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22 avril 2025
Diaspora
LE CHOC DES STYLES
D'un côté, Ousmane Sonko, Premier ministre connu pour sa fougue et son franc-parler, de l'autre, Amadou Ba, ancien numéro 2 de Macky Sall, réputé pour sa mesure et sa pondération. Profils des deux personnalités politiques les plus en vue du moment
Depuis quelques jours, l’on ne parle que du débat. Celui devant opposer le Premier ministre Ousmane Sonko à l’ancien n°2 du président Macky Sall, Amadou Ba. Comme lors des séances de présentation dans les sports de combat, les protagonistes ne cessent de se lancer des piques et d’alimenter les polémiques entre leurs militants et sympathisants. ‘’EnQuête’’ vous présente les profils des deux personnalités politiques les plus en vue du moment.
Amadou Ba est né le 17 mai 1961 à Dakar, plus précisément à Grand-Dakar. Dans un portrait-enquête, Seneweb informait qu’il a passé son enfance dans un quartier chaud de Dakar appelé ‘’Kognou Bagarre’’ (littéralement le quartier de la bagarre, en wolof). Les témoignages sont presque unanimes. L’homme était plus ou moins rangé, focus sur ses études, notamment à l’école primaire Route des puits où il a fait ses humanités, loin du petit banditisme et des fumeurs de chanvre indien.
Après l’entrée en 6e, l’ancien Premier ministre est orienté au lycée Maurice Delafosse. Le baccalauréat (série technique de gestion) en poche, il file à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar où il décrochera son diplôme de Maitrise en sciences économiques (option gestion des entreprises) au milieu des années 80. Par la suite, il réussit au concours d’entrée à l’Enam, d’où il est sorti en 1988.
Né le 15 juillet 1974 à Thiès, Ousmane Sonko, nourrisson de 6 mois, a fait une brève escale à Vélingara où il séjournera jusqu'à l'âge de 18 mois, avant de quitter le Fouladou pour d'autres destinations. Sur les terres de sa ligne paternelle, Ousmane ne s'établira que vers l'âge de 6 ans. Pour faire ses études notamment. Dans un portrait qu’avait réalisé ‘’EnQuête’’, ses proches le décrivaient déjà comme un bon bagarreur, têtu, parce que très à cheval sur la vérité et les principes.
Après l'entrée en 6e, Ousmane dépose ses baluchons au collège Amilcar Cabral où il obtiendra son BFEM, avant d'atterrir au lycée Djignabo puis à l'université Gaston Berger de Saint-Louis. Contrairement à son adversaire qui avait opté pour les sciences économiques, lui a fait droit public à l’UGB, avant de rejoindre l’ENA après la Maitrise. Il va continuer à se former notamment en finances publiques et en fiscalité.
Un débat entre un gestionnaire et un juriste
Du point de vue du parcours professionnel, difficile de faire mieux qu’Amadou Ba. Sorti de l’Enam en 1988, il eut son premier poste à Diourbel en tant qu’inspecteur stagiaire. Inspecteur-chef du 1er Secteur de taxe sur la valeur ajoutée à Dakar, il va faire en 1991 un stage de taxe sur la valeur ajoutée à l’Institut international d’administration publique de Paris, puis en audit des banques, assurances et grandes entreprises à Baltimore, aux États-Unis, avant de retourner au Sénégal où il a gravi presque tous les échelons. Chef d’inspection à Dakar-Plateau, délégué dans les fonctions de commissaire contrôleur des assurances ; inspecteur vérificateur à la Direction des vérifications et enquêtes fiscales. En 2002, il est promu chef du Centre des grandes entreprises de la Direction des impôts, directeur des Impôts en 2005, avant d’occuper la plus haute station au niveau de cette administration, en 2006. Poste qu’il occupera jusqu’à sa nomination comme ministre de l’Économie et des Finances, en 2013.
Artisan principal de la refonte du Code général des impôts de 2012, il a aussi été au cœur de l’élaboration du Plan Sénégal émergent (PSE). En 2019, accusé de nourrir l’ambition de succéder au président Sall, il est débarqué de son poste stratégique, pour être bombardé ministre des Affaires étrangères. Quelque mois plus tard, il est déchargé de toutes ses fonctions par son ex-mentor qui finira par le reprendre et en faire son n°2 et Premier ministre.
C’est un vrai révolutionnaire, un contestataire qui n’hésitait pas à aller au bras de fer avec ses supérieurs hiérarchiques. L’un de ses plus grands faits d’armes au sein de cette administration, c’est d’avoir créé avec ses camarades un organisme syndical dénommé le Syndicat autonome des agents des impôts et domaines (SAID), trois ans seulement après sa sortie de l’école. Naturellement, Sonko en deviendra le premier secrétaire général. La mise en place de ce syndicat, il l’a toujours justifiée par un désir de mettre les travailleurs à l’abri du besoin, en vue de ne plus les exposer à la corruption.
Présenté comme un ‘’incorruptible’’, quelqu’un qui a eu une carrière courte, mais assez lisse, Sonko n’a pas eu à occuper de postes clés dans cette administration. On sait juste qu’il a débuté au Centre des services fiscaux de Pikine et a également été affecté à la Direction du contrôle interne comme auditeur. Ses proches l’expliquent par son refus de toute compromission. Il en sera radié en 2016 pour manquement à son devoir de réserve.
Dans la foulée, il se présente aux élections législatives de 2017 et est élu grâce au plus fort reste.
Le carriériste face au contestataire
Présenté à tort comme un technocrate, Amadou Ba est un vieux routier de la politique sénégalaise. Un ancien du Parti socialiste, ancien ‘’protégé de Diop-le-maire’’, selon Seneweb, fils d’une ancienne militante du parti d’Abdou Diouf. Ba a démarré sa carrière politique dans les années 1990 aux Parcelles-Assainies, alors qu’il était déjà jeune cadre au niveau de l’administration des impôts. En 1996, il est élu conseiller municipal à la ville de Dakar. ‘’Il restait là jusqu’à 2 h du matin avec nous à faire du porte-à-porte’’, confiait Serigne Wagane Sougou, ancien baron du PS à nos confrères, qui ajoutaient : ‘’L’homme passait son temps plus dans son fief politique que dans sa maison à Nord-Foire. Il était aux Parcelles de 13 h à 14 h 30 mn, puis de 21 h à 3 h et même parfois 4 h.’’
À la chute du régime socialiste en 2000, Amadou Ba prend un peu ses distances et fait focus sur son parcours professionnel. Il tissera néanmoins de bonnes relations avec les tenants du nouveau régime, dont le fils d’Abdoulaye Wade, Karim. Certains n’avaient d’ailleurs pas manqué de le taxer de membre de la Génération du concret de Karim Wade. Lui avait préféré se faire très discret, sans prise de position publique manifeste.
C’est ainsi qu’il a su préserver son poste jusqu’en 2013. À l’arrivée de Macky Sall, il est promu sans qu’on ne sache comment ministre de l’Économie et des Finances.
