour de la guerre au Soudan. Les autorités françaises, qui pressaient N'Djamena d'adopter une position neutre dans ce conflit, se sont heurtées au refus de Déby
(SenePlus) - La rupture des accords de coopération militaire entre le Tchad et la France, annoncée le 28 novembre, révèle des tensions diplomatiques profondes, principalement cristallisées autour de la guerre au Soudan. Selon Jeune Afrique (JA), cette décision a pris Paris totalement de court, intervenant quelques heures seulement après la visite du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, à N'Djamena.
D'après les informations rapportées par le média panafricain, cette rupture trouve son origine dans des désaccords concernant la position tchadienne vis-à-vis du conflit soudanais. Une première friction serait apparue lors d'une rencontre à Paris début octobre entre les présidents Emmanuel Macron et Mahamat Idriss Déby Itno. Le chef d'État français aurait alors évoqué "le rôle des Émirats arabes unis dans ce conflit", ces derniers étant "accusés de soutenir Mahamat Hamdan Dagalo, dit Hemetti, notamment via des livraisons d'armes passant par le Tchad", précise JA.
La situation s'est particulièrement tendue lors de la visite de Jean-Noël Barrot au Tchad. Selon le journal, l'échange entre le ministre français et le président tchadien a été "houleux", notamment lorsque le premier a réitéré "l'appel d'Emmanuel Macron pour une neutralité tchadienne dans la guerre au Soudan". Le lendemain, lors de sa visite à Adré, à la frontière soudanaise, le ministre français dénonçait "la main invisible de certaines grandes puissances" dans le conflit soudanais, une référence à peine voilée à la Russie et aux Émirats arabes unis.
L'enjeu soudanais apparaît d'autant plus crucial que, comme le souligne Jeune Afrique, "plusieurs milliers de combattants tchadiens, entre autres menés par l'opposant à Mahamat Idriss Déby Itno, Ousmane Dillo Djerou, combattent aujourd'hui aux côtés de l'armée soudanaise d'Abdel Fattah al-Burhan contre les hommes du général Hemetti".
Cette rupture intervient dans un contexte de rapprochement entre N'Djamena et Abou Dhabi. Jeune Afrique révèle qu'après sa rencontre tendue avec Emmanuel Macron, le président tchadien s'est rendu aux Émirats arabes unis, où une aide de "300 milliards de francs CFA" lui a été octroyée par le Fonds d'Abou Dhabi pour le développement.
Un ancien conseiller du président tchadien, cité par le journal, analyse cette décision comme "un message" double : "Il dit aux Français que le Tchad n'a pas à être sermonné en ce qui concerne le Soudan. Et il dit aux Tchadiens, à quelques semaines des législatives, qu'il est capable de taper du poing sur la table". Toutefois, cette même source précise que cette rupture pourrait davantage viser à renégocier les accords "pour qu'ils correspondent davantage aux intérêts tchadiens" plutôt qu'à expulser les forces françaises.
Face à cette situation, le Quai d'Orsay s'est pour l'instant contenté de "prendre acte de la décision tchadienne", conclut Jeune Afrique.