Plus tard, vers 2016, il décide de revenir officiellement en politique en rejoignant officiellement l’Alliance pour la République. En 2017, il est désigné tête de liste de la coalition présidentielle dans la capitale sénégalaise. C’est d’ailleurs l’une des rares élections remportées par l’ancienne majorité à Dakar.
Le système vs l’antisystème
Son père fut un socialiste convaincu. Mais lui a toujours abhorré la politique. “Je détestais tellement la politique que, lorsque le débat virait à la politique, je me levais et je m’en allais”, confiait-il au journal ‘’L’AS’’. Il est même rapporté, dans un article fait par ‘’EnQuête’’ en 2016, que lui-même ne cessait de demander à son père de cesser ses activités politiques.
C’est donc par pure effraction que Sonko s’est mis sur le chemin de la politique, en passant d’abord par le syndicalisme.
De la création du syndicat en 2005 à 2013, l’actuel Premier ministre a mené une lutte farouche, mais interne. Il se révélera au grand public vers 2013, avec la traque des biens mal acquis qui avait valu des déboires à des membres de son syndicat, dont Tahibou Ndiaye. Ousmane Sonko se défoule sur les plateaux, défend son ami et crie au scandale et à l’injustice. Dans la foulée, en 2014, le parti Pastef est né et il est désigné par les fondateurs comme celui qui est le plus à même d’en être le porte-étendard. Ragaillardi par cette nouvelle casquette, il va mener une lutte farouche contre le régime Sall jusqu’à sa radiation en 2016.
Dans la foulée, il se présente aux élections législatives et devient député grâce au plus fort reste. Candidat à la Présidentielle de 2019, il fait sensation en se classant 3e avec plus de 600 000 voix pour ses premières élections présidentielles. C’est grâce à l’affaire Adji Sarr, en 2021, qu’il va s’imposer comme principal challenger de Macky Sall, pendant que les principaux leaders de l’opposition acceptaient de se ranger derrière lui, pour les Locales et les Législatives de 2022. C’était le début d’une ascension fulgurante jusqu’à la dernière Présidentielle qui a permis à son camp de terrasser le baobab BBY et de l’installer à la primature.
Entre la fougue et la mesure
Entre Amadou Ba et Ousmane Sonko, c’est comme entre le jour et la nuit. Alors que l’un est connu très posé, mesuré, pondéré et discret, l’autre est connu pour ses talents de provocateur, sa fougue, son agressivité… Ce qui pourrait certes constituer sa force pour ce débat, mais aussi une faiblesse. Déjà, dans un post publié hier sur ses plateformes, il donne un avant-goût de ce que devrait être le débat. ‘’Je puis vous promettre que les stigmates de mauvaise gestion de l’ancien Premier ministre seront aussi criards (sic) que les rayures d’un zèbre. Tout est référencé, sourcé et renseigné à partir de documents officiels irréfutables (y compris des rapports qui l’ont mis en cause) et sera mis à la disposition du peuple sénégalais’’, menace-t-il même au seuil du débat.
Ba est ainsi averti. L’actuel Premier ministre va faire ce qu’il sait faire de mieux : c’est-à-dire déballer. A-t-il les arguments pour le contrer, se défendre des accusations qui seront portées contre sa personne ? C’est l’un des plus grands enjeux de ce débat qui s’annonce épique, si jamais il se tient.
Conscient de la gravité des accusations contre lui, l’ancien Premier ministre a apporté récemment quelques bribes de réponses. ‘’Tout au long de ma carrière, disait-il en conférence de presse, j'ai toujours servi le Sénégal avec rigueur, transparence et intégrité. Aucun acte, aucune écriture ne peut m'être imputé dans quelques gestion frauduleuse ou malversation que ce soit’’. L’ancien ministre des Finances d’ajouter : ‘’Je le dis avec foi, fermeté et solennité, je n'ai jamais été épinglé dans aucun rapport d'audit. J'ai servi mon pays dans le respect strict des règles de bonne gouvernance et je rends grâce à Dieu pour cela. Aujourd'hui, certains m'accusent sans apporter la moindre preuve concrète. Je n'ai jamais falsifié les statistiques budgétaires et je nourris un doute profond sur la véracité de ces allégations’’, se défendait-il, non sans préciser qu’il n’était même pas à la tête du département des Finances durant la période couverte par les audits.
Il faut noter que rarement, pour ne pas dire jamais, les deux hommes n’ont été mis à l’épreuve dans des confrontations de cette envergure. Alors que l’ancien maire de Ziguinchor a toujours excellé dans le one man show – soit avec des points de presse ou des émissions où rien ne l’empêche de dérouler - l’enfant de Grand-Dakar, lui, a fait très peu d’émissions contradictoires.
Tous les deux possèdent cependant des atouts certains pour gratifier le public d’un débat de très haute facture.
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LE PACTE POUR ROMPRE AVEC LES VIEUX DÉMONS
Le Pacte National de Bonne Gouvernance Démocratique transcende la simple promesse électorale : il représente un contrat social historique pour un Sénégal nouveau. Son application immédiate et intégrale s'impose comme une nécessité absolue
Le Sénégal s'engage dans une transformation historique de sa gouvernance avec le Pacte National de Bonne Gouvernance Démocratique, une initiative cruciale signée par 13 des 17 candidats à l'élection présidentielle de mars 2024. Cette démarche inédite répond aux aspirations profondes d'un peuple déterminé à tourner la page des années de recul démocratique.
Fruit des conclusions des Assises nationales de 2008-2009 et des recommandations de la Commission nationale de réforme des institutions (CNRI) de 2013, ce Pacte représente la pierre angulaire d'une refondation institutionnelle urgente. Il établit un cadre strict pour la gouvernance des cinq prochaines années, avec des mesures concrètes à mettre en œuvre dès la première année du mandat présidentiel.
Au cœur de cette réforme : l'instauration d'une démocratie participative où la voix citoyenne devient constitutionnelle. Le texte prévoit une refonte complète de l'administration publique, imposant transparence, mérite et dépolitisation. La gestion des ressources naturelles, point névralgique du développement national, sera soumise à des normes strictes de transparence et d'équité.
L'indépendance de la justice, la séparation effective des pouvoirs et la décentralisation renforcée constituent les piliers de cette réforme. Un comité indépendant de suivi veille à l'application rigoureuse des engagements, garantissant ainsi la rupture tant attendue avec les pratiques du passé.
Ce pacte transcende la simple promesse électorale : il représente un contrat social historique pour un Sénégal nouveau. Son application immédiate et intégrale s'impose comme une nécessité absolue pour répondre aux attentes des Sénégalaises et des Sénégalais qui ont clairement exprimé leur soif de changement dans les urnes.
LA DIASPORA, TRÉSOR DU PASTEF
Fort de ses 10 000 adhérents en France, le parti présidentiel démontre sa capacité de mobilisation hors des frontières sénégalaises. Une force de frappe financière qui illustre le poids grandissant de la diaspora dans la politique sénégalaise
(SenePlus) - En seulement cinq jours, la branche française du Pastef a récolté 6 000 euros pour financer la campagne des législatives du 17 novembre. Une mobilisation qui n'est pas une première : en janvier dernier, lors d'un dîner de gala à Paris, les militants avaient collecté 190 000 euros pour la présidentielle, rapporte Le Monde.
Le parti du président Bassirou Diomaye Faye et du Premier ministre Ousmane Sonko peut compter sur une base solide en France, où résident entre 200 000 et 300 000 Sénégalais. "Pour ces élections législatives comme pour les derniers scrutins, la section française du Pastef va jouer un rôle important", confie au Monde un dirigeant du parti sous couvert d'anonymat.
Les chiffres confirment cette influence : le Pastef revendique 10 000 adhérents à jour de cotisation en France. Plus significatif encore, le parti est arrivé en tête dans la circonscription Europe du Nord et du Centre lors des législatives de 2022 et de la présidentielle de 2024, un territoire où trois sièges de députés sont en jeu pour le prochain scrutin.
Cette implantation n'est pas le fruit du hasard. Comme l'explique au Monde Amadou Tidiane Thiello, doctorant à Bordeaux étudiant le Pastef en Europe, "la diaspora a vite été un axe de la stratégie d'Ousmane Sonko quand il a fondé le Pastef, en 2014". Les visites de Bassirou Diomaye Faye à Paris en 2018 et 2022, avant son accession au pouvoir, témoignent de cette attention particulière.
La section française est devenue un réservoir de talents pour la nouvelle administration. Parmi les nominations récentes : Alioune Sall, ancien coordinateur, est désormais ministre de la communication, Fatou Kiné Diakhaté a rejoint le cabinet présidentiel, et Jean-Michel Sène, 28 ans, dirige l'Agence sénégalaise d'électrification rurale.
Les militants français du Pastef ont également développé des connexions avec la politique française, notamment avec La France insoumise (LFI). Mariama Dieng, cadre du parti en France, a ainsi contribué à organiser la visite de Jean-Luc Mélenchon à Dakar en mai et facilité la participation d'Ayib Daffé, secrétaire général du Pastef, aux universités d'été de LFI.
par Thierno Alassane Sall
PAUVRE DIOMAYE
Après avoir été l'exécutant de son Premier ministre sur la dissolution de l’Assemblée, le président est maintenant sommé de se renier une nouvelle fois devant les Sénégalais, après la nomination de Samba Ndiaye
Après avoir été l'exécutant de son Premier ministre sur la dissolution de l’Assemblée nationale, le président Diomaye est maintenant sommé de se renier une nouvelle fois devant les Sénégalais, après la nomination de Samba Ndiaye, pourtant membre de la coalition Diomaye Président.
Qui pour croire à une vague d'indignation spontanée qui viendrait des militants de base outrés, et non à une cabale montée par des voix autorisées de la Pastefie. Ces mêmes voix étaient muettes devant des nominations autrement plus scandaleuses et d'autres ralliements bien plus honteux. Où étaient ces "indignés de la 25e heure" lors des nominations de présumés trafiquants de visa, des personnalités impliquées par des rapports de l’IGE ? Ou encore de ceux qui désertent les listes de l'opposition et appellent à voter pour le régime à trois jours de la campagne ?
Diomaye, en agissant enfin comme un président sans consulter son mentor, s’est attiré un rappel à l’ordre public. Une humiliation inutile, si tant est qu’il accepte de se plier.
Où va la République ?
FIN CONTROVERSEE DES SOUTIENS PRÉSIDENTIELS AU WASHINGTON POST
Le monde de la presse américaine est en ébullition après l'annonce du journal de renoncer à soutenir des candidats. Si la direction évoque un "retour aux sources", certains y voient un manque de courage et une menace pour la démocratie
(SenePlus) - Le Washington Post, l'un des journaux les plus influents des États-Unis, a annoncé vendredi qu'il mettait fin à sa tradition de longue date consistant à soutenir des candidats à la présidence. Dans une note envoyée à la rédaction, le directeur général Will Lewis, a déclaré : "The Washington Post ne soutiendra pas de candidat à la présidence lors de cette élection. Ni lors des futures élections présidentielles. Nous revenons à nos racines de ne pas soutenir de candidats à la présidence."
Comme le rappelle le New York Times (NYT), le Post a soutenu des candidats à la présidence depuis 1976, lorsqu'il a donné son approbation à Jimmy Carter, qui a ensuite remporté l'élection. Avant cela, le journal ne le faisait généralement pas, bien qu'il ait fait une exception en 1952 pour soutenir Dwight Eisenhower. M. Lewis a précisé que la décision de ne plus soutenir de candidats à la présidence a été prise après un débat entre les hauts dirigeants du Post, ajoutant que ce n'était "ni un soutien tacite à un candidat" ni "une condamnation d 'un autre". Il a fait référence à un éditorial publié par le journal en 1960, qui affirmait qu'il était "plus sage pour un journal indépendant dans la capitale de la nation" d'éviter tout soutien.
Cette décision a provoqué des réactions immédiates au sein du journal. Au moins un membre du département des opinions, Robert Kagan, a démissionné en signe de protestation. Marty Baron, l'ancien rédacteur en chef du Post qui a dirigé le journal pendant une période de succès éditorial et commercial, a qualifié cette décision de "lâcheté, avec la démocratie comme victime", dans un message sur X. Il a ajouté que l'ancien président Donald J. Trump y verrait une invitation à continuer d'essayer d'intimider Jeff Bezos, le propriétaire milliardaire du Post. "Une absence de courage inquiétante dans une institution réputée pour son courage", a-t-il déclaré.
Les dirigeants de la Washington Post Guild ont exprimé leur "profonde préoccupation" face à la décision de ne pas soutenir le candidat "à peine 11 jours avant une élection extrêmement importante". Dans un communiqué rapporté par le NYT, ils ont déclaré : "Le message de notre directeur général, Will Lewis - et non du comité de rédaction lui-même - nous inquiète quant à une éventuelle ingérence de la direction dans le travail de nos membres de la rédaction."
Selon le New York Times, la décision du Post fait suite à des remous au sein du Los Angeles Times, où le responsable du comité de rédaction et deux de ses rédacteurs ont démissionné cette semaine pour protester contre la décision du propriétaire, le milliardaire Patrick Soon-Shiong, de bloquer un projet de soutien à la présidentielle. Mariel Garza, l'ancienne rédactrice en chef des éditoriaux, a déclaré mercredi dans une interview accordée à Columbia Journalism Review que le comité de rédaction avait prévu de soutenir Kamala Harris et qu'elle avait rédigé les grandes lignes. "Je démissionne parce que je veux qu'il soit clair que je ne suis pas d'accord avec notre silence", a-t-elle déclaré. "En ces temps dangereux, les gens honnêtes doivent se lever."
Dans un message publié sur X mercredi, le Dr Soon-Shiong a accusé le comité de rédaction de ne pas avoir suivi sa directive d'analyser les politiques positives et négatives de chaque candidat pendant son mandat à la Maison Blanche. "Avec ces informations claires et non partisanes côte à côte, nos lecteurs pourraient décider qui serait digne d'être président pour les quatre prochaines années", a-t-il déclaré. "Au lieu d'adopter cette voie comme suggérée, le comité de rédaction a choisi de rester silencieux et j'ai accepté leur décision."
Les journaux à travers les États-Unis ont progressivement renoncé à soutenir des candidats politiques ces dernières années, certains se demandant si cette pratique est encore pertinente. En 2022, la société d'investissement Alden Global Capital, qui possède quelque 200 journaux, a déclaré que ses publications ne soutiendraient plus les principaux candidats politiques, invoquant la confusion des lecteurs entre ce qui relève de l'opinion et ce qui relève de l'information, ainsi que le discours public "de plus en plus acrimonieux".
Le comité de rédaction du New York Times a soutenu Mme Harris à la présidence le 30 septembre, déclarant : "Il est difficile d'imaginer un candidat moins digne de servir comme président des États-Unis que Donald Trump." Mais en août, il a déclaré qu'il cesserait de soutenir les candidats aux élections new-yorkaises, y compris à la mairie de New York.
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DIOMAYE APPELLE À L'UNITÉ NATIONALE
Le chef de l'État met en garde, dans un discours solennel ce vendredi 25 octobre, contre les dérives enregistrées ces derniers jours, porteuses de menaces pour la stabilité et la démocratie du pays
(SenePlus) - À l'approche des élections législatives anticipées du 17 novembre, le président Bassirou Diomaye Faye a lancé un appel solennel à tous les Sénégalais, en particulier aux acteurs politiques de tous bords, les invitant à éviter les dérives dans leurs discours. et leurs actes durant la campagne électorale. Dans une déclaration à la nation, ce mercredi, le chef de l'État a déploré les propositions et comportements observés ces derniers jours, porteurs de "relents communautaires ainsi que des menaces verbales ou physiques dans l'espace public, médiatique et sur les réseaux sociaux".
"Ce n'est pas ainsi que nous devons exprimer nos divergences", a rappelé le président Faye, soulignant que les élections sont un moment crucial de choix démocratique, un moment de fête et non un prétexte à la discorde. Il a donc appelé chaque acteur à faire preuve de responsabilité, de retenue et de modération, insistant sur la nécessité de préserver collectivement la stabilité et la démocratie du Sénégal.
Le président de la République a également rappelé les changements significatifs vécus ces derniers mois dans la paix et la sérénité, saluant la maturité exceptionnelle du peuple, la vitalité de la démocratie et la robustesse des institutions du pays. Il a réaffirmé son engagement à servir chaque Sénégalais, sans distinction. Pour honorer cet engagement, il a rappelé avoir renoncé à ses fonctions de secrétaire général du Parti Pastef les Patriotes afin de se placer au-dessus des querelles partisanes et de consacrer toute son énergie au service exclusif de la nation.
Face aux nombreux défis qui attendent le Sénégal, le président Faye exhorte chaque citoyen à résister aux tentatives de division et aux manipulations, soulignant que c'est dans l'unité que le pays trouvera la force nécessaire pour relever ces défis. "Ensemble, dans la solidarité et le respect, nous serons plus forts", a-t-il martelé.
Par Makkane
DANGER CLAIR ET PRÉSENT
Installé dans la logique d'intimidation des citoyens exerçant leur liberté d'expression, le gouvernement Sonko ne rassure pas sur le chapitre de la gouvernance transparente, inclusive
S'il ne dépendait que des politiciens sans doute, la flamme du patriotisme et la démocratie qui gêne leurs accointances accoutumées aux combinaisons de la compromission et de la trahison eût été bien vite éteinte.
Mais la vigilance citoyenne des organisations de la société civile, les femmes et les jeunes se dressent en rempart, ne cessant pas d'entretenir et d'aviver la vigilance collective par l'observation attentive, active et résolue d'une population facile à embobiner, également prompte à se ressaisir.
Triste, le populisme a de beaux jours devant lui.
Mais il y a plus grave que le populisme, c'est le séparatisme. La trahison éhontée du sieur Déthié Fall, surnommé "Gathié" Fall sur les réseaux sociaux est la forfaiture la plus récente qui interpelle sur la problématique de l'éthique dans l'action politique.
L'histoire du Sénégal est émaillée de ces revirements spectaculaires, les reniements outrageants, ôtant à l'art de la gestion de la cité toute sa noblesse.
En 1968, Doudou Ngom arrimait le mouvement syndical au char du gouvernement pour un strapontin ministériel au nom de la "participation responsable" concoctée par notre poète-président.
Il y avait naguère une formalité à l'action par la théorie. Mais aujourd'hui, c'est seulement du " mbeukk rideau". Rires !
La rue des illicitement nantis, adeptes du gain facile vers les nouveaux locataires du pouvoir n'étonnent guère les Sénégalais désabusés, habitués qu'ils sont aux turpitudes d'une classe frauduleuse et parasitaire de la société, obligée de prêter allégeance à tous les corrompus soucieux de se maintenir par un système huilé de la concussion et de la dépravation.
La richesse de notre société est avant tout constituée d'un ensemble de valeurs immatérielles, des codes de conduite, non écrits, intériorisés dans la conscience collective. Lorsque ces valeurs se déprécient, c'est comme si les vannes des barrages cédaient sous la poussée de la puissance des courants de l'opulence mal distribuée, du trop plein mal géré.
Ce n'est pas de gaieté de cœur qu'un ingénieur procède au lâchage des eaux qui devraient servir au développement.
La société sénégalaise oscille, proche d'un précipice car les partis politiques ont depuis longtemps atteint leurs limites. Notre loi fondamentale, la Constitution, doit être revue en ses termes de représentation nationale.
Le mode de fonctionnement des partis politiques est anti-démocratique, ils sont des facteurs de corruption, puisque leurs dirigeants ne peuvent pas respecter leurs engagements auprès des électeurs et ne peuvent justifier le financement de leurs activités. L'agitation est le seul fonds de commerce. Les situations d'urgence pour les secours sont sujettes aux discours démagogiques, les consensus durables sont impossibles du fait de la permanence des compétitions électorales.
Il s'en suit une dégringolade de la toiture humaine, l'éclatement des fondements de l'édifice. Le Sénégal en est arrivé là. Les sages maîtres sont défiés par leurs disciples immatures, les aînés pacifiques sont déshérités par les cadets extravagants, les employés de l'État décident des dates d'ouverture des classes et les insulteurs publics sont porteurs de voix.
Autour des situations concrètes, les démarches rationnelles et scientifiques sont rangées derrière les émotions et les potions distillées par les prédicateurs-chroniques.
Les actes de violence et la dissimulation ont porté le bonheur au sieur Ousmane Sonko devenu Premier ministre. Le culte de l'occulte et la fabulation agressive sont en train de devenir un mode opératoire accepté, ancré pour réussir en politique. L'ex-fonctionnaire radié, présomption violeur, reconnu coupable de corruption de la jeunesse est aux manettes.
Il n'est pas élu du peuple, mais il s'est approprié des prérogatives non conformes au régime présidentiel consacré par la Constitution de notre pays. Par le jeu de la manipulation et la mobilisation de ses inconditionnels chauffés à blanc, il est parvenu à isoler et réduire l'influence du chef de l'État, à son profit personnel.
Si ce n'était pas la nature des forces cachées derrière cette nébuleuse pastefienne victorieuse, acceptant son droit au peuple de se tromper, nous laisserions Sonko et compagnie se dérouler jusqu'au prochain scrutin.
Aujourd'hui rien n'indique que cette forme d'État unitaire et républicain que nous chérissons tant survivra jusqu'à cette date au regard de la tendance pernicieuse de déconstruction en cours.
Les attaques répétées à l'endroit de la presse libre et des leaders d'opinions, la banalisation des institutions religieuses et la répression de l'opposition, sont autant de signes d'intolérance annonciateurs du déclin progressif de la démocratie.
Tout ceci pouvait encore être rangé sur le registre d'un déficit de culture étatique lié au noviciat du début de la période d'apprentissage si les corps constitués que sont l'armée et la justice n'étaient pas mêlés à l'empressement destructeur.
Nos vaillantes et loyales forces de défense et de sécurité ont consenti des sacrifices énormes pour le maintien de l'intégrité territoriale de notre pays, au prix de nombreuses pertes humaines et matérielles.
N'est-ce pas une haute trahison à vouloir faire reculer ces acquis pour la pacification des zones de conflits ? Le silence des chacals depuis sept mois après qu'ils aient descendu les couleurs nationales dans certaines écoles du sud ne pouvait pas être ignoré par les citoyens consciencieux.
Est-ce un hasard de calendrier ou suivi d'agenda, la cérémonie avortée de dédicace au plein cœur de la capitale d’un ouvrage pro-MFDC ? Les démocrates sincères souhaitaient se tromper sur les allégations de connivence Pastef-rebellion, mais les actes posés commencent à éveiller les soupçons légitimes.
Installé dans la logique d'intimidation des citoyens exerçant leur liberté d'expression, le gouvernement Sonko ne rassure pas sur le chapitre de la gouvernance transparente, inclusive. S'il veut bâillonner les Sénégalais, ce sera alors au prix d'un sacrifice plus élevé que celui consenti pour l'accession au pouvoir.
Le danger est clair et présent, le président Diomaye Faye que nous pouvons créditer de bonne foi puisqu'il a prêté serment devant Dieu et la Nation pour la défense de l'intégrité territoriale et l'unité nationale est appelée à la rencontre avec son destin solitaire, solidaire des armées dont il est le chef.
LE DÉBAT SONKO-BA MAINTENU PAR LES ORGANISATEURS
L'EAO et ITV confirment ce vendredi leur détermination à organiser le face-à-face entre Ousmane Sonko et Amadou Ba, passant outre les réserves du CNRA qu'ils jugent non compétent en la matière
(SenePlus) - Dans un communiqué conjoint publié ce vendredi 25 octobre 2024, l'École d'Art Oratoire et de Leadership (EAO) et la chaîne ITV réaffirment leur détermination à organiser le débat tant attendu entre le Premier ministre Ousmane Sonko et son prédécesseur Amadou Ba, malgré les réserves émises par le Conseil National de Régulation de l'Audiovisuel (CNRA).
L'EAO, qui se présente comme "une institution privée d'excellence, spécialisée dans la formation et l'accompagnement des leaders, managers et top décideurs du Sénégal et de la sous-région", rappelle qu'elle n'est pas soumise à la tutelle du CNRA, n'étant pas un média. Le communiqué souligne que cette initiative "s'inscrit dans une démarche citoyenne et moderne visant à enrichir le débat démocratique autour des enjeux économiques majeurs pour notre pays".
Cette confrontation historique, initialement prévue pour les 28 ou 29 octobre, a reçu un accueil favorable des deux protagonistes. Amadou Ba a officialisé son accord sur Facebook jeudi, déclarant vouloir "discuter des rapports évoqués et de sujets cruciaux comme l'économie, les libertés et les ressources naturelles". Une annonce qui a provoqué une réaction ironique d'Ousmane Sonko, s'étonnant qu'il ait "attendu des rumeurs d'interdiction du débat par le CNRA pour donner une réponse somme toute timorée".
Le format prévu concerne 90 minutes d'échange dans les locaux de l'EAO, les candidats debout derrière leur pupitre, disposant uniquement de "quatre feuilles vierges, un stylo et une bouteille d'eau", selon les informations rapportée par de Jeune Afrique, mercredi 23 octobre. ITV, qui assurera la diffusion à en croire l'EAO, s'est quant à elle engagée à mettre son signal à disposition de tous les médias.
Le CNRA, par la voix de son président Mamadou Oumar Ndiaye, avait exprimé ses réserves, invoquant "l'égalité de traitement entre les candidats". Une position qui n'a pas dissuadé les organisateurs, l'EAO et ITV se disant "honorés de contribuer à ce débat franc et direct en offrant un espace neutre, équitable et propice à un échange historique".
Le communiqué conclut en réaffirmant que les deux institutions "demeurent à l'écoute des deux candidats et réitèrent leur ferme volonté d'organiser ce débat tant attendu".
Par Henriette NIANG KANDÉ
LA SOCIÉTÉ CIVILE AU SÉNÉGAL, PROCESSUS HISTORIQUES ET CONTRAINTES SOCIALES
De l'ère du parti unique à l'alternance de 2000, la société civile sénégalaise a joué un rôle crucial dans l'approfondissement de la démocratie, tout en devenant parfois le refuge d'acteurs politiques en quête de reconversion
L’évolution récente des Etats africains traduit un élargissement important des possibilités pour les peuples, de participer en tant que citoyens, à la réalisation de leur progrès économique et social en influençant les décisions des gouvernants. Ces possibilités qui sont énoncées dans la plupart des Constitutions, sont largement mises en œuvre à travers les groupes de citoyens plus ou moins organisés qui ne cherchent pas à conquérir et à exercer le pouvoir, mais à exprimer la liberté et les besoins légitimes des citoyens. Le concept de société civile est mis en avant pour désigner cette catégorie intermédiaire entre l’Etat et les citoyens ordinaires..
La conception de la société civile en tant qu’espace de médiation entre l’Etat et les citoyens n’évacue en rien sa complexité et sa variabilité, notamment dans le contexte africain où l’institutionnalisation et la stabilisation des principes démocratiques rencontrent beaucoup de contraintes liées à l’origine occidentale (et donc étrangère) des notions de démocratie et de société civile, ainsi que de leur déclinaison dans les langues et les modes de vie locaux, et de leur rencontre avec d’autres principes qui aspirent aussi à gouverner la vie sociale, telle que la religion et les valeurs culturelles. Cependant, les analyses les plus pertinentes démontrent que les manifestations communautaires, religieuses et culturelles ne s’opposent pas à la promotion de la démocratie. En principe, la société civile exprime une diversité de formes de culture civique, conformes à une véritable vie démocratique et plurielle. Toutefois, dans le contexte africain, et selon l’état de la démocratie dans le pays concerné, elle peut être confrontée à des contraintes institutionnelles, techniques ou organisationnelles ainsi qu’à la manipulation politicienne et/ou à la frilosité de l’Etat, qui voit à travers les organisations civiques ou citoyennes, des instruments de contrôle et de contestation des politiques mises en œuvre par les gouvernements.
La société civile représente un maillon important dans la réalisation du progrès social et économique et un objet de recherche et d’action pour les chercheurs, les activistes, les Etats et les organisations internationales d’appui au développement. Après avoir considérablement contribué à la transition démocratique dans de nombreux états africains au cours des années 1990, la société civile a bénéficié d’une attention considérable au niveau global, national et local qui indique que les élections régulières à elles seules n’épuisent pas l’expression des libertés individuelles et collectives et ne constituent pas le seul fondement de la légitimité des décisions politiques. En effet, la société civile est un espace où différents groupes de citoyens se rencontrent, se mobilisent, échangent sur leurs préoccupations et apportent des solutions à leurs problèmes, ce qui la met nécessairement en relation avec les institutions internationales, les Etats, les collectivités locales et le marché.
Au Sénégal, le champ d’intervention de la société civile reste l’espace non gouvernemental et ce, depuis l’époque coloniale. UN PEU D’HISTOIRE Historiquement, l’avènement des indépendances en Afrique et la diffusion massive des sciences humaines dans toutes les représentations de la réalité économique et sociale dès les années 1950 contribuent à transformer la problématique du sousdéveloppement en problématique de la modernisation. Cependant, dans la plupart des contextes nationaux, cette problématique du développement et de la modernisation reposait sur le rôle majeur de l’Etat dans la mise en œuvre et le contrôle du processus de croissance, aussi bien au niveau des ressources nationales que de la mobilisation des soutiens populaires. Au cours des années 1970, le déclin des modèles idéologiques a libéré un espace théorique progressivement occupée par les thèmes et les productions intellectuelles stimulées par les organisations internationales telles que le PNUD, l’UNESCO, la Banque mondiale, l’OCDE, etc., qui sont devenus de facto les bailleurs de la recherche sur le développement, de plus en plus structurée en recherche-développement et en recherche-action. Ces deux approches ont permis de mettre en exergue la contradiction entre le dynamisme de la population et le manque d’efficacité de la bureaucratie étatique, avec, dans le cadre de l’expansion du nemo liberalis, des sollicitations de plus en plus précises à l’endroit de la société civile et du secteur privé, considérés comme des agents incontournables dans le processus de développement. Une trilogie se met de progressivement en place sous le concept de Consensus de Washington, avec l’Etat (le premier secteur), le secteur privée (le deuxième secteur) et la société civile (troisième secteur). C’est dans ce contexte que furent fondés ENDA Tiers-monde en 1972 comme programme des Nations-Unies pour l’Environnement, l’Institut Africain pour le Développement Economique et la Planification, et de l’Organisation Suédoise pour le Développement International, avant de se constituer en ONG en 1978.
Durant les années 1980, les programmes d’ajustement structurels (PAS) préconisés par la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International (FMI) ont contraint les Etats Africains à se retirer progressivement de plusieurs domaines du développement économique et social. En fait, la décennie 1980- 1990 est une période de crises économiques et politiques, marquée par le désengagement de l’Etat. C’était le « moins d’Etat, mieux d’Etat » d’Abdou Diouf. Face à l’avènement de l’Etat minimaliste et à l’approfondissement des inégalités sociales, les classes moyennes développent des stratégies de réponse qui contestent d’une manière ou d’une autre les systèmes autocratiques établis depuis l’indépendance, à travers l’Etat-Nation et sa version exclusiviste, le PartiEtat. Ce contexte engendre ou aggrave les conflits, la pauvreté de masse et les famines, et accélèrent les migrations forcées ou volontaires, l’urbanisation spontanée et la dégradation de l’environnement, laissant ainsi un vide que les Organisations de la Société Civile (OSC), devaient combler. En 1984, le CONGAD émerge comme consortium des Organisations Non Gouvernementales (ONG) sénégalaises. Les décennies 1980-90 ont constitué une période d’expansion des ONG locales qui vont de plus en plus se constituer en une société civile, avec la constitution de la RADDHO, du Forum Civil, du COSEF, du CNCR et de beaucoup d’autres organisations à vocation sous-régionales, telle que la FRAO, CARITAS, TOSTAN, l’AFAO, etc.
Les analystes s’entendent aussi à considérer que si les ONGs constituent une part importante de la société civile, celle-ci ne peut se composer uniquement d’elles. Une conception plus large de la société civile inclut les organisations syndicales néo-traditionnelles, les organisations communautaires de base (comme les Associations Sportives et Culturelles (ASC) et les Groupements de Promotion Féminines (GPF)), les organisations de ressortissants, les associations confrériques et religieuses.
Ces différentes formes d’organisations ont joué leur rôle en fonction de leur spécificité, de leurs objectifs mais aussi et surtout de leurs moyens matériel, humain et technique. Dans ce cadre général, les syndicats se sont faits remarquer par les différents combats menés non seulement pour l’amélioration des conditions de travail de leurs membres mais, en plus, pour la mise en place d’une organisation politique (au niveau de l’Etat) respectueuse des principes républicains. C’est ainsi que les syndicats tout comme les organisations de la société civile ont apporté une contribution importante à l’avènement de l’alternance au Sénégal en 2000.
La société civile sénégalaise a été particulièrement active dans la provision de services aux groupes marginalisés. Cependant, malgré leurs bonnes intentions, les organisations de la société civile n’ont toujours pas eu ni les ressources nécessaires, ni la capacité de faire des économies d’échelle pour offrir ces services de manière significative. C’est pourquoi, la société civile est plutôt attendue dans sa capacité de renforcer l’Etat afin de lui permettre de faire face à ces responsabilités en direction des populations pauvres.
L’une des opportunités qui a été offerte à la société civile de supporter les efforts de l’Etat en direction des couches pauvres a été le processus de rédaction du Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté (DRSP) pour lequel, la Banque mondiale et la communauté des bailleurs souhaitaient une appropriation effective par les bénéficiaires. La société civile devait assurer cette appropriation par son implication effective tout au long du processus d’élaboration du DRSP et dans la mise en œuvre et l’évaluation des politiques de lutte contre la pauvreté. La participation de la société civile dans ce processus a été jugée largement insuffisante, pour cause d’obstruction de la bureaucratie étatique, du manque de ressources financières et techniques, et des délais étroits fixées par la Banque mondiale.
La société civile sénégalaise a été active dans les activités de lobbying en direction des pouvoirs, que quand il s’est agi de sujets qui ne représentaient pas de grands enjeux pour les tenants du pouvoir. Deux exceptions méritent d’être soulignées à ce niveau : il s’agit des efforts du Collectif des ONG pour des élections transparentes qui a fortement contribué à un processus électoral transparent en 1999- 2000, sans pouvoir rééditer ce succès en lors des 2007. Puis des efforts ont été enregistrés pour une plus grande transparence dans la gestion des affaires publiques. L’analyse des attitudes de l’Etat post-alternance envers ces initiatives, et envers la société civile en général (considérée comme des groupes de politiciens « encagoulés » par les Présidents Abdoulaye Wade et Macky Sall), indique que l’influence de la société civile sur l’Etat a considérablement grandie.
La société civile a évolué vers la fin des années 2000 en intégrant de nouvelles formes d’organisation qui se veulent être des représentations d’ONG internationales mais elle va surtout s’emparer de problématiques nouvelles comme la gouvernance et les droits humains. Un tournant majeur va s’amorcer, certes en lien avec le contexte socio-politique marqué par les effets des politiques libérales, et se traduire par une exigence de plus en plus accrue des OSC pour une bonne gouvernance des ressources du Sénégal et une représentation des acteurs de la société civile dans les instances de représentations gouvernementales.
L’organisation des Assises Nationales en juin 2008, constitue une bifurcation importante dans les trajectoires des OSC et va consacrer cette exigence de la société civile à engager le gouvernement dans la gouvernance participative où le citoyen serait au cœur. Ces larges concertations ont donné lieu à la production d’une Charte de bonne gouvernance démocratique censée engager le président de la République, Macky Sall, alors signataire. Cette charte sera remise au gout du jour lors des dernières élections présidentielles après avoir largement inspiré les travaux de la Commission Nationale de Réforme des Institutions (CNRI). Dans le même temps, des missions locales d’observation des élections seront mises en place par les OSC. Ce qui fera émerger ou renforcer le rôle et les missions des OSC (COSCE) attachés aux idéaux d’une République démocratique, aux enjeux de bonne gouvernance et des droits humains faisant de leurs représentants, des acteurs incontournables du jeu démocratique local. Ces OSC vont également (se) nourrir de nouvelles ambitions de souveraineté africaine et s’inscrivent dans une perspective dé-coloniale qui émerge ou est présentée comme une volonté des populations africaines. Des cadres de réflexion autonome sous forme de think tanks, des ONG spécialisées dans la gouvernance des ressources naturelles, vont produire des évidences scientifiques qui viendront alimenter les échanges entre État, citoyens et société civile. Leur rôle de médiateurs et leur reconnaissance par les citoyens vont se sédimenter au point que ponctuellement des initiatives, des formes d’engagement citoyen, regroupant les acteurs de la société civile dans leur diversité et leur pluralité émergent, se développent, se redéfinissent, se redéployent au gré des contextes… politiques notamment en temps de crises. L’exemple le plus récent en date reste la plateforme « Aar Sunu Election » lors des dernières élections présidentielles qui est née de la volonté du report de l’élection présidentielle de 2024, par le Président sortant, Macky Sall.
Cartographie
D’une manière générale, les organisations formelles de la société civile sénégalaise sont largement basées dans les centres urbains, dans la mesure où elles sont souvent l’émanation des organisations de citadins et de lettrés produits par l’école occidentale. Selon les moyens dont elles disposent et les vocations qu’elles se donnent, elles interviennent à l’intérieur du pays et en milieu rural et contribuent au renforcement des associations communautaires de base qui sont leurs principaux bénéficiaires. Cependant, beaucoup d’organisations ethniques et religieuses se sont rapidement modernisées pour répondre aux exigences légales qui leur permettent de fonctionner en conformité avec les lois en vigueur, tout en utilisant les médias et les outils technologiques pour faire passer leurs messages, mobiliser leurs partisans et influencer les décisions.
Dans ce contexte, la différence entre OSCs formelles et OSCs traditionnelles tend à s’amenuiser, au profit de la différence dans les domaines d’interventions. Ainsi, la plupart des OSCs réunies au sein du CONGAD sont actives dans les différents secteurs sociaux du développement (santé, éducation, assainissement et autres services sociaux de base) et s’intègrent tant bien que mal dans un schéma relationnel avec l’Etat et le marché qui correspond aux orientations dégagées par le Consensus de Washington. Les programmes qu’elles mettent en œuvre visent surtout à contrôler et à influencer les politiques mises en œuvre par l’Etat, à renforcer les capacités des bénéficiaires à défendre leurs intérêts à travers des approches participatives, et à appuyer les initiatives de projet de développement à l’échelle locale.
Les contraintes et limites
La société civile sénégalaise a contribué à l’amélioration de la bonne gouvernance au niveau central comme au niveau local. Elle a travaillé dans le sens de l’approfondissement de la démocratie, de la construction d’un Etat de droit et de la protection des Droits de l’Homme. Cependant, dans certains cas, elle présente un profil de fonctionnement semblable à des organisations politiques : faible renouvellement des instances de gouvernance et conquête du pouvoir. Certains responsables des Organisations de la Société Civile se servent de tels appareils pour accéder à des stations du pouvoir ou pour contrôler et s’accaparer des ressources. D’autres ont emprunté la voie inverse : après avoir été politiques, ils se sont « réfugiés » dans la société civile. Pour ces cas précis, il est nécessaire de reconfigurer la société civile au Sénégal en en faisant des entités neutres dont la mission est de veiller à un exercice régulier et équitable du pouvoir.
Du fait de la diversité de ses acteurs, les contours de la société civile sont difficiles à tracer. Ce qui peut en faire une entité traversée par la confusion avec des pratiques bureaucratiques nébuleuses, plutôt orientés dans le sens des préoccupations d’une certaine élite et non vers une prise en charge de la forte et réelle demande des populations. Toutefois, il se manifeste une nouvelle conception de la Société Civile avec les nouvelles générations, qui veulent jouer leur rôle dans l’équilibre du climat politique, la distribution équitable des ressources, la prévention et la gestion des conflits, l’installation d’un Etat de droit, la réforme des mécanismes de désignation des représentants du peuple et la participation effective des citoyens dans le management des affaires qui les concernent.
Le concept de société civile se caractérise en Afrique et au Sénégal par le flou sémantique qui l’entoure. Cela se traduit par la difficulté à en définir ses contours, ses composantes et son contenu. Longtemps incarnée par une élite en déconnexion avec les réalités sociales sénégalaises, elle a eu du mal à se démarquer de la gouvernance politique et à s’imposer comme un véritable contre-pouvoir. Bien sûr l’émergence de nouveaux mouvements dits de société civile peuvent laisser envisager que celle-ci va contribuer à l’éveil d’une nouvelle conscience citoyenne du fait de la diversité des profils d’acteurs se positionnant comme défenseurs de la cause civile ou plutôt citoyenne.
FACE AUX INJUSTICES ET AUX INÉGALITÉS : LE CINÉMA, UNE ARME POLITIQUE
Les Graines du figuier sauvage est un film beau, tragique, militant, et par-dessus tout politique. Mohammad Rasoulof a réussi, malgré les terribles conditions du tournage, à montrer la soif de liberté des Iraniens
Samedi 19 octobre 2024, dans le quartier de Saint-Germain, au cœur de la rive gauche, je suis allé voir un film au cinéma UGC Danton : Les Graines du figuier sauvage, de Mohammad Rasoulof, tourné clandestinement, loin des regards inquisiteurs des mollahs. D’abord, qui est le réalisateur courageux de ce film ? Mohammad Rasoulof est un cinéaste iranien qui a fui son pays pour éviter une peine de prison et les persécutions d'un régime brutal. Il vit à Hambourg et a à son actif dix films, tous brillants. Je peux citer, entre autres : Les Manuscrits ne brûlent pas (2013), Un homme intègre (2017), Le Diable n’existe pas (2020), Les Graines du figuier sauvage (2024).
Cet exilé, qui a son pays chevillé au corps malgré l’absence, a puisé dans son panthéon personnel et, plus largement, dans l’histoire de l’Iran pour construire un film à la fois politique et militant, qui dénonce les absurdités d'une société patriarcale et fermée, après la mort de Jina Mahsa Amini, une jeune Iranienne kurde tuée par la police des mœurs pour avoir porté son voile de manière incorrecte.
Le film évoque les récents événements traversés par la société iranienne et la violence qui la caractérise. À travers ce film, le réalisateur porte un regard critique sur les monstruosités d’un régime théocratique dont la loi est fondée sur la charia. Rasoulof montre brillamment que les femmes iraniennes sont privées de toute forme de liberté, ainsi que de l’accès à la beauté, dans son sens profond, peut-être la seule véritable essence de l'existence. Ce puissant film, hautement politique, s'inspire du mouvement « Femme, vie, liberté », qui a résonné à travers le monde ces derniers mois, nourrissant le débat ainsi que la volonté de lutte.
Il raconte, à travers une famille de la classe moyenne, l’histoire du mouvement « Femme, vie, liberté », qui incarne la quête de liberté des femmes et la lutte contre les inégalités et les lois répressives en Iran, Téhéran en étant le bastion.
Cette quête de liberté et d’émancipation est incarnée par deux jeunes filles, Rezvan et Sana, ouvertes sur le monde et aux courants progressistes grâce aux smartphones et aux réseaux sociaux – espace de liberté et d’émancipation. Leur père, Iman, a été promu juge au service d’un régime autoritaire et violent, tandis que leur mère, Fatemeh, est nourrie par une culture conservatrice reléguant les femmes au second plan. Le film est centré principalement sur le personnage d’Iman – la Foi. Tout part de lui et y revient. Promu juge au tribunal révolutionnaire de Téhéran grâce à l'appui d’un collègue, il est chargé de jouer les mauvais rôles, voire d'accomplir des missions perfides pour garantir une future ascension sociale. L’objectif est de devenir juge d’instruction, ce qui est le Graal, mais avant d’y arriver, il doit flirter avec les compromissions. Ses valeurs, ses principes et son honorabilité sont échangés contre les privilèges fugaces que lui promet le régime par l’entremise de son collègue.
Quand le mouvement de protestation s'est déclenché dans les écoles et universités de Téhéran contre les dérives du régime, sa fille aînée, Rezvan, a vu sa meilleure amie, Sadaf, perdre littéralement sa beauté et son avenir, car les forces de l’ordre lui ont crevé l’œil gauche. Cette injustice, teintée d’une violence aveugle, a poussé Rezvan et sa petite sœur Sana à contester ouvertement le régime théocratique, dont Iman, leur père, est l’un des fidèles soldats. Elles pointent du doigt l’oppression politique et religieuse exercée par les gardiens de la morale et les représentants de Dieu sur terre. C’est à ce moment-là qu’Iman perd son arme de service chez lui, une arme qui lui permet de se protéger contre les manifestants et les « ennemis d’Allah ».
C’est le début de sa descente aux enfers. Sa fille Rezvan lui assène des vérités qu’il a du mal à admettre, tandis que son collègue lui suggère de trouver une solution très vite. L’arme doit être retrouvée, sans quoi il peut dire adieu à ses ambitions professionnelles de devenir juge d’instruction et d'intégrer l’élite de Téhéran. Iman est tiraillé. Sur les conseils de son collègue au tribunal, il envoie sa femme et ses filles chez un psychologue, un de ses amis, afin de savoir laquelle d’entre elles a volé l’arme tant cherchée. Cette consultation s’est soldée par un échec cuisant. Il convainc alors Fatemeh et les filles d’aller dans son village pour quelques jours afin de se reposer et de fuir l’agitation de la ville. Tout cela était cousu de fil blanc : par ce retrait, Iman cherchait simplement à retrouver son arme. Après avoir passé une nuit dans ce village calme, Iman commence son entreprise détestable : la torture de sa femme Fatemeh et de Rezvan, qu’il soupçonne d’avoir volé l’arme.
Iman a transposé la violence verbale qu’il exerçait sur les détenus du régime à sa famille, mais cette violence n’est pas seulement verbale, elle est aussi physique et psychologique. L’aveuglement qui caractérise le pouvoir théocratique iranien a atteint Iman, ce père jadis taiseux, pudique et aimant. Le drame familial est total. Car Iman est finalement tué par sa fille cadette, Sana, pour libérer sa mère et sa grande sœur Rezvan, son amie et modèle.
Les Graines du figuier sauvage est un film beau, tragique, militant, et par-dessus tout politique. Mohammad Rasoulof a réussi, malgré les terribles conditions du tournage, à montrer la soif de liberté des Iraniens, notamment des femmes, qui sont les principales otages de l’État policier iranien. C’est un long métrage qui peut paraître ennuyeux au regard du déroulement du récit, mais magistralement magnifique. Par ce film, Mohammad Rasoulof dit au monde que le cinéma est une excellente arme contre les injustices et les inégalités qui traversent les sociétés, notamment la sienne : l’Iran.
En regardant Les Graines du figuier sauvage, j’ai pensé au Sénégal et aux gardiens de la morale qui y pullulent comme Jamra et And Samm Jikko Yi. Ces intégristes religieux qui veulent réguler l’espace public selon leurs codes ancestraux en attaquant les libertés fondamentales garanties par la Constitution. J’ai pensé aussi au père du cinéma africain Ousmane Sembène, qui a brillamment exercé son métier d’artiste au service des causes justes. Son vaste œuvre n’a eu de cesse de montrer les inégalités qui traversent la société sénégalaise et les violences infligées aux filles et femmes en devenir au nom de la religion, l’islam. J’ai en mémoire Moolaadé.
Mohammad Rasoulof, tout comme le cinéaste Sembène, sont des tisseurs d’avenir, même si le Sénégalais a rejoint l’autre rive. Le temps n’effacera pas leurs œuvres.